Le souci, parfois voilé, toujours présent, du primitif est d'échapper aux influences malignes, et de n'encourir la défaveur d'aucune des puissances invisibles de qui dépend son bonheur ou son malheur. Les observateurs en ont fait plus d'une fois la remarque. M. Saville par exemple, qui a longtemps résidé chez les Papous de la Nouvelle-Guinée anglaise, l'exprime en ces termes : « Du commencement à la fin de la vie de l'indigène, règne la crainte de la mauvaise fortune, individuelle et sociale. C'est M. Marett, je crois, qui signale que dans les sociétés inférieures la crainte du malheur peut devenir une panique... Rien ne saurait mieux rendre l'état actuel, au point de vue psychologique, de la société à Mailu. Toute la vie mentale y est imbue du sentiment qui s'exprime par : “ Touchez du bois ! ” »
Il y a ainsi des moments où les puissances invisibles hostiles, où les influences malignes se manifestent de préférence. Elles y sont plus immédiatement présentes, plus actives, plus dangereuses. La prudence exige donc qu'alors on se tienne coi, que l'on s'abstienne de rien entreprendre, en un mot qu'on ne donne pas prise sur soi à ces forces ennemies, qui s'empresseraient de saisir l'occasion offerte. De là proviennent les tabous bien connus, qui à des moments déterminés interdisent telle ou telle action, ou même toute activité de quelque sorte qu'elle soit.