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EAN : 9782226461537
704 pages
Albin Michel (14/09/2022)
4.17/5   572 notes
Résumé :
"Cloud Cuckoo Land", 2021.

Un manuscrit ancien traverse le temps, unissant le passé, le présent et l'avenir de l'humanité.

Avez-vous jamais lu un livre capable de vous transporter dans d'autres mondes et à d'autres époques, si fascinant que la seule chose qui compte est de continuer à en tourner les pages ?

Le roman d'Anthony Doerr nous entraîne de la Constantinople du XVe siècle jusqu'à un futur lointain où l'humanité j... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (139) Voir plus Ajouter une critique
4,17

sur 572 notes
°°° Rentrée littéraire 2022 # 21 °°°

« Un chef d'oeuvre » nous dit le bandeau rouage qui ceint le livre. En général, je ne prête que peu de foi à ces allégations qui ne clignotent que pour pousser à l'achat. Mais là oui, je plussoie frénétiquement, tant le terme, souvent galvaudé, me semble ici mérité.

Pour être à la hauteur de l'ambition romanesque initiale, il fallait que le récit incarne la narration qu'il célèbre. Et c'est un exploit qu'un scénario aussi extravagant réussisse à garder cohérence et émotion jusqu'au bout de ses près de 700 pages. La distribution vraiment bizarre fait ainsi se croiser cinq personnages très différents, chacun évoluant sur des flux géographico-temporels très éloignés :

- dans l'Idaho d'aujourd'hui : Zeno Ninis, vieil homme vétéran de la guerre de Corée, qui aide des enfants à préparer une pièce de théâtre dans une bibliothèque le jour d'un attentat à la bombe commis par un jeune homme fragile, Seymour Stuhlman.

- en 1453, Anna, une brodeuse orpheline vivant derrière les remparts de Constantinople, apprend le grec ancien d'un vieux professeur goitreux, alors qu'Omeir, jeune bouvier au bec de lièvre se retrouve réquisitionné avec ses boeufs dans l'armée du sultan Mehmet II qui démarre le siège de la capitale de l'empire byzantin

- XXIIème siècle, Konstance, une adolescente vit confinée dans une cellule de l'Argos, vaisseau spatial qui fuit une terre dévastée pour se rendre dans la planète Beta Oph2, sous la surveillance de l'intelligence artificielle nommée Sybil.

Le fil conducteur à ses histoires disparates est un livre, La Cité des nuages et des oiseaux, contant les aventures d'un berger dont les transformations physiques font écho aux hauts et aux bas des personnages. Des extraits s'entrelacent dans les autres récits, texte entièrement inventé par Anthony Doerr qui l'attribue à un auteur antique réel, Antoine Diogène, en s'inspirant de ceux de l'Antiquité comme L'Ane d'or d'Apulée. C'est aussi la porte d'entrée et de sortie du labyrinthe narratif.

La grande joie du lecteur est de regarder les pièces du puzzle se remettre en place, les différents récits se réfractant les uns les autres comme autant d'éclats d'un kaléidoscope. La montre suisse de la construction laisse pantois d'admiration tant tout s'emboîte à la perfection. Anthony Doerr est un magicien capable d'animer chaque scène, trouvant les détails qui donnent de la texture à la lecture ou créent une intimité surprenante avec des personnages qui vous touchent profondément.

Ce roman-mondes - forcément au pluriel - stimule l'imaginaire et célèbre la littérature : celle qui fédère et relie les hommes à travers le temps, celle qui transcende la solitude, qui procure consolation et baume depuis des millénaires tout en brisant les murs autour de nous. L'épigraphe est limpide : « A tous les bibliothécaires passés, présents, et à venir ».

L'auteur souligne ainsi le rôle des gardiens passeurs de livres lorsque passe le Temps. Combien d'oeuvres de l'antiquité ont été perdues par le feu, la moisissure, l'insouciance, l'eau, la censure ou l'indifférence. Ce n'est pas un hasard si la ville ce Constantinople est mise en lumière, elle qui contenait avant sa chute en 1453 la plus grande bibliothèque du monde qui a permis de conserver la culture gréco-latine. Oui, la littérature peut sauver. La projection du récit dans un futur incertain rongé par le réchauffement climatique rappelle à quel point la survie de l'espèce humaine est reliée à la survie de la culture et des livres.

