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Billet à consulter sur mon blog www.marcbordier.com.

La Princesse de Clèves, classique de la littérature française depuis des décennies, a connu un curieux regain d'intérêt de la part du public grâce aux déclarations maladroites de Nicolas Sarkozy. Rappelons les faits. En février 2006, celui qui était alors encore simple candidat à la Présidence de la République a affirmé: "Un sadique ou un imbécile avait mis dans le programme [du concours d'attaché d'administration] d'interroger les concurrents sur La Princesse de Clèves. Je ne sais pas si cela vous est arrivé de demander à la guichetière ce qu'elle pensait de la Princesse de Clèves. Imaginez un peu le spectacle !". Une fois élu, il a tenu un discours similaire à l'occasion d'un déplacement à Lyon à la fin de l'année 2008 (vous pouvez consulter ici ses propos exacts). Influencé par ce contexte particulier, j'ai récemment relu le roman de Madame de la Fayette en me posant les questions suivantes: comment La Princesse de Clèves peut-elle éclairer le lecteur d'aujourd'hui, dans sa vie personnelle ou professionnelle? En quoi peut-elle lui être utile dans un univers dominé par les compétences techniques, commerciales, ou administratives?

Comme la plupart des grands textes classiques, La Princesse de Clèves exige du lecteur moderne une concentration et une attention auxquelles ne l'ont pas habitué les écrans qui monopolisent d'ordinaire ses facultés intellectuelles. Passé le célèbre incipit ("La magnificence et la galanterie n'ont jamais paru en France avec tant d'éclat que dans les dernières années du règne de Henri second."), il doit retrouver son chemin au milieu d'une longue galerie de portraits historiques, et suivre un fil narratif certes linéaire, mais entrecoupé de quatre récits enchâssés illustrant les dangers de la passion amoureuse. Lire le roman de Madame de la Fayette, c'est donc cultiver la persévérance et le goût de l'effort. Ne sont-ce pas là des qualités appréciables dans la vie professionnelle?

Sur la forme, La Princesse de Clèves se distingue par un style sobre, simple et naturel. Selon l'usage de l'époque classique, Madame de la Fayette refuse l'effet pour l'effet, les métaphores coquettes, les ornements fleuris. En parlant de son roman, elle écrit dans une lettre à une amie "je le trouve très agréable, bien écrit, sans être extrêmement châtié [...]. Il n'y a rien de romanesque ni de grimpé" ("grimpé" désignant ici un style prétentieux, excessivement élevé). Il ne faut pas voir dans ces affirmations la manifestation d'un quelconque narcissisme, mais plutôt le jugement sûr d'une artiste qui fait tendre tous ses efforts vers la clarté, la concision et la simplicité. Tout au plus peut-on relever dans son roman une présence un peu trop fréquente des superlatifs et des hyperboles pour désigner les brillantes qualités des gentilshommes de la cour de Henri II, mais cela fait partie du style littéraire précieux. Dans l'ensemble, l'écriture de Madame de la Fayette est un modèle pour les amoureux de la langue française, et son étude est plus que jamais nécessaire dans un monde où l'écrit retrouve toute sa place grâce à la multiplication des correspondances électroniques.

Enfin, La Princesse de Clèves est un chef d'oeuvre d'analyse du sentiment amoureux et de ses dangers. le roman montre la naissance de l'amour, ses élans, ses doutes et ses reflux, ses joies et ses souffrances, les jalousies et les peines terribles qu'il peut inspirer. C'est un ouvrage de casuistique amoureuse, une anthropologie fine qui explore les variations du coeur sur le mode de l'introspection. Sans doute la guichetière de M. Sarkozy n'en a-t-elle pas besoin pour apposer des coups de tampons derrière son guichet. Mais si elle veut s'élever vers de nouveaux horizons, aussi bien matériellement qu'intellectuellement, elle trouvera une bonne guide dans La Princesse de Clèves.
Lien : http://www.marcbordier.com
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La Princesse de Clèves
Madame de la Fayette (1634-1693)
« La magnificence et la galanterie n'ont jamais paru en France avec tant d'éclat que dans les dernières années du règne de Henri le second. »
Ainsi commence l'histoire de la Princesse de Clèves, un des romans les plus célèbres du XVIIe siècle. Paru en 1678 sans nom d'auteur, ce roman précieux, historique et d'analyse se passant à la cour des Valois au XVIe siècle connut immédiatement un succès retentissant et reste de nos jours un des plus beaux romans d'amour de la littérature française. Madame de la Fayette, de son vrai nom Marie-Madeleine Pioche de la Vergne comtesse De La Fayette, fut l'amie De La Rochefoucauld et de Madame de Sévigné.

