Le tragi-comique de la colère
Moix aurait-il écrit un grand livre comique ? On aurait pu écrire l'exact inverse en insistant sur les portraits de français victimes des exilés (pour reprendre la terminologie Moixienne), leurs déprédations, leurs agressions et faire pleurer l'autre frange.
Supplanter un problème politique majeur par l'apitoiement individuel est un tour de passe-passe digne des plus grandes prestidigitations sophistiques. Avec un
Gérard Collomb en tête de turc qui en bon bougre de centre gauche fait ce qu'il peut en ménageant la chèvre et le chou.
Cette interminable lettre adressée au président Macron a quelque chose de pathétique comme s'il avait l'espoir qu'un centriste mène la politique de l'extrême gauche la plus libertaire.
Moix révère la clandestinité à l'image d'une vertu romantique que l'on aurait oubliée, en elle-même symbole de sainteté, qui devrait jouir de tous les avantages légaux et qu'on rechigne à leur donner. Mais comme l'a si bien dit le père de
Pagnol, malheureusement, qu'est-ce qu'on est faible quand on est dans son tort.
C'est quasiment une lettre d'insultes, la colère faisant perdre toute lucidité à
Moix, il s'excite piteusement et tente d'apporter ce qu'il croit être des arguments alors qu'il ne s'agit que d'un réquisitoire contre les frontières. Être pro ou anti-migrants peut relever du plus pur instinct. Mais une fois ce stade dépassé arrive la réflexion, la pesée du pour et du contre sur la balance des apports et des désastres que ce soit à court ou à long terme. Réflexion que tente de court-circuiter
Moix avec son petit bout de lorgnette des destins individuels alors qu'elle relève évidemment de la gestion des flux de masse et de leurs conséquences sur la société.
Le monde est complexe et cruel, et la révolution qui devrait nous mener vers un bonheur inconditionnel et universel n'est pas pour demain.
Moix feint de l'oublier et nous propose l'expression d'une utopie juvénile en croisade dont ses artères n'ont plus l'âge.
Pour conclure, malgré ce que j'ai pensé de
Dehors je continuerai à lire
Moix car il poursuit une noble quête que celle de proposer de la pensée, certes le plus souvent délirante, mais il fait l'effort de la maintenir dans des endroits qui lui sont propres et d'une certaine façon radicale. C'est stimulant quels que soient nos avis sur les questions abordées et j'en veux pour preuve la présente critique.
Et puis il y a toujours ses formules à lui que seul son esprit biscornu est capable de délivrer.
Samuel d'Halescourt