Le message peut sembler banal mais le résultat est captivant. Une bouffée d'air frais que cet ample roman follement inventif, regorgeant de générosité et de vie, et finalement plein d'un espoir. Galvanisant !
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Quel livre fascinant ! Je ne me souviens pas avoir lu un autre livre comparable à celui-ci. Quasiment 700 pages, et pas un mot de trop. Personnellement j'aurais même bien continué un peu avec les derniers personnages du roman. L'émotion est bien présente, chacun des personnages sait nous toucher, chacun avec ses failles, ses faiblesses, mais aussi ses déterminations, ses forces, et ses victoires.

Un roman sur plusieurs époques, chacune mettant en scène des personnages qui se révèleront tous reliés, les uns aux autres.

Konstance, dans un futur lointain, en route vers une planète à des années-lumière, seule enfermée dans une capsule de son vaisseau l'Argos, découvrant la terre par un programme nommé Atlas, sous la surveillance d'une intelligence artificielle nommée Sybil.

Anna, jeune brodeuse à Constantinople, au quinzième siècle, plus passionnée par les livres, les idées et le pouvoir des mots que par les points de broderie :
« "Tu te bourres le crâne de choses inutiles ", lui chuchote Maria. Peut-être - mais le point de chaîne câblée, le point noué et le point de marguerite, Anna ne les apprendra jamais. Quand elle manie l'aiguille, son talent le plus sûr consiste à se piquer accidentellement le bout du doigt et à tâcher l'étoffe de sang. »

Omeir, à la même époque jeune paysan au bec de lièvre, recruté avec ses boeufs pour rejoindre l'armée du sultan, à la conquête de Constantinople. Omeir qui aime ses bêtes plus que beaucoup d'humains
« Ce n'est pas normal qu'un enfant ait moins de sympathie pour les humains que pour le reste des créatures.
La mèche du fouet claque à deux doigts de son oreille.
Un conducteur à la barbe blanche, qui les accompagne depuis Edirne, lance alors : « Laisse ce gamin tranquille. Il a de la bonté pour ses bêtes, et après ? le Prophète lui-même, que la paix soit avec Lui, a préféré un jour couper un pan de sa tunique plutôt que réveiller le chat qui dormait dessus. »

Zeno et Seymour, tous deux vivant à Lakeport aux États-Unis, quelques dizaines d'années les séparant. Zeno ancien soldat, solitaire, qui se prend de passion pour la traduction de textes grecs et Seymour, jeune hypersensible, passionné par la nature et se battant pour sa défense.

Et puis le personnage le plus improbable, Aethon, berger grec inculte de l'antiquité qui va partir à la recherche d'une cité céleste utopique : la cité des nuages et des oiseaux.
« Il fut Homme pendant quatre-vingts ans, Âne pour une année, Loup de mer pour une autre, et une année Corbeau. »

Le lien le plus immédiat entre eux est ce livre de Diogène, racontant la quête d'Aethon. Ce livre fera partie de leur histoire à chacun au cours des siècles, et l'auteur nous révèlera peu à peu toutes les ramifications qui unissent ces hommes et femmes au cours de l'histoire. Beaucoup d'informations dans les premiers chapitres, qui peuvent dérouter certains lecteurs, et peu à peu le récit s'organise, rythmé par les chapitres du livre de Diogène, et les différentes parties du récit s'accordent les unes aux autres, telles un puzzle immense. Je suis admirative de la façon dont l'auteur a mis en place toutes les petites pièces qui trouveront toutes leur sens à un moment ou un autre.

L'auteur nous enchante par un talent de conteur hors du commun, rendant chacune de ces époques, chacun de ces personnages, réels, touchants. Aucun n'aura un destin glorieux, mais ils survivront et sauront nous captiver. Je les aurais tous aimés. Je n'en oublierai aucun.

