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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Sens aller : Un homme qui se meurt dans un hôpital se remémore ses années d'enfance après-guerre traversées par un tramway allant de la ville à la mer.
Sens retour: un enfant attrape chaque jour le tramway au pied e son école qui le dépose au pied de la maison familiale, pendant qu'ailleurs on agonise à la ville.
Tout autre sens est hautement souhaitable.

Une vraie belle surprise sur ma route de découverte des Nobel: contre toute attente, je pense être (un peu) arrivée à entrer dans l'univers littéraire très particulier, peut-être emprunté qui se dégage de l'écriture de Claude Simon.

Les commentaires des uns et des autres, tantôt admiratifs tantôt plus que tièdes m'ayant laissée à équidistance entre envie et répulsion, il m'a semblé sage de commencer par un roman court, ce qui est le cas de ce Tramway.
Par ailleurs ce titre m'attirait, imaginant un moyen de locomotion qui entraîne le lecteur dans le monde de l'auteur : bingo, c'est un tramway magique dont le trajet lent et répété aide à se plonger dans les phrases sans fin, oublier les points et passages à la ligne, entrer en apnées régulières au creux des innombrables parenthèses, et donc par une sorte d'hypnose laisser se créer les images convoquées et reliées entre elles dans un rapport au temps déconstruit.

Sensation au final assez agréable de se couler dans les visions d'un autre, perception de réalités coexistant à travers des images imprimées au fond de la mémoire : expérience de lecture vraiment intéressante au final. Reste à trouver le moment adéquat pour une lecture plus longue comme La route des Flandres.
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Comme toujours chez C. Simon, ce n'est pas l'histoire qui compte mais le chemin des personnages rendus à leur densité grâce à l'écriture, le quotidien, les souvenirs ou le mouvement de la pensée suivent le passage du tramway. Il s'agit bien d'une succession de micro-évènements ou de micro-rêveries suscités par le passage du tramway. La précision délicate de l'écriture étire langoureusement chaque description ou chaque pensée jusqu'à en faire un tableau parfois abstrait ou surréaliste. La somme des tableaux peint par C. Simon donne une vague impression des personnages et de ce qu'ils sont. le lecteur a aussi l'impression de passer dans leur vie comme le fait le tramway au milieu de cette cité balnéaire.
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(copier-coller depuis mon blog)

En matière de lecture, je n'aime pas rester sur une défaite et d'avoir interrompu la lecture du tramway il y a quelques années, en fut une. Je m'étais juré d'y revenir et j'ai profité du propos d'une quincaillière me laissant entendre que je ne lisais jamais de roman de la mouvance nouveau roman (dont aujourd'hui les auteurs publiés aux éditions de minuit poursuivent un peu le projet), pour y revenir. Je viens de le terminer ce soir un oeil sur ma liseuse et l'autre sur la deuxième saison de Broadchurch (série anglaise potable, en tout cas moins pire que d'autres). Admirez la prouesse : lire du Claude Simon, l'un des auteurs les plus difficiles qui soit tout en faisant autre chose ! Autant faire cuire des oeufs et préparer une vinaigrette en même temps. Et mieux encore, je n'ai pas perdu le fil de l'histoire.

Je ne sais pas si mes trois lecteurs connaissent Claude Simon (prix Nobel de littérature en 1985 décédé en 2005) mais dès les premières lignes où l'auteur explique le fonctionnement de la manette de pilotage d'un tramway, on voit déjà qu'on ne lit pas quelque chose de commun.

L'un qui ne connaîtrait pas la prose de Simon et qu'on n'aurait pas averti serait déjà tombé de sa chaise. Toute l'oeuvre de l'auteur se résume dans ses quelques lignes (je me souviens que dans la route des Flandres, il lui avait fallu trois pages pour expliquer le dysfonctionnement de la serrure rouillée d'un poulailler), mais je vous rassure Claude Simon ne s'occupe pas uniquement des objets, au contraire même, il y a bien comme ça dans ses romans - un peu comme des parenthèses - des descriptions précises de 'choses' souvent mécaniques mais l'essentiel chez Simon, ce sont les sensations, ce que le tri accompli par la mémoire nous laisse de souvenirs épars et en l'occurrence ici, le narrateur est un vieillard gisant dans une chambre d'hôpital (à Paris je crois) et qui se souvient de sa jeunesse au lendemain de la première guerre mondiale dans une ville de bord de mer dont un tramway reliait le centre à la côte. Il se souvient qu'il l'empruntait pour aller et rentrer du collège, de la vie autour de ce véhicule, des hommes mutilés par la guerre, et du quotidien autour du trajet, les différences de classe et puis très vite la lente agonie de sa mère (son père était mort au combat) rongée sans doute par le crabe. Devenu orphelin, il est pris en charge par son oncle et sa tante ou que sa tante, je ne sais plus, (avec Simon, on a le droit de ne pas tout suivre). Mais comme je le stipulais, le récit qui n'est pas linéaire s'avère être plutôt une succession aléatoire de tableaux de cette jeunesse jaillissant au gré des poussées de fièvre du narrateur dans sa chambre d'hôpital où sa vie ne tient qu'à des tuyaux et des bonbonnes de gaz.

