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3,23

sur 179 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
– Comment ça ? Tu lis Yann Moix maintenant ?
– Oui.
– Il ne manquait plus que ça.
– Comment ça ?
– Je ne sais pas, je le trouve arrogant.
– Tu le connais ?
– Non, à la télévision. Ça me suffit.
– Je ne regarde pas la télévision.
– Tu es d'un chiant.
– Certainement.
– C'est quoi le titre ?
Une simple lettre d'amour.
– T'es con.
– Certainement.

Me voilà dégagé de toute obligation sociale et familiale suite aux fêtes de fin d'année. Premier janvier et gueule de bois obligent, je pars en quête d'un nouvel auteur à rencontrer. Tiens, mais pourquoi pas Yann Moix, depuis le temps que j'hésite et que je l'évite. Assez étrange que de ne pas oser ouvrir un livre d'un auteur dont on est persuadé d'y trouver une certaine forme de contentement. La peur du mécontentement certainement. Ma fille vient de terminer sa sieste, elle hurle. Je clique sur commander. Une simple lettre d'amour va donc arriver dans ma boite aux lettres noire. Même nuance colorimétrique que les menuiseries de la maison. C'était capital. C'est la première fois qu'elle va avoir la chance d'accueillir une lettre d'amour.

Une simple lettre d'amour. Pour toutes celles et ceux s'étant prêtés à l'exercice, ça ne l'est en aucun cas. C'est tellement personnel. La lettre en tant qu'objet émanant des divagations de l'être et la définition de l'amour qui varie selon chacun d'entre nous. En quatrième de couverture, une phrase pour illustrer le propos “Dès qu'une femme aime un homme, elle fabrique un infidèle” et une présentation laconique de l'auteur “Yann Moix est écrivain.” Et ça, clairement, ça me plaît. Soit ce type est totalement imbu de lui-même, soit c'est un génie. C'est certainement un pot-pourri des deux hypothèses. le problème du pot-pourri, c'est que ça peut sentir bon à l'allumage – maman adore ces machins-là – et vite vous infliger un violent mal de crâne. Qu'en est-il ici ?

143 pages, c'est tout à fait louable pour une simple lettre d'amour. J'ouvre ça en soirée et dès le début des hostilités, j'accroche en découvrant vite qu'une lettre d'amour n'est pas forcément ce que l'on retrouve dans les correspondances de François Mitterand à Anne Pingeot. Bel ouvrage au demeurant pour celles et ceux qui en auraient assez de relire sans cesse celles de Victor Hugo à Juliette Drouet. Si c'est votre cam, je serai curieux d'avoir votre ressenti sur celle de Yann Moix. Cette lettre doit se lire en une seule fois, car au-delà d'une lettre, c'est une plaidoirie qui se dessine au fil des pages. Étonnant, cette plaidoirie n'a pas lieu dans le but d'obtenir quelconque prétention. Je découvre une plume acerbe, acide et parfois très égoïste. J'entends par là que l'auteur se fait souvent plaisir stylistiquement et n'hésite pas à manier les références antiques. Cela reste tout de même plutôt digeste puisque Yann Moix manie sa langue à la perfection, et ce, même en dehors de tout coït.

Je constate que tout ce que l'on jette, comme mots, après l'expres sion « l'amour c'est» fonctionne très bien ; tout y excelle et son contraire. « L'amour c'est » permet toutes les aberrations : la bêtise et l'intelligence s'y confondent, tout s'y abrutit. Tout le monde est Chamfort et Cioran quand il parle d'amour – c'est très pratique. Je suis un génie par conséquent. Dès que je changerai de sujet, ce génie cessera ; je pour rai retourner chanter sous la pluie, collectionner les voitures de sport, manger des chips, m'intéresser à du foot, me consacrer aux jeux vidéo. (page 19)

On voudrait bien s'adorer jusqu'à la tombe, mais des événements viennent défaire les voeux, déraciner les promesse, abîmer l'espérance. On achète, dans l'amour qui naît, un futur qui ne veut jamais exister. Impression atroce que le sommaire ment sans cesse, que les pages du livre se contredisent, que le chef-d'oeuvre est toujours empêché. (page 55)

