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4,15

sur 545 notes
Dire que j'ai apprécié Et soudain, la liberté paraît bien faible au regard des trois petits jours qu'il m'a fallu seulement pour dévorer ses près de 450 pages et de l'émotion qu'il a fait naître en moi.

Je ne connaissais pas du tout Evelyne Pisier. Pourtant, grâce à la plume délicate de Caroline Laurent, je me suis immédiatement sentie proche de cette femme. de cette femme et de sa mère, avec laquelle elle entretenait une relation fusionnelle.
Et c'est sans doute la force de ce récit, que de conjuguer deux personnalités qui vont se révéler et cheminer côte à côte pour s'émanciper de tout ce que leur milieu et leur éducation avaient imprimé en elles.

Evelyne - alias Lucie, dans le roman - est née en 1941 à Hanoï. Son père était un haut fonctionnaire de l'administration française, pétainiste, maurrassien, antisémite, convaincu de la supériorité de la race blanche. Pour un tel homme, les femmes n'ont d'autre rôle que celui de seconder leur époux et d'élever les enfants. Mais de petite fille avide de susciter la fierté de son père, Lucie va devenir une adolescente, puis une jeune femme en rupture avec son milieu, soutenue en cela par sa mère, qui va elle-même accomplir un chemin comparable vers l'indépendance, un chemin ouvert par quelques rencontres décisives, mais surtout par une lecture qui ne l'est pas moins, celle De Beauvoir, qui laissera en elle une trace indélébile.
La relation qui unit les deux femmes m'a paru magnifique tant, au-delà de l'amour mutuel qu'elles se portent, elles puisent l'une chez l'autre une force et une énergie hors du commun. Chacune pousse l'autre à dépasser ses propres préjugés et ses seules émotions pour évaluer chaque situation avec intelligence. Elles sont dans un échange dynamique et permanent qui les aide mutuellement à tracer leur voie. le contexte historique de l'après-guerre, du colonialisme, puis des années post-soixante-huit n'est pas neutre, et ces deux figures solaires apparaissent comme une incarnation des combats féministes du siècle passé, ceux qui furent livrés au sein de la famille comme au sein de la société.

Mais la dimension supplémentaire, et qui n'est pas la moindre, est celle qu'apporte Caroline Laurent, jeune femme à peine trentenaire qui devait être l'éditrice du livre. de sa rencontre avec Evelyne, de leurs échanges autour du manuscrit est née une amitié fulgurante, vive et intense. Et lorsque Evelyne tombe malade, elle fait promettre à Caroline d'aller au bout de ce travail d'écriture. Une lourde responsabilité qu'elle assumera après la mort d'Evelyne, malgré le chagrin et le vertige donné par une telle tâche.
Chez l'éditrice, comme chez tout lecteur, ce qu'évoque l'auteur fait écho à sa propre expérience. Or, plutôt que de s'effacer pour tenter de retrouver la voix d'Evelyne – ce qui aurait sans doute été vain – elle choisit d'apparaître dans la lumière et n'hésite pas à faire état de la manière dont elle reçoit ce témoignage depuis son histoire personnelle et l'époque qui est la sienne.
Sans jamais outrepasser son rôle, par petites touches, elle ponctue le récit de ses appréciations, fait part de ses doutes dans la manière d'appréhender le texte, de ses questionnements sur son travail d'éditrice glissant vers celui d'auteur. Elle dit en passant son amour de la littérature et de son métier. Ce sont ainsi non pas deux, mais trois voix qui se font entendre, trois générations qui se rencontrent et se répondent dans ce texte plein de sensibilité. Cela lui confère une profondeur de champ, qu'il n'aurait peut-être pas eue sans cela. Ce lien ainsi établi entre les générations est aussi, me semble-t-il, ce qui nous rapproche, nous lectrices de 2017, de ces deux femmes appartenant à une époque à bien des égards différente de la nôtre. Mais comme on le voit si bien aujourd'hui, la lutte est loin d'être terminée, et les femmes ont encore quelques batailles à mener pour conquérir un statut égal à celui des hommes.
Lien : https://delphine-olympe.blog..
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Encore une fois je remercie le comité de lecture de Cultura qui m'a permis de découvrir ce roman. le mélange de biographie (parfois romancée) et de combat féministe m'a de suite attiré. Et je suis ravie puisque ce roman a été un véritable coup de coeur ! J'ai de suite accroché à cette histoire, celle d'Évelyne, de sa mère. Une façon de traverser l'Histoire par le biais de deux femmes, leurs ambitions, leurs espoirs, leurs combats. J'ai aimé apprendre à les connaitre, comprendre leurs choix et suivre leur quotidien.

