AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782382460948
192 pages
Agullo (25/05/2023)
4.34/5   34 notes
Résumé :
Un portrait saisissant de la Croatie et de la Dalmatie contemporaine en 5 actes.
On découvre à travers ces cinq nouvelles finement ciselées la Croatie d’avant la Guerre de Yougoslavie, mais surtout celle d’après : l’impact qu’elle a eu sur la société ainsi que sur les familles : des frères et des soeurs séparés, des héros de guerre ayant fait de mauvais choix, les deuils, la violence et l’émergence de la corruption…
Mais même face à ces sombres table... >Voir plus
Que lire après Le Collectionneur de serpentsVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (23) Voir plus Ajouter une critique
4,34

sur 34 notes
5
15 avis
4
7 avis
3
1 avis
2
0 avis
1
0 avis
Après le bignami sentimental soutenu par une prose plate,sans intérêt de Postorino alors que je m'apprêtais à lire un auteur sud américain, par pur hasard m'arrive entre les mains le dernier livre de l'écrivain croate Jurica Pavicic , des nouvelles. Et devinez le sujet ? Toujours la guerre en l'ex-Yougoslavie (1991-2001). Bien qu'une seule nouvelle soit entièrement consacrée à la guerre, c'est elle qui y donne le ton. Entre Pavicic et Postorino , un abysse littéraire et historique.Là où Pavicic en quelques phrases brosse avec brio et concision un portrait , une atmosphère, un événement…l'autre se noie dans détails et clichés arrosés de larmes de crocodiles.

Dans ce recueil en cinq actes , Pavicic attaque avec la nouvelle portant le nom du titre, et nous plonge illico dans l'horreur d'une guerre où les valeurs courantes de l'existence changent de donnes. le problème une fois l'horreur accomplie aucune chance de «  rewind »,”Il aurait mieux valu que ce ne soit pas ainsi. Il aurait mieux valu pour lui que la vie puisse faire marche arrière, comme pour une cassette avec la touche rewind, qu'il puisse revenir à ce matin où il est sorti du Puch, pâle comme un protée, recroquevillé, avec ses bras fins et blancs comme ceux d'un violoniste. Mais il n'y a pas de touche rewind dans la vie. Toni ne peut plus ne pas être un meurtrier. Et moi, je ne peux pas ne pas être son complice.”
Au second acte , «  le Tabernacle » , à travers un appartement récupéré par son propriétaire d'origine à la mort du locataire , on entrevoie en quelques pages un aperçu de l'Histoire croate de 1946 à nos jours, avec toujours le suspens en bonus qu'il poursuit dans les trois nouvelles suivantes . Deux frères , l'un policier l'autre qui tourne mal, deux soeurs séparées par la guerre et des frontières qui se disputent un héritage et le dernier génial, un géomètre qui débarque à la frontière Croatie -Bosnie Herzégovine pour mission de mesurer la frontière pour l'emplacement d'un nouveau post- frontière, seront prétextes pour vous emmener dans les dédales de l'Histoire complexe de l'ex- Yougoslavie et de ses habitants.

J'avais beaucoup aimé son premier livre « L'eau rouge », sa prose , son goût pour le suspens qui sous couvert de fiction lui permet superbement de relater la réalité sociale de son pays m'ont encore une fois éblouie. Je le recommande même aux ennemis (es)des nouvelles 😁!
Commenter  J’apprécie          867
J'ai aimé les deux livres précédent de cet auteur.
Alors lorsque j'ai vu qu'il avait sortie ce recueil de nouvelles je me suis précipité dessus pour l'acheter.
J'ai trouvé ses 5 nouvelles très prenante, touchante et triste.
C'est l'image de la Croatie, pendant et après la guerre de Yougoslavie.
Des récits hors du commun qui vous prends aux tripes.
Et je me suis laissé prendre par l'émotion. Je suis attristé par ses personnages hors norme, à la fois héros, fou et abandonné dans leurs souvenirs…

J'y ai découvert un pays ravagé par la peine et qui malgré cette guerre stupide reste remplis d'espoir…

bonne lecture !
Commenter  J’apprécie          500
La nouvelle ne ment pas !

C'est au pied du mur qu'on voit le maçon. Peut-être… C'est dans l'art de la nouvelle qu'on voit l'écrivain. C'est sûr. Car le genre ne peut souffrir l'à peu près, la faute de carre, l'usurpateur. C'est la chambre noire de l'écriture, où l'impératif de concision passe au révélateur les failles. Ou le talent.

