A propos des besoins des tout-petits...
Assez naturellement, nous avons donc développé une idéologie (...) pour justifier le fait de considérer les enfants comme des objets d'amour. Les enfants ont besoin d'amour (...). Ils ne peuvent jamais en recevoir trop, ils n'en ont jamais assez, peu importe qui le leur prodigue, comment et sous quelle forme cela leur arrive. Tout ce qu'ils veulent, c'est de l'amour, de l'amour et de l'amour. Il y a peut-être un peu de vrai là-dedans dans la première année de leur vie. D'expérience, je crois que les enfants ont besoin de beaucoup de contacts humains et peuvent souffrir s'ils n'en ont pas assez. Cependant, même avec les bébés nous devons faire preuve de tact et de discrétion. Tous les bébés aiment avec certitude être portés, bercés et que l'on joue avec eux. Mais pas nécessairement tout le temps, ni avec n'importe qui, ni tous de la même manière. Autour de six mois ou même avant, ils ont déjà des objectifs personnels bien développés, des besoins propres et des préférences. Il y a des moments où ils sont concentrés sur une chose ou une autre et où ils ne veulent pas être interrompus. Il y a des gens qu'ils apprécient et d'autres qu'ils aiment moins ou pas du tout. Ou encore, il arrive qu'ils aiment que l'on joue avec eux mais pas qu'on les porte. Et il peut y avoir des jeux ou des façons de monter son affection qu'ils n'apprécient pas du tout quelle que soit la personne qui les leur propose. Même avec les bébés nous devons faire attention, apprendre à lire les signaux qu'ils émettent et à les respecter.
P.77 « S’évader de l’enfance : les besoins et les droits des enfants », John Holt.
Le problème, c'est que nous ne pouvons pas décider une fois pour toutes de qui - des parents, des professeurs, des experts, des psychologues, des tribunaux aux affaires familiales, des juges, etc. – saura décider ce qui est le mieux pour les enfants. Pour les choses vraiment importantes, personne ne sait mieux que l'enfant lui-même. On n'a pas besoin d'être très vieux ni très intelligent pour distinguer nos amis de nos ennemis, pour savoir quand les gens ne nous aiment pas, quand ils sont cruels avec nous et qu'ils nous font du mal. N'importe quel enfant de cinq ans fait la différence entre l'enseignant malveillant et le bienveillant, et il est assez intelligent pour vouloir s'écarter de celui qui est malveillant. Il n'y a que les adultes qui sont assez stupides pour penser que, d'une certaine façon, l'enseignant malveillant apporte quelque chose de positif à l'enfant. Non pas que les adultes soient prompts à rester auprès des gens qui sont méprisants et cruels envers eux... Non, pas une seule minute ! Ce n'est qu'aux autres, et en particulier aux enfants, que l'on dit que la douleur ne fait pas vraiment mal, et qu'elle fait même du bien. Mais l'enfant devrait, comme n'importe qui d'autre, avoir le droit de s'éloigner des gens et des situations qui le blessent, et de se tourner vers là où il pressent qu'il recevra de l'aide.
John Holt - Escape from childhood, chap 23