La vie parisienne épuise les ressources de la terre, une vie campagnarde s'y conforme et y trouve une certaine harmonie convenant à son tempérament ouvert et généreux, à une certaine sagesse naturelle qui lui fait si bien s'adapter à une solitude nourrie de lecture, de rêverie, de conversations avec son fils et quelques amis bien choisis.
C'est bien la particularité de Madame de Sévigné, par rapport aux femmes de son monde, de son temps, qu'elle a pu briller dans les salons, y trouver l'inspiration autant qu'un art de vivre, et se soumettre sans gémir aux rigueurs d'une vie campagnarde, sachant y trouver les charmes et les plaisirs qui y sont secrètement attachés, et passent dans ses lettres avec la même ardeur bienveillante, amusée, et spirituelle, que ceux de la ville.
Le champ est libre pour une activité qui, ne visant pas la qualité littéraire, peut se décliner à tous les genres, et passer de la chronique à la méditation, du potin à la pédagogie, parce qu'il entretient des liens avec des familiers entrant aisément dans les méandres d'une écriture inventant ses propres rythmes et trouvant dans l'instant ses accents.
Ne devant répondre à aucune loi, et n'ayant d'autre but que de distraire un correspondant, une oreille amie, familière et indulgente, la correspondance favorise la spontanéïté, souvent trouve son charme dans l'impulsion qui y préside, et parce que l'effet de surprise, les ruptures de rythmes, l'enchevêtrement des genres y secrètent ses parfums les plus intimes, les plus prenants.
Toute forme littéraire obéissant à des lois doit se mesurer à des modèles, et vise à les dépasser pour ne pas rester un exercice d'école. La correspondance est à l'exacte ressemblance de son scripteur. Elle est à la mesure du timbre de sa voix. Une sorte de voix suspendue sur le papier. Elle n'appelle pas le livre, tout au plus la copie, sa multiplication restant limitée, réservée à un groupe d'intimes, d'initiés. De privilégiés.
Que sa signataire soit un personnage aussi distingué que la marquise qui a une existence sociale considérable ne lui donne que plus d'attrait, mais n'enlève rien de son caractère élitaire, et de sa confidentialité.
Jean-Jacques Lévèque :
Gustave CaillebotteOlivier BARROT nous propose de découvrir
Gustave CAILLEBOTTE à travers le livre de
Jean-Jacques LEVEQUE. Plus connu comme collectionneur selon
Olivier BARROT, c'est le
peintre de l'eau et de Paris après Hausmann que nous découvrons. Illustration (quelques tableaux issus du livre).