Puisque nous sommes entre nous, entre ami(e)s ai-je presque envie de dire, je serai bien tenté de me laisser aller à quelques confidences et autres petits reproches ...
Ce roman, "
La franque aux cheveux d'or" est bien le troisième tome de la "tetralogie barbare" d'Yves le Febvre.
Alors je sais bien qu'il s'écrit et se réécrit, se répète à l'envie sur la toile ce qu'un internaute avisé a murmuré à un autre internaute encore plus avisé : le grand "cycle barbare" d'Yves le Fevre serait une trilogie.
Un peu comme les trois mousquetaires ... qui, au final, étaient quatre !
Ce grand cycle barbare se compose de quatre ouvrages : "la gaule conquérante", "
les barbares", "
la franque aux cheveux d'or" et "les féodaux".
D'après l'historien Léon Dubreuil* on pourrait même l'élargir avec un prologue et un épilogue qui seraient respectivement les deux recueils de nouvelles suivants : "les contes celtiques" et "le sang des émeutes".
C'est qu'
Yves le Febvre est un écrivain injustement oublié.
Et, comme l'arbre peut cacher la forêt, un livre parfois peut occulter tout un pan d'une oeuvre.
Il faut dire que son livre "
la terre des prêtres" lui valut un procès intenté par une vingtaine de curés du Léon.
En ce temps-là, le recteur avait la tête près de son chapeau plat !
Yves le Febvre naquit à Morlaix en décembre 1874 et mourut à Nantes en janvier 1959.
A sa sortie du collège, son unique ambition était de devenir écrivain.
Il le devint, en même temps que magistrat et homme politique.
"
La franque aux cheveux d'or" a été préalablement publiée dans le journal "La Petite République" en feuilleton sous le titre de "l'ombre romaine", certainement entre 1900 et 1906.
C'est un roman historique puissant et passionnant.
A la fin du VIIIème siècle, Charlemagne dominait le monde occidental.
A la suite de ses ancêtres et de plus de cinquante ans de combats incessants, il était parvenu à installer une civilisation neuve faite de violence barbare, de l'ambition romaine et du mysticisme chrétien.
Le roi Karl se fit le protecteur de l'évêque de Rome Léon III, et mit son glaive au service de l'Église qui, par échange de bons procédés, le fit empereur ...
A la cour, Hiltrude, la jeune et insouciante suivante de Gisèle la fille du roi, est devenue la maîtresse d'un comte aquitain surnommé Gontran-le-loup.
Mais ce dernier en est venu à s'absenter pour escorter le pape, la jeune Hiltrude est alors tombée dans les bras de Pépin, le jeune fils du roi Karl ...
En parallèle, un complot s'ourdit dans l'ombre de l'accession à l'empire, quelques vieux guerriers francs fidèles entre tous ont décidé de remettre le dernier descendant des rois chevelus sur le trône.
Pour cela, il faudra arracher le moine Thierry à sa passion des parchemins, et l'enlever de l'abbaye de Saint Wandrille où il s'est retiré depuis de longues années ...
Comme dans chacun des quatre tomes de cette tétralogie, le personnage principal est une femme.
Hiltrude est "
la franque aux cheveux d'or", qui va être projetée par la sauvagerie des temps dans un tourbillon d'ambitions et de turpitudes barbares.
Le roman est ici inséré dans une trame historique puissante et précise.
Les descriptions sont bluffantes.
Yves le Febvre semble décrire ce qu'il voit.
Les contours des décors historiques sont limpides et exacts.
Aurait-il possédé une machine à remonter le temps ?
Ou n'aurait-il pas plutôt lu les historiens les plus qualifiés, fréquenté les bibliothèques et et les musées parisiens et même ne se seraitil pas rendu sur place en Italie, en Sicile et en Tunisie pour mieux appréhender les ambiances de ses romans ?
Ceci expliquerait cela !
Dans son cycle barbare, l'ambition d'Yves le Febvre était de montrer comment
les barbares avaient introduit par la violence et l'énergie un sang nouveau dans les anciennes civilisations décadentes et par-delà préparé à la constitution des civilisations suivantes.
Dans "
les barbares", il avait rudoyé l'Église naissante, il semble, ici dans "
la franque aux cheveux d'or", vouloir la montrer sous un jour meilleur, même si un de ses personnages, Maracharius, est un moine perverti et comploteur, agent secret de l'impératrice byzantine Irène et de l'eunuque Staurace son âme grise ...
*"Un écrivain breton méconnu - la vie et l'oeuvre d'Yves le Febvre" de Léon Dubreuil - Annales de Bretagne et des pays de l'ouest - Anjou/Maine/Touraine - 1960 -