1991, palindrome premier.
Franck Thilliez nous convie à un voyage dans le temps. 30 ans exactement, collé aux basques d'un Franck
Sharko fraîchement sorti de l'école d'inspecteurs. Autant dire qu'on prend un coup de jeune à ainsi découvrir les racines de l'un des personnages de fiction les plus marquants du polar.
Les racines du Mal, aussi. Une première enquête où on le découvre et où il se découvre. Premier face à face avec la violence et la folie du monde qu'il va côtoyer durant plusieurs décennies. Que dirait-il aujourd'hui, si on lui demandait de revenir en arrière ?
Ce thriller / polar est un vent de fraîcheur (malgré l'ambiance lourde et sombre). Pour le lecteur comme pour l'auteur. Il n'est pas question d'un « c'était mieux avant », mais de se sortir de l'environnement pesant de 2021 pour une virée temporelle, et de se rappeler qu'une enquête à l'époque ne se menait absolument pas de la même manière que de nos jours.
Les tests ADN en sont à leurs balbutiements, les téléphones portables encore de la science-fiction. Les flics de ‘91 s'usent les semelles pour enquêter.
C'est une double investigation de terrain auquel nous convie l'écrivain, qui visiblement a pris grand plaisir à écrire une intrigue autrement, où l'humain ne se repose pas sur la technologie pour faire le bien ou le mal.
Mais, la folie des hommes n'en a pas besoin. le cerveau humain est la plus formidable des machines, capable d'inventer des mécanismes inouïs pour faire souffrir son prochain.
Sharko se confronte à une enquête hors du commun dès son début de carrière. le voilà directement dans le bain (d'acide).
Objectivement, le pari n'était pas gagné. Depuis le début des années 2000,
Franck Thilliez nous fait vivre chaque année des intrigues toujours plus folles, toujours plus poussées et travaillées. C'était un vrai pari que de revenir en arrière et de devoir construire une histoire autrement.
Le défi est relevé haut la main. L'énigme proposée dès les premières pages est vraiment surprenante et ressemble à un tour impossible, réussi par un tueur qui semble aussi brutal que magicien. le goût de l'écrivain pour les problèmes impossibles à résoudre est toujours bien présent. Reste à
Sharko et toute son équipe à démêler les fils pour comprendre la supercherie.
Sharko, petit dernier de l'équipe, pour être plus juste. A qui on demande de s'occuper des tâches ingrates (archives, distribution de tracts…), avant qu'il ne prouve qu'il a toute sa place sur le terrain. Il sera malmené d'ailleurs pour apporter cette preuve à ses collègues du 36 quai des Orfèvres.
On sent, là aussi, que l'auteur a plongé avec bonheur dans la construction d'autres personnages autour de son inspecteur, de nouveaux caractères.
Sharko n'est pas seul, loin de là.
Avec
1991, l'aspect « polar » prend le pas sur l'aspect « thriller ». Une vraie histoire policière, une tranche de vie de flics de l'époque. Tout réside dans l'inventivité et l'imagination du tueur, et aussi dans la malice des enquêteurs.
Thilliez est autant auteur de talent que prestidigitateur. Même avec d'autres éléments, il arrive encore et toujours à construire des histoires impensables, avec ce goût du jeu avec le lecteur. Et cette capacité à décrire le Mal.
Et puis, le sujet de fond est loin d'être has been. Il est au contraire encore cruellement d'actualité. Là aussi, l'auteur fait fort.
1991, période bénie pour une vraie enquête de terrain. Sauf qu'avec le génie de
Franck Thilliez, une intrigue n'est jamais que simplement policière. Et cette cure de jouvence pour Franck
Sharko l'est aussi pour le lecteur. Décidément, tout lui réussit à
Thilliez !
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