Comme je le disais, cette histoire est une biographie sans en être vraiment une puisque Évelyne raconte son histoire tout en ayant enjolivé certaines choses, passé d'autres sous silence, et ce de manière volontaire (en commençant par des changements dans les prénoms des personnages). Son but n'étant pas de relater simplement sa vie mais de décrire un combat pour la liberté. Au fil de l'histoire, on comprend d'ailleurs où elle veut en venir, quel est son message et c'est ce qui m'a tant plu.

Dans la première partie du roman, j'ai beaucoup apprécié le caractère de la jeune Lucie, ses réflexions par rapport à ce qu'elle vit (la colonisation, la guerre, l'antisémitisme). C'est intéressant de découvrir les questions et raisonnement d'une petite fille qui ne comprend pas pourquoi les personnes de couleurs sont inférieures à elle, pourquoi il ne faut pas se lier d'amitié avec une personne juive, pourquoi on lui apprend que la famille est une valeur importante alors que sa nourrice n'a pas le droit de passer du temps avec la sienne. On retrouve ainsi toute l'innocence de l'enfance confronté aux moeurs de l'époque. C'est alors intéressant de voir les mentalités du milieu du XXe siècle avec notre recul, ainsi que les tentatives de compréhension d'une enfant. La seconde partie du roman nous révèle une Évelyne qui grandit, évolue, apprend à faire ses propre choix et réflexions en rapport avec son vécu, son passé. Et j'ai adoré son évolution avec un tempérament qui n'était pas forcément bien perçu à une époque où les femmes n'avaient pas le même statut qu'aujourd'hui.

Même si le roman est écrit par Lucie (Évelyne), il traite également de sa mère, Mona. J'ai adoré suivre son parcours, d'épouse amoureuse et dévouée à femme indépendante qui s'assume malgré les regards désobligeants. J'étais curieuse de savoir quel serait le déclic de ce changement et quelles en seraient les conséquences. Nous avons ainsi les destins de deux femmes, une mère et sa fille qui n'hésitent pas à se battre pour des valeurs qu'elles estiment justes. Qui n'hésitent pas à aller à l'encontre de l'opinion publique et à clamer haut et fort leur féminisme. J'ai adoré !

Concernant la structure du roman, j'ai beaucoup apprécié les quelques mots de l'éditrice à chaque début de chapitre. Ils nous permettent de comprendre les difficultés liées à la fabrication du roman suite au décès de son auteure, les questions que l'éditrice s'est posée et sa peur de ne pas être à la hauteur. Elle en profite également pour faire le parallèle avec sa propre histoire avec des anecdotes qui m'ont souvent touchée. J'ai trouvé ces passages intéressants, ils apportent un petit plus au roman.

J'ai donc pris beaucoup de plaisir à la lecture de ce roman avec ces destins qui m'ont touché, révolté ou ému. C'est un roman que je conseillerais sans hésiter !!
Lien : https://dreamingwithboooks.w..
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* coup de coeur *

Second coup de coeur de la rentrée littéraire avec Et soudain, la liberté.
(Pour rappel le premier coup de coeur est pour le roman de Martin Diwo « Pour te perdre un peu moins » dont mon avis est déjà en ligne : voir ici)
Je ne connaissais pas du tout Evelyne Pisier avant de lire ce roman qui oscille entre biographie romancée et entretien/mémoire.
Quel magnifique roman, hommage à cette grande femme, quelle magnifique écriture de Caroline Laurent.

