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J'ai entendu beaucoup de bien des Lettres À Un Jeune Poète de Rilke. Beaucoup. Alors je m'y suis attardée — un peu — et j'ai trouvé dix lettres, dont quatre au moins sont très courtes. Si l'on en expurge les formules rituelles de politesse et la relation d'une actualité à peu près dénuée d'intérêt à présent, on s'aperçoit que ce qu'il en reste d'exploitable littérairement ou philosophiquement parlant, ou encore à titre de ce que l'on pourrait considérer comme un essai est assez bref.

Toutes les lettres, sauf une, datent de 1903 et 1904 (la dernière étant de 1908), c'est-à-dire, à peu de choses près que ce sont les pensées d'un poète, autour de 28 ans destinées à son correspondant qui avait, lui, autour de 20 ans.

Comme il s'agit d'une correspondance, Rainer Maria Rilke utilise un style très direct ; il y expose sa pensée sans détour, sans trop de précaution, avec un certain nombre de généralisations probablement abusives mais qui passent très bien, et d'autant mieux que l'on est jeune, avec une âme flambante et des désirs d'absolu.

Je pense que j'aurais adoré découvrir ces lettres alors que j'étais lycéenne ; cela m'aurait transportée. Malheureusement, maintenant que je suis devenue un peu vieille et rabat-joie, je les trouve esthétiquement belles et exaltantes, mais, dans le fond, assez creuses et pas très fouillées.

Ce n'est pas désagréable à lire. L'auteur y exprime sa vision de la vie de l'époque, avec un petit côté rassurant pour son interlocuteur. Très bien, mais outre cela, qu'y trouve-t-on ? La vision de Rilke sur la création artistique et poétique, son avis sur la critique, sa profession de foi sur la solitude puis sa théorie sur l'amour véritable.

Sur la création artistique : n'essaie pas de te plier aux modes ni à ce que l'on attend d'un auteur, ferme tes écoutilles et n'écoute que ce qui vient de toi. Tu dois sentir que l'écriture est la seule chose qui compte dans ta vie sinon tu n'es pas fait pour devenir écrivain.

Sur la critique : c'est de la merde, n'écoute pas les critiques, n'aie aucun dogme, ne vénère pas ce qu'on te dit de vénérer, mais vénère quand même Jens Peter Jacobsen. (Tiens ? Y aurait-il comme une forme de contradiction sur ce point précis ?)

Sur la solitude : de toute façon, quoiqu'on fasse, quoiqu'on se leurre, on est toujours et éternellement seul. Mais il ne faut pas s'en affliger, bien au contraire, car c'est cette solitude et cette acceptation qui permettent d'atteindre l'accomplissement de soi et la grandeur maximale qu'il nous est possible d'atteindre. Il faut être serein, laisser du temps au temps, se laisser croître soi-même et tout ira bien.

Sur l'amour véritable : nous sommes démunis et mal préparés. On nous fait miroiter le côté grandiose et extatique — le plaisir, pour faire simple — or, l'amour véritable, c'est bien autre chose que ça. C'est un long travail de domestication de soi-même et de l'autre afin d'arriver à une vie harmonieuse, équilibrée et réciproque, d'ailleurs non dénuée de solitude.

Bon, c'est vrai, c'est très joli tout ça. En première approximation, en première lecture, à chaud cela paraît super mais quand j'essaie de creuser (excusez-moi, c'est une sale habitude que j'ai contractée avec le temps de toujours vouloir creuser, à l'instar de certains chiens mal appris qui maltraitent les belles pelouses), quand j'essaie de creuser, donc, je ne trouve pas grand-chose au bout de ma bêche.

C'est probablement normal, car Rilke lui-même, à l'époque est encore un jeune poète et je pense qu'il ne faudrait probablement pas l'inscrire à un concours de bras de fer cérébral avec son compatriote et contemporain Robert Musil quant aux thèmes abordés dans ces lettres. Rainer Maria Rilke s'avèrerait sans doute assez vite être un poids plume, un très agréable et très élégant poids plume, mais un poids plume tout de même.