Ce roman est aussi un formidable hommage aux bibliothèques et surtout aux bibliothécaires, ceux d'aujourd'hui et ceux d'hier, qui protègent et transmettent les livres. Ces livres qui sauvent l'homme de l'ignorance, de la solitude, qui lient les différentes générations, indispensables et pourtant si fragiles. Combien ont disparu au cours des âges, combien ont été détruits par la bêtise humaine, l'intolérance, le besoin de puissance et de domination.
Je terminerai cette critique par la dédicace de l'auteur :
« À tous les bibliothécaires passés, présents et à venir »
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Ce livre m'a littéralement happé.
Un mystérieux ouvrage datant de la Grèce Antique va se transmettre de main en main à travers les siècles.
Leurs détenteurs ne sont ni des princes, ni des politiciens, ni des hommes de pouvoir ; ce sont des gens bien ordinaires ballotés par la vie et le tragique de l'Histoire. Ils seront les gardiens fidèles et intransigeants de ce livre fascinant.
Un codex grand comme un livre de poche avec ses pages à moitié effacées, si détérioré qu'il donne l'impression d'être « resté mille ans au fond de la cuvette d'un WC ».
Un livre venu du fond des âges et qui poursuivra son chemin chaotique bien au-delà de notre siècle.
Un livre qui changera l'existence de ceux dont le destin a donné mission de l'étudier, de le comprendre, de le conserver comme le plus précieux des trésors, de lui permettre de poursuivre sa route à travers les incertitudes du temps.
Nos passeurs de relais se nomment Anna, Omeir, Zeno, Seymour, Konstance…
Constantinople au moment de sa chute, la guerre de Corée, les trente glorieuses, la terrible machinerie humaine qui tue à petit feu la planète Terre, la fuite éperdue vers les étoiles… Les époques sont différentes, mais la fascination exercée par ce petit livre et son récit en quête d'une fabuleuse cité reste la même.
J'ai aimé tous ces personnages ; j'ai aimé les suivre dans leurs espérances, leurs rêves, leurs rémissions et leurs défaites.
Anna et sa soif d'apprendre. La tare du visage d'Omeir, et sa façon de parler aux animaux. L'amour impossible de Zeno. L'effroyable tumulte dans la tête de Seymour. La rébellion de Konstance contre Sybil…
Des vies et des époques différentes avec pour seul fil conducteur leur rencontre avec ce petit livre épuisé par les ans.
Où donc a voulu nous mener Anthony Doerr ? Comme pour tous les grands livres, il y a tellement de portes d'entrée que chaque lecteur pourra se faire sa propre opinion. Moi, j'y vois l'insignifiance du petit homme emporté par l'histoire et les évènements comme feuilles au vent, et la puissance éternelle du rêve et de l'espérance…
Un roman fleuve puissant, évocateur, où l'émotion est à fleur de peau. Dès les premières pages, vous voilà embarqué. Vous ne le lâcherez plus.
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Je vous écris ce billet depuis les entrailles d'un Léviathan et je vous assure que ce n'est pas un endroit très confortable pour écrire. Ça bouge tout le temps, ces petites bêtes... En plus il y a plein d'arrêtes, ce que je déteste par-dessus tout dans le poisson...
Le récit démarre dans une capsule spatiale appelée L'Argos qui nous propulse dans un temps futur indéfini, sauf peut-être pour ceux qui ont programmé sa trajectoire.
Mince ! Un récit de SF, ai-je pensé tout d'abord. Cela vous donne déjà un aperçu de mon appétence pour le genre... Mais non, c'est bien autre chose, même si cela l'est aussi d'une certaine manière...
La Cité des nuages et des oiseaux est l'histoire d'un manuscrit qui traverse les âges.
Le temps est cet indicible et vertigineux territoire qui abrite, protège, broie aussi.
La Cité des nuages et des oiseaux est le titre du livre dont je vous parle, mais c'est aussi le titre d'un livre qui aurait été écrit il y a de cela plus de dix-huit siècles par un certain Antoine Diogène, un auteur grec de l'époque romaine. Et la genèse de la Cité des nuages et des oiseaux part de ce manuscrit disparu, puis retrouvé par hasard...
C'est donc un livre qui parle d'un livre, un peu comme le voyage d'un Léviathan qui aurait englouti le monde dans lequel nous sommes et que je vous décris en le contemplant à travers la gueule ouverte du monstre qui m'a avalé... Vous me suivez ?
J'aurais très bien pu écrire ce billet d'un autre endroit plus confortable, tiens par exemple dans un vaisseau intersidéral, - quoique, ou bien sous les remparts de Constantinople, la gardienne des textes anciens ou pourquoi pas sur le dos d'un âne depuis une plaine de l'Arcadie.
