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Les braises du souvenir tome 1 sur 2
EAN : 9782809825732
400 pages
L'Archipel (02/01/2019)
3.5/5   1 notes
Résumé :
Été 1961. Philippe Marion-Lapierre, jeune sous-lieutenant, commande un poste isolé dans le massif de l’Ouarsenis, au nord-ouest de l’Algérie.

À 25 ans, perdu dans ces montagnes rudes, engagé dans une guerre quasi médiévale entre harkis et fellaghas, il se bat loin de tout ce qui a fait son existence.
La vie dans le djebel le dépouille peu à peu de son passé, l’amène à rompre avec Marie-Ange, sa fiancée parisienne. Sa rencontre avec Laure, une f... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Les premiers romans de Maurice de Kervénoaël, le manoir des Lannélec (2016), le destin des Lannelec (2017), et L'honneur des Lannelec (2018) nous ont déjà entraînés sur les pas de jeunes héros contemporains, happés par l'amitié, l'amour, confrontés aux aléas de la vie, dont la guerre d'Algérie, puis engagés professionnellement dans l'univers des grands groupes multinationaux, des agences de pub aux voiles gonflées par les trente Glorieuses. Bien ancrés en terre bretonne, biens nés, cadres dynamiques, entrepreneurs audacieux, ces personnages sensibles et proches de nous ont su nous toucher.
Mais dans son nouveau double roman Les braises du souvenir, En Algérie (2019) et le grand départ (2020), notre prolifique auteur nous entraîne dans les années poignantes de la guerre d'Algérie, puis de son abandon par la France à partir de 1962. L'Histoire de la douloureuse décolonisation des départements français d'Algérie et du Sahara, les 1,4 millions de militaires français engagés, dont plus de 23 000 morts, les attentats meurtriers, le FLN, l'OAS, le drame des pieds-noirs et des harkis, tout ce tableau historique prend singulièrement vie au travers des personnages du récit : le jeune appelé du contingent, étudiant vite nommé sous-lieutenant à 25 ans, nous entraîne au jour le jour dans le camp militaire d'un douar près des montagnes de l'Ouarsenis, où il doit, avec son commando de « dragons », pacifier la zone. Comme l'a écrit le grand romancier algérien Yasmina Khadra, en évoquant cette guerre d'Indépendance, « L'hiver 1960 fut si rude que nos prières se gelaient ; on les aurait entendues tomber du ciel et se fracasser au sol tel des glaçons. » (2)
On y ressent au quotidien la haine entre les deux camps, la haine attisée par les crimes sordides commis… d'un côté les fellaghas, quasi invisibles, noyés dans les villages ou terrés dans les djebels, et dont on devine les accointances avec certains paysans, ou même avec certains notables, de l'autre les pieds-noirs et les harkis, plus ou moins sécurisés par la présence de l'armée. Et le lecteur participe aux « ratissages » des zones rebelles, comprenant vite que « la guerre, cette mangeuse d'hommes, avait besoin de chair fraîche » (3)… Comme le dit un parachutiste aguerri qui y participe, « tu vas découvrir ce que tout homme en peau de bique savait dès la naissance » (4), vaincre ou mourir !
Les convocations du jeune officier au PC de son escadron, ses permissions à Alger, les rencontres avec des camarades ou des familles de pieds-noirs permettent d'élargir notre champ de vision à l'Algérie et à l'opinion publique en France. On sent émerger les tractations politiques qui aboutiront aux accords d'Evian, conclus en mars 62 entre De Gaulle et le FLN. Les chefs fellaghas prendront le pouvoir, profitant sans vergogne de la manne générée par l'abondance des hydrocarbures, et par les richesses minières du sous-sol algérien. Et en dépit des mouvements populaires que l'on sait, ils dirigent encore aujourd'hui, 60 ans après, le pays. Les autres seront tous perdants, les pieds-noirs, rapatriés en métropole en abandonnant leurs ateliers, leurs exploitations agricoles, leurs habitations… Les harkis, tragiquement abandonnés, et livrés pour beaucoup à la vengeance de leurs frères ennemis, ou débarqués à Marseille, bien souvent dans des conditions peu enviables. Nous suivons le parcours, plus heureux, de quelques familles, exfiltrées in extremis grâce à la ténacité de Philippe, qui s'installeront, comme les Zitouni, berbères de l'Ouarsenis, accueillis dans le sud de la France par des viticulteurs ou des entrepreneurs compréhensifs. Quant à l'armée française, déjà durement éprouvée sur le terrain, elle fut moralement blessée par l'épisode tragique de l'OAS, et le destin bouleversant de Roland, un copain de Philippe, entraîné dans la révolte comme le furent certains chefs chouans contre la République, nous aide à imaginer le drame.

