Après l'extraordinaire succès (bien mérité) de son "Quinconce",
Charles Palliser, qui bien qu'américain a fait ses études à Oxford avant d'enseigner la littérature en Ecosse, poursuit son exploration de la société victorienne en offrant à ses fidèles lecteurs une histoire à frémir d'horreur ...et de plaisir pour ceux qui sont amateurs d'intrigues alambiquées, de landes désolées, de personnages redoutables ...
Mais quel dommage que l'éditeur présente aussi mal cet ouvrage ! D'abord la modification du titre original "Rustication " qui est un terme désignant l'exclusion d'un élève des universités d'Oxford et Cambridge , donc parfaitement adaptée à la situation du narrateur, en ce titre sans saveur "
Mère et fille " qui sent par trop le "
Femmes et Filles "d'
Elizabeth Gaskell qui exploite un tout autre registre.
Ensuite l'illustration de couverture avec les touches d'une machine à écrire qui peuvent faire croire au lecteur que l'histoire est en fait bien plus contemporaine qu'elle ne l'est réellement !
Ces lourdes maladresses ont peut être contribué à écarter le lectorat francophone d'un roman envoûtant qui distille la perversité au fil des pages avec de beaux retournements de situation et c'est bien dommage !
Quand le jeune Richard exclu de son université, revient au foyer familial, il apprend que son père est mort dans des circonstances bien étranges, que sa famille est ruinée et que sa mère et sa soeur n'ont qu'une idée, c'est de le voir partir . Les deux femmes luttent pour conserver leur position sociale alors que la mort du père les a plongées dans la misère et elles n'ont aucune envie que le jeune homme mette le nez dans leurs affaires !
Aucun amour au sein de cette famille où on se surveille du coin de l'oeil avec malveillance.
Nul ne veut dévoiler les lourds secrets qui cachent les fautes et Richard, le narrateur raconte, au fil de son journal comme il se heurte à la loi du silence et à l'hostilité de son entourage.
Corsetée dans la moralité victorienne, la petite société locale fourmille de commérages malveillants et la pauvreté devient tare à tel point que pour y échapper on est vraiment prêt à tout !
Bien sûr il m'est arrivée d'être agacée par ses questions sans réponse, ses dérobades, ses silences et j'avais hâte de connaître le fin mot de l'histoire.
Je n'ai pas été déçue car si le rythme est un peu lent au début, tout s'accélère par la suite et le final est vraiment éblouissant .
Bien sûr l'histoire est très noire...et mériterait d'être lue au coin du feu, dans une chaumière située sur une lande désolée.