On a tort de considérer Claude Simon comme élitiste ou pompeux. Quand on sait à quoi s'en tenir et bien, cela se lit assez agréablement. Et puis quelque part, il n'y a pas plus vrai que cette littérature. A l'orée de la mort, fiévreux et branché de toute part, que peut-il traverser notre esprit si ce ne sont des bribes, des sensations voire même quand on sombre dans une demi-conscience des détails incongrus dont l'intérêt peut échapper au bien-portant ? N'est-ce pas ce qui nous arrive à tous lorsque malades et parvenant à trouver le sommeil 5 mns, des rêves étranges naissent de la fièvre ?

Je ne suis pas le meilleur commentateur de Claude Simon. Il a ses adeptes qui se réunissent parfois secrètement en colloques (dans un château de Cerisy-la-Salle) lors desquels j'imagine on ne doit pas beaucoup se marrer (mais peut-être quand même plus qu'à un spectacle de Anne Roumanov ou lors d'un meeting de l'ump) .Vous savez, entre eux, les intellos ne se racontent pas de blagues de Toto mais ils possèdent leur propre sens de l'humour, un peu comme ceux qui s'esclaffaient lors de l'émission Apostrophe sur des sujets ne prêtant pas pourtant à l'hilarité.

éditions de minuit, 2001, 144 pages, lecture sur kindle en avril 2015. note : 4/5
Lien : http://doelan.blogspirit.com..
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Ayant refermé le livre plutôt satisfaite et ne comprenant décidément pas pourquoi plus aucun souvenir ne m'était resté de ma lecture précédente, qui pourtant avait bien eu lieu puisqu'en témoignaient non seulement ces deux étoiles sur mon Babelio, mais encore ce volume que j'avais du acheter et qui figurait en bonne place sur la bibliothèque du salon, parmi les autres volumes du même auteur ; lecture que j'avais néanmoins oubliée au point d'emprunter un exemplaire en tout point identique à la bibliothèque universitaire, dans le but de combler ce que je pensais être une lacune de ma connaissance de cet auteur.
Tout en contemplant depuis le balcon la circulation des nombreuses voitures et des plus rares piétons et cyclistes, je cherchais dans ma mémoire dans quelles circonstances – sans doute troublées – j'avais pu lire une première fois ce livre, dans une fourchette temporelle se situant entre ma mutation à Perpignan (puisque c'était pour la description de la ville que j'avais voulu le lire) et une période plus proche mais suffisamment éloignée pour avoir eu le temps de s'effacer complètement de ma mémoire. La logique me suggérait deux hypothèses : d'une part une lecture à mon arrivée à Perpignan, qui ne m'aurait pas marquée parce que ne connaissant pas la ville ma pensée n'aurait pas relié à des images précises ce récit, cette période de ma vie étant en outre baignée dans le brouillard de la fatigue car je venais tout juste de commencer mon travail à la bibliothèque, et dans cet état de vide et d'isolement où me plongeait l'absence de Mathieu resté à Grenoble et qui ne devait me rejoindre qu'au bout d'un an ; d'autre part ma seconde hypothèse optant pour une lecture précédant ou succédant à ma grossesse, mes préoccupations étant alors entièrement tournées vers les bébés et ma fatigue touchant des sommets jamais atteints, bien que j'aie gardé des souvenirs d'autres lectures (profondes ou parfaitement futiles) de cette époque.
Le tramway me touchant désormais doublement, par l'évocation de cette ville qui était désormais la mienne et que je reconnaissais en même temps que je percevais les profonds changements qu'elle avait subi depuis les souvenirs décrits dans le livre, et en premier lieu la disparition du dit tramway, séparant durablement, malgré la voie rapide et la ligne de bus dont j'observais les allées et venues depuis mon balcon, la ville de la cote ; notre appartement donnant précisément sur le début de la route menant à la mer, peut-être sur le trajet même de l'ancien tramway ; me touchant aussi par l'expérience du séjour hospitalier du narrateur à laquelle, ayant passé plusieurs mois à l'hôpital avant et après la naissance des enfants, je pouvais désormais m'identifier, reconnaissant dans les attitudes des soignants et l'esprit flottant du patient comme quelque chose d'universel, n'ayant en tout cas guère évolué depuis la période de rédaction du livre.
Le tramway faisant pour moi comme pour Claude Simon la liaison entre une ville et une expérience traumatique, à cette différence près que le traumatisme a été pour moi une (double) naissance quand pour l'auteur il s'agissait d'une mort (celle de sa mère mais aussi en filigrane la sienne, ou en tout cas – c'était son dernier livre – une certaine déchéance de la vieillesse se rapprochant étrangement de mon état pendant la grossesse, notamment cette difficulté à respirer, cette faiblesse, le moindre geste demandant un effort inhumain, et cette médicalisation d'un état finalement naturel). A cette différence aussi que Perpignan incarnait pour l'écrivain la ville d'origine, familière et lointaine car l'ayant depuis quittée, quand pour moi elle était la ville d'arrivée, étrangère, et qui devient au fil du temps de plus en plus familière ; Simon témoignant d'un enlaidissement progressif qui m'a été donné à voir d'emblée, la ville ayant depuis passé à un degré supérieur de laideur, avec ses centres commerciaux qui rendent en comparaison plutôt excessive l'animosité de l'auteur envers les tuiles mécaniques, tandis que sont laissées à l'abandon les riches demeures de l'entre deux guerres. Et moi ayant eu d'emblée cette laideur sous les yeux (le HLM en face de notre balcon déployant ses fenêtres sans volets sur la place entièrement bétonnée que les trop rares pluies ne suffisent pas à laver des déjections canines, mais rendue tolérable voire agréable par la présence de trois jeunes mimosas fleurissant de jaune vif au coeur de l'hiver), je découvre progressivement les charmes cachés de Perpignan, apprenant à comprendre et à aimer les contrastes d'une ville qui ne cesse de se « renier » elle-même. le livre de Claude Simon constituant en quelque sorte le négatif, la parfaite symétrique, de ma propre expérience : mon arrivée à Perpignan et la naissance de mes enfants s'inscrivant en relief correspondant au creux de l'auteur retraçant la mort de sa mère et son départ de la ville, dans ces longues phrases d'une précision mathématique, avec ces participes présents, qui dès la lecture de la route des Flandres avaient sonné à mon oreille comme un parler familier, au point qu'après l'avoir lu je ne pouvais m'empêcher de penser dans ce style qui venait naturellement, comme une langue maternelle réactivée après une longue absence d'un pays qu'on aurait quitté.
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J'ai décidé d'emprunter à la bibliothèque pour découvrir des auteurs cultes comme les Nobel de littérature. Je n'ai pas manqué Claude Simon qui a un style très particulier (que je n'ai jamais rencontré), personnel et singulier : il ouvre de nombreuses parenthèses, pour aller au plus profond de sa pensée, dans des phrases particulièrement longues. J'ai adoré même s'il est parfois déroutant mais il est incontournable.


