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EAN : 9782844183194
126 pages
La Part Commune (10/09/2015)
4.25/5   4 notes
Résumé :
Marie-Hélène Prouteau construit ce livre en vingt-six fragments reliés entre eux par un même fil, une petite plage bretonne. Ce lieu d'enfance dessine un de ces paysages premiers, intimes et universels, tels ces vergers, jardins publics ou coins de rivière que chacun de nous garde au cœur,
Dans cette promenade de grand vent qui bouscule les époques se tisse un rapport sensitif aux éléments, odeur du varech, beauté sauvage des rochers, des vagues, des dunes, s... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Philippe Leuckx. En une longue topographie presque amoureuse, disons solidaire, Marie-Hélène Prouteau élève une toute petite plage bretonne au rang des sites d'une vie. Tout y a été vécu, senti, donné, repris, comme un legs d'une résidence d'autrefois, comme celui de patientes générations de mer, comme celui, aussi généreux, d'une mémoire vive, féconde et soucieuse.

En une vingtaine de stations devant cette plage concrète ou symbolique, l'auteure ramène à elle des pans de passé, colorés, aigus, pleins d'algues, de goémons, des pas des aimés (ah ! la grand-mère et le souvenir blessé d'un oncle Paul perdu à cause de la guerre !). Elle rameute le doux des promenades, le « promenoir » des anciens qui lui ont appris un regard futé sur le monde des vagues, des chemins et des vents. Il y a du Sansot (Chemins aux vents) chez cette Bretonne, cette volonté d'asseoir dans sa prose légère et vivifiante des moments, des récits (on ne peut passer sous silence l'épisode de l'Allemand et du chien), des blasons d'un passé resté unique. Car il y a, c'est l'évidence, des leçons à prendre dans ces morceaux de plage, dans cette rumeur naturelle, dans cette enfance retrouvée (et combien d'épisodes du livre font mention des années soixante, de ce que l'enfant a pu conserver des usages et des modes et de l'histoire concrète). La plage, certes, est un personnage de premier plan, que l'on peut découvrir à la nage, dont on peut graver sur les laminaires les variations et l'intemporalité, que l'on peut garder au coeur « qui fait sécession ».

La « mangeuse de vent » relate, s'approprie, et transmet. L'oeil, le corps et l'âme de la promeneuse de l'océan sait, ô combien, faire partager l'humeur d'un ciel, le hors saison, la leçon des rochers, celle aussi d'une nature sans cesse à conquérir dans le silence. Comme le compagnon, qui a tout largué, pour renouer avec la nature, rencontré sur les routes, l'écrivaine sait (et c'est peut-être un épisode à lire comme un apologue) qu'il y a là matière de vie, à saisir, à comprendre, à offrir (comme ce « don des morts » sallenavien) à l'autre, lecteur ou contemporain, puisque la nature sans cesse nous convainc de vivre, en dépit des doutes, des blessures et du temps qui ronge, même une petite plage.
Un beau livre, fervent et tout à la fois mesuré, à l'aune d'un style précis, économe, « au bord du chemin », aiguisé, qui nous entraîne à rouvrir les yeux sur un monde que la réalité embue et trouble. Et voir le monde du « divers », à l'image de Segalen, cité : en visant l'essentiel. L'auteure a réussi, de ce côté-là aussi.


Lien : https://www.lacauselitterair..
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Deux paysannes peinent dans l’eau jusqu’aux genoux.
Je suis immergée dans le tableau de Paul Gauguin « Pêcheuses de goémon ». Deux vagues d’émeraude explosent sur la toile. Ce vert bordé d’écume blanche me saute au visage. Grondements, mugissements, ruissellements jaillissent et toute la maison dans la campagne nantaise retentit soudain. Je reçois ces vagues en plein cœur. C’est mon finistère des sables qui surgit d’un coup.
Datée de 1889, cette gouache me parle de 1960. Des images venues de saisons déjà lointaines quand je voyais les goémoniers récolter le goémon à la main sur la grève. Le ballet de lignes de la mémoire s’anime[...]
Dans ma tête, les vagues de la Côte des sables font autant de turbulences que celles de Gauguin. Le peintre a fait de ces deux vagues un volcan. Un volcan actif qui va engloutir les deux jeunes paysannes. La vieille lutte avec la nature. Ici, on besogne la mer mais elle vous le rend bien. Telle des griffes blanches sur le tableau, la crête des deux vagues surligne l’espace marin. Celle en arrière-plan est plus haute que l’autre. C’est un énorme soulèvement d’eau qui écrase la toile. Elle a quelque chose de « La grande vague de Kanagawa » peinte par Hokusai. Le peintre japonais est passé dans la tête de Gauguin.
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Du plus loin que je me souvienne, j’ai l’horloge des marées dans le corps et dans la tête. Et la mer dans les oreilles, tantôt le ressac léger, tantôt le fracas d’enfer des vagues contre les rochers. Comme un rythme natif.
J’écris l’histoire de la petite plage de sable blanc. Une histoire qui dure. Une histoire d’enfance, mais qui se prolonge, comme l’écume ne cesse de sourdre de la mer. Une plage où j’ai couru dans les vagues, joué sur le sable, ramassé des coquillages. Pareille au verger, au coin de rivière, au jardin public qui, pour d’autres, est le paysage premier.
C’est un espace presque clos. Un anneau de granit est posé sur les sables. Les hauts rochers font abri dans l’échancrure de la petite crique. Un lieu fermé et ouvert à la fois, ouvert aux souffleries du vent et aux allées et venues de la vie. J’y reviens souvent, j’aime marcher des heures durant sur les sables et les dunes. Où se promener en rêves, sinon là, entre les tamaris tordus comme les oliviers de Van Gogh et les oiseaux de mer qu’on dirait photographiés par Martine Franck à Thoraigh Island ?
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Pas un arbre. Rien que l'herbe courte. Il y a le blanc du sable. Il y a ce bleu de l'eau qui lève des désirs et, souvent, les brise en virant au gris. Le gris agité de l'océan. Le gris du granit, lui, porte au silence, à l'île intérieure en chacun de nous.
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Video de Marie-Hélène Prouteau (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Marie-Hélène Prouteau
Librairie Dialogues-Brest. Cinq questions à Marie-Hélène Prouteau autour de son livre "les Blessures fossiles". 2009.
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