Il faut bien avouer que certains concepts ne convainquent pas au premier coup d'oeil. Quand on m'a expliqué pour la première fois celui du
Simetierre – « Tu vas voir, c'est une histoire de cimetière d'animaux domestiques bâti sur un cimetière indien hanté ! » – mon premier mouvement a été de m'ébahir : « Dieu que ça a l'air con… » Franchement, des histoires de minous maléfiques qui reviennent des morts pour trucider des piafs, ça fait vraiment peur à quelqu'un ? Et puis la plupart des chats sont déjà maléfiques et trucident déjà des piafs, alors comment faire la différence ? Depuis une histoire involontairement hilarante de machine à laver diabolique dans le recueil «
Danse macabre », je me méfie un peu de l'imagination de
Stephen King : certes, le bonhomme a du génie, mais il a aussi parfois des idées assez loufoques, plus propres à donner le fou rire qu'à nous hérisser les poils de la nuque. Alors «
Simetierre », nanar littéraire ou roman authentiquement flippant ?
Eh ben, c'est pas si mal, voir pas mal du tout ! L'histoire commence de façon très classique pour un
Stephen King avec l'arrivée d'une petite famille d'américains moyens dans le Maine (C'est fou le nombre de trucs horrifiques qui arrivent dans le Maine ! Moi, si j'étais un américain moyen, faudrait que l'on me traîne par la peau du cou pour que je mette un pied au Maine…). Ces braves gens emménagent dans une charmante maisonnette en pleine campagne, la maisonnette en question ne souffrant que de deux défauts : une rue voisine arpentée régulièrement par des poids lourds et un cimetière pour animaux domestiques, lieu à la fois charmant et un peu glauque où les enfants du coin ont pris l'habitude d'enterrer leurs petits compagnons disparus. Derrière les frontières du cimetière, s'étendent des forêts sinistre et inviolées, anciens territoires des indiens Micmac. Des légendes curieuses courent sur ces territoires : les terres seraient pourries, maléfiques et hantées par le Wendigo, sombre démon surgi des légendes indiennes dont le touché suffirait à transformer tout homme en cannibale. Mais les terres auraient aussi un pouvoir très particulier, celui de ressusciter les morts ! Très rapidement, Louis Creed, le père famille développe une fascination morbide pour ce lieu malsain et le jour où le chat de sa fillette, Church, est écrasé par un camion, il prend une dangereuse décision…
Sans me faire sauter en l'air d'enthousiasme ou de terreur, «
Simetierre » a été une bonne expérience de lecture. Tout compte fait, l'idée du cimetière des animaux n'est pas si anodine qu'il y parait au premier abord : dans la plupart des cas, la mort de leur animal de compagnie constitue le premier rapport des enfants avec ce grand mystère que l'on appelle la Mort. Et puis, on se doute bien que le roman ne s'arrêtera pas à la mort d'un minou trop aventureux ! Ne nous mentons pas, «
Simetierre » c'est un peu de la série B, mais de la bonne série B, bien construite et menée avec assez de subtilité pour nous prendre aux tripes et nous plongeait dans un doux sentiment d'oppression qui enfle lentement au fur et à mesure du récit. Histoire d'épouvante réussie, «
Simetierre » est également un roman sur le deuil, la douleur et surtout sur la peur panique, expérimentée par tous les jeunes parents, de voir périr leurs enfants. C'est si fragile quand on y pense, un enfant en bas âge : un couteau oublié, une bouteille mal refermée, un instant d'inattention peuvent suffire et soudain, le cauchemar surgit, entraînant avec lui souffrance, horreur et folie… Très efficace.