Depuis que les anciens Dieux avaient perdu leurs temples, leurs derniers fidèles, ceux qu’on appelait les païens, descendirent de plus en plus rares vers les demeures d’Hadès, apportant à la foule innombrable des morts qui les attendait sur le rivage de tristes du monde des vivants : « Que ceux qui ont laissé des fils sur la terre n’espèrent pas les revoir : nos fils ont renié le culte de leurs pères ; à leur mort, au lieu de passer le fleuve dans l’attente d’une résurrection prochaine et du paradis qu’ils disent fermé pour nous. Que ceux qui regrettent la vie se gardent de boire de Léthé : des peuples barbares couvrent la terre et, au nom du Dieu nouveau, on a détruit tout le divin travail de la pensée des vieux âges. »
La Grèce païenne ne connut jamais les disputes ni les persécutions religieuses. Le polythéisme classe toutes les conceptions particulières dans une unité sans hiérarchie, comme la nature dont l’harmonie résulte du concours des lois et des volontés ; unité républicaine, la seule que la Grèce pût admettre, parce qu’en religion comme en politique c’est la seule qui se concilie avec la liberté.
L’émission « Poètes oubliés, amis inconnus », par Philippe Soupault, diffusée le 19 juin 1960 sur Paris Inter.