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EAN : 9782844183828
140 pages
La Part commune, 2019 (12/03/2019)
4/5   4 notes
Résumé :
De ce livret militaire retrouvé, l'auteure imagine la vie de son grand-père puis se remémore les bombardements à Brest lors de la 2e guerre mondiale. Ce récit sera relié à toutes les guerres, elle imagine les cris, les agonies, les ruines. C'est un récit sur les soldats affrontant les guerres passées, les guerres d'aujourd'hui et surtout sur les civils. Dans ce récit, vont se surimprimer d'autres décombres enfouis dans la mémoire familiale, ceux de Brest bombardée, ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Jacqueline Saint-Jean. « C'est une histoire de livret perdu, une histoire de revenance ». Au coeur du livre, le livret militaire du grand-père, perdu dans la bataille de Maissin, en 1914, retrouvé 50 ans plus tard dans un grenier en Belgique. Un livret jamais oublié par l'enfant : « elle y a logé son rêve ». Il aimante ici la mémoire et les mots. Relique d'une hécatombe, veilleur d'Histoire, il instaure un « pacte » entre l'auteure et son grand-père, devient chambre d'échos, résonance des voix qui traversent le temps et les ténèbres. « N'est-il pas de ces choses singulières qui portent plusieurs mondes ? ».

Peu à peu, sous les doigts, le vieux livret s'anime, frémit, soupire. L'auteure se met à l'écoute, avec lucidité, empathie et courage. Elle se met en quête de vérité, elle veut traverser « les couches de silence », questionner L Histoire. Il lui faut plonger dans les archives, témoignages, historiens, photos sépias, lettres, cartes postales mais aussi se laisser pénétrer par la parole des poètes, les oeuvres des musiciens, peintres, cinéastes, qui tentent de sublimer l'horreur.
En phrases denses et brèves, comme écrites parfois souffle coupé face à l'enfer, dans un temps haché par la violence, Marie-Hélène Prouteau ranime des présences vives, des récits bouleversants, telle Sara la douce qui apaise les moribonds. Elle veut leur « donner chair et visage », les nommer, traverser leurs épreuves. Respiration vitale, l'écriture ouvre des trouées fugaces, clairières lumineuses sur des fragments de monde habitable, moissons, rires d'enfants, odeurs, pulsations, poussées vitales, « un peu de la vie qui fait son petit bruit d'avant ».
"Sous les pierres, la mémoire", avec la même force d'évocation, lève la mémoire de Brest bombardée, arasée, amputée de son avant. A travers la Barbara de Prévert, le vécu de l'enfance après la guerre, ses images gravées, les traces, les témoins, l'explosion terrible de l'abri de Sadi Carnot, l'incroyable traversée du calvaire breton offert à Maissin, « douleur sublimée dans le "don magnifique ". Peintres, musiciens, poètes viennent donner vie et souffle aux archives. Inoubliable vision fantastique de l'ancienne Brest enfouie en sous-sol, enracinant la ville neuve. Comme dans le livre sur Nantes, l'écriture tend ses fils à travers les siècles et les frontières, relie des cités dévastées, Sarajevo, Dresde, Beyrouth, Alep, l'antique Ur.... au chant sumérien mis en musique par un créateur tchèque.
Loin de nous désespérer, cette intense quête de mémoire, à la fois fragmentaire et portée dans une unité puissante, nous ramène à ce beau titre de Paul Celan qui a le dernier mot. Ne pas abdiquer, garder « le courage qu'il faut pour se relever », traverser les décombres, persévérer. le coeur doit résister, réinventer la vie. Dans un final irradiant d'énergie, l'auteure accueille en elle le souffle des disparus, relie le poète et la grand-mère magnifique, « celle qui veille à la proue du monde », incarnant tous deux, malgré leurs épreuves, cet esprit d'amour et de résistance.
Lire un tel livre est à la fois bouleversant et vivifiant, car il cherche « une force pour devenir humain ». Il a ce pouvoir qu'elle prête à la poésie, « cette incroyable faculté de faire revivre ce qui est perdu, de faire vibrer à nouveau la corde de la vie et du temps ».




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C'est à la fois beau , poignant, oppressant. Tous ces morts, ces civiles, victimes impuissantes des combats et des bombardements. Des soldats inexpérimentés envoyés à la boucherie. Et cette répétions infernale la guerre toujours, partout. Brest, Maissin, Sarajevo....Je fini ce livre en me demandant comment on survit a l'horreur de la guerre.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Je caresse la matière de ces pages…


Je caresse la matière de ces pages. Les feuilleter
avec précaution,  ne pas les tourner trop vite.
Elles risqueraient  de tomber en  poussière.
Les années ont passé. On n’a plus beaucoup
de temps tous les deux.  Maintenant que les
circonstances familiales m’amènent à me sé-
parer du vieux livret, vient l’idée de retrouver
ce qui a été perdu.  Le chemin qui fut le sien,
qui sait, les présences qui l’habitent. Avancer
pour cela dans la fréquentation  des livres et
des archives.
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Pour que ça résonne dans le coeur humain, les archives n'ont-elles pas besoin de l'art ?
C'est le cas avec "1946-Automne allemand", le film du peintre vidéographe Michaël Gaumnitz qui met en images le livre de Stig Dagerman du même nom. On est frappé par l’infinie compassion. Quelque chose s’ouvre à nos yeux. Un soupirail sur le désordre insensé des ruines allemandes. Michaël Gaumnitz utilise des images d’actualités en noir et blanc. En fond on entend les paroles de Stig Dagerman. Puissantes. Vibrantes. Le scandale des souffrances infligées par les Alliés éclate. Mêlant victimes et bourreaux. Au plus obscur des caves allemandes.
Le peintre Michaël Gaumnitz leur donne un visage, de cendres et de terre. Il les peint au pinceau électronique. Insérés dans le mouvement des images d’archives, ces visages s’animent sous le geste du peintre.
Le résultat bouleverse. Le souffle coupé, on est happé par cet album des décombres. Le flux de ces ombres inventées par lui troue le réel d’archives. Le dessin se fait en direct sous nos yeux. Saisissant surcroît d’humanité que trace la main du peintre. Comme si ces ruines vivaient en lui.
Des visages à la Giacometti nous fixent. Nous interpellent. La même impression d’irréalité que dans la chronique "L'Assaut de Brest" nous saisit.
Comment traverser les décombres ? Comment vivre après ? Dire « non » à cette part de nous-mêmes qui, trop souvent, abdique. Le regard de Stig Dagerman est là. Celui de Michaël Gaumnitz aussi qui interroge. Ne vivons-nous pas dans un monde où s’activent trop de moteurs de la mort ?
On tourne la tête vers notre présent qui trame son inhumanité croissante. Où des mots se grippent. Comme « abeille », « semence », « espèce ». Et le mot « humain » qui bleuit de froid au soleil. Embarcations, corps rejetés par la mer, on regarde derrière, par-dessus l’épaule, vers le naufrage.
Que serait se tenir à la hauteur de toutes ces ombres emportées dans la guerre ? Entre hier et demain. Peut-être trouver l’élan qui sauve. Le sursaut de bienveillance pour ce monde qui est le nôtre.
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