Caroline Laurent reçoit un jour un manuscrit, c'est celui de Evelyne Pisier, elle désire « raconter l'histoire de sa mère et à travers elle la sienne, une histoire fascinante qui couvrait 60 ans de vie politique, de combats, d'amour et de drames (...) »

Pari réussi, j'ai adoré suivre ces 2 femmes et en miroir l'histoire de la mère de Caroline Laurent. Même si celle-ci n'apparaît que peu dans le roman et que j'aurais aimé en savoir plus c'est un très bel hommage que l'auteure, Caroline Laurent, rend à ces 2 femmes, l'une l'amie rencontrée grâce au manuscrit, Evelyne Pisier, l'autre sa mère.

Ce roman est passionnant à plus d'un titre, pour son côté historique, 60 années si riche en faits et personnages célèbres, et pour son côté féministe.
Quelle femme passionnante Evelyne Pisier devait être. Et tellement intelligente aussi, elle que son père ne prédestinait qu'à être épouse lui a fait à beau pied de nez.
J'ai vu qu'elle avait écrit des romans, je pense les lire.
Revenons à Et Soudain, la liberté.

Le livre commence en Indochine, aujourd'hui Vietnam, la petite Lucie fête ses 7 ans, combien elle est fière d'avoir atteint l'âge de raison, oui, mais la petite est très attachée à Tibai, sa nounou, son père un être profondément raciste, partisan du gouvernement de Vichy, il est en poste là-bas jusqu'à ce que la révolution commence.
Mona la mère de Lucie, au début du roman est conforme à ce qu'on attend d'une femme à cette époque, elle soutient son mari, quoi qu'il dise ou fasse : il a raison.
Au fur et à mesure et surtout grâce à la lecture de « le deuxième sexe » de Simone de Beauvoir elle va s'émanciper, d'abord en portant simplement un pantalon d'équitation puis en passant son permis.
Mona veut que sa fille, Lucie, puisse faire des études, ne pas seulement être une épouse, elle lui interdit d'ailleurs de faire la cuisine et de faire son lit.
Lucie qui au départ voit son père comme un héros, en grandissant comprend tous les enjeux politiques derrière les colonies, elle aussi commence à se révolter.
La petite Lucie devenue adulte sera une fervente militante avec sa mère pour toutes sortes de causes, mais surtout les droits des femmes.

J'ai adoré suivre d'un côté l'évolution des moeurs de Mona, pas simple à cette époque de divorcer surtout qu'elle éprouve encore le besoin du regard des hommes, elle a besoin d'être aimée, et en parallèle suivre Lucie (en réalité Evelyne Pisier) sur 60 ans.
La partie à Hanoï est à la fois tendre, sa relation avec Tibai est belle, et dure, je ne savais pas du tout que les Françaises avaient été internées dans des camps, en fait en lisant ce roman je me suis rendu compte que, la passionnée d'histoire que je suis, a encore beaucoup à apprendre.
Après Hanoï, ce sera le départ pour Nouméa, le nouveau poste de son père.
J'ai vraiment détesté ce personnage, quel être infect, sûr de ses idées et ceux qui n'y croient pas sont pour lui des êtres dénués d'intérêt.
Je ne peux vous raconter tous les différents voyages de Lucie, je vous gâcherai une grande partie du roman.

Sachez que côté historique vous lirez la révolte en Indochine, les bombes à Hiroshima et Nagasaki, la colonisation et l'abus de ses « blancs » tout puissants, la récolte du caoutchouc pour une certaine entreprise Michelin, on vous parlera de Hô Chi Minh, de la correspondance et du lien qui unissait Lucie avec Fidel Castro, du docteur Vallejo, de Che Guevara et de son assassinat, du communisme, de Ferré et Mouloudji, de Regis Debray, de mai 68, du Printemps de Prague, Tito en Yougoslavie, l'URSS, etc.

À côté de ce côté historique dense et passionnant vécut par ces 2 femmes, Mona et Lucie, il y a les combats qu'elles mènent toutes 2 : l'émancipation de la femme, le droit à l'avortement, le droit à la contraception, la décolonisation, le bras de fer qu'elles doivent faire contre cette société patriarcale.
Ce sont 2 femmes passionnées, Mona vit un peu à travers Lucie certains combats qu'elle aurait voulu mener (notamment les études qu'elle a dû abandonner), mais est quand même très active sur le terrain.
Lucie rejette toutes les idées que son père, son héros de l'enfance, lui a inculquées, elle rejette en masse ses pensées, elle soutiendra activement les idéaux communistes, partira à Cuba soutenir la révolution, manifestera contre la guerre du Vietnam tout en continuant l'émancipation de la femme que cela soit du côté culturel, intellectuel ou sexuel.
Mona embrassera la cause homosexuelle, elle aidera les malades du sida, elle militera aussi dans les plannings familiaux.
Ce sont des femmes, des égaux de l'homme.
Il faut se rappeler que ces faits se sont déroulés à partir des années 50 pour comprendre combien ces 2 femmes étaient inspirantes (et le sont toujours à mes yeux) et inspirées, en 60 ans combien la condition féministe à évolué.