J'aime bien me mettre en situation pour écrire mes billets. Les entrailles d'un Léviathan ne sont peut-être pas l'endroit idéal pour explorer le monde et ses méandres, mais il offre une capacité de voyager indéniable, traversant les mers, effleurant les rivages, défiant les contrées les plus insaisissables...
C'est un récit choral comme je les aime. Un manuscrit traverse le temps et capte toutes ces voix, nous les renvoie par le truchement de l'imaginaire comme des miroirs jouant avec le soleil, avec les constellations qu'il traverse.
Les premiers chapitres m'ont permis de faire la connaissance de tous les personnages avec lesquels je m'apprête à voyager... Chacun habite un récit qui lui est propre, un temps qui lui est propre aussi, viendra un romancier qui s'appelle Anthony Doerr, qui dans un geste empli de jubilation et de virtuosité, va couturer l'ensemble comme un orfèvre autour d'un seul chemin : celui d'un livre. Quelle prouesse !
Certains de ces personnages sont attachants et je ne suis pas prêt de les oublier. Konstance en voyageuse intersidérale du vingt-deuxième siècle à destination de la planète Bêta Oph2, Anna et sa soeur Maria dans la Constantinople du quinzième siècle, un jeune berger du nom d'Omeir né avec une fente labiale, Zeno Niris vétéran de la guerre de Corée, traducteur inspiré, Seymour Stuhlman, inquiétant jeune homme qui a l'âme d'un terroriste au motif qu'il veut sauver la planète en danger...
Sans oublier ces cinq enfants d'une bibliothèque municipale de Lakeport, dans l'État de l'Idaho aux États-Unis...
Ils ont plusieurs points communs même s'ils ne se connaîtront jamais. Un seul leitmotiv les anime et va donner sens à leur existence : un livre, un manuscrit miraculeusement préservé venu des limbes de la Grèce antique, écrit par un certain Antoine Diogène...
Les différents chapitres font écho les uns aux autres puisqu'ils nous parlent que d'une seule et même chose : l'odyssée d'un manuscrit.
Ce récit qui ressemble à lui seul à un immense vaisseau traversant le temps est avant tout un magnifique hommage à l'univers des livres.
Plus que conteur, Anthony Doerr se fait ici griot, dépositaire d'une histoire à transmettre à travers les âges, puisant à la fois dans son imaginaire épris de fiction, mais aussi dans les récits mythologiques et les riches références historiques qui peuplent ce livre.
S'il me venait spontanément un adjectif, là à cet instant, ce serait celui de tourbillonnant.
C'est un récit vaste comme l'espace dans lequel nous voyageons sans nous en rendre compte au quotidien, c'est un récit qui se déplie sous la forme d'une odyssée.
C'est un récit qui nous parle d'humanité, celle qui vacille sous la menace ou l'emprise des barbaries, des guerres, de la disparition des espèces vivantes et du changement climatique..., une humanité en perdition qui joue à chaque instant sa survie...
La plus belle image du récit que je garderai en moi après sa lecture est celle que la littérature est la discipline à avoir su inventer le premier voyage dans l'espace.
Livre-monde,
Livre-vaisseau,
Livre-Léviathan,
Livre-Arche de Noé,
Livre-humanité...
Je n'en finis pas de déplier toutes les possibilités de ce livre comme une cartographie infinie tout en contemplant l'espace-temps abyssal que je traverse et que j'aperçois lorsque le Léviathan se met à bailler... Oui je confirme, un Léviathan ça baille, c'est même à ça qu'on le reconnaît...
Odes aux bibliothèques (et je rajouterai : odes aux bibliothécaires),
Odes à la transmission,
Odes aux quêtes insensées...
Oui, ce livre célèbre les quêtes insensées si l'on peut ainsi qualifier celle de vouloir protéger à toutes forces un manuscrit vieux de plus de dix-huit siècle.
En filigrane se détache comme ultime message celui-ci que seule la littérature pourra nous sauver. Mais nous sauver de quoi ? Peut-être de nos propres démons...
La fin du roman pourra surprendre certains d'entre nous... Récit inachevé ? Bâclé ? Ouverture vers d'autres espace-temps ? Elle ressemble peut-être tout simplement à l'âme de ce livre... Une histoire qu'il reste encore à transmettre aux générations futures...
Et comment ne pas oublier la fabuleuse dédicace qui entame le livre d'Anthony Doerr :
« À tous les bibliothécaires passés, présents et à venir. »
Cet écrivain est remarquable et ce livre m'a tout simplement rendu heureux.
Il me faut à présent glisser mon billet dans une bouteille et la jeter par-dessus les vagues en espérant qu'un lecteur attentif la recueillera au bord d'un rivage...
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Mêlant mythes antiques et science-fiction dans une formidable traversée des temps dédiée « À tous les bibliothécaires passés, présents et à venir », Anthony Doerr rend un fervent et éblouissant hommage à la littérature et à tous ceux qui contribuent à son rayonnement par-delà les siècles.


