Quand on n'a pas la possibilité de lire un texte dans la langue de l'auteure, il faut faire confiance à la traduction.
Après la confiance viennent les remerciements.
Merci donc à
Christine Laferrière de nous faire si bien entendre les contrepoints de
Toni Morrison.
Roman aux multiples voix.
Home ce n'est pas l'histoire d'un retour. Peut être bien plus : celui d'un nouveau départ.
Comment rentrer chez soi, quand nul part vous n'êtes reconnu comme faisant partie prenante de la terre ?
Comment revenir sur ses pas lorsque la fuite est la seule réponse que l'on puisse donner à l'ordre établi ?
De 1873 à 1960, les États Unis d'Amérique ont pensé, géré, institutionnalisé, autorisé la ségrégation raciale.
Un nouvel Ordre établi par les anciens maîtres.
Massacre, lynchage. Égaux mais séparés disait la loi... ?
1950. Franck retourne à Lotus. Chemin faisant,
Toni Morrison égrène le chapelet du calvaire.
Aucun manichéisme, aucun pathos.
La vie était ainsi. Ils ont vécu cela. Ils ont survécu à cela.
Le rythme est là, comme celui d'une porte qui bat sur la galerie d'une maison en bois.
Beaucoup avaient renoncé à l'espoir. Au bout de nul part où peut on espérer aller?
Savoir "qui on est" est une chose, mais ne pas savoir d'où l'on vient sans savoir où aller ?..
Qui sait ce que l'on deviendra quand personne ne sait dire ce qui nous adviendra ?
Cela n'est pas vouer un homme à l'errance, c'est le condamner à la désespérance.
Comment penser poursuivre une route sans l'assurance de ses racines ?
Franck reviendra à Lotus, avec Ceel, sa soeur. Et c'est par la prise de conscience de leur appartenance à une communauté , dans cette reconnaissance, qu'ils trouveront enfin un foyer.
Un terreau assez fort , assez puissant qui leur permettra de se dresser, de se mettre debout.
Des hommes comme des arbres.
Une Amérique telle qu'elle le fut, un monde tel qu'il a été.
Les prémices d'un nouvel ordre dans un pays qui se mit un jour à rêver mais qui n'a pas encore, à ce jour, tout réglé.
Le réalisme d'une langue qui nous dit ceux qu'ils furent et ce que tout cela a été.
Astrid Shriqui Garain