Petit rappel historique.
Henri II, duc d'Orléans et de Bretagne, second fils de François Ier et de Claude de France naquit en 1519, et régna de 1547 jusqu'à sa mort en 1559, survenue de façon accidentelle lors d'un tournoi (contre Montgomery, capitaine de la garde royale), organisé pour le mariage de sa fille Élisabeth avec Philippe II roi d'Espagne. Epoux de Catherine de Médicis il avait une première favorite en la personne de Diane de Poitiers, duchesse de Valentinois dont la reine, dissimulatrice, ne sembla jamais jalouse. Diane de Poitiers avait été la maitresse de son père François Ier et l'était encore de bien d'autres comme le comte de Brissac. Henri II accéda au trône en 1547 suite à la mort de son frère aîné François le dauphin en 1536. Il était un séducteur et aimait le commerce des femmes. Hélas sous son règne débuteront les terribles guerres de Religion.
L'histoire.
Mais tout d'abord une précision sémantique importante à savoir qu'au XVIIe siècle le mot « amant » signifie seulement « celui qui aime » sans connotation sexuelle comme de nos jours.
Arrive un jour à la cour une vertueuse beauté âgée de quinze ans qui attire les yeux de tout le monde, une beauté parfaite issue de la Maison de Chartres. Orpheline de père, elle est élevée par Mme de Chartres sa mère qui ne se contente pas de lui apprendre à cultiver sa beauté et son esprit mais fait tout pour lui donner en plus vertu et amabilité. Chez un bijoutier italien elle est remarquée par le prince de Clèves, un homme respectable et de haute naissance, ami de François de Lorraine duc de Guise. Il est séduit par sa beauté et ne voit d'autre issue pour la revoir que de se confier à Madame, la soeur du roi, qui a une grande influence à la cour et qui organise la rencontre. Par la suite Mlle de Chartres devient la favorite de la Reine dauphine, Marie Stuart l'épouse du dauphin fils ainé du roi, et fréquente Mesdames filles du Roi et fait l'unanimité à la cour, excepté auprès de Madame de Valentinois, la favorite du Roi. Passionnément amoureux, le Prince de Clèves d'un statut social plus élevé que celui de Mlle de Chartres, désire ardemment l'épouser. Ce que sait hélas aussi le prince, c'est que son ami le chevalier de Guise en est lui aussi amoureux depuis le premier jour qu'il l'a vue. Et puis le père du prince, le duc de Nevers est aussi un obstacle probable de par son étroite relation avec Madame de Valentinois ennemie de la maison de Chartres. Il faut dire qu'à la cour, l'ambition et la galanterie sont source de cabales et de jalousies, de commérages et d'intrigues amoureuses et politiques.
« …On n'y connaissait ni l'ennui, ni l'oisiveté, et on était toujours occupé des plaisirs ou des intrigues…Ainsi il y avait une sorte d'agitation sans désordre dans cette cour, qui la rendait très agréable, mais aussi très dangereuse pour une jeune personne. »
La mort du duc de Nevers son père laisse le champ libre au Prince pour demander en mariage Mlle de Chartres, mais avisé, « il eut préféré le bonheur de lui plaire à la certitude de l'épouser sans en être aimé. » Car il apparaît que la demoiselle n'éprouve aucune inclination particulière pour le Prince, son sentiment étant d'estime tout au plus. Quoi qu'il en soit, le mariage se déroule au Louvres, mariage qui donne au Prince des privilèges mais pas davantage de place dans le coeur de sa femme.
À la cour la beauté de Mme de Clèves ne laisse de susciter de l'admiration et Jacques de Savoie duc de Nemours, grand séducteur, homme brillant de retour de Bruxelles ne peut qu'être surpris par sa beauté et lorsqu'il fut proche d'elle et qu'elle lui fit la révérence, il ne peut s'empêcher de donner des marques de son admiration, et en peu de temps faire une grande impression dans le coeur de Mme de Clèves. « Se voyant l'un et l'autre ce qu'il y avait de plus parfait à la cour, il était difficile qu'ils ne se plussent infiniment. »
Sur son lit de mort Mme de Chartres rappelle ses devoirs à sa fille et ce qu'elle doit à son époux, la met en garde quant à sa réputation si elle se laisse séduire par le duc de Nemours.