Challenge Nobel illimité
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Montez dans un tramway nommé délire ! Étonnant ouvrage du Prix Nobel de littérature (1985) dont je n'avais rien lu jusqu'à ce jour. Je dis "délire", parce que, allongé sur un brancard, vous regardez sous un angle nouveau la ville qui vous était familière : de la rue vous ne voyez plus la chaussée ni les trottoirs, mais seulement les parties supérieures des deux façades qui partent à reculons au fur et à mesure que l'on vous enfourne dans l'ambulance qui vous conduit à l'hôpital où vous pourrez revivre à loisir vos trajets d'enfance avant de sombrer dans le délire qui vous attend probablement.

le titre renvoie à un tramway reliant une petite ville à la plage voisine mais renvoie aussi à l'auteur des souvenirs immergés que sa condition de malade et sa position allongée font ressurgir.

Ne vous attendez pas à ce que Claude Simon vous raconte une histoire. Il peint un tableau et réalise un film ou plutôt vous projette des diapositives en fondu parfois enchaîné, mais aussi parfois sans enchaînement évident. Tout le plaisir de la lecture et du visionnage est ici dans la contemplation. Ce plaisir, toutefois, ne vous sera offert qu'en contrepartie d'un important effort de lecture (ce fut du moins le cas pour moi). En effet, le style de Claude Simon explore de nouvelles façons d'écrire et rejette toute forme traditionnelle. Pas d'histoire, mais toute une enfilade d'impressions, de souvenirs, de sentiments éprouvés, d'images accolées les unes aux autres, superposées dans une sorte de collage à la manière surréaliste, tout un méli-mélo de membres de phrases imbriqués entre parenthèses, incises et apartés. Entrez dans son jeu, et ne soyez pas étonnés si le travail de marqueterie réalisé dans la phrase est repris à l'échelle des paragraphes qui, eux aussi, arrêtent parfois leur cours pour le reprendre un ou deux alinéas plus loin, comme la résurgence d'une pensée temporairement détournée de son objet.

Si vous vous procurez ce petit livre, je vous mets au défi d'en lire d'emblée à voix haute plusieurs pages consécutives sans avoir à vous reprendre. C'est que, habitués que nous sommes à la phrase classique dominante, il nous faut d'abord accepter d'en abandonner le rythme convenu, pour embarquer dans cet étonnant tramway dont je renonce à vous donner une description, me réjouissant d'avance des surprises qu'il vous procurera
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