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EAN : 9782021171419
495 pages
Seuil (25/06/2014)
5/5   2 notes
Résumé :
Au début des années 1970, Jean-Marie Le Pen s'impose peu à peu à l'extrême droite et mène sur le devant de la scène un agrégat de groupuscules, le Front national. Valérie Igounet retrace la longue et chaotique gestation du parti, décrypte le travail des idéologues, ceux qui lui ont donné son identité et une certaine unité. Mais l'histoire du Front national, c'est d'abord celle d'un homme qui reste à la tête de sa formation pendant près de quarante ans, d'un provocat... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Le souvenir de la seconde guerre mondiale (et sur un autre versant la diabolisation et la dispersion des forces de l'extrême droite, révolutionnaire ou non) et de la guerre d'Algérie est omniprésent dans la constitution du Front National (FN).

Avant hier, Europe-Action, Occident, Ordre nouveau. Puis en 1972 ce FN qui perdure entre ruptures et continuité. Ce parti qui jongle entre deux positionnements « l'aspiration à être un parti comme les autres et la revendication d'une idéologie et d'une posture politiques contestataires, en marge du « système ». »

Il convient d'étudier la discours, la « sémantique frontiste », le double registre « politique et provocateur » de Jean-Marie le Pen, les hommes et les femmes, leurs orientations convergentes ou divergentes, les symboliques, les idées, les mots d'ordre, les formes d'organisation et de fonctionnement de ce parti à la démagogie xénophobe et nationaliste. « Ce livre retrace la genèse et l'histoire d'une formation politique artisanale qui accède, en plus d'une décennie, à l'étape supérieure : celle d'un parti qui s'impose dans le paysage français et qui, à la fin des années quatre-vingt-dix, en deviendra la troisième force politique. Il revient sur l'élaboration e la fabrication de tout ce qui constitue un parti : son modèle organisationnel, son logo, ses slogans et affiches, ses organisations satellites, la formation de ses militants… ».

Dans son introduction, Valérie Igounet souligne quelques dimensions traitées particulièrement dans le livre : « les ressorts idéologiques de sa propagande », les « concepts accrocheurs » comme celui de « préférence nationale », la capacité à rassembler des électeurs et des électrices, le rôle des « doctrinaires » et des « passeurs idéologiques », les lieux emblématiques du FN, l'héritage Lambert ou l'« attitude inadaptée de ses adversaires politiques »…

Naissance (1969-1981). Une matrice fasciste et un déploiement permis lorsque « la parenthèse de l'inhibition se referme », lorsque les faits de la seconde Guerre mondiale s'éloignent. Une bataille pour l'« unité », le regroupement de groupuscules derrière une nouvelle image. La place de Jean-Marie le Pen, la flamme première représentation du label FN, les alliances fragiles, les sujets d'intervention et la « sémiologie » frontiste, trois adjectifs « sociale, populaire et nationale », une première affiche « HALTE AU CHÔMAGE, LE TRAVAIL aux FRANÇAIS », la lutte contre l'immigration, l'impossible équilibre entre Ordre Nouveau et Front National, le 21 juin 1973, scission et émancipation, l'image du président, « L'assimilation du FN à son dirigeant est immédiate et perdure tout au long de l'histoire du Front National », l'univers visuel, la lutte contre le communisme, contre l'immigration et l'avortement, l'édifice argumentaire, les ouvertures aux radicaux, « Tout au long de son existence, le FN s'ouvre plus ou moins ouvertement aux éléments et mouvances les plus radicales, un invariant rattaché à son histoire dès son apparition », l'héritage Lambert, la gestion financière, une affiche fondatrice, « Non au racisme anti-français », le courant solidariste, le tournant de 1978, « 1 million de chômeurs, c'est 1 million d'immigrés de trop ! », la mort de François Duprat, l'interdépendance du négationnisme avec l'idéologie frontiste, les élections et leurs résultats, l'attentat de la rue Copernic…

L'auteure insiste sur des noms, des hommes et leur parcours, l'émergence d'une « marque », la création des « Bleu-Blanc-Rouge (BBR) », la nouvelle ère et le passage d'un score électoral de 1% à 10%…