Après les fabuleux L'Eau rouge et La Femme du deuxième étage, le Collectionneur de serpents – traduit par Olivier Lannuzel – consacre en cinq nouvelles Jurica Pavičić et l'installe au rang des meilleurs, confirmant au passage l'aptitude d'Agullo à sortir de l'ombre des auteurs européens inconnus du lectorat français.

Dans tous ses textes, le conflit qui déchira la Yougoslavie est omniprésent, frontalement ou en arrière-plan.

C'est cette vie des tranchées dont Pavičić après Jünger, Dorgelès, Weller et tant d'autres, décrit l'horreur et les petits détails et humanités du quotidien, qui permettent de chasser les angoisses de l'attente.

Ce sont les souvenirs et les relents de la guerre qui remontent en fin de journée à l'intérieur du pays croate, quand la bora se lève et fait tourbillonner une terre marquée par la souffrance, les déchirements et les pleurs.

C'est la fatalité des conflits qui passe sur les générations les plus anciennes, mais qui marquent de manière indélébile les plus jeunes, futurs acteurs d'une difficile reconstruction.

Ce sont ces villages croates quasi-abandonnés, cette terre « lie de la lie, le cramé qui est au fond de la poêle, tout ce qui reste parce que ça ne vaut rien. »

Ce sont ces familles à jamais déchirées par la guerre vécue dans des lieux – et donc dans des camps – différents, que même les souvenirs d'une vieille maison de famille ne suffisent pas à resouder.

Ce sont des frontières à redessiner et des crimes anciens à venger.

C'est enfin le Tabernacle, formidable texte d'émotion et d'humanité, maîtrise parfaite de tous les codes de la nouvelle, rappelant avec un brin d'espoir, les liens invisibles et insoupçonnés qui unissent parfois les hommes et les âmes qui autrefois s'opposaient.

Non, la nouvelle ne ment pas et le Collectionneur de serpents vous le prouvera.
Commenter  J’apprécie          322
On ne compte plus les découvertes littéraires enthousiasmantes de la maison d'éditions Agullo nous entraînant aux quatre coins de l'Europe avec une prédisposition marquée pour les auteurs des pays de l'Est et plus particulièrement du côté de la Pologne avec la rencontre et le succès phénoménal de Zygmunt Miloszewski publié chez Mirobole quand Nadège Agullo y travaillait encore en tant qu'éditrice avant de créer l'entreprise à son nom où elle met en valeur les romans policiers de Wojciech Chmielarz, autre romancier polonais reconnu. Peut-être moins visibles, mais pas moins passionnants, en ce qui concerne notamment la littérature noire, il y a eu des escapades dans d'autres contrées comme la Roumanie avec Bogdan Teodorescu, la Slovénie avec Arpad Soltesz et un retour en Pologne avec Magdelana Parys qui séjourne désormais à Berlin tout comme Maryla Szymiczkowa, nom de plume d'un couple d'auteurs gays. Beaucoup plus médiatisée, c'est l'arrivée de Jurica Pavičić, en tant que premier auteur de polar croate traduit en français, qui a suscité un intérêt certain avec L'Eau Rouge (Agullo 2021) vaste panorama de l'histoire contemporaine du pays se déclinant sur un brillant registre de roman choral aux tonalité intimistes récompensé du Prix du polar européen et du Grand prix de littérature policière. Son précédent roman, La Femme du Deuxième Etage publié en 2022 par Agullo, tout aussi remarquable et remarqué d'ailleurs, s'articule autour de l'anatomie d'un fait divers et de la mutation d'une société en suivant le parcours d'une femme purgeant sa peine de prison pour avoir empoisonner un membre de sa famille, avant de s'exiler sur une de ces petites îles que l'on trouve au large de la Croatie. Et puis de manière plus frontale, Jurica Pavičić dépeint les fracas de la guerre de Yougoslavie dans une première nouvelle intitulée le Collectionneur de Serpents donnant son titre au recueil rassemblant quatre autres récits imprégnés des échos de ce conflit fratricide dont les répercussions bouleversent le destin de ces femmes et de ces hommes de l'ordinaire.