Cette lettre n'a rien de simple, elle n'est que souffrance, déception et en vient à rejeter l'amour et les relations de couple telles qu'elles existent depuis des lustres. À tort ou à raison. Je ne vais pas me mouiller là-dessus, car ça va encore lancer des débats stériles en soirées avec ce qu'il me reste de copains. L'expéditeur de cette lettre ne se cache pas, ne s'épargne en aucun cas. Il ne se donne pas le beau rôle et enfonce des portes qu'il semble avoir ouvertes dans ses précédentes relations. C'est un cercle immuable, sans fin. La nouveauté réside dans la fraîcheur d'un corps à révéler, un corps à jouir.

La question sexuelle ne se posait pas ; elle n'était plus un problème. Nous avions dépassé, depuis longtemps, la possibilité de cette forma lité. C'était comme si tout entre nous avait déjà fait l'amour, nos corps exceptés. Pénétrations, fellations, sodomies, et autres festivités avaient lieu entre nous, en temps réel, par d'autres moyens, par des chemins étrangers au contact des chairs, par des clins d'oeil, des tintements de verre, des éclats de rire : une pornographie se déroulait bel et bien, mais selon d'autres modalités, installée sur une fréquence connue de nous seuls. Personne ne s'en doutait, mais face à face, debout, nous baisions comme des détraqués. Nous n'avions pas attendu le coït pour commencer à jouir. (page 109)

Tiens, le corps et son vieillissement semble être presque obsessionnel dans le raisonnement de l'auteur. L'obsession de l'après plus généralement : physique, intellectuelle et émotionnelle. Où est le présent ? Cela me fait penser au propos de Frédéric Beigbeder : “Les hommes sont toujours entre une ex et une future, car le présent ne les intéresse pas.”

De la même manière qu'un amour achevé nous enferme dans le passé, jusqu'à nous abrutir de mélancolie, un amour qui s'ébauche nous projette dans l'avenir, jusqu'à nous abrutir d'espoir. Nous quittons ce qui n'existe plus, et n'a peut-être finalement jamais existé, pour embrasser ce qui n'existe pas encore, et n'existera peut-être jamais. (page 125)

En attaquant le bouquin, j'ai rapidement eu une idée claire de son destinataire. Et finalement, au plus, j'avançais, au plus, j'avais le sentiment qu'il s'agissait d'une lettre à toutes les femmes que l'auteur a aimées avant ou plutôt (pour reprendre le poète) “À toutes les filles qu'il a aimées avant ”, car il ne s'en cache pas : il aime les femmes jeunes. Qui à son contact semblent basculer dans un vieillissement prématuré. Lorsqu'il baise ses femmes, il devient l'exact contre-pied d'une fontaine de jouvence.

Une lettre ça se mérite. Une lettre d'amour, encore plus. Personne ne semble la mériter aux yeux de l'auteur. À part peut-être lui-même. En reconnaissant des aspects sombres, il dessine les contours d'un personnage dont il prend plaisir à justifier actes et comportements. Finalement, le bouquin aurait aussi bien pu s'appeler “Lettre à la suivante” mais cela paraît moins simple puisque celle-ci appartient déjà au passé.
Lien : https://jecritiquetout.fr/un..
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Une description étonnante des rapports humains, le couple dans ce cas de figure, cru, hard, direct, moix ne prends pas de gants.
il raconte son autre côté de l'amour, le un peu moins glamour, un peu moins rose.
très violent, mais je trouve que c'est en gros réussi
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Lecture fluide que j'ai appréciée. Un petit air de « L'amour dure trois ans » de Frédéric Beigbeder à mon goût, dans l'écriture. de très beaux passages d'amour et d'autres beaucoup plus trash. Au final une simple lettre d'amour.
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Un homme écrit une lettre de rupture à la femme qu'il a aimée.
On retrouve dans cette oeuvre le génie stylistique de l'auteur, sa profondeur d'analyse, ses formules fulgurantes ainsi que la sincérité douloureuse qui est sa patte personnelle.

Voici quelques extraits en vrac :

On perce mieux les mystères de l'univers en finissant clochard dans sa propre venelle que muni de sa carte Visa sur l'Amazone à Belém do Para.

