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Même si ce récit de Manchette n'atteint pas à mon avis la pureté conceptuelle de "la Position du tireur couché" ou du "Petit bleu de la côte ouest" - ou peut-être grâce à ce manque (très relatif) de profondeur, Tardi se sort remarquablement bien de l'adaptation en bande dessinée. Je trouve qu'il a su comme jamais donner une véritable identité graphique à chacun des personnages (ce qu'il ne parvient pas toujours à faire dans son oeuvre propre). le récit de cette course-poursuite, sur fond assez discret de lutte des classes, se lit avec beaucoup de plaisir.
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Le titre a de quoi mettre en appétit. Un pastiche bien frais du célèbre vers rimbaldien aussi décalé que le célèbre « Je suis hanté, le rut, le rut, le rut » de mon poète préféré, sétois que j'aime. Mal armé ? Ce ne sera pas vraiment le cas en tournant les pages.
Et que dire de la couverture ? Un ciel de pluie sur un paysage de campagne déjà tellement triste qu'on peut se demander pourquoi EDF a cru bon de rajouter une ligne à haute tension. Un enfant roux blotti dans les bras d'une fille qui paraîtrait presque tendre. Presque tendre parce que la fille tient un flingue.
Inutile de dévoiler ne serait-ce qu'une once de l'intrigue. Disons juste que le scénario ferait passer Tarantino pour la Comtesse de Ségur et que les dessins de Tardi sont, comme toujours, au service du texte de Manchette, décapant, marrant, barré…
Merci à mes géniales bibliothécaires d'avoir acheminé dans notre petit local cette BD depuis la Grrrande bibliothèque de prêt de Montpellier… Un Tardi/Manchette pour se remettre de la tempête Larisa, quelle bonne idée !
Un petit détail m'interpelle : une référence à Pratt vers la fin du livre. Hommage de Manchette ? de Tardi ? Damned, je suis bon pour essayer de dénicher ce polar de 1973 afin de vérifier…
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Le graphisme de Tardi illustre l'univers noir de Manchette. Il nous entraîne dans la cavale de l'héroïne et dans la traque des tueurs. Les personnages sont brossés avec leurs faiblesses en filigrane chacun ayant sa part d'ombre et de lumière. Tandis nous laisse imaginer certaines parties de l'histoire non dessinées. Petit clin d'oeil à Hugo Pratt et à son héros Corto.
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Une histoire rocambolesque et rythmée, des personnages aussi loufoques qu'improbables, un titre obscur aux accents lyriques et poétiques. La bd refermée, difficile de reprendre son souffle.

S'il est toujours question de malfrats ridicules, de tueurs à gage louftingues, de situations grotesques, Manchette place son décor dans la France populaire des années 70, entre Renault 16, bonnet en laine à pompon et caddies de supermarché. A travers une violence sans discernement et gratuite dispensée par un aéropage de petites frappes, Manchette et Tardi nous sortent de l'univers convenu parisien pour celui de la province. Les forces de l'ordre sont curieusement absentes.

Plus abrutis les uns que les autres, pas la moindre étincelle d'intelligence n'éclaire nos personnages. Impossible pour le lecteur de s'incarner dans la peau de l'un d'entre eux. Même femme et enfant échappent à l'empathie du lecteur : la bêtise le dispute à la beaufitude.

L'exagération des scènes de violence décrédibilise celles-ci. Rien n'arrête l'escalade des moyens mis en oeuvre, surtout pas la raison. Les causes de ce burlesque imbroglio sont d'ailleurs aussi vite oubliées que peuvent l'être le nombre des victimes expiatoires de cette vaudevillesque chasse à l'homme.

Si la pâte de Tardi est délicieusement reconnaissable, la « tronche » des personnages échappe aux merveilleux excès de caricature dont Tardi peut être coutumier. Les mains restent disproportionnées, les yeux juste esquissés.
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Adaptation convaincante, d'un roman qui l'est moins.

Julie Ballanger, à peine sortie de "chez les fous", est embauchée comme nurse du jeune héritier Hartog, Peter, légèrement caractériel.
Dont la fortune est gérée par son oncle original, Michel, qui n'embauche que des gueules cassées, où des gens qui n'ont pas été trop gâtés par la vie.
Ah oui, accessoirement, au même moment il embauche aussi un tueur professionnel, Thompson...

