On parle parfois de l'Europe comme d'un "softpower" en opposition avec les Etats-Unis censés représentés le "hardpower". Quelle réalité peut-on donner à ces termes et comment les différencier ? L'auteur entreprend de démontrer que la mise en oeuvre d'une gouvernance par les normes est effectivement une caractéristique de l'Union européenne, inhérente à sa forme d'organisation : partageant les souverainetés sans les abolir, la norme est un instrument de convergence des politiques nationales que l'Union utilise au-delà de ses Etats-membres dans le jeu des rapports internationaux. L'auteur caractérise l'objet privilégié de ces normes, et en évalue l'efficacité. En notant que les Etats-Unis sont peu enclin à y souscrire, il en déduit une préférence pour un modèle de puissance différent pour ce pays qui confirme donc la particularité européenne.
Le livre est très documenté et s'appuie sur les accords internationaux et les chiffres du commerce mondial pour en déduire les différentes voie politiques adoptées par l'Union européenne et les Etats-Unis principalement. Outre les précisions apportées aux définitions vagues d'Etat-puissance et de softpower, il contribue aussi à revoir les connotations de naïveté et de faiblesse qui accompagnent souvent ce dernier terme. Enfin, il remet encore en cause un préjugé d'objectivité de l'UE en faveur, comme pour tout ensemble politique, d'une défense d'intérêts particuliers. Il en ressort une meilleure compréhension des modes d'intégration de l'Union européenne dans le monde (commerce, normes sociales et environnementales, industrie...), souvent mis en relief à contre-pied des analyses attendues.
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Ce qui est en jeu, ce n'est plus la simple concurrence entre les économies, mais la compétition entre les systèmes sociaux.
[La préférence européenne pour la norme] repose sur un principe essentiel de la construction européenne : la souveraineté partagée. Celle-ci remplit une fonction d'harmonisation des positions nationales européennes face au reste du monde.
Il existe une évidente proximité entre la gouvernance européenne et la gouvernance mondiale, tout simplement parce que l'un comme l'autre cherche à régler des problèmes que les Etats ne peuvent plus régler tous seuls.
Les réalistes envisagent l'ordre mondial comme un ordre anarchique qu'il serait vain de chercher à domestiquer par des normes en raison de la forte discontinuité entre l'ordre interne et l'ordre externe.
Pour comprendre l'Europe, il faut donc se dispenser de trop la comparer aux Etats-Unis.
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