Ma sensibilisation pour cette action de la pensée avait une double origine. Je voulais, en premier lieu, perfectionner mes facultés de telle sorte que chaque pensée soit vérifiable dans toute son étendue et qu'aucun sentiment imprécis ne puisse la faire dévier. En second lieu, je voulais réaliser un accord entre un tel mode de penser et l'enseignement de la religion qui, à l'époque, m'intéressait au plus haut degré.
J'ai conscience de n'avoir jamais fait intervenir mes inclinations personnelles dans la description des mondes spirituels, et de m'être toujours conformé à la nécessité inhérente au sujet traité. C'est pourquoi je peux, avec toute l'objectivité requise, restituer la manière gauchement enfantine avec laquelle je justifiais par la géométrie mon besoin de parler d'un monde «que l'on ne voit pas».
Je me disais: pour que l'âme puisse admettre l'expérience du monde de l'esprit, il est indispensable aussi de développer une pensée capable d'accéder jusqu'à l'essence même des phénomènes naturels. Mes troisième et quatrième années au lycée technique furent marquées par ce genre de sentiments. Tout ce que j'apprenais, je l'ordonnais moi-même en vue de m'approcher du but que je m'étais proposé.
Je raconte ces faits conformément à la vérité; bien sûr, ceux qui cherchent des raisons pour qualifier l'Anthroposophie d'enseignement fantaisiste conclueront peut-être que j'avais déjà comme enfant des dispositions fantasques, et que, dès lors, il n'y a pas lieu de s'étonner de voit se former en moi une aussi étrange conception du monde.
RUDOLF STEINER Artiste et enseignant - L'art de la transmission - Céline Gaillard
http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=37325 Rudolf Steiner, tout comme Kandinsky, Klee ou encore Beuys furent tout à la foi...