Pas la peine de chercher bien loin ce qui a plu à Tardi dans ce polar, la majorité des personnages sont atypiques et un brin déjantés, ayant chacun leur petits problèmes.

Mais j'ai du mal à la base avec les romans de Manchette, un peu pour les mêmes raisons.
Couplé ici au fait que l'intrigue est à mon sens assez faiblarde, avec des tueurs pros auxquels on ne croit pas trop. Manque de chance, ou pas doués, nos deux improbables héros l'étant bien plus.

Si l'auteur sait très bien choisir des polars qui sortent du lot, j'ai toujours un peu de mal avec ses dessins.
Et si pour le très bon "der des der", j'ai loupé une occasion en ne bouquinant pas ce probablement excellent Daeninckx avant la BD (erreur que je rattraperais un jour), ne m'être penché que sur ce Tardi, et pas sur l'oeuvre originale de Manchette m'apparait bien suffisant, en refermant ce volume.
(plus d'avis sur PP)
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Après une première collaboration avec Jean-Patrick Manchette sur « Griffu » en 1978 et l'adaptation des romans le petit Bleu de la côte ouest et La position du tireur couché, Jacques Tardi adapte un autre roman de cet auteur disparu en 1995. Il n'est d'ailleurs pas le seul à adapter les oeuvres de ce grand maître du polar, comme en témoigne encore récemment « La Princesse du sang » de Max Cabanes.

Cette histoire qui marqua le début de la carrière professionnelle de Jean-Patrick Manchette, raconte la fuite d'un gamin et de sa nounou, poursuivis par un tueur réputé, mais pas vraiment au mieux de sa forme. La mise en place d'une vingtaine de pages est particulièrement réussie et permet de faire la connaissance d'un casting assez savoureux. Une fois que le kidnapping a lieu, le récit prend des allures de road-movie. Cette longue course-poursuite ne réserve cependant que peu de surprises et la confrontation finale, pourvue de scènes violentes un peu gratuites, a eu du mal à me séduire.

Si le scénario de ce kidnapping est très classique, les deux fuyards s'avèrent cependant très attachants et le tout est narré par un expert en la matière. L'histoire est rythmée par une voix-off parfaitement maîtrisée, qui s'attache aux moindres détails, mais n'entrave jamais la fluidité de la lecture. Cette narration précise, quasi chirurgicale, permet de comprendre l'état d'esprit et les motivations des protagonistes, tout en conservant une certaine distance avec les personnages. le lecteur prend également beaucoup de plaisir à retrouver cette tonalité particulièrement foncée qui caractérise les polars à l'ancienne de Tardi et se retrouve plongé au sein d'une ambiance pessimiste et froide, pour une longue décente aux enfers, sombre et sans concessions.

Le dessin noir et blanc et le style si particulier de Tardi viennent encore renforcer cette atmosphère de polar à l'ancienne. L'auteur n'a également pas son pareil pour illustrer le Paris des années 70.
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En 1972, Jean-Patrick Manchette fait paraître en Série noire, sous le n°1489, son troisième roman: "Ô Dingos, Ô Châteaux" après "Laissez bronzer les cadavres" et "L'affaire N'Gustro". L'auteur, à mon sens, n'est pas encore à son zénith. Ses meilleurs titres viendront plus tard avec en 1976, "Le petit bleu de la côte ouest", et en 1981, "La position du tireur couché".

Tardi nous offre l'adaptation BD de "Ô Dingos, Ô Châteaux" en 2011 et signe un chef d'oeuvre.

En dessinateur émérite mais scénariste de moindre efficacité, il est sans cesse à la recherche d'âmes soeurs de talent, lui aux pinceaux et les autres au clavier. Manchette et lui, par exemple, en duo de rêve, "Griffu" (1977) en est la preuve, auraient pu avancer, main dans la main, si la maladie n'avait pas emporté, trop jeune, le romancier. Leur avenir commun était tout écrit: Manchette, en scénariste, la tête perdue dans les cliquetis incessants de la machine à écrire et Tardi, en dessinateur de génie, les pieds dans l'encre de Chine noire, les doigts armés du crayon papier et de la gomme. Mijotaient en eux les mêmes horizons politiques, les mêmes haines, les mêmes (des)espoirs, la même noirceur politique colérique.