Le Collectionneur de Serpents.
En 1992, les combattants se terrent dans des tranchées pour faire face aux soldats monténégrins dans un échange quotidien de tirs et de bombardements. Et puis c'est un jeune garçon qui débarque dans son uniforme trop grand en étant chargé de manipuler des missiles filoguidés antichars. Un peu comme dans jeu vidéo. Mais quand il faut abattre des prisonniers trop encombrants la guerre n'a plus rien d'un jeu.

Le Tabernacle.
Niko a bataillé pendant quinze ans pour récupérer l'appartement dont il était le propriétaire mais dont il ne pouvait avoir l'usufruit car occupé par M. Vujnović, un vétéran de la guerre qui avait obtenu gain de cause devant les tribunaux. Néanmoins, à la mort de ce locataire encombrant, Niko peut désormais entamer les travaux. Mais lors de la rénovation, il découvre une pièce étrange aux allures de sanctuaire.

La Patrouille Sur La Route.
Policier officiant dans la petite localité d'Imotski, Josip Jonjić patrouille non loin de l'Herzégovine en se remémorant ses rapports houleux avec son frère Frane, un ancien soldat qui s'est reconverti dans la contrebande et le trafic de drogue.

La Soeur.
Ne pouvant racheter la part de sa soeur, Margita s'apprête à céder la vieille demeure insulaire de son grand-père à une architecte de Rijeka. En faisant visiter la maison familiale, Margita se remémore les souvenirs avec son aïeul ainsi que tout ce qui la sépare de sa soeur Marija qui vit dans la lointaine Belgrade, devenu un autre pays après la guerre.

Le Héros.
Robert séjourne dans un petit village situé non loin de l'Herzégovine. En tant que géomètre, il est chargé de mesurer la frontière en vue du nouveau poste-frontière que l'on va bâtir dans le cadre des accords Schengen. Mais tandis qu'il parcourt la région, Robert semble être à la recherche de quelque chose … ou de quelqu'un.


Il faut bien avouer que l'on reste, une fois encore, complètement saisi par la maîtrise de l'écriture du Jurica Pavičić parvenant à restituer d'une manière magistrale les affres de la guerre de Yougoslavie au détour de ces cinq nouvelles composant le Collectionneur de Serpents où l'on passe de l'atrocité "ordinaire" des champs de bataille, en s'attardant sur les rancoeurs qui en découlent au sein des familles, pour s'achever sur une espèce de solde de tout compte en traquant ceux qui se sont livrés au pires exactions durant cette période tragique. Et sans grandiloquence, sans excès, l'auteur décline cette tragédie dans la banalité d'un quotidien que les événements de l'histoire bouscule plus ou moins soudainement comme en témoigne ces hommes mobilisés intégrant le front en quelques jours à peine, pour faire face aux assauts de l'ennemi tout en perdant pied, peu à peu, dans le fracas des combats. On devine ainsi cette dichotomie entre la vie journalière et l'impact de la guerre dont on perçoit la douleur insidieuse qui laboure le coeur des membres de ces communautés s'accommodant tant bien que mal aux nouvelles frontières qui se sont dessinées. Sur des registres bien différents et toujours avec cette sobriété caractérisant l'auteur, on ressent également cette somme de regrets et de tristesse émanant de l'ensemble des personnages traversant les différentes nouvelles qui semblent se télescoper les unes les autres, au détour d'un assemblage élaboré avec une indéniable habilité nous permettant d'assimiler l'intégralité des incidences de cette guerre qui va déchirer et dissoudre des familles entières. Mais au delà de la tragédie, on retrouve, dans le Collectionneur de Serpents, cette humanité et cette lueur d'espoir émergeant en filigrane au sein de cette atmosphère méditerranéenne si caractéristique imprégnant ces cinq récits bouleversants où l'ombre côtoie la lumière dans un agencement narratif d'une remarquable intensité.


Jurica Pavičić : le Collectionneur de Serpents (2008 : Skupljać zmija,Patrola na cesti - 2013 :Tabernakul, Heroj, Sestra). Editions Agullo Court 2023. Traduit du croate par Olivier Lannuzel.