Un parti politique s'enracine (1981-1998). Des élections européennes, « Front d'opposition nationale pour l'Europe des patries », élections législatives et « Rassemblement national », élargissement de l'espace politique frontiste, les premiers succès électoraux, le « détail » (les chambres à gaz comme « détail » de l'histoire) son avant et son après, la carrière médiatique de Jean-Marie le Pen, les défilés de la fête de Jeanne d'Arc, le « coup de tonnerre de Dreux », Dreux ville laboratoire du FN, « le débat immigration = chômage = insécurité est au coeur de la campagne des municipales partielles de Dreux », la fusion avec la droite parlementaire, les nouvelle adhésions, une existence électorale, l'utilisation de la télévision, l'ancrage du courant intégriste traditionaliste au sein du FN, les européennes de 1984 et « la première victoire politique nationale mais aussi une manne financière importante », les ambitions de certains, les parachutages, la structuration, les tentatives d'implantation dans les transports (« référence chilienne »), les rouages complexes d'une entreprise commerciale, la recherche de candidats par petites annonces, cantonales et législatives, l'insistance sur la préférence nationale, la construction d'une « sémantique », la thématique négationniste comme « élément à part entière de l'idéologie frontiste », une respectabilité de façade, la mise en scène du corps et de la parole de Jean-Marie le Pen, les échecs électoraux et les problèmes de trésorerie, Jean-Pierre Stirbois, Bruno Mégret

Valérie Igounet insiste sur les effets des petites phrases, les oppositions de ligne politique, les problèmes de financement, les marqueurs idéologiques persistant derrière une façade se voulant plus respectable…

Le FN s'impose dans le paysage politique français (1988-1998). Crédibilité et ouverture d'autres horizons, rhétorique, thématique de « la menace islamique », Bruno Mégret se pensant numéro 2, professionnalisation, l'atelier de propagande, le « conseil scientifique », les horlogers, la porosité entre l'université de Lyon III et le négationnisme, la formation idéologique des cadres, double jeu et double langage, les fédérations, sur le terrain, l'enracinement du FN, le nationalisme, l'antisémitisme stratégique, un affichage social, le congrès de Nice, le discours pro-irakien, décalage stratégique entre Bruno Mégret et Jean-Marie le Pen, les 50 mesures de l'ère Mégret, arsenal idéologique et dédiabolisation, nouvelle crédibilité dans la région PACA, une organisation centralisée et l'absence de démocratie interne, des mairies « conquises », notables locaux et présidence, mise en minorité de Jean-Marie le Pen au bureau politique, les structures socio-professionnelles, le réinvestissement de la « préférence nationale », Bruno Mégret contre Jean-Marie le Pen, Vitrolles, le congrès de Strasbourg, la dissolution de l'Assemblée nationale par Jacques Chirac, recomposition du FN et stratégie…

Je souligne les analyses des positions stratégiques de Bruno Mégret, de la construction-conquête de l'appareil, des fragilités et des conditions des fractures…

La scission (1998-2000). Une existence remise en cause, un basculement, une nouvelle génération, la figure primordiale du chef, fronde et rupture, purges-exclusions-licenciements, la fin d'une histoire, les conséquences financières et organisationnelles, FN-MN, les procès, le financement, MNR, le FN comme propriété de Jean-Marie le Pen, coup d'arrêt brutal à l'ascension, « le mégrétisme » survit à cette rupture…

Il me semble important de comprendre les forces et les enjeux qui s'expriment et vont faire exploser le Front National. Ces enjeux n'en disparaissent pas pour autant, ils survivent sous d'autres modalités à cette scission. Et ne manqueront pas de (re)venir sur le devant de la scène si le Front National poursuit sa résistible ascension.

L'héritage (2000-2011). La montée de Marine le Pen, la perpétuation du nom et les inflexions politiques, l'élection présidentielle comme moteur de reconstruction, le séisme du 21 avril et l'extrême droite au second tour d'une élection présidentielle, 2002 comme symbole, la crédibilisation d'un parti, Hénin-Beaumont, les batailles de succession, la nouvelle génération, la marinisation, les dérapages, Alain Soral, Dieudonné, les nouveaux amis et les nouveaux territoires, l'assimilation comme positionnement frontiste, un nouveau cycle, démissions et fragilité, lutte contre l'« islamisation » et défense de la « laïcité », le passage de flambeau…

« le Front national de 2014 est un parti d'extrême droite. Ce n'est pas un nouveau parti. Il est, simplement et logiquement, le prolongement de son prédécesseur. Son histoire commence à l'automne 1972 et se poursuit aujourd'hui ».