Des récits secondaires viennent se greffer sur l'intrigue centrale et illustrent la thèse centrale en attirant l'attention sur les désordres de l'amour. Ainsi la seconde partie de ce récit cite entre autres la conversation que tient M. de Clèves à sa femme au sujet de la relation entre Mme de Tournon et son amant M. de Sancerre, (ami de M. de Clèves), qu'elle trompe avec M. d'Estouville. Leur projet de mariage semble prendre mauvaise tournure car M. de Sancerre n'est pas un parti assez bon pour elle. de retour de voyage M. de Sancerre apprend et la mort subite de Mme de Tournon et son infidélité et se confie à M. de Clèves.
Également est évoquée par la reine Dauphine, Marie Stuart, à l'intention du duc de Nemours, la vie de Anne Boulen (ou Boleyn) qui fut la seconde femme de Henry VIII d'Angleterre, reine consort de 1533 à 1536 et mère de la reine Élizabeth I ère. Née en 1501, son mariage avec Henry VIII est à l'origine de la réforme anglaise, Rome tergiversant pour accorder le divorce à Henry d'avec Catherine d'Aragon. Accusée injustement de trahison, d'adultère et d'inceste avec son frère le vicomte de Rochefort, elle fut décapitée en 1536.
On ne peut que remarquer dans ce roman qui est aussi une peinture des moeurs de l'époque la précision du style dans l'action et la subtilité de l'analyse du caractère des personnages et des passions qui les animent. On peut dire que Madame de Lafayette a su concilier dans cette oeuvre la subtilité romanesque de l'esprit précieux et la vérité sobre et éternelle du classicisme. Les situations sont souvent compliquées et parfois invraisemblables.
Dans la troisième partie, on découvre la lutte de Mme de Clèves avec des rebondissements incessants pour ne point succomber au charme du duc de Nemours, quitte à s'éloigner un temps de la cour après avoir avoué à son époux qu'un prince de la cour, sans en citer le nom, la poursuit de ses assiduités et qu'elle en est touchée de passion. le duc de Nemours dissimulé derrière une porte assiste à la confession de la princesse. La jalousie de M. de Clèves va grandissante malgré la grande marque de sincérité que constitue l'aveu de son épouse. Garder le secret est le plus difficile, et des bruits courent … Mais Mme de Clèves se refuse au duc de Nemours autant par souci de sa tranquillité que par respect de son devoir d'épouse. Et puis elle lui en veut de son manque de discrétion et de son imprudence dont il s'afflige in fine : elle sait qu'elle a eut tort de croire qu'il y eût un homme capable de cacher ce qui flatte sa gloire. La troisième partie se termine sur la mort du roi lors du tournoi organisé lors du mariage de sa fille.
Après la mort du roi, la cour change complètement de face pour passer aux mains des Guise par l'intermédiaire du cardinal de Lorraine Charles de Guise qui devient le maître des finances, avec l'arrivée du duc de Guise aux commandes des armées. le connétable du roi, M. de Montmorency est le premier écarté, puis c'est le tour de Diane de Poitiers. A lieu à Reims le sacre du nouveau roi, François II, fils de Henri II, et époux de Marie Stuart.
La mort de M. de Clèves qui plonge Mme de Clèves dans une douleur et un abattement indicibles, ne laisse pas de donner espoir au duc de Nemours de conquérir définitivement le coeur de la princesse, mais c'est sans compter sur le goût du sacrifice qui habite Mme de Clèves pour honorer la mémoire de son mari. Elle va prendre une décision irrévocable en accord avec son sentiment du devoir bien que son amour pour le duc de Nemours n'ait faibli.
En définitive c'est une vue pessimiste du monde et la négation de la possibilité d'atteindre le bonheur malgré les apparences qui domine dans ce magnifique récit. L'influence du jansénisme sur le caractère de la princesse est évidente, qui met en lumière le fait que l'amour mène à la perdition et à la mort selon un destin inexorable qui nie la notion de liberté humaine.
En conclusion, un chef d'oeuvre éternel.


