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EAN : 9782367321899
187 pages
Editions Chandeigne (17/02/2022)
4.5/5   3 notes
Résumé :
Sophia de Mello Breyner Andresen est née en 1919 à Porto dans une famille aristocratique, elle a vécu à Lisbonne et y est décédée en 2004. Elle publie en 1944 son premier livre, Poesia, qui impressionne par le rare sentiment d’équilibre qui préside à sa construction. Dès son deuxième livre Dia do mar (1947), se manifeste la profonde attraction qu’exerce sur elle le monde classique, grec en particulier. C’est toujours d’un héroïsme perdu que nous parle cette poésie.<... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Après la lecture de Navigations, courte anthologie de la poésie publiée aux Éditions de la Différence, j'ai voulu poursuivre ma découverte de la grande écrivaine portugaise de Sophia de Mello Breyner-Andresen. Les traductions en français de son oeuvre poétique étant plutôt rares, c'est donc avec grand plaisir que j'ai lu celle qu'a réalisé Michel Chandeigne, une anthologie bilingue publiée en 2022 sous le titre de la nudité de la vie.

Dès les premières pages, j'ai retrouvé dans l'écriture la même ferveur lumineuse, la même grâce, la même sensibilité. Dans des poèmes pour l'essentiel en vers, Sophia de Mello Breyner-Andresen partage, édifie, invoque magnifiquement les choses vues, le temps des voyages (les références à la Grèce et à sa mythologie – Orphée et Eurydice, le Minotaure) sont nombreuses dans ce recueil), la beauté des paysages méditerranéens mais aussi les êtres chers, les poètes disparus (Fernando Pessoa / Ricardo Reis, Lord Byron, Jorge de Sena,...).

« MUSE
[…]
Muse enseigne-moi le chant
Où la mer respire
Constellée de brillants
Muse enseigne-moi le chant
De la fenêtre carrée
Et de la chambre blanche

Que je puisse dire comment
Le soir effleurait ici
La table et la porte
Le miroir et le corps
Et comment il les recouvrait

Car le temps me coupe
Le temps me divise
Le temps me traverse
Et me sépare vivante
Du sol et du mur
De la maison primitive

Muse enseigne-moi le chant
Vénérable et ancien
Pour saisir l'éclat
De ce matin lisse
Qui posait doucement
Ses doigts sur la dune
Et repassait à la chaux les murs
De la maison propre et blanche
[…] »

Dans une écriture tout en maîtrise et en élégance, Sophia de Mello Breyner-Andresen pose les bases d'une écriture portée sur l'idée de transcendance et de pureté. Selon elle, nulle métaphysique ne peut exister sans sa transposition dans le domaine de l'existence et du vécu, nul rapprochement possible entre l'origine et la fin des choses. Cette transcendance s'incarne dans tous les recoins de sa poésie, elle en est sa vitalité, sa condition même.

« LES AMIS
Revenir là où
La verte explosion de la vague
L'écume le brouillard l'horizon la plage
Conservent intacte la fougueuse
Et ancienne jeunesse -
Mais comment sans les amis
Sans le partage l'étreinte la communion
Respirer l'odeur d'algue des marées
Et cueillir l'étoile de mer dans ma main »

Beaucoup des textes du recueil - ce peut être aussi quelques vers d'un poème - touchent au sublime comme Chemin matinal (Caminho da manha) ou Les Grottes (As Grutas). La parole s'épanche mais garde en elle sa réserve de pudeur pour être au plus près de la pensée. Ce don de la parole suscite l'émotion, traverse le temps et les paysages. Ainsi la poésie de Sophia de Mello Breyner-Andresen nous parvient-elle, libre et lumineuse.

« 25 AVRIL
Voici l'aube que j'ai tant attendue
Le jour initial entier et pur
Où nous émergeons de la nuit et du silence
Et libres nous habitons la substance du temps »


.

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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Ma vie est vécue
Déjà ma mort prépare
Sa poudre de belladone
Je voyagerai encore pour prendre congé des images
Avant de me dévêtir de la tunique du visible

En vrai je me trompe moi-même
Je suis véritablement ce que j’ai été
Traversant des chambres tapissées de miroirs ardents
Et diluée dans l’éclat de l’ancien printemps
- Ma Vie

VO :
A minha vida está vivida
Já minha morte prepara
Seu pó de beladona
Viajarei ainda para me despedir das imagens
Antes de despir a túnica do visível

Em vāo me engano
Verdadeiramente sou quem fui
Atravessando quartos forrados de espelhos ardentes
E diluída no fulgor da Primavera antiga
- A Minha Vida
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Il y a dans l’air des espaces défunts
La forme gravée dans le vide
Des voix et des gestes qui jadis existaient là.
Et mes mains ne peuvent rien saisir.

[...]

Je crois à la nudité de ma vie.
Tout ce qui arrive est en cela secondaire.
- Passent les voitures

VO :
Há no ar espaços extintos
A forma gravada em vazio
Das vozes e dos gestos que outrora aqui estavam.
E as minhas māos não podem prender nada.
[...]
Creio na nudez da minha vida
Tudo quanto nele acontece é dispensável.
- Passam os carros
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J’écoute

J’écoute mais je ne sais pas
Si ce que j’entends est le silence
Ou dieu

J’écoute sans savoir si j’entends
La sonorité des plaines du vide
Ou la conscience attentive
Qui des confins de l’univers
Me distingue et me fixe

Je sais juste que je chemine comme celui
Qui est regardé connu aimé
Et c’est pour cela que je mets en chaque geste
Du risque et de la solennité
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Énigmatiques, déserts et suspendus
Les espaces rougeoyants du couchant,
Pays de merveille absolue,
Recouvrent le champ mort des débris

Un par un nous mourrons les yeux fixés
Sur le chemin des dieux
- Énigmatiques

VO :
Enigmáticos, desertos e suspensos
Os espaços vermelhos do poente
Países de completa maravilha,
Cobrem o campo morto dos destroços

Um por um morremos olhos fitos
No caminho dos deuses
- Enigmáticos
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Car j’appartiens à la race de ceux qui plongent les yeux ouverts
Et reconnaissent l’abîme pierre à pierre anémone après anémone fleur après fleur
- Le Minotaure

VO :
Porque pertenço à raça daqueles que mergulham de olhos abertos
E reconhecem o abismo pedra a pedra anémona a anémona flor a flor
- O Minotauro
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Video de Sophia de Mello Breyner Andresen (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Sophia de Mello Breyner Andresen
Sofia de MELLO BREYNER – Entretien avec Bernard Pivot (Antenne 2, 1988) L'émission "Apos'", présentée par Bernard Pivot, diffusée le 13 novembre 1988 sur Antenne 2.
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