En somme, je trouve ces lettres très sympathiques, très plaisantes à découvrir autour de l'âge qu'avait le destinataire, soit une vingtaine d'années, mais peut-être plus autant par la suite, notamment pour les vieilles chamelles méfiantes, retorses et racornies de mon espèce. Mais ce n'est bien entendu que l'expression d'un avis singulier et d'une ampleur limitée, c'est-à-dire, pas grand-chose.
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Bien entendu, tout a déjà été dit sur le précieux art de Rilke, à quel point il peut aider à vivre. J'ai étudié ce livre dans une classe préparatoire française et éprouvé un embarras mal dissimulé de mon ignorance, lorsqu'un proche m'a indiqué, en songeant à mes origines, que Franz Xaver Kappus, celui à qui Rilke a écrit les Lettres à un jeune poète, celui qui les a publiées et y a ajouté une introduction, était un écrivain roumain. C'était une exagération mais pas tant que ça: Kappus était germanophone, né à Timișoara, à l'époque dans l'empire austro-hongrois. Il s'est installé à Berlin en 1923. Ceci étant de 1918 à 1923, il était pour ainsi dire roumain. Pas le genre de choses à constater en classe prépa, où l'on est censé former l'élite de la France…
Cependant, poursuivons. Non seulement publication et introduction, mais en plus Rilke recopie un sonnet de Kappus dans ses lettres, le seul, à ma connaissance, traduit en français. Dans son introduction, essentiellement il se tait "comme les petits le doivent devant quelqu'un de grand". Entre "petit" et négligeable, toutefois la différence est grande, surtout qu'on a toujours besoin d'un plus petit que soi. Les problèmes de taille m'intéressant peu, je relève d'une part qu'un simple coup d'oeil sur un site bien connu fait ressortir que Kappus jouit en Allemagne d'une postérité loin d'être triomphante, mais réelle cependant. D'autre part, l'art précieux, incomparable même, de Rilke, n'aurait pas existé de la même manière s'il n'y avait eu ce qu'au cinéma on appelle le hors-champ, que le temps d'un sonnet le réalisateur a voulu mettre en lumière, ce qu'il a aiguillonné, intrigué, touché: l'oeuvre de Franz Xaver Kappus.
J'ai cru, moi aussi, qu'il existait une élite (en art par exemple, des génies et des salauds, i.e. des Mozart et des Salieri selon la définition de Peter Shaffer, qui s'inspire à son tour de Mozart et Salieri d'Alexandre Pouchkine), avant et après prépa: proposition qui, en dehors de l'école et des discours politiques (dans les halls des immeubles de banlieue, on a compris depuis longtemps) ne résiste guère à la réflexion.
Je préfère toujours les poèmes de Rilke à ceux de Kappus. Mais, finalement, en me disant qu'il était bien roumain après tout, j'ai acheté un roman (il a aussi écrit des succès de librairie) de Franz Xaver Kappus, histoire d'enrichir ma bibliothèque.
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Un poète qui écrit à un autre poète, et encore un autre qui le lit. Et pourtant, comme dans la chanson de Léo Ferré, la solitude. Rilke revendique sa solitude, il l'assume, il l'aime et il la partage à d'autres solitudes, d'autres plongées en soi-même pour y trouver, par un travail assidu, acharné, nécessaire, l'art, l'art de dire les choses, l'art d'écrire vrai, l'art d'écrire soi-même. Qu'est-ce qu'un poète? Un être qui vit dans l'impossibilité de ne pas écrire. Suis-je poète? Je ne suis pas assez seul, et trop fainéant. Les mots, pourtant, les traductions du réel qui passe en silence, remontent à la surfance, demandent à dire. Dire une rose, dire un regard, dire une motte de terre, dire un goût passager dans la bouche seraient le travail d'une vie, la recherche illusoire d'une vérité fuyante, la pierre sans cesse retombant qui rend Sisyphe heureux.
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Leçon de coaching littéraire ! Rilke est magnifique dans son humilité, lorsqu'il se livre intimement avec des réponses aussi universelles qu'émouvantes.
Même s'il manque pour moi dans cette édition la moitié du dialogue (les lettres de Kappus, ou au moins un rappel de leur contenu), on découvre, surtout dans les quelques lettres a Lou, la solitude de l'artiste, l'impossibilité de relations sociales et intimes.
Une fois de plus, comme beaucoup d'artistes, écrivains en particulier, Rilke est dans une prise de tête permanente, tournés exclusivement vers lui-même.
Les lettres de Rilke sont des analyses psychologiques très fines et très novatrices pour l'époque, sur lui-même et ceux qu'ils côtoient (son approche libre du sexe, très présente et très égalitaire, est aussi bien loin des poncifs de l'époque).

Je découvre Rilke par ce livre (malgré quelques poèmes lus il y a très longtemps), et je vais poursuivre !
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ce livre est étrange. un poète échange des lettres avec un ami, poète également. au début, j'ai été enthousiaste puis peu à peu je me suis ennuyée, j'attendais autre chose... j'aime mieux lire des poèmes qu'un texte sur la poèsie, son rôle dans la société, comment l'écrire.... bref je suis restée sur ma faim....
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En une dizaine de lettres écrites au matin du XXe siècle, Rainer Maria Rilke, fameux écrivain et poète autrichien, prodigue ses conseils et réflexions sur la vie à un jeune homme aspirant à la poésie, un certain Franz Xaver Kappus. Ce dernier n'a pas vingt ans au début de ces échanges épistolaires, et bien que Rilke n'en ait lui-même que vingt-sept, il émane de ses mots une sagesse riche et grave. Aux attentes de reconnaissance et aux souffrances du cadet Kappus, Rilke apporte une aimable et sincère attention, ainsi qu'une compassion presque paternelle. Entre la France, l'Allemagne, l'Italie et la Suède, c'est un Rilke souvent épuisé par le travail et la maladie, s'excusant pour ses longs mois de silence, qui revient avec plaisir et dévouement vers ce jeune homme torturé, hésitant entre une carrière littéraire et celle d'officier au sein de l'armée austro-hongroise.