Du côté de l'écriture j'ai tout simplement adoré, autant les parties sur Lucie que les parties où l'auteure Caroline Laurent nous parle de sa peur d'échouer à faire de ce livre ce que Évelyne voulait qu'il soit, des nuits blanches qu'elle a passées à écrire, elle nous parle de son enfance et sa mère mauricienne, de la couleur de leurs peaux pas identiques et qu'on ait pu mettre en doute leur filiation.
Je peux la rassurer, pari réussi, j'ai compris et aimé Mona et Lucie, Lucie m'a passionnée et je ne compte pas à en rester là, j'ai besoin de lire encore et de comprendre cette femme tellement intelligente, qui, je pense, m'aurait beaucoup impressionné si je l'avais rencontrée et qui a l'air d'une telle simplicité. Je voudrais aussi dire à Caroline Laurent que je suis certaine qu'Évelyne est totalement d'accord avec les libertés prises pour certains faits ou intervenants.
On ressent la profonde amitié qui a lié les 2 auteures ainsi que le profond respect de Caroline Laurent pour Evelyne Pisier.

Je suis frustrée de ne pas arriver à mettre en mots la beauté et la richesse de ce livre, lisez-le, vraiment, autant pour les passionnés d'histoire que pour le féminisme à ses débuts, l'évolution de notre société, les moeurs de l'époque, les voyages de Saigon, Hanoï, Nouméa, Cuba, et tellement plus le tout porté par la magnifique écriture de Caroline Laurent.


En 2013 j'avais lu Z le roman de Zelda qui fut un coup de coeur, j'ai le même ressenti ici, j'aime les romans où l'on nous parle de femmes fortes qui sont nos contemporaines et, qui, ont très certainement influencé une partie de nos vies actuelles.
Lien : http://luciebook.blogspot.be..
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Je ne savais pas trop comment aborder ce livre. Disons que j'étais gênée par le mélange des genres. Ce qui me tracassait le plus c'était de savoir si la volonté de l'autrice avait bien été respectée. Après tout, c'est si facile de faire parler les morts et de leur prêter des intentions qu'ils n'ont jamais eu (souvenirs de ces interminables explications de textes plus rocambolesques les unes que les autres au collège). Comment savoir ? Comment transmettre, même avec toute la meilleure volonté du monde, sans trahir ? C'est avec toutes ces questions (entre autres) que je me suis plongée dans ce roman et juste… WOW.

WOW parce que ce livre, avant d'être le roman inachevé d'Évelyne Pisier, est surtout un incroyable témoignage d'amitié. Une de ces rencontres qui compte et qui comptera pour toujours. le début de l'histoire lui même est romanesque. Évelyne est morte, son roman inachevé, presque mort lui aussi. Mais c'est sans compter cette promesse qui la lie avec son éditrice (j'ai envie de dire son amie). Évelyne transmet à Caroline le flambeau et c'est à elle de combler les trous, instiller les souvenirs et anecdotes dans le texte, ajouter, retirer, écrémer. Faire un travail d'orfèvre, « mettre à nouveau les mains dans le cambouis » tout en se laissant porter par la confiance que son amie a placé en elle.

On sent que la démarche est sincère de par les incises, au gré des chapitres, de l'éditrice, qui nous explique finalement ses choix, qui tente de dire comment, au-delà d'un simple projet, cette histoire a trouvé un écho avec sa propre histoire. Pourquoi ce livre était si important pour elles.