... les larmes, ces poèmes du corps...

Il me fallait du neuf, de la chair inédite, du coccys impénétré, du non encore visité par ma secousse.

Le sexe est chronophage : tandis que l'on s'y livre, on ne lit pas Zola.

Les gens sont plus intelligents seuls.

L'amour est plus méchant que la guerre, puisque la guerre consiste à faire du mal à ceux que l'on n'aime pas.

On pénètre dans le couple par la porte Carmentale, en char fleuri de jasmins sous le patronage ému des nymphes : on s'en évade par le hublot des sanitaires.

L'amour, c'est de l'infini qui se rétracte.

Depuis je suis la tristesse et la grisaille entière. Dans chacune de mes mains, un oursin.

Ma gueule veuve et solitaire qui marche sous les gouttes froides.

Pourtant je préfère "Naissance" à "Une simple lettre d'amour" : ce qui fait pour moi la force de Yann Moix, c'est son extrême vivacité, la profondeur de ses analyses ainsi que sa très grande mobilité imaginative. Là, forcément, le déploiement de ces qualité est limité par l'unicité du thème.

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Curieux de lire cet auteur un peu donneur de leçons dans ces chroniques chez Ardisson ,je m'y suis collé.C'est bien écrit certes mais le personnage me laisse perplexe.Une lettre d'amour qui est en fait une lettre de rupture.
Est-il un romantique exacerbé ou un incroyable misogyne ,difficile à dire!
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Mille fois je me suis dit "quel enfoiré"...et mille fois je me suis dit "comme il a raison".
Paradoxe de lecture, paradoxe de ressenti, paradoxe de vie peut-être?J'aurais sans doute davantage apprécié avec moins de suffisance et de condescendance dans l'écriture...mais, je dois bien le reconnaître, j'ai plutôt apprécié. ("quel enfoiré!")
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Avec Moix, c'est souvent excessif, sans filtres et viscéral. Là, ça parle d'amour, de séparation, de passion, de jalousie et du besoin de la chair et c'est du brutal.

Difficile "d'aimer ou pas", mais il tape souvent juste. Un Godzilla des sentiments, Caterpillar des émotions, la porcelaine de Limoges de grand-maman tremble sur les étagères.
Lien : http://noid.ch/une-simple-le..
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Cette lettre qui commence par « Mon Amour » n'a de lettre d'amour que le nom.

Simple ? Elle ne l'est assurément pas. de figures de style en métaphores, Y. Moix jongle avec les mots peut-être au détriment de l'histoire qu'il tente de raconter. Il l'avoue lui même, lui qui aime tant avouer, cette lettre est l'occasion de faire ses armes. En se dévoilant avec une sincérité (vraiment ?) cash, presque trash, il révèle surtout une très haute estime de lui-même.

Moix est très fier de lui, on ne cessera de le constater dans les multiples références littéraires qu'il distillera sans subtilité tout au long du livre (de Proust à Stendhal en passant par Racine). le mystère est résolu : voilà donc d'où viennent ses questions à rallonge dont il nous fait profiter, nous pauvres incultes, lors de ses interview dans ONPC chaque samedi soir.

Cela dit, moi aussi j'avoue aimer « avouer » et je dois bien admettre que je ne suis pas insensible à ceux qui ont le sens de la formule et de la répartie. Menus plaisirs de l'esprit même si parfois il le révèle à travers des petites piques malheureuses et gratuites à destination de l'être anciennement adulé.

Suite de la critique sur mon blog
Lien : https://lepetitcrayonblog.wo..
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Titre trompeur, Yann Moix fait preuve d'audace, car celui-ci se livre totalement quitte à avoir des reproches.
Il est difficile de décrire ce roman alors même que l'on déteste les propos qui y sont tenus...
Pour autant, ce roman ne laisse pas indifférent.
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Une lettre particulièrement crue sur les rapports humains et ceux qui régissent le couple en particulier.

Une lettre, unique, de rupture et qui signifie de manière claire la fin d'une relation basée sur des simples critères physiques, la désorientation psychologique et sexuelle d'un homme.

Peu encourageant sur le plan humain, un ouvrage déconseillé pour les personnes en phase de doutes ou en période "noire" de leur vie...
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