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Un classique de la littérature française que j'ai mis des années à lire. Je suis ravie d'avoir fini par le faire. J'ai choisi ce livre parce qu'il validait un item dans le challenge « Multi-défis 2022 » sur Babelio.

L'histoire :
Mademoiselle de Chartres, tout juste quinze ans, est introduite par sa mère à la cour du roi Henri II. Immédiatement, sa grâce et sa beauté attirent l'attention. le prince de Clèves tombe éperdument amoureux d'elle et l'épouse, mais il s'agit d'un amour non réciproque. Mais la jeune femme rencontre alors le duc de Nemours. Jusqu'où iront-ils par amour ? La Princesse est une femme vertueuse et elle laissera sa vertue guider ses choix.
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Il faut aimer la romance classique pour se laisser guider dans les pas de cette princesse de Clèves.
Par devoir, par frivolité ou par ambition politique, le couple est une obligation à la cour du roi de France. Cependant les couloirs du pouvoir n'excluent pas l'amour. Celui-ci est rare, et donc suspect. Il peut amener à la folie, au désastre. Se laisser tenter est une prise de risque à laquelle Mme de Clèves résiste.
Ce roman est donc celui d'une autopsie de la tentation, très bien écrit, par une femme, où on peut, quatre cent ans après, se laisser plonger avec délice.
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Je profite de l'excès de temps que me laisse ce second confinement pour lire certains classiques, qui étaient restés longtemps dans ma PAL. La princesse de Clèves est peut-être le plus célèbre des premiers romans en langue française. Il a été écrit par Madame de la Fayette (1634-1693) qui a eu toute sa place à la cour de Louis XIV.
Le cadre de l'histoire se déroule est la cour du roi Henri II. Tout le roman est consacré à l'amour "impossible" entre le duc de Nemours, le plus séduisant de tous les gentilhommes, et Mademoiselle de Chartres, la plus vertueuse des belles jeunes femmes introduites à la cour. Celle-ci a été vite mariée au prince de Clèves, un homme honnête et sincèrement épris, pour lequel elle a respect et estime, mais qu'elle n'aime pas d'amour. Or, elle conscientise peu à peu sa passion pour le duc de Nemours qui, lui-même, est devenu amoureux fou. Mais la princesse s'abstient obstinément de lui céder. Après de longs rebondissements, le dénouement du roman arrive: le prince de Clèves meurt de chagrin. Désormais libre, la princesse a un premier et dernier véritable entretien en tête-à-tête avec le duc: elle refuse définitivement un remariage avec lui.
Le lecteur est plongé dans un débat "cornélien" poussé à l'extrême. Il ne discerne pas nécessairement toutes les motivations des protagonistes et se trouve confronté à une éthique exotique, c'est le moins qu'on puisse dire. L'auteure représente - avec virtuosité - toutes les affres de l'amour (platonique, en l'occurrence) et imagine des éléments romanesques assez artificiels comme, par exemple, la perte de la lettre compromettante, attribuée d'abord au duc de Nemours. de là à taxer tous ces épisodes d'aimables marivaudages, il y a un grand pas que je ne franchirai pas. Dans le roman, l'inachèvement de l'amour est une question très sérieuse qui a une dimension tragique. La romancière prend tout son temps pour explorer les ressorts de l'âme humaine, corsetée ici par une conception très élevée du "devoir "
J'ai été étonné par la langue utilisée par l'auteure, qui m'a semblé très facile à lire (a-t-on adapté le texte pour le lecteur du XXIème siècle ?). Au début, on est perdu dans la galerie des nobles personnages; à la cour, il y a plusieurs reines (la "reine dauphine" est plus connue sous le nom de Marie Stuart) que l'on finit par bien distinguer. La cour royale est décrite d'une façon détaillée. On s'étonne de voir comment évoluent les personnages, oisifs ou concentrés sur des tâches uniquement honorifiques. Enfin, la mort d'Henri II constitue un morceau de bravoure.