Rilke évoque la passion et les affres de la création, place l'irrépressible besoin d'écrire comme la condition même de l'existence de celui qui souhaite écrire, vante les mérites des romans qui lui sont indispensables, tels Niels Lyhne de Jacobsen, livre de splendeurs et d'abîmes, somme le jeune homme « d'avoir de la patience envers tout ce qu'il y a de non résolu dans [son] coeur et d'essayer d'aimer les questions elles-mêmes comme des chambres verrouillées », l'invite à rechercher un métier qui le rendra indépendant, à embrasser la grande solitude tout en parvenant « à conquérir une relation au sexe qui vienne de [lui-même], des dispositions et de la manière d'être qui sont les [siennes], de l'expérience, de l'enfance et de la force qui sont les [siennes] ». Rilke couche de très belles pensées sur les femmes, visionnaires pour l'époque : « Cette humanité de la femme, portée à son terme dans les douleurs et les humiliations, apparaîtra au grand jour lorsque les métamorphoses de sa condition extérieure lui auront permis de se dépouiller des conventions qui la réduisent à la seule féminité, et les hommes, qui ne le sentent pas venir, seront surpris par leur défaite. » En somme, des lettres profondément inspirantes sur l'identité et l'altérité.
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Correspondance tronquée (puisque la version que j'ai lue ne contient que les réponse du poète confirmé Rainer Maria Rilke au poète en devenir Franz Kappus), ces "Lettres à un jeune poète" font l'effet des conseils du sage pour son disciple.
L'auteur se pose en guide pour aiguiller son correspondant sur la voie de l'art. Comment savoir si telle est bien sa destinée ? Où trouver son inspiration ? Comment rester authentique ?
On pourrait alors penser qu'il n'a de pertinence que pour celui qui se destine à un métier de plume, pourtant ces lettres sont aussi de celles qui aident à grandir, à s'apprivoiser en tant qu'individu particulier, à ne pas se sentir terrorisé par le sentiment de solitude qui peut s'emparer de soi que l'on soit effectivement isolé ou que la présence de nos semblables ne fasse qu'aviver cette impression.
Il en dit aussi assez long sur son auteur, qui parfois se laisse aller à des digressions philosophiques et qui surprend par sa modernité, que ce soit par ses propos féministes ou sa conception toute particulière de la spiritualité.
Mais je dois dire que malgré toutes ses qualités et le fait que je trouve que son contenu peut être le meilleur des allié dans des périodes critiques de la vie ou l'on se sent perdu et incompris, ce qui m'a gênée c'est qu'il n'est pas toujours très facile d'accès. Les tournures de phrases sont assez alambiquées. Cela n'effraiera certainement pas le lecteur aguerri féru de classiques, mais pour ma part j'ai dû souvent relire des phrases qui me paraissaient un peu nébuleuses au premier abord.
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De longues lettres de Rilke pour faire entendre sa conception de la poésie, son amour de la littérature et son envie de transmettre ce qu'il a appris et acquis pour que son oeuvre se perpétue. C'est très bien écrit, très littéraire, peut-être un peut trop et ça plaira aux artistes en herbe, aux amoureux de Rilke et aux romantiques, un peu moins aux autres, comme moi, qui ont entendu parlé de cette oeuvre importante et se sont un peu fatigué à sa lecture...
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Comment écrire ? Qu'est-ce qu'être poète ? Comment le devenir ? Ce sont quelques-unes des questions auxquelles le poète Rainer Maria Rilke réfléchit dans ces lettres adressées à un auteur de poèmes qui lui demande conseil, Frantz Kappus, mais aussi à son épouse Clara, son beau-frère Friedrich Westhoff, et à son amie Lou Andreas-Salomé.

Ces quelques pages de la correspondance de Rilke constituent un très bel essai sur la création, la solitude et au-delà, sur la vie en général. Chacun des extraits choisis est à la fois une méditation philosophique agrémentée de remarques pratiques et un texte merveilleusement écrit.

Difficile cependant d'en dire beaucoup plus sans faire injure à l'auteur qui explique dès les premières lignes : « Rien n'est moins capable d'atteindre une oeuvre de l'art [a fortiori la sienne] que des propos critiques. »

Ne me lisez donc pas plus longtemps, mais précipitez-vous sur ce très beau classique à découvrir à tout prix !
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Je peux ajouter ces lettres de Rilke aux plaisirs que me procurent certaines de mes drogues dures telles que le café, les chats ... C'est un plaisir tendrement délicieux que la lecture de ces lettres écrites par Rilke en réponse à un jeune poète qui lui soumet de critiquer quelques uns de ces premiers vers.
Il en résulte que Rilke lui répond que la critique de l'art est indicible et devient, dans les réponses qu'il envoie à ce jeune poète, un guide de la force intérieure en prônant le fait d'exister, de profiter de la vie, d'avoir de l'expérience des moments vécus, de dégager des instants privilégiés par la solitude. C'est un livre qui peut changer la vie ou faire prendre conscience que tout est davantage bonheur de prendre la vie comme elle vient.
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