Combien d'écrits, perdus au fil du temps, ont-ils disparu définitivement ou dorment encore, cachés en quelque recoin oublié, doucement rongés par l'âge, les champignons et les insectes, en attendant que, peut-être, leur découverte ne leur redonne un jour la parole ? « Un texte – un livre – est un lieu de repos pour les souvenirs de ceux qui ont vécu avant nous. Un moyen de préserver la mémoire après que l'âme a poursuivi son voyage. » « Mais les livres meurent, de la même manière que les humains. Ils succombent aux incendies ou aux inondations, à la morsure des vers ou aux caprices des tyrans. Si personne ne se soucie de les conserver, ils disparaissent de ce monde. Et quand un livre disparaît, la mémoire connaît une seconde mort. »


Un manuscrit très ancien et abîmé, relatant, à la manière des Oiseaux d'Aristophane, l'odyssée d'un berger vers une utopique cité céleste, royaume des créatures ailées, est retrouvé par hasard dans la Constantinople de 1453, assiégée par les Ottomans. Dans l'atmosphère apocalyptique qui précède la chute de la ville et la fin de l'Empire romain d'Orient, le petit codex est miraculeusement sauvé de la destruction en même temps qu'il favorise la fuite conjuguée de deux adolescents, Anna et Omeir, représentants de chaque camp. Après encore bien des turpitudes et des détériorations supplémentaires, il parvient entre les mains de Zéno le bien-nommé – Zénodote fut le premier bibliothécaire de la bibliothèque d'Alexandrie –, un Américain du XXe siècle dont un érudit anglais, rencontré dans les camps de prisonniers de la guerre de Corée, a sauvé la vie en lui communiquant sa passion pour les grands textes et mythes de l'Antiquité. Mais Zéno et la bibliothèque de sa petite ville se retrouvent au centre des visées terroristes d'un jeune écologiste déterminé à frapper fort pour tenter de freiner la destruction de la forêt. C'est dans une navette spatiale fuyant en 2146 la Terre dévastée en direction d'une autre planète, qu'une adolescente explorant virtuellement la vie grâce à la formidable bibliothèque stockée dans une incollable intelligence artificielle, devra elle aussi son salut à la découverte de l'utopie rédigée deux mille ans plus tôt…


Constatant avec mélancolie la fragilité de la littérature, dont une part s'évapore inexorablement au fil du temps, siphonnée par les guerres, la précarité et les catastrophes naturelles en même temps que passent les générations humaines, Anthony Doerr s'émerveille en même temps de son universalité et de ses pouvoirs salvateurs. Dans un monde qui, à aucune époque, n'aura su s'affranchir de la violence, de la peur et du désespoir, il célèbre son enchantement possible grâce à la force de l'écriture et de l'imaginaire, à la capacité de la littérature de s'affranchir du temps et des frontières, de nous ouvrir les portes de l'utopie et de l'espoir. Et c'est avec un immense plaisir que, fasciné par la savante imbrication de chacun des récits qui forment ce roman-fleuve aux multiples atmosphères prégnantes, l'on se laisse emporter par sa narration aussi fluide, dense et vivante qu'érudite et pertinente.