En conclusion, je dirai que je suis satisfait d'avoir enfin lu - en prenant mon temps - ce roman quasiment mythique et très lisible.
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Ah La Princesse de Clèves ! Imposée en 1ère pour le bac, qui plus est dans une filière technique, quel affreux souvenir et surtout quel ennui...
Et puis au détour d'une conversation, je me suis dit pourquoi pas. La 1ère, c'était il y a 30 ans. Je manquais de maturité. le roman est court alors j'y retourne. Je ne risque pas grand chose.
La Princesse de Clèves est l'histoire d'un amour impossible au XVIème siècle. Lorsque Mademoiselle de Chartres arrive à la cour du roi Henri II, elle a 16 ans et se retrouve très rapidement mariée au prince de Clèves tombé amoureux d'elle au 1er regard tant sa beauté est éblouissante. Elle estime le prince mais sans éprouver d'amour à son égard. Plus tard, elle rencontrera la passion amoureuse avec le duc de Nemours. Tiraillée entre ses sentiments amoureux et son devoir d'épouse, Mme de la Fayette analyse la situation et les sentiments des protagonistes.
Verdict... j'ai adoré. C'est magnifiquement écrit. La passion est parfaitement décrite. Sans vouloir divulguer l'histoire, il faut garder en tête l'époque et le rang des personnages.
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En 1678, La Princesse de Clèves paraît anonymement chez l'éditeur parisien Claude Barbin. Cependant, le public habitué aux salons reconnaît sans peine son auteur, Madame de Lafayette. Au risque de surprendre beaucoup d'entre vous, je fais partie des rares lycéens qui ont su apprécier cette oeuvre (j'étais en filière L, c'est peut être pour ça). Car, une héroïne aussi vertueuse, aussi exemplaire dans sa conduite comme l'est Mme de Clèves, est quelque chose d'inédit dans notre littérature contemporaine. À mes yeux, ce roman est tout ce qu'il peut exister de sublime au monde: une rédaction épurée, une intrigue palpitante et déchirante et des personnages étonnamment vraisemblables et romanesques. Mais je digresse, pardonnez-moi. Âgée de seize printemps, la délicate Mademoiselle de Chartres épouse le prince de Clèves pour lequel elle a beaucoup d'estime. Toutefois, ce mariage n'engendre aucun amour chez l'héroïne. Un soir, à l'occasion d'un bal donné par la Dauphine (l'intrigue se déroule à l'époque des Valois), Mme de Clèves fait la connaissance du Duc de Nemours avec lequel elle danse. de cette rencontre va naître une passion que l'héroïne va tenter de dompter tout au long de l'intrigue...
Avec un schéma narratif qui n'est pas sans rappeler le déroulement d'une tragédie classique, Madame de Lafayette nous offre une analyse détaillée des sentiments de ses personnages, gráce à des passages remarquablement bien construits (la rencontre au bal, le portrait dérobé et bien entendu l'aveu sont mes favoris). Pour les lecteurs que nous sommes, cet ouvrage est également l'occasion pour nous de voir comment était la vie dans ce milieu de cour, où chacun était observé (en particulier les femmes). En effet, après s'être rendue compte des sentiments qu'elle porte au Duc de Nemours, Madame de Clèves fait tout ce qui est en son pouvoir pour ne pas se trahir, et surtout, pour ne pas éclabousser d'opprobre son époux. N'est-ce pas là la quintessence du sublime inhérente au classicisme et à la préciosité? En dépit des années qui se sont écoulées, je frémis toujours lorsque je lis la scène de l'aveu:

