Le cas Furtwängler : un chef d'orchestre sous le III Reich

Audrey Roncigli, historienne, effectue dans ce livre très circonstancié un travail remarquable sur le "cas Furtwängler ». Ce mythique et immense chef d'orchestre du Berliner Philharmoniker fut accusé d'être l'ambassadeur musical du IIIe Reich. Devait-il quitter l'Allemagne à l'accession d'Hitler au pouvoir ? Devait-il cesser la direction d'orchestre ?
Si l'auteur prend avec raison la défense de Furtwängler, elle le fait de façon argumentée, en embrassant toute la carrière et le répertoire du chef d'orchestre, et pas uniquement la période incriminée. Elle précise : "Tous ceux qui s'intéressent à l' « affaire Furtwängler » savent cependant que le chef n'a jamais été membre du NSDAP, ni n'a eu de sympathies pour les thèses du Parti, comme le prouve cette remarque du ministre de la Propagande, Joseph Goebbels : Furtwängler n'a jamais été national-socialiste. Et il n'a jamais fait de mystère là-dessus [...]. Et les Juifs et les émigrés ont trouvé cela suffisant pour le considérer comme un des leurs, lui qui était dans une sorte d' “émigration intérieure”. "
Enfin, elle a le mérite d'identifier le vrai problème de Furtwängler : son illusion (d'où le titre de cette étude : une illusion face au nazisme), celle d'un Art totalement distant de la politique et d'un artiste totalement apolitique.

Force est de constater que cette redoutable manie quasi stalinienne de vouer au purgatoire, au nom de la moraline ambiante, des artistes ou personnes en vue, ou de psychiatriser ou insulter des catégories sociales pour non-conformité au discours dominant est toujours d'actualité, imposant pour nous tous le devoir moral d'exercer une auto censure a priori avant de penser, de s'exprimer, de débattre, de revendiquer et surtout d'exercer son art.

- On peut également se reporter aux carnets de Berta Geissmar, secrétaire du chef d'orchestre et au texte « A propos de mon attitude face au National-Socialisme » publié en 1946 rédigé par Furtwängler.
- Ecoutons encore et toujours l'incomparable Furtwängler en 1943 et la symphonie n°7 de Beethoven, c'est de l'or liquide.
Lien : https://tandisquemoiquatrenu..

Très bon livre d'un chercheur débutant.