Cette histoire est donc double. C'est d'abord celle d'Evelyne Pisier qui raconte son histoire et celle de sa mère (les noms des personnages ont été changés), des années 40 à aujourd'hui. le contexte historique est loin d'être anecdotique. La seconde guerre mondiale, la décolonisation, les premiers mouvements féministes. On a tous étudié ça à l'école mais peut-être pas sous cet angle. La guerre, les déchirures, Mona et sa fille Lucie (aka Evelyne) l'auront vécue de l'autre côté du globe : En Indochine dans les années 40, à Nouméa, en France et à Cuba.

L'horreur des camps, le racisme et l'idéologie nauséabonde de son mari… Mona aura tout traversé, tout supporté tant bien que mal parce qu'il faut bien survivre jusqu'au jour où elle fait une rencontre qui va changer sa vie. Celle d'un livre : « le deuxième sexe » de Simone de Beauvoir. Et là tout bascule. Mona va peu à peu s'émanciper et s'éprendre de liberté. Elle se donne le permis de vivre en tant que femme, qu'individu qui peut faire ses propres choix. Sa fille, Lucie, toute jeune encore, tiraillée entre le besoin de plaire à son père et celui de comprendre, se laisse quant à elle entrainer par sa curiosité. Elle pose des questions, s'interroge, s'indigne, toujours la tête haute, comme Mona. Sa mère ira en enfer parce qu'elle veut divorcer ? Et bien « On va faire comme si Dieu n'existait pas ».

On va faire comme si et on va se créer le monde dans lequel on a envie de vivre. Ça sera peut-être le leitmotiv de Lucie. de Nouméa à ses études de droit, dans ses voyages à Cuba où elle rencontrera Castro, l'homme, le charismatique, pas le politique, elle s'affirmera, elle aussi. le destin se jouera encore une fois, avec sa mère comme spectatrice qui ne veut pas qu'elle fasse la cuisine et qui insiste pour qu'elle persévère dans ses études et gagne son indépendance.

*

J'ai été touchée par ces portraits de femmes, si différentes mais si semblables qui ont su traverser les épreuves et vivre comme elles l'entendaient. Véritable récit porteur d'espoir. C'est toutefois un livre qui prend une toute autre dimension lorsque l'on y rajoute la patte de l'éditrice qui, elle aussi, nous raconte sa propre histoire en parallèle à celle d'Evelyne. On voit presque ce roman finalement comme un « work in progress » et en le refermant on se dit (ou plutôt je me dis, mes propos n'engagent que moi) que ce format là, ces incises de l'éditrice, c'est ce petit plus qui fait que ce livre est autre chose qu'un témoignage d'une époque et du combat des femmes. C'est une histoire d'amitié, de promesse et finalement peu importe que ce soit romancé. Peu importe parce que cette histoire est vraie, même si elle emprunte le chemin de l'imagination.

