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EAN : 9782848055084
136 pages
Sabine Wespieser (01/02/2024)
3.7/5   25 notes
Résumé :
Avant cette conversation avec le professeur de philosophie de son fils, les jours s’écoulaient selon un rythme immuable pour le narrateur de ce bref et saisissant roman d’un ébranlement : issu d’une bonne famille lyonnaise, marié depuis près de vingt ans à Madeleine avec qui il est venu s’installer à Sète, Clément Bontemps est un être d’habitude, bon mari et bon père, heureux d’ouvrir à horaires fixes son officine de pharmacien. Il a suffi que le professeur Almassy ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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Au travers du destin d'un homme sans histoire ni passion, Jean Mattern poursuit son délicat questionnement des apparences, dans une nouvelle exploration des non-dits autour des origines et de la filiation.


« J'ai passé ma vie à éviter les sensations fortes. Question d'éducation. Pas d'alcool, pas de sauts en parachute, pas de voitures de course. Pas d'aventures non plus. Même le sexe m'ennuie parfois. Tout m'ennuie d'ailleurs, je crois. J'attends que ça passe. » Ainsi fait-on, dès l'incipit, la connaissance de Clément Bontemps, anti-héros absolu issu de la bourgeoisie lyonnaise et menant à Sète une existence réglée comme du papier à musique, entre son épouse Madeleine, son fils Matias et sa pharmacie. Ayant décidé une fois pour toutes d'éviter les vagues et les drames, « gérant sa vie comme un financier ses actions », il traverse le temps comme sous anesthésie, les yeux soigneusement fermés sur tout ce qui pourrait briser la perfection des apparences. Comme la mélancolie de Marguerite lors de leurs épousailles, la naissance prématurée de Matias et leurs si grandes dissemblances, et, de temps à autre, les absences « vitales » de sa femme, « pour aller à l'Opéra de Paris ou ailleurs »...


Mais voilà qu'un coup de téléphone vient soudain égratigner la bulle ouatinée de sa sérénité. Georges Almassy, le professeur de philosophie de Matias, veut lui parler de son fils. « Il craint de vous faire certains… aveux. de vous dire certaines choses, si vous préférez. » En ces années 1980 où, tout juste dépénalisée, l'homosexualité est toujours perçue comme une maladie, l'enseignant multiplie les allusions sans que le père muré dans les convenances ne s'autorise à comprendre. Sa gêne, notre homme l'attribue plutôt à une coïncidence troublante : le nom Almassy le renvoie à ses origines hongroises par sa mère et au silence familial qui les a reléguées dans l'oubli, Mme Bontemps mère s'étant « fondue dans le décor comme une plante verte qui reprend le motif du papier peint sur le mur » pour ne plus jamais évoquer d'autrefois qu'un prénom, József, répété en boucle sur son lit de mort.


Alors, perturbé par le rappel de cette fêlure d'un passé qu'une fois veuf, son père a définitivement bouclé d'un « Chacun emporte sa part de mystère en quittant ce monde », ce n'est pas en songeant à son fils mais à sa mère que le narrateur recontacte l'enseignant. Lui qui aux eaux de la Méditerranée a toujours préféré la sécurité sans surprise de la piscine, va se retrouver plongé dans celles, ensanglantées par L Histoire, du Danube. Découvrant alors les frappantes répétitions d'un destin familial qui l'aura influencé à son insu, trouvera-t-il la force de briser la carapace et d'enfin s'autoriser à vivre ? S'ouvrira-t-il enfin aux émotions de ses proches, son épouse qui laisse traîner les poèmes de Paul Valéry – « le vent se lève !… Il faut tenter de vivre » –, et son fils qui se désespère de parvenir à lui parler de qui il est ?


Ciselant son texte en mille détails signifiants, Jean Mattern réussit encore une fois, en un roman aussi bref qu'intense, une brillante auscultation des thèmes qui lui sont chers : les pouvoirs dévastateurs du non-dit, la transmission, et enfin, l'acceptation de soi. Un livre délicat et délicieux.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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*Les Eaux du Danube*, de Jean Mattern (Éditions Sabine Wespieser, 2024), est le dernier roman de l'auteur qui s'inscrit dans la constante littéraire de ce dernier : de la très bonne littérature noyée dans un flot d'inepties et de crétineries.

À cet égard, il serait faux de penser que l'inculture est un phénomène récent - elle existe depuis la nuit des temps, et Babelio ne déroge pas à ce phénomène à son paroxysme. Mais si à l'époque la crétinerie existait, ce n'étaient pas les crétins qui donnaient le ton !

