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EAN : 978B00MMPVWI0
88 pages
(10/08/2014)
4/5   1 notes
Résumé :
Le narrateur est un écrivain parisien hanté par la pensée de sa possible médiocrité, de son incomplétude, de ses impuissances et de ses limites. Il nous raconte son amour pour Cécile, amour qu'il ne peut avouer, s'avouer, par peur d'aimer ou d'en être incapable dont il ne prendra conscience entièrement qu'après la mort de Cécile. Il nous livre ses pensées, ses hésitations et ses blocages, son égocentrisme et son désir (impossible à combler) d'être aimé, son pessimi... >Voir plus
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Les deux frères sont d’ailleurs très différents l’un de l’autre.

L’aîné est un contemplatif. Tout le jour, il s’en va de l’un à l’autre de ses sept points de vue ; il remarque les plus légers changements que les caprices de la lumière apportent au paysage, et il en jouit. Rien ne lui semble monotone dans cette contrée dont il connaît les moindres détails et qu’il observe toujours des mêmes lieux. (...)

Le cadet, au contraire, est un méditatif. Pendant que son frère laisse sa vie se confondre dans la vie de la nature, et trouve le bonheur en cette délicieuse identification, il rentre en lui-même et réfléchit. Et comme, étant seul, il ne peut que tourner et retourner ses idées, les développer et les amplifier sans qu’aucun fluide étranger les féconde, certains problèmes métaphysiques ou moraux prennent pour lui une réalité, une consistance inouïes. On le voit frissonner de sa propre pensée qui, quelque large que soit d’ailleurs son cercle, finit toujours par revenir à son point de départ, après s’être heurtée et meurtrie aux barrières de l’inconnu. « Qu’est-ce que l’homme fait sur la terre ? » se demande-t-il par exemple. Et, au lieu de hausser les épaules, comme le scepticisme vulgaire ne manque jamais de le faire devant une question aussi insoluble qu’inutile, il se la répète désespérément, la mûrit, la pèse, se laisse entraîner par elle à travers le cycle d’hypothèses qu’elle soulève, écoute les réponses inintelligibles que lui murmurent de confuses voix intérieures, se morfond à les tirer au clair, – puis se retrouve devant son douloureux point d’interrogation. (...) Je n’ai jamais rencontré de si tragique incertitude, de pessimisme si universel et si sincère.

– Vous êtes un bon schopenhauerien, lui dis-je après que nous eûmes longtemps causé.

Chapitre XXXVII
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À travers mon souvenir, les idées que nous avons poursuivies, nos observations communes, nos divinations réciproques, ce ne sont que des voix confuses dont le son va se perdant, soit qu’elles viennent de trop loin ou de profondeurs trop intimes : voix incertaines comme tout ce qui pénètre en moi, comme les ombres grises de la nuit, comme les apparitions mal dessinées dans le crépuscule du matin, comme l’image que je contemple dans mon cœur, – hélas ! comme mon cœur lui-même, qui déforme toutes les choses ou peut-être les crée !

Chapitre XI
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Je connaissais tous les sentiers de ces montagnes peuplées de légendes capricieuses ou symboliques. Je rencontrais en chemin les êtres surnaturels que la naïve fantaisie d’autrefois faisait glisser sur les fleuves ou passer avec le vent dans les arbres de la forêt, qui se plaisaient à consoler les hommes de leurs peines ou les attiraient doucement à une mort, facile, ou bien emportaient à travers la tempête les cadavres des héros tombés en combattant. Je rencontrais aussi les barons dont les burg sont écroulées, et les minnesaenger errants, et les blondes filles des ballades, qui tiennent à la fois de la femme, de la vierge et de la fée, qui aiment, qu’on aime, dont les corps diaphanes s’évaporent dans les transparences de l’air. le bruit des ouvriers d’Albéric dans leurs forges souterraines a souvent frappé mes oreilles ; le même oiseau que Siegfried sut comprendre m’a révélé la vie de la forêt ; j’ai aperçu dans la tour de Rolandseck le pâle visage du chevalier Toggenburg, les yeux éternellement fixés sur la fenêtre de sa bien-aimée, la recluse de Nonnenswerth. Et les inconnus, les oubliés, les morts obscurs que nul poète n’a chantés, dont nulle légende ne consacre le souvenir, – tous ceux qui ont souffert parmi les splendeurs de cette impassible nature, tous ceux dont les noms ont passé comme mon nom passera, tous ceux dont les cœurs ont été gonflés d’hymnes inexprimés, plus beaux mille fois que ceux des plus grands poètes !…

Chapitre XXXVI
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Entre Wagner et Michel-Ange, il y a eu des géants. Mais, à trois siècles de distance, ces deux génies ont traduit le même sentiment, qui est le dernier mot des recherches, des douleurs, des doutes : l’apaisement de ceux qui meurent et qui souffrent.Le grand Florentin a connu toutes les fièvres de l’esprit qui travaille sans cesse, tous les troubles de l’homme égaré parmi la nature et victime de ses propres faiblesses, toutes les meurtrissures qu’il se fait en tâtonnant dans une obscurité où flottent des lueurs incertaines, tous ses dégoûts à travers un interminable combat dont le but lui échappe, – les fatigues, les anxiétés, les problèmes, les blessures que sa femme de marbre oublie dans son éternel et calme sommeil de San-Lorenzo. Wagner a éprouvé les mêmes fièvres, les mêmes troubles, les mêmes dégoûts, développés par la lassitude d’une marche de trois siècles de plus, si multiples maintenant, si absorbants, qu’il faut pour les traduire le symbolisme du mythe et la pénétration du langage musical. Et, comme la femme endormie, enfin, il a voulu les oublier, et il a aussi trouvé le calme dans son rêve mystique, à côté du Pur Simple auquel la compassion découvre le mystère de la vie, sous les ombrages sacrés du Graal où Kundry elle-même repose.

Chapitre XXXVIII
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Les imperceptibles moments où nos deux cœurs ont battu à l’unisson ont disparu sans retour. Maintenant, nos années passeront, nous serons absorbés tous les deux dans le même infini, les âges sans mesure amasseront les durées, – et ces moments ne reviendront jamais !

Nous ne nous sommes pas connus… Je vois toujours son indéchiffrable sourire. Je sais qu’il y avait là tout un immense secret, – un secret qu’elle a emporté là-bas, tout là-bas, dans le mystère universel où elle a disparu, un secret que je ne connaîtrai jamais.

Ce sourire restera dans ma mémoire comme une énigme où je me morfondrai : il aiguisera en moi d’inapaisables curiosités, il me tourmentera comme un remords, il sera le but insaisissable et fou de tout mon travail intérieur, il se dessinera sur le fonds de toutes mes pensées. Je le verrai toujours, obsédant, figé. Mais je ne reverrai plus jamais les lèvres qui l’esquissaient, mon regard ne rencontrera plus jamais le regard où son mystère faisait passer de si étranges reflets, je n’entendrai plus jamais la voix profonde qui m’a tant de fois fait frissonner comme si je l’avais devinée prête à prononcer le mot définitif, le mot que je voulais entendre le mot, qui n’est pas sorti et que je n’entendrai jamais.

Chapitre XL
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