Critique complète sur le blog
Lien : https://lepetitcrayonblog.wo..
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Ce livre, qu'un ami m'avait offert, m'a attendu quelques mois sur ma haute pile de "bouquins" car je craignais une énième biographie d'une femme issue d'une famille d'intellos, bobos parisiens un peu "m'as tu vu"! Et bien, je dois admettre que globalement, je me suis trompée. Dès les 1ères pages tournées, Caroline Laurent (dont j'avais adoré "rivage de la colère") m'a cueillie. J'ai pris un réel plaisir à découvrir la vie romanesque de cette famille Pisier. Elle méritait vraiment un roman. L'évocation des années passées en Indochine et l'épisode dans le camps de concentration à Hanoï en 45, où la mère et sa fille furent emprisonnées par les japonnais, m'a vraiment interpellé. C'était la 1ere fois que j'entendais parler de ce fait d'histoire. Les autres pages de leur vie sont tout aussi bluffantes : leur vie au Vietnam, à Nouméa, en France et même à Cuba, leurs amours, leurs combats pour faire évoluer les droits des femmes, les luttes pour le respect des différences... Quel parcours, quelle évolution ! C'est surprenant !
J'ai aussi beaucoup aimé les interventions de Caroline Laurent qui encraient bien le récit dans la réalité de son travail en nous dévoilant ses questionnements pour ne pas dénaturer le manuscrit de son amie et rester fidèle à sa mémoire.
Mais ce qui m'a empêché de mettre 5 étoiles c'est ce que l'on sait maintenant sur cette famille et donc sur Evelyne. le fameux Olivier, son mari, dont parle Caroline Laurent n'est autre que O Duhamel. Comment admettre qu'Eveyne Pisier n'ait pas protégé son fils, elle, la combattante des droits ? L'amoureuse avait donc pris le dessus sur la mère ? Dommage également, ce choix de rayer totalement la superbe Marie-France Pisier, actrice et soeur d'Evelyne, avec qui elle était en froid depuis cette sombre histoire de viol.
Si l'on occulte ces révélations survenues depuis peu, le livre demeure vraiment intéressant et je le conseille, il ne laisse pas indifférent !
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Le livre commence un peu comme une bluette ,Mona la mère d'Evelyne Pisier ,est amoureuse de son mari et a une vie de grande bourgeoise dans ce qui était des colonies françaises à l'époque, l'Indochine et la Nouvelle Calédonie. . Comme Madame Bovary,laquelle contrairement à elle, n'aimait pas son mari et était insatisfaite de sa position sociale, Mona veut sa liberté. Pour ce faire: elle prend un amant , fait de l'équitation , apprend à conduire , se sépare de son mari ,se remarie à nouveau avec lui , se resépare .Sauf que la plume ici n'est pas celle de Flaubert!!
La seconde partie du livre est beaucoup plus intéressante car Mona va se battre pour conquérir cette liberté, en militant pour le planning familial ,le droit à mourir dans la dignité ,l'aide aux victimes du Sida ,son respect pour les homosexuels .Mais finalement ces questions ne sont que survolées ,peu approfondies et lorsque l'on sait désormais le peu de compassion qu'Evelyne Pisier a eu elle-même à l'égard de ses propres enfants ,son manque de protection vis à vis de leur beau-père Olivier Duhamel on ne peut qu'être décu !
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Je viens de terminer le livre et je suis un peu écoeurée. Quelle drôle de rapport mère -fille…la liberté ? du grand n'importe quoi…..L époque et les épreuves personnelles n excusent pas tout. Un milieu social bourgeois plus que privilégié qui aurait du protéger ses enfants…..égoïsme des parents apologie du suicide et quand on sait qu'elle a renié sa propre fille qui dénonçait les viols sur son frère …Camille Laurent est elle encore dans l admiration de ces 2 femmes après la publication de la ‘Familia Grande' ?
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 ''Evelyne voulait raconter l'histoire de sa mère, et à travers elle, la sienne. Une histoire fascinante qui couvrait soixante ans de vie politique, de combats, d'amour et de drame- le portrait d'une certaine France aussi, celle des colonies et des révolutions, de la libération des femmes. »
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Evelyne Pisier, agrégée de droit public, écrivaine, politologue, féministe engagée et révolutionnaire a pour projet un récit autobiographique. Elle rencontre @caroline.laurent.livres . C'est un coup de foudre amical et, d'éditrice, cette dernière va devenir co-auteur  puis achever ce roman au décès D E.Pisier.
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« Si la femme n'hérite pas, si elle n'a aucune indépendance financière, si elle ne possède pas mais est possédée, que se passe-t-il ? Marthe écrasait son mégot avec rage : Elle reste une esclave ! »
On découvre dans ce roman, 2 femmes combatives (Evelyne et sa mère, Lucie et Mona dans le roman) issues d'un milieu conservateur et patriarcal, rétrograde, et, telles des héroïnes de roman d'aventure, on va les voir évoluer, s'émanciper et lutter pour les droits des femmes, la liberté, le respect des différences, … le destin d'Evelyne Pisier est surprenant : d'Indochine à Cuba, en passant par la Nouvelle Calédonie et la France, son parcours militant est atypique. Tout comme sa relation aux hommes, que ce soit son père ou ses amours (Fidel Castro, Bernard Kouchner, …)
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En parallèle du récit, on peut lire les questionnements de son éditrice, son angoisse de ne pas retranscrire la vie d'Evelyne Pisier comme elle l'aurait voulu. On ressent cette amitié profonde qui les liait.
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Une plume magnifique pour un destin incroyable.
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J'avais déjà lu Rivage de la colère de Caroline Laurent, que j'avais adoré. Coup de coeur pour ce roman également !
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Ce roman symbolise la lutte des femmes pour leur LIBERTÉ et la relation mère-fille, chacune et ensemble vers leur indépendance. Comme 2 histoires semblables à époque différentes mais qui semblent se passer sur la même temporalité ! La similitude entre ces deux femmes est déconcertante.
On lit dans cette pseudo biographie l'engagement des femmes pour obtenir leurs droits, être autorisées à travailler,...
Toujours vrai aujourd'hui, où il existe encore l'inégalité salariale, les insultes, les meurtres, ....
Ce livre reste gravé dans ma mémoire et j'avais envie de partager avec vous.