L'histoire est celle d'un homme, Clément, pharmacien, époux et père d'un adolescent, Mathias, n'est pas malheureux, mais sans passions heureuses ou malheureuses : une vie sans aspérités.

Jusqu'au jour où il fait la rencontre du professeur de philosophie de son fils, qui lui fait des révélations sur sa personne intime et la famille de Clément.

De nombreuses critiques, à se demander si leurs auteurs ont saisi la finesse du roman, estiment qu'il ne se passe rien dans cette histoire. C'est précisément l'inverse, à l'occasion de laquelle l'auteur est confronté à son passé et à l'anatomie de la (de sa) passion.

En bref, un nouveau roman splendide de Jean Mattern dont je recommande la lecture, comme tous les livres de l'auteur.

Bonne lecture.

Michel.
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Mattern procède par petites touches
de rien du tout qui aiguisent la curiosité.
Un pharmacien sans passion, à la vie rangée
comme les étagères de son officine va connaître
le chamboulement de ses certitudes.
Son ascenseur fils/père prend l'eau...
Son petit univers va connaître l'expansion,
sa vision de la vie devenir plus périphérique
De belles balades dans les hauteurs de Sète .
Un hommage à Shubert
Une lecture délicieuse!
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Clément Bontemps, pharmacien, le narrateur, est "un homme sans passion".
Il n'appartient à aucun lieu, il avance dans la vie plutôt sans problème, et ne semble surtout pas se poser de problème existentiel. Bref, il ne se complique pas la vie et navigue tranquille sur "le fleuve des heures".
C'était sans compter sur l'imprévu. Et même l'imprévisible.
Un jour comme un autre il reçoit un message de Georges Almassy, un professeur de son fils s'exprimant à son sujet : "Je crois qu'il a besoin de votre écoute bienveillante".
Et c'est là qu'une mécanique s'enclenche qui le mènera au coeur des non-dits et des secrets de famille, à l'exhumation de vérités enfouies, aux douloureuses origines hongroises de sa famille maternelle. À l'issue de ce processus il aura noué de vraies relations avec son fils et peut-être même plus : trouvé un sens à sa vie.
Tout cela est dit en une petite centaine de pages, il n'y a pas un mot de trop, l'écriture est délicate, sans brusquerie. le lecteur s'interroge, page après page, et tout se résout simplement.
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Clément Bontemps est un homme qu'on pourrait qualifier d' « ordinaire », il mène une vie tranquille à la limite de l'ennui. Il est même assez désabusé, sa vie ressemblant « à un écoulement du temps et rien d'autre ». Bon professionnel, bon mari, bon père, il se « demande s'il occupe indûment la place qui est la sienne depuis des années .Celle de mari, et de père ».

En ce début d'été, le pharmacien est seul dans leur maison de Sète. Comme chaque année, son fils et sa femme sont absents. Madeleine et Matias partagent une passion commune pour la musique dont il se sent évincé. Il se serait sans doute accommodé de cette exclusion, comme de tout le reste dans sa vie d'ailleurs, s'il n'avait eu il y a quelques jours, un entretien avec le professeur de philosophie de Matias qui lui explique que son fils est brillant mais soufre de ne pas pouvoir parler avec son père sans crainte, de ne pas oser lui « dire certaines choses ». Et ce sont ces quelques mots, choisis avec soin par le professeur, qui vont bouleverser la vie de Clément.

Ce livre est une délicieuse balade dans la ville de Sète (du cimetière du mont Saint-Clair aux plages), mais aussi des îles écossaises à la Hongrie. « Les eaux du Danube » est bref roman d'une justesse et d'une beauté à laquelle l'auteur nous a habitués. 

La musique, une écriture fluide et délicate, pas un mot de trop, j‘ai retrouvé tout l'univers de Jean Mattern pour écrire la transmission et la filiation, des thèmes qui lui sont chers.

Et puis au fil de ses romans je me suis habituée à chercher le lien entre un des personnages et celui d'un autre roman. Cela n'a pas été facile de retrouver Madeleine … celle qui avait laissé Robert (Suite en do mineur) dans la mélancolie de ne pas avoir vécu plus longtemps avec Madeleine et qui plonge Clément dans celle de ses sentir exclu du quotidien de sa femme.

