Freud gardait le cinéma à distance, parce que dit-on, il craignait que le défilement des images ne parasite l'écoute. Étrange paradoxe pour celui qui interprétait les images surgies de
l'inconscient.
Jean Imbeaut exerce au Canada. Il a la manie incontrôlable d'interpréter les films. le premier évoqué est une production locale, La neuvaine, que je connaissais, ainsi que la plupart de sa sélection. J'ai lu ce qu'il avait éprouvé, pensé, retenu du film et cela m'a plu. Il en donne sa "vision", forgée sur plusieurs jours repris dans un journal étalé sur cinq années, mettant en scène onze longs-métrages vus, revus (trente ans plus tard parfois), réfléchis sous l'angle de la psychanalyse. Un titre en appelle un autre, une projection renvoie à une lecture, un émoi ravive une émotion.
L'auteur lit le Guépard, livre éblouissant après avoir vu l'adaptation de Visconti. Ses récits de films sont fluides, convoquent mes souvenirs de cinéphile. La relation de la scène du bal, pièce musicale par pièce musicale est remarquable. Ses décodages et impressions m'ont ouvert des angles inattendus, sachant que la matière d'une vision sur grand écran est inépuisable. Finalement, il est peu question de psychanalyse, et quand la discipline est abordée, c'est dans un langage accessible.
J'ai écrit deux essais sur les vertus thérapeutiques du 7ème Art. La lecture de ce livre intime, passionnant et humaniste a conforté ma conviction, qu'au cinéma, on peut mettre sa vie en jeu.
Lu il y a quelques années, il dormait sur mes rayonnages. Il mérite largement un coup de projecteur dans la Babeliothèque, douze ans après sa parution.
Je n'ai qu'une envie, relire "
Remake", histoire de renouer avec un vieil ami.