« À chaque signe correspond un son, associer les sons revient à former des mots, et en associant les mots on finit par bâtir des univers. » On ne se lasse pas de celui que cet auteur, fort de son merveilleux talent de conteur et de son imagination sans pareille, nous donne à explorer. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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critiques presse (5)
OuestFrance
04 janvier 2023
Le prix Pulitzer 2015 (consacré pour son roman historique situé à Saint-Malo) célèbre le pouvoir de la fiction et nous plonge dans un récit foisonnant traversant le temps et l'espace.
Lire la critique sur le site : OuestFrance
LaLibreBelgique
03 janvier 2023
Anthony Doerr relie trois époques et leurs humbles héros grâce à un manuscrit ancien préservé miraculeusement.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
LaCroix
30 décembre 2022
L'écrivain américain Anthony Doer, prix Pulitzer 2015 avec Toute la lumière que nous ne pouvons voir, revient avec un roman ambitieux, où il est question d'écologie mais aussi et surtout du pouvoir salvateur des livres.
Lire la critique sur le site : LaCroix
RevueTransfuge
22 décembre 2022
Une ode à l'humanisme et au patrimoine littéraire mondial.
Lire la critique sur le site : RevueTransfuge
LeJournaldeQuebec
29 août 2022
La Cité des nuages et des oiseaux est réellement un chef-d’œuvre.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
Citations et extraits (137) Voir plus Ajouter une citation
Étranger qui que tu sois, ouvre ceci et tu apprendras des choses stupéfiantes.
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Ainsi font les dieux, ils tissent les fils du désastre à l'étoffe de nos vies, afin d'inspirer un chant pour les générations futures.
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Un souvenir remonte à sa mémoire : un jour, il y a de cela des années, Grand-père l’a emmené un jour dans les montagnes pour qu’il regarde les bûcherons abattre un très vieux pin argenté aussi haut que vingt-cinq hommes, véritable royaume à lui tout seul. D’une voix sourde mais résolue, les forestiers chantaient en travaillant, plantant leurs coins en rythme dans le tronc comme s’ils fichaient des aiguilles dans la cheville d’un géant, et Grand-père lui a appris les noms de leurs outils – hache, cognée, scie, serpe. Mais ce qu’Omeir se rappelle à cet instant, face au chef de convoi armé de son fouet, c’est le chagrin qu’il a éprouvé lorsque l’arbre a basculé, le tronc fracassé, au milieu des clameurs des bûcherons, et que l’air s’est soudain empli d’un parfum riche et piquant de bois éclaté. Tous semblaient exulter au spectacle de leur puissance collective, regardant s’écraser dans la broussaille ces ramures qui, des générations durant, n’avaient connu que la clarté des étoiles, la neige et les corbeaux. Omeir, lui, se sentait au bord du désespoir, mais il avait deviné que, même à son âge, cette émotion ne serait pas bien reçue, et qu’il devait la cacher à tous, y compris à son propre grand-père. Pourquoi se lamenter devant ce dont les hommes sont capables ? lui aurait-il répondu. Ce n’est pas normal qu’un enfant ait moins de sympathie pour les humains que pour le reste des créatures.
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« Un reposoir, dit-il enfin. Tu connais ce mot ? Un lieu de repos. Un texte - un livre - est un lieu de repos pour les souvenirs de ceux qui ont vécu avant nous. Un moyen de préserver la mémoire après que l’âme a poursuivi son voyage. »
Alors ils ouvre grand les yeux, comme s’il contemplait le fond des ténèbres infinies.
« Mais les livres meurent, de la même manière que les humains. Ils succombent aux incendies ou aux inondations, à la morsure des vers ou aux caprices des tyrans. Si personne ne se soucie de les conserver, ils disparaissent de ce monde. Et quand un livre disparaît, la mémoire connaît une seconde mort.
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— Un reposoir, dit-il enfin. Tu connais ce mot ? Un lieu de repos. Un texte – un livre – est un lieu de repos pour les souvenirs de ceux qui ont vécu avant nous. Un moyen de préserver la mémoire après que l'âme a poursuivi son voyage.

Alors il ouvre grand les yeux, comme s'il contemplait le fond de ténèbres infinies.

— Mais les livres meurent, de la même manière que les humains. Ils succombent aux incendies ou aux inondations, à la morsure des vers ou aux caprices des tyrans. Si personne ne se soucie de les conserver, ils disparaissent de ce monde. Et quand un livre disparaît, la mémoire connaît une seconde mort.
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Vidéo de Anthony Doerr
Extrait du livre audio « La Cité des nuages et des oiseaux » d'Anthony Doerr, traduit par Marina Boraso, lu par Thibaut Delmotte, Aaricia Dubois, Fabian Finkels, Sophie Frison et Martin Spinhayer. Parution CD et numérique le 12 avril 2023.
https://www.audiolib.fr/livre/la-cite-des-nuages-et-des-oiseaux-9791035412593/
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