A lire en écoutant : Ista Slika de Darko Rundek. Album : Ruke (Remastered 2022). 2022 Menart.
Lien : http://www.monromannoiretbie..
Commenter  J’apprécie          140
Ce jeudi 25 mai, les Éditions Agullo publient le troisième titre de celui qui est devenu l'un de leurs auteurs phares et multiprimé, Jurica Pavičic. Après la toute première publication de l'écrivain croate, devenu un best-seller, L'eau rouge, puis son second roman publié en septembre dernier, La femme du deuxième étage, l'auteur croate revient avec un recueil de cinq longues nouvelles, réunies et publiées dans la collection Agullo court. Alors que dans les deux ouvrages précédents abordaient le thème de la guerre de façon plus subsidiaire, c'est de front qu'il reprend le sujet dans chacune de ces nouvelles, avec beaucoup de réussite. 

Les cinq nouvelles sont les suivantes : Le collectionneur de serpents, Le tabernacle, La patrouille sur la route, La soeur, Le héros. Chacune orchestre un protagoniste différent, trois d'entre elles ont un soldat pour narrateur, un individu parmi d'autres qui se fait/s'est fait enrôler dans ce qu'ils nomment la guerre patriotique, et que l'on connaît par-delà nos frontières sous le nom de guerre de Yougoslavie. Tous sont réduits à l'état de pions sur le damier du nationalisme et de conflits ethniques, dont ils ne comprennent ni les enjeux, ni la finalité. Les premières choses auxquelles ils sont confrontés, c'est la terre, la boue, puis dans le sang, dans lesquels ils évoluent jour après jour, sans aucune vision à court ou moyen terme. Le bruit des mortiers. Les visages des ennemis, si étrangement le reflet de leur propre visage, des garçons avec lesquels ils auraient partagé une bière ou un café, dans une autre vie, seulement quelques années plus tôt. Jurica Pavičic plonge dans la boue à leurs côtés, les descriptions de chacun des soldats qui côtoient les successifs narrateurs constituent un panorama complet sur la façon dont cela a été vécu par certains des principaux concernés, les hommes envoyés sur le front d'un conflit qui ne fait pas vraiment sens à titre personnel et auxquels on demande de défendre leur ligne de front au prix de leur vie. Des bras et des jambes, pour porter armes de poing, munitions et uniformes, parce qu'on ne leur demande rien d'autre que de combattre, la réflexion est réservée à ceux qui mitraillent leurs ordres de plus haut. L'important, c'est de survivre. Car le premier instinct, c'est celui de préserver leur peau, de supporter cette position où les nerfs sont constamment à vif, de retrouver un semblant de sens au milieu de deux embuscades, de deux rafales de tirs, de se reconstruire un semblant de vie, un semblant d'ordre au milieu du chaos, et de la mort qui rode. Et celui qui se met à collectionner les peaux de serpents, dans l'attente du combat, d'une attaque, donner un semblant d'ordre à ce qui reste de sa vie.


Il n'y a pas une seule nouvelle qui m'ait laissée indifférente, la première m'a touchée car elle retrace la métamorphose subite d'un jeune homme, sortant à peine des pénates de sa mère, en apprentissage de sa nouvelle fonction, en un stout frais soldat grâce à une paire de bottes et un ceinturon, à triturer une arme alors même qu'il serait plus enclin à prendre sa place au bureau de l'une des classes qui les abrite, à apprendre le manque de sommeil, le froid, l'attente interminable, l'ennui. L'impression de voir des grands enfants jouer à la guerre jusqu'à ce que la réalité les rattrape froidement et les confronte à l'ennemi, ici en l'occurrence, les Monténégrins, et aux pires exactions auxquelles l'état de guerre les pousse.

Les cinq nouvelles ne sont pas agencées de façon forcément chronologique, mais leur disposition a un sens : alors que la première surprend les apprentis soldats dont fait partie Dino tout juste au début de la guerre, la dernière, Le héros, l'une de mes préférées, s'inscrit dans l'après-guerre, souvenirs et plaies encore frais et suintants. Avec Robert, ancien soldat de l'ultime nouvelle, dont les activités clandestines proposent finalement une réflexion assez pertinente sur le degré de responsabilité de chacun. On assiste à la métamorphose de ces jeunes garçons, à l'esprit et l'âme vierges, transformés en arme de guerre, ces souvenirs des visages livides et des regards vides de leur alter ego monténégrins morts, des hommes qui se sentiront continuellement à côté de la plaque. De ceux qui ont continué à vivre et profiter, inconscients de ce qui se jouait à quelques centaines de kilomètres d'eux, dans le creux d'une Yougoslavie en train de disloquer. Et d'hommes, enfin, qui semblent avoir perdu tout sens de l'équité, avec une envie de justice aveugle et sans concession.