France coloniale vit ses derniers feux. Chez les Desforêt, sous la férule d'un père haut-fonctionnaire, on grandit dans l'idée d'une hiérarchie des races et des sexes. Les drames en Indochine, à Nouméa, puis la lecture de Simone de Beauvoir conduiront la mère, Mona, et la fille, Lucie, à s'émanciper. Une liberté conquise à deux, qui conduira au militantisme et à la révolution, jusque dans les bras d'un certain Fidel Castro... Au-delà du roman, il y a aussi cette promesse crépusculaire entre Évelyne Pisier, 75 ans, et Caroline Laurent, 28 ans, leur amitié folle, comme une ultime transmission.
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Vous arrive-t-il parfois d'être inspirée par des héroïnes, d'avoir comme un coup de foudre au moment où vous découvrez leur existence, même si vous avez des vies et des idées bien différentes ? C'est ce qui m'est arrivé avec Evelyne Pisier, surtout, un peu moins avec sa mère Mona. Car oui, j'ai adoré cette lecture, qui se dévore avec passion !

Le livre a été écrit à quatre mains, celles d'Evelyne Pisier, qui souhaitait raconter la vie de sa mère, et celles de Caroline Laurent, jeune éditrice. Ce livre évoque leur coup de foudre amical, explique le moment T de la rencontre qui change votre vie et vous emmène très loin et très haut. Caroline Laurent n'hésite pas à interférer dans le récit initial d'Evelyne (ou Lucie dans le texte) pour expliquer ses émotions en écrivant le livre, ce que j'ai trouvé original. Nécessaire ? A vous d'en juger ! Pour ma part, j'ai trouvé enrichissant de connaitre leur histoire d'amitié, et dans la lignée du livre, qui parle beaucoup d'héritage et de transmission.

Ce livre parle de beaucoup de choses. Au-delà du simple roman biographique, il explique avant tout un éveil au féminisme absolument saisissant. Et pas seulement un éveil au féminisme, mais surtout à la liberté que le concept inspire. Les mots d'Evelyne Pisier et de Caroline Laurent pour décrire la sensation inexplicable que ce déclic inspire sont saisissants et fabuleux, et m'ont totalement galvanisée. Pour l'avoir vécu (à une échelle inférieure), cela m'a rappelé l'importance que peuvent renfermer les mots, les sentiments qu'ils peuvent créer et les idées qu'ils recèlent.

Après, j'avoue, j'ai parfois été un peu perdue dans les périodes historiques décrites par le livre. La guerre d'Indochine, la révolution cubaine, je ne connaissais que de loin… Heureusement qu'internet existe, et a pu m'apporter les précisions nécessaires à la bonne compréhension du livre. Mais ce ne sont pas ces faits historiques qu'il faut retenir du roman, mais surtout l'éveil de Mona (la mère) et Lucie (la fille) aux libertés que ce monde a à offrir, et leur militantisme à toute épreuve. Je n'ai pas du tout un esprit militant, mais il m'était impossible de ne pas être admirative de leur courage, leur détermination et leur optimisme sans faille à tenter d'améliorer ce monde.

J'ai maintenant envie de sonder les femmes de mon entourage ayant vécu les années 60-70 pour savoir comment elles avaient appréhendé cette période de combats féministes. J'ai moi-même envie d'être vecteur de transmission, chose que je n'ai jamais ressenti jusqu'ici !

Si vous avez envie d'une lecture inspirante, qui vous plongera au coeur de l'Histoire tout en vous racontant deux destins exceptionnels, je vous conseille vivement de lire Et soudain, la liberté : une pépite !
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