AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782268102351
184 pages
Les Editions du Rocher (21/08/2019)
3.75/5   4 notes
Résumé :
Nous n’avons pas encore dans notre base la description de l’éditeur (quatrième de couverture)
Ajouter la description de l’éditeur

Vous pouvez également contribuer à la description collective rédigée par les membres de Babelio.
Contribuer à la description collective
Que lire après La théorie des signaturesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
J'aurais pu trouver ce roman oppressant, angoissant. Et il l'est, sans nul doute. Mais il m'a surtout égarée dans sa complexité stylistique, amoindrissant du même coup la force de son propos.
Il met en scène un quatuor familial banal, un père, une mère et leurs deux enfants, englués dans une relation qui n'a en revanche rien d'ordinaire.

Louise Delabre passe la majeure partie du temps dans sa chambre, où elle dépérit et prie sans relâche, atteinte d'une interminable langueur, d'une maladie sans nom que son époux impute à des maléfices, et à la probable expiation de ses mauvaises pensées. Perdue dans des visions tendues vers l'atteinte d'un état éthéré, elle fait preuve envers ses enfants d'un dévouement tout aussi impalpable, puisqu'il prend racine dans l'image qu'elle projette sur eux, une idée de l'enfance s'inspirant de l'illusoire pureté des vertus enfantines et de la beauté des communiants.

Aux antipodes de cette nature fragile, le père veut s'ancrer dans le monde sensible que rejette sa femme, adepte de l'esprit fort dans un corps robuste, méprisant la modernité et les bons sentiments qui favorisent la faiblesse. Lui aussi est à sa façon un mystique, un fanatique de ses propres visions où s'entremêlent rigidité morale te religieuse et culte de la nature.

Mais c'est un mystique autoritaire, imposant ses préceptes hygiénistes et spirituels à coups de règles en bois, faisant inlassablement recopier dans un même cahier leçons de catéchisme et leçons de choses, mêlant herbier et rosaire, bréviaire et bestiaire…

Imbibés de phraséologie religieuse et d'éloquence sacrée, forcés à se curer la conscience autant que les ongles, mais aussi contraints à de longues escapades en plein-air où le cadet Théodore s'épanouit (à l'inverse d'Aloys l'aîné qui révèle au grand désespoir de son père des langueurs et des fragilités de « fin-de-race ») les enfants du couple Delabre cheminent tant bien que mal dans cette enfance aux relents délétères qui leur promet d'insistants et durables traumatismes. Et il y a de quoi être d'autant plus déstabilisé lorsque celui qui vous imprègne de sa dogmatique morale vous emmène chez sa maîtresse pour vous y laisser devant des dessins animés pendant que les adultes s'ébattent dans la chambre…

Heureusement, son poste de commercial au sein d'un grand groupe amène le père à de fréquentes absences, pendant lesquelles les fils Delabre soufflent un peu, adoptent un semblant de vie normale, vont à l'école et se promènent au parc avec leur cousin Romain avant de retrouver l'espèce de pouponnière géante pour chérubins qu'évoque l'appartement familial envahi de bimbeloterie en verre ou en cuivre.