Si l'on regarde les profils des scénaristes avec qui Tardi collabora, on constate que, peu ou prou, ils furent tous taillés dans la même mouvance d'idées et d'univers, la même (in)compréhension du monde: Daeninckx, Vautrin, Pennac, Manchette ... D'autres écrivains échappent à cette complicité d'idées quand des cheminements différents conduisirent Tardi à s'occuper de Céline ou de Veran ...

Après le mythique "Griffu" en collaboration rêvée avec Manchette, Tardi, désormais sans le romancier à disposition depuis son décès en 1995, adapte seul trois titres du maître du néo-polar français. Ce sont trois hommages forcenés qu'il ira gratter au fond de lui-même et au plus près des textes incisifs et percutants de Manchette. On trouve successivement en BDs ; "Le Petit bleu de la côte ouest" (2005), "La position du tireur couché" (2010) et le présent "Ô Dingos, Ô Châteaux" (2011). le dessinateur ira jusqu'à les regrouper en triptyque, dans un coffret grand luxe. Ce qui assemble les trois ouvrages BDs est évident, ils suivent la même veine sanglante, la même brutalité sans fard, des destins quasi identiques de héros taillés dans les mêmes moules de déveine et de marginalisation. Et au-delà, le lecteur sent que le dessinateur a voulu rendre hommage à un écrivain d'importance et surtout à l'homme qu'il fut. Il y a du respect derrière chaque trait de plume, dans chaque vignette.

Le dernier album paru, "Ô dingos, Ô châteaux" suit un scénario simple: un road-movie sanglant et brutal confrontant une jeune marginale névrosée en fuite face à un tueur à gages psychopathe à ses trousses. Tardi reprend quasi à l'identique le déroulé de l'intrigue, les variations sont mineures, relèvent du détail, de la nécessité de ramasser encore plus l'intrigue sur elle-même. le texte de Manchette est souvent repris à la lettre, au mot près. Certaines phrases tirées intégralement du roman étaient si fortes que Tardi n'a pu s'en passer: "Le projectile de 11.43 mm entra sous les côtes de Bibi, fit éclater le foie et ressortit par la fesse."

Une nouvelle fois, Tardi utilise son traditionnel noir et blanc. Les contrastes sont appuyés, sans guère de gris intermédiaires. Tout est, au final, noir ou blanc. le background n'est rien, simplement blanc et neutre, banalement évoqué. le noir absolu de l'encre de Chine dessine les hommes au pire d'eux-mêmes, en écho à la noirceur de leurs actes.

Tardi recrée dans le détail les backgrounds urbain et campagnard des années 70. Manchette, dans sa frénésie neo polar minimaliste ne s'y était que peu astreint dans le roman. Pas grave. , comme à son habitude, Tardi se fait plaisir et utilise une documentation énorme. On croise le Lyon et le Paris d'alors; ma campagne du Massif Central, celle inchangée que je n'échangerai plus contre les arbres gommés du béton. On y trouve des képis d'agents de police effacés de ma mémoire; une Simca 1500 d'un temps révolu, celle verte que conduisait mon père; les étals d'un super-marché où l'on cherche les échos consuméristes du passé; le design typique d'un mobilier d'époque étonnant; une DS de chez Citroen; la rondeur rassurante d'une Coccinelle de Volkswagen; une Micheline de la SNCF..... et, surtout, ces armes de poing d'antan que Manchette (hélas..!) vénérait.

Tardi a une manière toute particulière de dessiner les yeux. Deux simples points noirs minuscules les matérialisent. Rien de plus. Ce minimalisme qui les rétrécit à une quasi absence étonne. Sont t'ils même ouverts derrière les lunettes en verre miroir qui les cachent parfois ? le regard du tueur à l'oeuvre du meurtre à gages, ainsi réduit à sa plus simple expression, devient neutre, froid, vide, impersonnel, impavide, effacé de toute humanité, gommé de tout remords de la mort imminente qu'il promet. le lecteur n'y lit rien si ce n'est la seule certitude d'une mort désormais à l'oeuvre. Tout, ainsi, peut arriver derrière ce que Tardine montre pas. L'incertitude de survie, tuer ou être tuée, conduit la victime à la même froideur d'âme, chasseur et chassée se ressemblent dans la traque: le même regard s'impose.

