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EAN : 9782371000773
195 pages
Le nouvel Attila (15/03/2019)
4.65/5   10 notes
Résumé :
Scribouilleur est un écrivain public né et travaillant dans l'univers du Border. Le jour, il répond aux angoisses et aux deuils de ses habitants. La nuit, il croque, émerveillé, leurs élans de vies : rues, immeubles, bières et autoroutes descendues à pleine vitesse en quête d'un horizon. Cette ville est peuplée d'hommes et de femmes obsédés par leur avenir, ivres, rêvant d'aimer ou amoureux. Une microsociété d'écorchés vifs errant entre les reliefs d'un monde qui la... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
« J'égrène des traductions comme un chapelet. Ignorant la prononciation dans la plupart de ces langues. » « Border » de Jacques Houssay est une flamboyance verbale. L'ouvrir c'est être attentif à autrui. Savoir que chaque phrase pourra être annotée. Retenir. Apprendre par coeur le plan mémoriel de ce chef-d'oeuvre. Ce roman est digne. Puissant, manichéen, ciselé dans une aérienne fusion avec une lecture grave et poétique. La construction de « Border » est une citadelle dont la clef de voûte est la beauté grammaticale. Jacques Houssay est doué, observateur et ne laisse aucune ombre dévorer son lieu parabolique. « Border » est la vie. L'idiosyncrasie d'un monde où les exclus, les désenchantés façonnent de leurs mains la gloire intérieure d'une bonté pourtant mise à rude épreuve. « Je serre l'émoi entre mes ongles, ne pas lui lâcher la bride…. Je me tourne vers Nerveux. Un clin d 'oeil. Nos coeurs se sont retranchés dans un pouls normal et régulier…. Et nous pleurons comme d'autres chantent. » Scribouilleur est le protagoniste principal, le narrateur guidant le lecteur dans cet antre où le gris voudrait étouffer de ses mains la clarté vierge des jours de survivance. « Border » est mal aimé, affamé, pauvre, au chômage souvent, drogué ou voleur mais riche de cette intériorité quasi religieuse et altruiste. Abandonné, ses rues sont des mains tendues sans oser mendier le peu. La nourriture est cette miette de pain dont les oiseaux envient le brillant fraternel. « Border » à un langage de sel et de larmes et pourtant ici se magnifie la couronne dont rêvent les purs. « Etre heureux ou malheureux. Sachant très bien qu'Icare dans sa chute se retiendrait même à une libellule. » Scribouillard est intelligent, cultivé, intuitif et magnanime. Il est l'hôte qui soulage. Solidaire, il est le point d'appui d'un « Border » qui « déborde » de douleurs. « Je rafistole ma tendresse de quelques élastiques. le temps avance en grattant les promesses au couteau. Il n'y a pas d'archéologie possible, nous effaçons le paysage comme un tableau blanc…. Ne plus feindre d'être en vie, donner des preuves. » Scribouillard panse les plaies de ce « Border » emblématique. Il s'enivre de regards, de rais de lumière. Il côtoie le sang des souffrances et l'encre de ses mots consolateurs pour les survivants de « Border » est l'universalité. Les frontières endormies s'épanchent dans la foi d'un avenir meilleur. « Border » n'est pas nihiliste. Au contraire l'hédonisme apaise le filigrane qui en devient salvateur. Cette double lecture renforce le point d'ancrage d'un « Border » palpitant de vie. Sociologique, géopolitique, ses rives sont le modèle de ce qui existe dans le chao de notre monde. Un microcosme rangé, prêt à la bataille contre les inégalités. Sous l'écorce de ce lieu, les battants cherchent l'issue de secours, dans cette ténacité et cette volontaire envergure d'étreindre l'amour à plein bras. « Je te laisserai grimper sur mes genoux quand je ferai face à la fenêtre à guillotine. Tu y verras d'autres choses que moi. Aujourd'hui ta petite main dans la mienne, nous pourchassons les pigeons. Nous marchons en équilibre et c'est mon rôle de te tenir la main » Ce roman est une prouesse. Ses reliefs « Bordent » un monde en péril. Et pourtant ! son chant s'étire dans la nuit glacée. C'est un roman grave et engagé. « Un Border » majeur. « Mes pensées baguées à la patte comme un oiseau migrateur ». Beau à couper le souffle. Publié par les Editions « le Nouvel Attila » « Border » de Jacques Houssay est en lice pour le Prix Hors Concours 2019 et c'est une immense chance.
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Jacques Houssay pourra se targuer d'avoir réussi à me sortir de ma zone de confort et sans déplaisir. Son premier roman "Border", sans être l'un de mes coups de foudre, m'a beaucoup intéressée et l'écriture n'y est pas étrangère.

L'auteur, je l'ai rencontré un soir de février 2018 au bistro des Tilleuls à Annecy. Il avait neigé quelques jours plus tôt, mais à l'intérieur il faisait bon et l'ambiance était chaleureuse pour partager bières et charcuteries savoyardes. Ce n'est pas mon amie Julie qui me contredira. Nous étions venues écouter Erwann Larher nous parler de ce fameux livre qu'il ne voulait pas écrire et Jacques était là pour l'interroger. Il conduisit l'interview avec une grande sensibilité, beaucoup d'humanité et une certaine timidité. J'étais curieuse, après l'avoir écouté, de lire ses mots sur le papier.