Les deux tomes de ce roman forment donc un grand livre d'Histoire : Maurice de Kervénoaël, qui fut lui-même un appelé combattant, comme Philippe, à 25 ans, dans le bled algérien, raconte avec une grande véracité ces destins humains. Il serait bon d'en proposer la lecture à notre jeunesse, car s'il est vrai que, comme l'a dit le président français en parlant des contraintes du Confinement et du danger de la Covid 19 « C'est dur d'avoir vingt ans en 2020 » (5), il n'est pas inutile de rappeler que ce fut autrement dur d'être soldat à vingt ans, que ce soit en 1914, en 40, ou en 60 en Algérie !
Et c'est, à l'automne de sa vie, depuis le manoir de granit breton patiné par les siècles, où le général révolutionnaire Hoche aurait fait escale, qu'il partage avec nous les souvenirs encore rougeoyants de son jeune temps, et nous invite à la méditation.
Mais l'écrivain sait aussi faire palpiter les coeurs, nouer les intrigues, et nous concocter un happy end ! Comme dans ses précédents récits, il accorde toute sa place à l'amour, ce sentiment vital qui par-delà les braises de la guerre, enflamme le coeur des soupirants, et donne un avenir, une descendance à notre aventure humaine ! Et c'est ainsi que, malgré la dureté du monde, l'on se prend à fredonner, en refermant le livre, la chanson de Guy Béart « S'élève l'espérance Dans le silence Soudain de la nuit Et les matins qui chantent Déjà enchantent Nos soirs d'aujourd'hui… » (6).


Les braises du souvenir, En Algérie, t. I, Editions L'Archipel, 2019.
Les braises du souvenir, le grand départ, t. II, Editions L'Archipel, 2020.
(1) « » Pour les pertes militaires françaises en Algérie (non compris le Maroc et la Tunisie), Le Journal officiel du 4 août 1986 donne les chiffres suivants37 :
effectifs engagés, 1 419 125 militaires dont 317 545 d'active (22,38 %) et 1 101 585 appelés du contingent (77,62 %) ;
pertes totales : 23 196 morts et 60 188 blessés dont 11 283 morts soit 48,64 % du total des morts parmi les militaires d'active et
11 913 morts soit 51,36 % du total des morts parmi les appelés du contingent. (source Wikipedia)
(2) Ce que le jour doit à la nuit, roman de Yasmina Khadra, Editions Julliard, 2008.
(3) Page 55, tome I
(4) Page 17, tome I
(5) Discours d'Emmanuel Macron le 28 octobre 2020, annonçant une seconde période de Confinement.
(6) Page 378, tome II
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
L’Algérie, pensait-il, possédait des richesses agricoles, énergétiques et touristiques, un haut niveau d’infrastructures et une main-d’œuvre de qualité. Ce potentiel économique l’autorisait à mettre ses espoirs dans une paix retrouvée.
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Un khalouf, mon lieutenant.
Un cochon, un sanglier… Un animal inoffensif.
Le danger, c’est la rencontre avec un groupe de fellaghas. Mais c’est aussi, parfois, l’unité amie qui a dévié de sa route sans s’en rendre compte. Elle s’est détournée du trajet prévu pour sa mise en place, et se retrouve soudain en face de vous. Ces méprises ne sont pas rares. Combien de blessés ont-elles fait ? Combien même y ont laissé la vie ?
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Pour la première fois, il s’interroge sur sa relation avec Marie-Ange. Avant son départ pour le service militaire, il songeait à l’épouser. Elle lui inspire toujours un fort désir physique. Privé de femme depuis plusieurs mois, il a souvent fantasmé sur son corps ferme et brun de Méditerranéenne. Pourtant le sentiment qui les a unis est en train de se distendre. Et c’est de son fait à lui.
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Les métropolitains lui apparaissent comme des gens repus qui refusent de savoir ce qui se passe de l’autre côté de la Méditerranée. Ils rêvent de se débarrasser du fardeau algérien, de trouver vite une solution à cette épine dans le pied de leur confort. Mais quelle solution ? L’Algérie française, la France de Dunkerque à Tamanrasset ? Un leurre !
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Les Algériens se haïssent parce qu’ils se connaissent trop ; et la guerre, cet alibi, leur offre la possibilité de vider leurs contentieux anciens. Ils sont violents comme l’est cette terre d’Afrique ! Philippe a essayé de comprendre leurs motivations, de démêler les fils de cet écheveau. Il aurait voulu trouver dans leurs comportements un semblant de logique.
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Je défends la mémoire des harkis.
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