C'est vertigineux et magnifique !
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critiques presse (2)
LeMonde
20 février 2024
Le plaisir du lecteur réside moins dans la résolution d’une quelconque intrigue, ou dans la révélation d’une pièce supplémentaire du puzzle familial que Jean Mattern élabore de livre en livre, que dans son analyse sensible des méandres de l’âme humaine.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Actualitte
16 février 2024
Introspectif, Jean Mattern ? Les eaux du Danube, tumultueuses comme on le sait, invitent bien à plonger dans une existence terne et monotone. Celle d’un pharmacien – mais pas de généralité sur une profession… D’autant que ce dernier souffre d’insomnie et développe une obsession sur ses origines, son passé, son identité…
Lire la critique sur le site : Actualitte
Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Hélène et Léopold Bontemps étaient des figures de la bonne société lyonnaise : mes parents. Pharmacien de père en fils pour l’un, et femme au foyer modèle pour l’autre. Une épouse qui s’était fondue dans le décor, comme une plante verte qui reprend le motif du papier peint sur le mur. (…) Maintenant, pendant ces heures où le sommeil ne vient plus, je me demande si je n’ai pas été anesthésié par la pièce de théâtre que mes parents répétaient jour après jour. Celle d’une famille ordinaire.
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Madeleine me l’avait dit le jour de nos fiançailles : je suis un homme sans passions. Elle ajouta que cela lui convenait très bien. Mais j’aimerais tout de même comprendre comment la Fantaisie en fa mineur de Schubert parvient à remuer à ce point un jeune homme de dix-sept ans. Je n’ai jamais été ce garçon-là. J’aimerais connaître cette félicité – dont témoignaient son regard et la coloration de ses joues encore une heure plus tard – que même le sexe ne me procure pas. Suis-je condamné à la bonne mesure en toute chose ? Je n’ai pas le cœur sec pour autant. J’aime Madeleine avec une tendresse que je ne peux pas nier. Nous faisons encore l’amour de temps en temps. Cela me procure de la satisfaction et elle aussi semble trouver ça agréable – mais ce que nous partageons s’arrête là. Et être satisfait n’a pas grand-chose à voir avec être heureux. Contrairement à ce que l’on m’a appris. Dans ma famille, la passion pour Schubert, ou autre chose, n’avait aucune place dans nos journées. La pharmacie occupait celles de mon père et, si la musique faisait partie intégrante de la bonne éducation et de temps en temps de la vie sociale, lors d’une soirée au concert ou à l’opéra, elle n’a jamais joué un autre rôle, jamais empourpré les joues de qui que ce soit. On ne m’a pas donné accès à ce territoire étrange où Madeleine s’aventure à chaque fois qu’elle met un 33-tours sur notre platine, ou lorsqu’elle part assister à un spectacle quelque part. Il faut croire qu’elle a transmis la clef de son paradis à Matias. Il me reste la salle d’attente. Ou devrais-je dire le purgatoire ?
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Elle avait connu une année de félicité, elle pouvait dire sans sourciller à un inconnu tel que moi qu’elle avait perdu le grand amour de sa vie. Je lui enviais ses certitudes et même sa douleur. Ma vie, réglée comme l’horloge au-dessus de la porte de la pharmacie, si petite à côté, si ordinaire ou médiocre, comparée à son chagrin immense. Comment pourrais-je lui parler de cette oppression qui enserrait ma poitrine depuis quelques semaines, sans pouvoir lui en donner la moindre raison ? Oserais-je admettre que le doute me rongeait ? Le sentiment que j’avais géré ma vie comme un financier gère ses actions, mais que je ne prenais aucun plaisir à récolter les fruits de ma sagesse ?
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Mais je n’ai pas l’habitude de ce genre de choses. Déranger les gens. M’imposer. Poser des questions. La discrétion était une vertu cardinale pour mon père, il ne cessait de nous le répéter. Et nous nous efforcions tous de mettre sa maxime en pratique. Tous. Même l’affection se devait d’être discrète. Pas d’effusion, pas de sentimentalité. Surtout pas. Madeleine se moquait parfois de moi, en me disant que c’était devenu ma seconde nature. Il m’est arrivé de m’interroger, j’avoue : quelle serait ma première nature – si cela existe – sans ce diktat paternel de la modération et de la mesure en toute chose ? Qui serais-je devenu alors ?
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Je n’appartiens à aucun lieu. Comment pourrais-je affirmer que je suis plus moi-même ici qu’ailleurs ? J’ignore le sens de ces mots. J’essaie de traverser les journées. C’est la seule définition que je trouve à tout ça. Il faut avancer. La vie, c’est cet écoulement du temps, rien d’autre. Il faut naviguer sur ce fleuve des heures, pourquoi imaginer autre chose ? Se contenter de rendre tout cela aussi agréable que possible, éviter les tempêtes, avancer. C’est ça, être soi-même.
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Videos de Jean Mattern (9) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jean Mattern
Jean Mattern vous présente son ouvrage "Suite en do mineur" aux éditions Sabine Wespieser.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2505570/jean-mattern-suite-en-do-mineur
Note de musique : © mollat
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