L'oeil renvoyant l'âme, Tardi se passe volontairement de moyens graphiques reconnus pour donner du relief psychologique à ses personnages. Je n'ose imaginer qu'il ne soit pas capable "de rendre" un regard. L'intention est, à mon avis, délibérée quand l'effet est, au final, foudroyant. Les personnages-mystères à l'oeil minimal tendent jusqu'à la rupture l'arc dramatique du récit, l'action est sans arrêt comme suspendue entre deux moments d'incertitude.

Si les yeux ne parlent pas, l'empathie du lecteur à l'égard des personnages fonctionne à plein. Quels sont les mécanismes à l'oeuvre pour qu'une telle alchimie se réalise, pour que l'intégration du lecteur dans le récit soit si forte ? Quelque chose dans les phylactères, dans l'emprunt au texte original de Manchette ? Peut-être ? Même si tout se complique quand on sait que l'écrivain ne s'épanchait pas vraiment sur les ressorts psychologiques de ses héros, laissant place libre aux seuls faits. Je ne sais pas expliquer cette magie, et pourtant elle est là, scotche le lecteur à la force brutale qui se dégage des vignettes. Tardi rend copie d'un chef d'oeuvre alors que le roman original n'en était pas un. Etonnant renversement de situation.

A l'occasion du violent règlement de comptes final, Tardi nous offre dix dernières pages apocalyptiques où l'attention du lecteur, j'allais dire du spectateur, se focalise, presque à défaut de textes, sur un déroulé presque cinématographique des vignettes. On est ici en terrain du 25 images/seconde; le réalisateur ciné que devient Tardi y montre toute l'ampleur de son talent. Chapeau..!

La police n'est qu'ombre au tableau, en son absence on est en pays de polar, de neo polar même quand l'hyper-violence règne sans retenue, quand les faits violents se bousculent l'un l'autre à un rythme diabolique. Tardi avait pris l'habitude, dans d'autres BDs, d'user d'encre de Chine rouge pour surligner la dramaturgie des blessures; ici il n'en fait rien: tout aurait été rubicon.

Tardi, une nouvelle fois, choppe son lecteur et l'emmène loin, au-delà de la simple lecture récréative d'une banale BD, vers un univers sombre où la bonté n'a que peu de place, vers celui, violent et fracassant, où l'humain ne promet rien si ce n'est la mort au bord du chemin.
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Le dessin de Tardi colle à merveille à l'univers glauque et dément de Manchette , peuplé uniquement de psychopathes à divers degrés , on se croirait chez Tarentino , ça flingue partout .
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C'est une histoire un peu dingue. Une histoire de dingos et de châteaux.
De dingos, avec Julie Ballanger, qui sort d'un asile psychiatrique pour être embauchée comme nounou d'un très riche jeune héritier, avec lequel elle se retrouvera coursée par une bande de tueurs à gages très intelligents, mais en fait complètement frappadingues.
De châteaux, avec les réalisations architecturales de Michel Hartog, dont la survie financière dépend de l'héritage de son neveu Peter.
Qui est le plus fou, qui est le plus intelligent ? Qui est le plus pauvre, qui est le plus riche ? Entre mépris humain et mépris de classe, on ne sait plus où donner de la tête...
Ça se termine dans un château complément dingo, sorte de folie architecturale où nos questions trouvent une réponse dans une violence... folle.
Manchette nous offre encore une fois un scénario aux petits oignons, presque du sur-mesure pour le trait acéré de Tardi.
Génialement dingue !

Lu en novembre 2017.
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Après avoir vu l' excellent film (Folle à tuer) et lu le bouquin dont il est tiré
(Ô dingos, ô chateaux), voilà que je trouve et lis dans la foulée, l' adaptation en bd illustrée par Jacques Tardi.
Le graphisme à la foi poisseux et charbonneux de Tardi, colle parfaitement à ce roman aussi angoissant que noir.
Une performance intéressante, pour relancer, sous une forme modernisée, le roman de Jean- Patrick Manchette.
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