"Eh bien, Monsieur, lui répondit-elle en se jetant à ses genoux, je vais vous faire un aveu que l'on n'a jamais fait à son mari, mais l'innocence de ma conduite et de mes intentions m'en donne la force. Il est vrai que j'ai des raisons de m'éloigner de la Cour et que je veux éviter les périls où se trouvent quelquefois les personnes de mon âge. Je n'ai jamais donné nulle marque de faiblesse, et je ne craindrais pas d'en laisser paraître si vous me laissiez la liberté de me retirer de la Cour, ou si j'avais encore Madame de Chartres pour aider à me conduire."

Et que dire de la scène de la canne ornée de rubans, lors de la retraite de Madame de Clèves à Coulommiers? Ce passage lors duquel Monsieur de Nemours reconnaît en voyant les rubans les couleurs qu'il avait arborées lors d'un tournoi où Madame de Clèves était présente! C'est tout à fait éblouissant. Hormis les Hauts de Hurlevent d'Emily Brontë, je ne crois pas qu'il puisse exister un roman capable de me donner tant d'émotions que La Princesse de Clèves. Voilà une oeuvre qui fait partie intégrante de notre identité nationale, que nous nous devons de connaître, peu importe si elle nous plaît ou non. Plus qu'une oeuvre intemporelle, c'est un manifeste littéraire qu'abrite La Princesse de Clèves, devenue légendaire grâce à la beauté éthérée de Marina Vlady, et à l'idéal de femme vertueuse que le roman à laissé. C'est bien simple, bien avant que Stendhal, Balzac ou encore Hugo ne laissent les oeuvres splendides que nous connaissons, le code du roman se trouvait dans La Princesse de Clèves.
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La princesse de Clèves, Madame de la Fayette, 1678
Genre : Roman, préciosité, classicisme

A contre-courant du baroque (1580-1660) et de ses romans-fleuves, Mme de la Fayette oriente son oeuvre vers un style sobre et un art plus sincère et réaliste avec La Princesse de Clèves. Ancré dans un contexte historique précis, la cour du roi Henri II, le roman expose les dangers de la passion et prend des accents classiques et précieux. L'amour est en effet le thème favori des salons précieux que fréquente l'auteur et le duc de Nemours incarne l'idéal de l'honnête homme. Il s'agit également d'un roman psychologique, grâce à l'épaisseur des caractères et à l'analyse psychologique fine que nous livre l'auteur.
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Ahhh la Princesse de Clèves : un si grand modèle de vertu, de rigueur, d'austérité… Quand je n'arrive pas à résister à une boîte de chocolats, elle résiste à l'envie de succomber à l'homme de sa vie…

La Princesse de Clèves est secrètement amoureuse du duc de Nemours, l'un des plus beau partis de la Cour du roi Henri II. Mais sa condition de femme mariée du 17ème siècle lui interdit de vivre sa passion au grand jour, d'autant plus que le Prince de Clèves son mari l'aime éperdument. Au plus mal, elle finit par tout avouer à son mari : mais à quel prix ?

Transposons cette situation à une situation de nos jours. Tu es mariée à Mister Bean parce qu'il a de l'argent et que cela arrange bien tes parents. Alors que tu découvres la vie de femme mariée avec un mari que tu n'aimes pas (mais qui est bien brave), Bradley Cooper t'envoie des sextos et te dit qu'il t'aime… Tu fais quoi ?

En ce qui me concerne, je plaque tout et m'enfuie avec Bradley dans sa décapotable blanche, cheveux au vent et levant mon majeur en l'honneur des conventions et du « qu'en dira-t-on ? ». Mais pas la Princesse de Clèves. Elle choisit de rester fidèle et obéissante à son mari (et à elle-même), quoi qu'il advienne.

Courage ou stupidité ? La réponse à cette question diffère selon l'époque où on lit le roman.

Les premières pages sont difficiles à aborder en raison de la multiplicité des personnages et des alliances qui y sont décrites par Madame de Lafayette. Passé cela, on est plutôt pris par l'histoire de ce triangle amoureux. de nombreux thèmes sont abordés par l'auteure : l'amour impossible, la condition féminine, le renoncement…

Lien : http://mademoisellechristell..
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Si vous êtes du genre fleur bleue, foncez ! Effectivement, les premières pages, consistant en une présentation détaillée des différents personnages de la cour, sont un peu difficiles à digérer. Mais ensuite, en tant que grande romantique, j'ai été transportée par cette romance, et me suis prise à aimer cette ambiance particulière qui est celle de la cour royale, faite de rumeurs et d'apparences. de plus, je pense que ce livre soulève de nombreuses questions, notamment celle du véritable amour et de ce qu'il est permis ou pas de faire au nom de celui-ci. Il est également très intéressant de voir évoluer ces personnages dans un milieu clos, à l'abri de toute influence extérieure, dans un univers presque irréel. Cela reflète bien la mentalité des aristocrates du 16e siècle, qui vivaient entre eux, dans un faste révoltant, au regard des conditions de vie de la population.
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La Princesse de Clèves (IV Partie)

Quand elle commença d'avoir la force de l'envisager, et qu'elle vit quel mari elle avait perdu, (...)______ qu'elle eut pour elle−même et pour monsieur de Nemours ne se peut représenter.

l´haine
l'amour
l'horreur
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