Les civils ne sont pas épargnés, ceux-ci qui vivent la fin du communisme, et se retrouvent face à un monde nouveau, face aux secrets mis à jour. La deuxième nouvelle, le Tabernacle, narre la réattribution d'un appartement, dont une partie était occupé par un homme étranger : cette nouvelle qui reconstitue en quelque sorte une guerre miniature, avec ces espions, ces no mans land, ces territoires ennemis, ces endroits illicites tenus secret. La guerre du front, du bord des tranchées, la guerre à l'arrière, ou les vivres se font rarissimes et contraignent tout à chacun à se débrouiller et survivre. La patrouille sur la route explore la dissolution d'une famille, dans laquelle la guerre a fait irruption et a pris avec elle son dû. L'art de l'allégorie de Jurica Pavičic est à son apogée dans ces conflits fraternels qui déchirent les familles, l'un et l'autre d'un côté et de l'autre de la légalité, une soeur en Croatie, l'autre en Serbie. La guerre s'immisce dans ces familles yougoslaves dont les membres habitaient aux quatre coins du pays et scelle un sort à leurs relations. 

L'auteur a composé des nouvelles qui permettent de cerner une vision de cette guerre patriotique, du côté croate, ses ravages sur la population, sur l'évolution de cette société, où le conflit armé a davantage ancré la violence, patriarcale, dans les normes : à peine vingt cinq ans plus tard, on y apprend que la violence domestique est implicitement tolérée. Et le temps de la reconstruction et de la résilience, celui de la paix, de la normalité et sérénité. D'une Croatie dalmate, parfois istrienne du côté de Rijeka, d'un territoire croate avant et après guerre qui se retrouve réunifiée autour des mêmes expériences, blessures, une Croatie moderne aux vagues de touristes qui débarquent régulièrement sur ses côtes et qui ne sont pas sans rappeler L'eau rouge.  

La dernière nouvelle du recueil, Le Héros, ma préférée, présente un homme, géomètre de son état, qui rejoint un village isolé à la frontière croato-bosnienne (matérialisée pour un pan par la fameuse rivière de l'Una) pour, a priori, y effectuer des mesures. Mais c'est un ancien général croate de brigade qu'il vient dénicher, un criminel de guerre, un assassin, un auteur de massacres. Comme un ultime affrontement, un jugement rendu sans Cour pénale internationale, un ultime affrontement où la culpabilité est renvoyée d'une partie à l'autre, accusateur contre criminel jugé, à l'instar d'une balle de tennis enflammée, une culpabilité corrosive que personne ne souhaite endosser. Cet ultime texte pose la question insoluble de la responsabilité individuelle, et collective, au-delà même de celui qui a agi, l'homme qui endossera de façon systématique la faute, mais celui qui a vu et laissé faire. 

Les Éditions Agullo ont débuté leur année 2023 avec Le livre de l'Una du bosnien Faruk Šehić, qui nous a mis le nez dans cette guerre de Yougoslavie, ce recueil de nouvelles avec l'auteur croate établit comme une sorte de prolongement avec, cette fois-ci, une vision qui se place de l'autre côté de l'Herzégovine. 
Lien : https://tempsdelectureblog.w..
Commenter  J’apprécie          50


critiques presse (2)
LeMonde
26 juin 2023
D’un trait de plume et avec vivacité, Jurica Pavicic a notamment l’art de choisir un ou deux détails parlants, de brosser avec brio et concision un portrait en quelques lignes. Dire tant de choses en si peu de mots est un don rare dont il fait, une fois de plus, un usage admirable.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Liberation
12 juin 2023
Cinq nouvelles d’un auteur né à Split en 1965, connu en France pour ses polars, dont l’Eau rouge, grand prix de littérature policière en 2021.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
Chez nous, les gens sont comme ils sont – ils aiment se mêler des affaires des autres. Ils guignent dans les cours, surveillent les arbres fruitiers, les vignes et les porte-monnaie. Ça les intéresse de savoir qui a combien, qui est brouillé avec qui, à quel prix tu as vendu une guimbarde ou un champ, combien tu as gagné en Allemagne et comment est ton nouveau gendre. Ils vont reluquer par-dessus ton épaule pour voir comment tu entretiens ton jardin, pour qui tu as voté et ce que tu as cuisiné. Mais il y a une chose dont ils ne se mêlent pas – c’est si tu cognes ta femme.
Commenter  J’apprécie          322
C'était une nuit sans lune, le village était noir et la voûte étoilée étincelait. Robert contemplait la Voie lactée, Orion, la Grande Ourse, la grosse et opulente Vénus, prenant soudain conscience qu'il n'avait pas vu pareil firmament depuis bien longtemps. Le ciel ressemblait à cela pendant la guerre, pensa-t-il. Pendant la guerre, au milieu de l'été, quand l'électricité était coupée. En bas, sur terre, c'était la nuit noire, mais le ciel étincelait, indifférent à la misère humaine.