Un nouvelle ligne affichée et une porosité maintenue avec ses « marges idéologiques extrémistes », une déficience de personnel « compétent », des divergences profondes persistantes en son sein… sans oublier quelques vrai-e-s fascistes…

Plus qu'une base factuelle sérieuse pour mieux comprendre les agissements et les contradictions de cette extrême-droite qui se rêve au pouvoir. Reste à analyser en détail ses insertions sociales, les publics mobilisés, ne serait-ce que lors des consultations électorales, ses activités d'implantation dans les villes, ses financements occultes, les passerelles avec certains dirigeants d'entreprises, ses relations – parfois conflictuelles – toujours renouvelées avec de vrais fascistes, ou des groupuscules de droite révolutionnaire, en France et à l'étranger… Sans oublier les responsabilités et les erreurs d'appréciation ou de « réponses » de la gauche d'émancipation…
Lien : https://entreleslignesentrel..
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critiques presse (2)
LaViedesIdees
13 octobre 2014
Le FN, loin d’être uniquement un trublion de la vie politique, en est devenu une pièce routinière. C’est à la fois la conclusion la plus forte d’un ouvrage passionnant et le résultat le plus marquant des trente ans qui ont suivi la percée du parti à Dreux.
Lire la critique sur le site : LaViedesIdees
Telerama
09 juillet 2014
L'ouvrage est précieux au moment où le FN est devenu un acteur majeur de la vie politique française. Précieux en particulier car il démythifie l'évolution de ce parti, qui a su profiter du contexte de crise économique et sociale.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Ce livre retrace la genèse et l’histoire d’une formation politique artisanale qui accède, en plus d’une décennie, à l’étape supérieure : celle d’un parti qui s’impose dans le paysage français et qui, à la fin des années quatre-vingt-dix, en deviendra la troisième force politique. Il revient sur l’élaboration e la fabrication de tout ce qui constitue un parti : son modèle organisationnel, son logo, ses slogans et affiches, ses organisations satellites, la formation de ses militants…
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Le Front national de 2014 est un parti d’extrême droite. Ce n’est pas un nouveau parti. Il est, simplement et logiquement, le prolongement de son prédécesseur. Son histoire commence à l’automne 1972 et se poursuit aujourd’hui
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Tout au long de son existence, le FN s’ouvre plus ou moins ouvertement aux éléments et mouvances les plus radicales, un invariant rattaché à son histoire dès son apparition
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Videos de Valérie Igounet (8) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Valérie Igounet
"Il est des livres qui s'imposent. Crayon noir pourrait appartenir à ceux-là. (...) Écrire sur Samuel Paty a été une urgence doublée d'une évidence."
Ces quelques mots de Valérie Igounet, historienne, journaliste et directrice adjointe de l'observatoire du conspirationnisme, se trouvent en préface de Crayon noir, un roman graphique nécessaire publié en octobre 2023, 3 ans après l'assassinat de Samuel Paty. Il s'agit d'une enquête dessinée qui retrace l'engrenage qui a mené à ce drame, la façon dont cet événement nous a bouleversés et transformés, à un niveau individuel et collectif, mais c'est aussi un récit plein de vie qui nous fait entrer dans l'univers de Samuel Paty, son quotidien de professeur, la passion qui l'animait.
Une bande dessinée qui s'adresse à un large public, qui met des mots sur ce drame et permet de ne pas oublier, et que nous explorons dans cet épisode en compagnie de ses auteurs, Valérie Igounet et Guy le Besnerais.
Voici la liste des ouvrages évoqués dans cet épisode :
Crayon noir, de Valérie Igounet, Guy le Besnerais et Mathilda (éd. Studiofact) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22774624-crayon-noir-samuel-paty-histoire-d-un-prof-valerie-igounet-studiofact ;
Le Chevalier de la charrette, de Chrétien de Troyes (éd. Classiques Garnier) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/17994823-le-chevalier-de-la-charrette-lancelot-chretien-de-troyes-classiques-garnier ;
La Chute, d'Albert Camus (éd. Folio) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/887645-la-chute-albert-camus-folio ;
Noces, suivi de L'Été, d'Albert Camus (éd. Folio) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/91666-noces-suivi-de-l-ete-albert-camus-folio ;
Nadja, d'André Breton (éd. Folio) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/394481-nadja-andre-breton-folio.
Invités : Valérie Igounet et Guy le Besnerais
Conseils de lectures de : Julien Laparade, libraire à la librairie Dialogues, à Brest
Enregistrement, interview et montage : Laurence Bellon
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