Jusqu'à ce jour je n'ai lu que peu de chose d'Amélie Nothond et parfois j'ai même abandonné la lecture car j'entrai dans un univers qui ne me correspondait pas.
Lors de la rentrée littéraire de Septembre 2017, comme chaque année, le nouveau cru est sorti et là le sujet m'a interpellé : dans les articles, interviews etc.... le sujet me parlait, m'intéressait. Je voulais savoir la façon dont l'auteure avait appréhendé celui-ci, l'avait analysé et transcris.... Et j'ai dévoré, je l'avoue, le livre. Pas très épais, il est vrai, en moins de 24 heures, comme quoi un bon livre ne se calcule pas au nombre de pages mais à la précision des mots, du récit.
Frappe-toi le coeur, C'est là qu'est le génie !
Alfred de Musset
L'histoire se divise en deux parties : la première, la jeunesse de Marie, la mère, la "déesse" (tout est dit), et l'enfance de Diane, sa fille. Très bien abordé et décrit. Tout est plausible, sans démesure, simplement la jalousie ordinaire , dans tous ses actes, pensées, événements, omniprésente dans la vie de Marie sans qu'elle n'en prenne vraiment conscience trop occupée à ne penser qu'à elle. J'ai même été très perturbée pour diverses raisons..... Certaines phrases ont tourné en boucle dans ma tête, me réveillant même en pleine nuit et n'ayant pas d'autres choix que de reprendre le fil de la lecture, pour en savoir plus.
Une mère jalouse de la beauté de sa fille, de l'intérêt qu'elle suscite ! Inimaginable et pourtant. le récit est alerte, vif mais non violent, implacable, finement décrit, subtile. On souffre avec Diane qui quémande l'amour de cette femme froide et indifférente à son existence. On est à la limite de la maltraitance mais on franchit jamais la frontière. Marie est le portrait parfait de l'égocentricité : elle veut être le centre des attentions, des regards, elle a soif de reconnaissance. Son manque de sentiments pour son mari, pour Diane peut révolter, peut faire penser qu'elle est insensible mais non car les naissances suivantes prouverons que de l'amour elle peut en donner et parfois trop.
Avec une narration simple il y a une violence inouïe et je pense que cela peut réveiller chez certaines (et peut être certains mais là il s'agit de la relation mère/fille) des souvenirs enfouis et tus.
Dans la deuxième partie Diane adulte va s'orienter vers la cardiologie, soigner le coeur grâce à un médecin qui va prendre le temps de déceler chez l'enfant le manque, sera confrontée à Olivia, professeur de médecine qui va la vampiriser alors qu'elle espérait une amitié basée sur l'admiration, peut être une mère de substitution, un modèle et qui va se révéler comme quelqu'un de manipulateur et d'intéressé.
Fallait-il qu'elle fut généreuse pour lui suggérer cela
La récit est très bien construit en particulier dans la première partie, ensuite j'ai été surprise, pas de façon désagréable, mais je pensais qu'il y allait avoir une fin de roman orientée sur la revanche de la fille sur la mère, elle y est, mais d'une façon différente à celle qu'on pense et le fait d'avoir imaginé ce personnage d'Olivia, qui va devenir, elle aussi, un sorte de bourreau, source de désillusion pour Diane, d'avoir occulté la mère, surprend et au final redonne de l'élan à l'histoire et ne sombre pas dans le convenu.
Il demeure qu'il est difficile de se construire avec des images féminines si négatives, froides, blessantes. Mais Diane est forte et va se servir de son passé pour se construire avec l'amour de ses grands-parents maternels aimant et très vite interpellés par le comportement de leur fille, ses amies même si parfois elle les délaisse. Sur son chemin il y aura des personnages clés et en particulier Mariel (je ne vous dirai pas qui elle est pour laisser le suspens) mais qui va lui permettre de donner ce qu'elle n'a pas reçu.
Un roman réussit, qui tient en haleine, qui pose l'épineuse relation mère/fille à différents stades de la vie et de tous ses méandres. Une réussite.
"La bêtise, c'est de conclure" a écrit
Flaubert. Cela se vérifiait rarement autant que dans les querelles, où l'on identifiait l'imbécile à son obsession d'avoir le mot de la fin. (p87)
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