Le héros
Commenter  J’apprécie          120
La tranchée sous le chêne n'a plus servi à rien. Elle est restée là, comme un mémorial d'une guerre lointaine et stupide. Elle est peut-être toujours là, très certainement pleine de feuilles mortes, moins profonde car elle se sera remplie de terre. Je doute que quelqu'un l'ait comblée : les cicatrices des gens ici ont déjà du mal à guérir, qui donc se préoccuperait de soigner celles de la terre ?

le collectionneur de serpents
Commenter  J’apprécie          130
Il ne distinguait dans la pénombre que la lueur des bougies, des lumignons et des lanternes à pile. Il alluma la lumière et le tabernacle se déploya sous ses yeux – les fleurs, les rubans, les sacs en plastique et les yeux, une multitude d'yeux enfantins qui le fixaient comme des épingles.

le tabernacle
Commenter  J’apprécie          180
𝘓𝘦𝘴 𝘤𝘪𝘤𝘢𝘵𝘳𝘪𝘤𝘦𝘴 𝘥𝘦𝘴 𝘨𝘦𝘯𝘴 𝘪𝘤𝘪 𝘰𝘯𝘵 𝘥𝘶 𝘮𝘢𝘭 𝘢̀ 𝘨𝘶𝘦́𝘳𝘪𝘳, 𝘲𝘶𝘪 𝘥𝘰𝘯𝘤 𝘴𝘦 𝘱𝘳𝘦́𝘰𝘤𝘤𝘶𝘱𝘦𝘳𝘢𝘪𝘵 𝘥𝘦 𝘴𝘰𝘪𝘨𝘯𝘦𝘳 𝘤𝘦𝘭𝘭𝘦𝘴 𝘥𝘦 𝘭𝘢 𝘵𝘦𝘳𝘳𝘦?
Commenter  J’apprécie          30

Videos de Jurica Pavicic (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jurica Pavicic
Une belle soirée de partage autour des coups de coeur de nos libraires ! Ci-dessous les romans présentés :
- La nuit des pères, Gaëlle Josse, Notablia - Les enfants endormis, Anthony Passeron, Globe - Chien 51, Laurent Gaudé, Actes Sud - L'odyssée de Sven, Nathaniel Ian Miller, Buchet Chastel - Qui sait, Pauline Delabroy-Allard, Gallimard - Biche, Mona Messine, Livres Agités - La mémoire de l'eau, Miranda Cowley Heller, Les Presses de la Cité - Chouette, Claire Oshetsky, Phébus - le goûter du lion, Ogawa Ito, Picquier - Que reviennent ceux qui sont loin, Pierre Adrian, Gallimard - La femme du deuxième étage, Jurica Pavicic, Agullo - Un profond sommeil, Tiffany Quay Tyson, Sonatine - On était des loups, Sandrine Collette, JC Lattès - Hors la loi, Anna North, Stock - Frankenstein et Cléopâtre, Coco Mellors, éditions Anne Carrière - Les marins ne savent pas nager, Dominique Scali, La Peuplade - L'été où tout a fondu, Tiffany McDaniel, Gallmeister - Fantaisies guérillères, Guillaume Lebrun, Christian Bourgois - Trois soeurs, Laura Poggioli, L'Iconoclaste
+ Lire la suite
autres livres classés : littérature croateVoir plus
Les plus populaires : Littérature étrangère Voir plus


Lecteurs (101) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (6 - polars et thrillers )

Roger-Jon Ellory : " **** le silence"

seul
profond
terrible
intense

20 questions
2864 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , thriller , romans policiers et polarsCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..