Comme exprimé en préambule à ce billet, je suis restée en dehors de ce titre, dont j'ai trouvé la complexité déstabilisante et souvent frustrante, car consciente de passer à côté d'un texte intense et brillant. Et les très beaux passages décrivant le milieu naturel dans une langue qui chante l'organique de manière très émouvante, pour m'avoir par moments emportée, n'ont malheureusement pas suffi à me raccrocher à l'ensemble.
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
Commenter  J’apprécie          30
Graal détaché du front de l'archange rebelle. Hortus mortus semé de roses immarcescibles, flambant géométries non euclidiennes. Entre collection de minéraux digne de Caillois/Michon et entomologie à la Maeterlinck, effluves de « képhir maison, gingembre confit, gelée royale », cette langue déplie ces instants où « le langage ne se révélerait lui-même qu'un conte » ; « le corps moins la chair, l'espace moins le temps, la lumière moins le mouvement ». Me fascine la « rose de personne », autant que « la fleur inversée », fût-elle à l'image de la pensée. Cette fleur, est-elle encore le « myosotis au bleu inoubliable qu'on dit fidèle au souvenir du paradis » ? Me hante aussi la pensée des limbes : thème de réflexion interminable. Celui qui n'a pas été touché par le péché, où va-t-il, en attendant le paradis ? Les limbes sont-ils simplement ce lieu où l'on n'a pas eu le temps d'être, ou un lieu en lui-même ? J'ai lu ce livre somptueux comme on « arrache les peaux mortes des bouleaux nacrés », prise dans cette hypersensitivité, cette prose de la mesure dans l'excès. Ou de l'excès dans l'apparente mesure. Autant de ciels où la lumière est sang (sublime Ars Magna, de Milosz) – victoire sur la clarté, lieu et formule, encore, d'une équivoque, d'une brisure déjouée. Soit : qu'il y eut chez l'enfant la découverte d'une vérité jamais oubliée, seulement occultée : celle de la sujétion de la vie au mal. Car le mal est une projection de l'enfant dans la vie éternelle (« Tu te trompes, il est déjà sauvé »). Or, sa figuration rejoint ici celle du bien ; elle en est l'imposture. M'est étonnamment venu à l'esprit le cinéma de Yorgos Lanthimos (« Canine », « Mise à mort du cerf sacré »). Et vous ?
Commenter  J’apprécie          10
Si la théorie selon laquelle la signature de chaque personne, – ou les croyances que d'aucuns utilisent pour vivre – impose la place des uns et des autres dans le monde, elle ne laisse que peu d'espoir aux enfants élevés avec une telle éducation : « Trois grains de sable et beaucoup de rêves, tels sont les méchants comptes que Destinée réserve aux âmes sensibles. » (p 135).
C'est avec une érudition qui frise parfois le déconcertant – et ce, malgré de jolis passages, notamment sur la nature – que Joseph Soletier lève le voile sur le drame de ces existences.
Plus sur http://anne.vacquant.free.fr/av/index.php/2021/02/18/joseph-soletier-la-theorie-des-signatures/

Commenter  J’apprécie          20
Les parents bourreaux inspirent toujours... les romanciers. La Théorie des signatures, premier ouvrage de Joseph Soletier, décrit un père catholique féroce, tyrannique avec ses deux fils, tandis que sa femme se laisse mourir en sainte martyre. Dans la veine de la Vraie Vie, d'Adeline Dieudonné, la caricature maquille la tragédie d'un monde qui opprime les plus faibles, et en premier lieu les enfants, mais avec un style plus érudit, qui fourmille de références aux Écritures et aux sciences de la botanique.
(Le Nouveau Magazine littéraire)
Commenter  J’apprécie          10
J'ai adorer ce livre! Je le trouve très bien écrit, l'auteur fait preuve d'une remarquable sensibilité envers la nature et ce qui l'entoure. J'aime beaucoup cette sensibilité! J'ai savourer chaque moment en le lisant ce livre. L'histoire est passionnante, tellement que je n'arrivais pas à m'empêcher de le dévorer. Ce qui fessait qu'à chaque fois que j'avais un petit moment, même pour juste quelques minutes, je le lisais. Ce livre est incroyable, il est tellement émouvant, ce qu'on retrouve tout au long de la lecture. L'histoire d'Aloys et de Théodore en soi est très touchante mais la façon dont l'auteur la raconte la rend encore plus touchante qu'elle ne l'est déjà. A la fin, je n'ai pu m'empêcher de pleurer en lisant l'épilogue. On s'attache très facilement aux personnages, on rentre dans leur vie et dans leur pensées les plus intimes qu'on est obligé de constater le talent incroyable d'écrivain dont l'auteur est doté.
Lien : https://www.babelio.com/livr..
Commenter  J’apprécie          11

Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Rien, ni jeux ni mauvais coups, ne parvenait pourtant à conjurer durablement l’influence paternelle en ces semaines de liberté. En l’absence du monarque, son règne, sa puissance et sa gloire trouvent à se perpétuer dans les stèles, temples et palais qu’il a pris la précaution d’ériger afin que son action se confonde avec son héritage, son pouvoir avec le souvenir qu’on en garde dans le temps arrêté des inscriptions. Item : les livres accumulés sur la table de chevet formaient un monument à la gloire du père parti en déplacement et dont le règne s’étendait jusque tard dans la nuit à la lumière symbolique de la lampe. Car il ne suffisait pas de lire chaque soir les vagues proses édifiantes, théorèmes théologiques, dissertations visionnaires, ni même de les comprendre, il fallait lui livrer à son retour un compte rendu oral des pages lues et nécessairement intériorisées. Parmi les titres imprimés sur les dos massifs, briques criblées de cunéiformes qui dépassaient de la pile aux airs de ziggourat en ruine, le regard d’Aloys s’arrêtait invariablement aux Phénomènes de la vie mystique, Vera Stigmata, Clefs de l’Apocalypse, à ces noms effarants — « théophanie », « martyrologe », « hagionymie », « patristique » et « patrologie » —, théorie d’orgueilleux vocables en habits d’elzévirs que le père, aussi malversé dans le grec et le latin que dans le syro-chaldéen ou l’hébreu, prononçait avec un respect proche de la verbolâtrie, et dont l’influence persistait dans l’entêtante flaveur des vieilles pages tournées à la hâte — moisissures, rousseurs et encens.
Le crâne d’Aloys résonnait de paroles considérables, appartenant toutes à ces graves idiomes qui lui ramenaient, en écho, les rumeurs déformées du monde depuis sa prime enfance. Des mots sérieux comme des papes y régnaient dans une pénombre hachée de rayons pâles : syllabes latines, grégeoises & judaïques, altitonnants hiéronymes coulés dans la suave atonie du français […], et autres termes issus de ce jargon théologal qui permet à quelques fidèles de suivre les secrets mouvements de l’industrie divine jusque dans les enchaînements liturgiques. Comment ne pas se perdre entre savoir et foi lorsque les nomenclatures latines font écho à la prière et que les épithètes symboliques (Maria Rosa mystica, Vitis florigera, Lilium convallium…) renoncent à couvrir le léger mais tenace parfum de pharmacie qui se dégage des onctions imaginaires ?
Commenter  J’apprécie          00
[…] quelque ascendant que puissent exercer sur nous les hautes futaies aux branches équanimes, belles en vertu des taches d’ombre et de soleil qui marquent la base de leurs troncs uniment cylindriques, c’est surtout le désordre fou, l’apparent manque de proportions, tout le tordu, le biscornu des bois qui nous enchantent ; les brognes et les creux ; la souche festonnée de polypores ardents, soufrés, moelleux ; les sabots de l’amadouvier ; l’effilure des clavaires ; les rouleaux d’écorce noire et les paquets d’esquilles claires ; le long morceau de bois mort qui, achevant de pourrir et de se désagréger, répand un bouleversant parfum de pluie caillée ; les troncs ventrus, gibbeux ; les branchages entortillés comme des paraphes ; les racines empierrées ; on ne sait quoi qui nous forlonge et frappe d’irréalité jusqu’au sentier prochain, et, par-là, plus loin, nous dit que les murs végétaux ont des poumons et les fûts (patibulaires) des oreilles de Judas (Auricularia auricula-judae). Le silence est si profond, si profonde la solitude, que le moindre frisson, le moindre craquement en viennent quelquefois à réveiller les vieux remords dissimulés sous l’écorce des coeurs humains.
Commenter  J’apprécie          10
Il importait […] de faire coïncider l'édifice matériel avec l'édifice-pensée […] pour aboutir à l'immatérielle mosquée-pagode byzantine, la basilique ectoplasme, seule digne du King of Heaven et de son Holy Ghost, qui se dresse au seuil du traité […] en usage dans le rite libéral de l'Eglise australienne et qui remplacerait peut-être un jour Notre-Dame de Paris (la cité impie), lorsque […] celle-ci aurait brûlé.
Commenter  J’apprécie          00
La règle qui veut que l’âge de raison coïncide avec celui des petits calculs et des premières grandes lâchetés.
Commenter  J’apprécie          20
À croire que l’Église n’a d’autre vocation que de dresser un mur supplémentaire entre le Réel et nous.
Commenter  J’apprécie          00

autres livres classés : questionnementVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus

Lecteurs (16) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (2 - littérature francophone )

Françoise Sagan : "Le miroir ***"

brisé
fendu
égaré
perdu

20 questions
3679 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , littérature française , littérature francophoneCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..