"Border", je ne sais toujours pas s'il s'agit d'une ville, d'un quartier, d'un lieu imaginaire. Ses habitants ne s'appellent pas Théodecte, Erasme, Acis ou encore Gnathon, mais plutôt Nerveux, Misérable, Doug, Vénus, Jeanne… Et c'est Scribouilleur, écrivain public qui en parle le mieux. Scribouilleur aide les habitants de Border, installé au fond d'une cour, mais il les raconte aussi, il les suit, les écoute, on pourrait même dire qu'il les filme. J'y ai vu des plans, des cadrages serrés, des plongées et des contre-plongées. Les personnages sont tous des laissés pour compte, ils boivent, fument, se droguent, divaguent, et pourtant la tendresse est présente et puis il y a Jeanne.

Quelle galerie de portraits !

Je n'apprécie pas les expressions grossières, trop nombreuses à mon goût dans le roman. Mon petit-fils dirait que je suis une chochotte, il a sans doute raison. Je parlerais plutôt d'une préférence pour une langue châtiée. Pour autant, l'écriture de Jacques Houssay m'a bluffée. Elle donne un rythme fou au texte, l'enveloppe d'une ligne musicale. Ce n'est pas du Mozart mais des riffs d'AC/DC ou de Metallica et ça pulse. Je reconnais même que ça a de la gueule… tiens voilà que je parle comme l'auteur. A coup de petites phrases… sans verbes, pas de sujet, pas de compléments… des groupes de mots, de noms, des expressions posées là comme des dés jetés d'un cornet sur un tapis de jeu…Jacques Houssay m'a emmenée dans son univers. Malgré tous ces manquements à l'académisme, je le reconnais, c'est extrêmement beau : "Rue des Couteaux. 5cm x 5cm x 5cm, pavés petits noirs de roche volcanique. Cubes luisants chargés de cristaux ? Caillots de sangs. Brillance chargée du feu de la terre. Ce feu sous nos pieds que nos crachats ne sauraient éteindre."

Et quand ça se termine "J'aime chaque grain de poussière de cette terre que je maudis. Je suis cette terre sur laquelle je crache et qui a accueilli nos cris et nos silences, le corps des êtres aimés dans des rectangles profonds et froids…Il ne sert à rien de fuir. Il n'est pas certain que je sois fou…", la vieille que je suis et l'institutrice que je fus voit dans "Border" un premier roman, parfois déroutant certes, mais plutôt réussi et vraiment percutant.

Lien : https://memo-emoi.fr
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J'ai envie de dire «waouuuh» !!
Cette lecture est bouleversante, dérangeante ; l'écriture originale, ciselée, poétique et percutante.
L'auteur écrit pensées, ressenti, vie de personnages rebaptisés, comme au Moyen âge, de «surnoms» qui les caractérisent.
C'est sans fioritures, cash et parfois trash. Des émotions jetées, crachées sur le papier. Les phrases sont courtes quand elles existent et les mots choisis font mouche.
La vie dans ce lieu «border», apparaît dans tous ses maux et toute la force des liens qui unissent les acteurs de cet endroit, cité, zone....je ne sais.
Toujours est-il que c'est avec un réel talent empreint de poésie que l'auteur nous emmène dans ce lieu souvent sombre où les rayons de lumière filtrent dans le partage et la solidarité que chacun distribue discrètement.
Je suis sous le choc mais le poids des mots !!
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Un roman qui nous plonge dans une étrange atmosphère, entre réalité la plus triviale et envolée lyrique exaltée... Dans une cité comme tant d'autres, "récif de briques et de rues" Scribouilleur remplit la fonction d'écrivain public. Il est celui qui remplit les papiers des autres, qui cochent les cases des formulaires et documents administratifs divers. Dans cette ville les noms et prénoms ont été effacés par l'usage, certains rêvent d'un avenir radieux alors que d'autres se contentent de vivre l'instant. Mais les faux semblants se devinent lorsque se fissure la façade sociale... Un roman inclassable, dans lequel le narrateur, personnage contemplatif et homme du commun, se fait le témoin de ceux qui hantent les nuits de cette ville frontière.
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Je viens de terminer Border. Je l'ai dévoré. J'ai tellement aimé.
Cette humanité, cette brutalité teintée de tendresse, ces failles qui font de nous des êtres humains, ces doutes qui assaillent et ces moments de grâce qui balaient tout le reste...
La scène de la marelle sur le parking du dancing m'a particulièrement touché, comme je peux l'être par un film de S. Benchetrit ou un morceau de D.C Fontaine.
Se sentir vivante et un peu moins seule en lisant un livre... quel bonheur!
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Je regarde ma carcasse, pâleur rosâtre, flottant dans mon costume devenu trop grand. Le soleil chatouille mon visage. Ce besoin qu'on les hommes de rendre la chute concrète. Je me hisse à une descente de gouttière pour m'asseoir dos au mur. Figurant de ma propre perte. (p. 128)
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Habits, habitudes. Je me revêts de mes actes, les mêmes, encore et encore jusqu'à disparaître sous leur épaisseur.
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