OEuvres III : La Place de l'autre

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Rien n'est pur, et surtout pas ce rapport à l'autre qui est soi. Aussi, en regardant la liste de mes livres, je n'éprouve que gêne : je suis celui qui vit et qui écrira encore malgré "ça", qui écrira à cause de l'insuffisance de ça par rapport à l tentation ambiguë de rejoindre en lui-même le mort qu'il est déjà pour renaître derrière lui. J'ai toujours rêvé de me voir de dos, comme si je pouvais voir ainsi s'éloigner de moi le mort que je suis. J'écris pur cette rencontre et pour lui échapper, car je sais bien que l'identité du vivant et de l'écrivain n'aura lieu qu'une fois, très exactement à l'instant de ma mort, car je mourrai à la fois dans mon corps et sous mon nom. En commençant, je voulais parler des livres que j'avais détruits et des livres dont il me semble que je dois les écrire. Ces livres se ressemblent dans la mesure où les uns n'existent plus et les autres n'existent pas, et sans doute ces deux absences de sens contraire tracent-elles mieux que n'importe quoi la figure que je cherche, que je me cherche.

La matière est le seul pays natal, mais il lui faut prendre une forme. Elle la trouve au "pays" dans la conjugaison d'éléments dont les uns sont visibles et les autres invisibles. Leur action réciproque produit une inscription, dont notre mémoire fait un paysage, des bouffées de mouvement, des scènes avec visages, mais ce que nous voyons, directement ou indirectement, n'est jamais que la lecture qu'à tous moments fait du monde cette nécessité, en nous, de comprendre, qui est aussi notre liberté.