AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,25

sur 204 notes
Coincé dans son appartement bruxellois par le confinement consécutif à la pandémie de mars 2020, Jean-Philippe Toussaint organise ses échappatoires. Ses après-midis seront consacrés à la traduction de la nouvelle de Zweig, le Joueur d'échecs, dont le protagoniste Monsieur B., assigné à résidence par la Gestapo, ne tient le coup que parce qu'il a réussi à subtiliser un ouvrage consacré au jeu d'échecs. Et puisque, lui aussi, comparant ce jeu à la vie, y voit une façon rassurante d'approcher le monde, le matin il écrira son prochain livre, L'Echiquier. Un programme qui devrait d'autant plus lui convenir en cette période déstabilisante qu'il se fait cette réflexion : « Qu'importe ce que je recherche à travers l'écriture, qu'importe, finalement, ce que les livres racontent, l'écriture est cet abri mental dans lequel je me réfugie pour résister au monde. le livre, pendant que je l'écris, devient un sanctuaire, un lieu clos où je suis protégé des offenses du monde extérieur. »


Dès lors, structurant son texte en soixante-quatre fragments pour arpenter la géographie de sa mémoire, non pas de manière linéaire mais par bonds et gambades à la manière du cavalier dont la polygraphie ne lui permet pas moins de parcourir toutes les cases de l'échiquier sans jamais repasser par la même, l'écrivain s'observe, à mesure que, de souvenirs en souvenirs, il commente la genèse de ce premier ouvrage autobiographique, entreprendre « un parcours vers les origines », une plongée à la rencontre de son « continent englouti », là où sous la surface du visible gît « quelque chose de noué », un « noeud secret qu'il s'agit d'élucider ». Et ce qu'il met au jour, en une sorte de dédoublement qui lui fait assembler des éclats de son enfance, de son adolescence et de sa vie avec Madeleine en un tout romanesque – souvenons-nous que Monsieur B., à force de jouer dans sa cellule, mentalement et contre lui-même, les parties proposées dans son livre, s'est lui aussi dédoublé au point de se retrouver au bord de la schizophrénie –, ce qu'il découvre, avec beaucoup d'émotion, qui explique ni plus ni moins que sa vocation d'écrivain en même temps que son goût pour le jeu d'échecs, c'est sa relation à son père.


Maniant ainsi, comme Nabokov qu'il analyse avec admiration, la virtuosité de la ligne – c'est-à-dire de la construction d'ensemble du roman : « C'est très technique, et cela demande beaucoup de préparation. Cela me fait penser à certains coups d'échecs, apparemment anodins ou innocents, qui préparent en réalité une subtile combinaison à long terme » – et la virtuosité du détail – « c'est quand Nabokov, délaissant les grands desseins de la composition, s'empare d'un pinceau très fin et intensifie un contour, accentue un cil. C'est la souplesse, c'est la ductilité de son trait de plume, c'est la précision de sa touche, pour souligner un détail, faire vivre un reflet de lumière sur le velouté d'une épaule, chatoyer une couleur, briller un rayon de soleil sur le pare-brise d'une voiture ou dans les lunettes d'un personnage, dans lequel on aperçoit soudain, en reflet, avec un frisson d'incrédulité, la tête chauve de l'auteur – qui vous fait un clin d'oeil » –, il réussit, par petites touches servant, au millimètre près, un dessein d'ensemble savamment calculé, encore une fois dans le droit fil de la métaphore du jeu d'échecs, un livre assurément brillant, original dans sa construction, drôle et émouvant dans l'intimité de ses questionnements existentiels, d'une grande beauté enfin quand il évoque sa relation à son père. Un père qui, très symboliquement, refuse soudain de se mesurer à lui lorsque le fils se retrouve assez fort pour le battre aux échecs, mais qui, effaçant toute rivalité, l'encourage à devenir écrivain comme lui.


Entre journal de confinement et exercice autobiographique, un récit aussi brillant que singulier qui, filant la métaphore du jeu d'échecs, déroule, en même temps que la bobine de vie de l'auteur, son rapport à l'écriture et, à travers elle, à la vie et à la mort. Aujourd'hui plus que jamais, si Jean-Philippe Toussaint a la passion des échecs et de la littérature, c'est parce qu'ils lui offrent « une protection intellectuelle inégalable contre les menaces du monde extérieur. »

Lien : https://leslecturesdecanneti..
Commenter  J’apprécie          8816
* ZUGZWANG mot compte triple *

Et me voilà bien obligée de jouer, de mettre à la disposition de vos mirettes mon humble critique de ce bouquin.
Pourtant ce n'est pas facile !
Tel le Mogadon (mais sans accoutumance), l'échiquier a sur moi un effet soporifique bienfaisant et bénéfique.
* Fini la vie de Panda, grâce à l'échiquier, vous ne serez plus cernés !*

Jean-Philippe Toussaint nous livre sa vie en 64 cases. Il fallait bien trouver quelque chose à faire pendant le confinement. Partant de là, ca peut être bien ! le bonhomme écrit bien... j'ai de lointains souvenirs de Fuir qui n'était pas trop mal.

Et que nous raconte l'auteur ?

Je vous livre ça en vrac :
- Son écriture et ses livres, ses difficultés de traduire Zweig
- Sa rencontre avec Madame
- La mise en scène de sa pièce Echecs
- ses souvenirs de parties d'échecs
- ses amis d'enfance
- ses simultanées
- ses amis disparus
- maman, papa,...

Le problème, Jean-Phi, il a oublié de roquer !
Et de là, on a l'impression qu'il ne maitrise plus son autobiographie et qu'il y a trop de cases sur son échiquier. J'aurais préféré un blitz ou un 50 coups.
Rien grand chose n'a éveillé mon intérêt, le zygomatique n'a nullement frémi, l'oeil n'a pas frisé.

Une chose est certaine, il ne m'a pas damé le pion !




Commenter  J’apprécie          5817
Jouer avec la vie
ou
vivre pour jouer ?

Vivre. Apprendre à vivre. C'est un peu comme prendre le train en marche. On n'a pas le choix : il n'y a ni cours ni mode d'emploi. Désolé, Georges.

C'est brutal. Alors, l'on ressent le besoin de se protéger, peut-être en intercalant quelque chose entre soi et les faits nus. Un sens, quelque chose qui donnerait, qui ferait sens. Ou au moins, qui reformulerait les données, qui procurerait l'illusion du contrôle que l'on souhaiterait avoir. Peut-être même, quelque chose qui permettrait de vivre ailleurs…

Si la vie est affaire tellement sérieuse, pourquoi ne pas choisir un jeu ? Un jeu dont la complexité serait telle qu'on pourrait s'y perdre ? Et qui conférerait aux joueurs une maîtrise quasi totale : connaissance parfaite des règles, par ailleurs fixes, des buts, des moyens et du territoire. Est-ce pour cela que, jeune, Jean-Philippe Toussaint a été séduit par le jeu d'échecs? Un jeu qui, avec ses dix à la puissance cent vingt parties possibles, avoisine la complexité de la vie humaine, mais où l'on peut choisir où et quand jouer.

Mais même le grand maître ne crée pas le jeu d'échecs. Il le joue, il domine peut-être ses adversaires, mais il subit autant qu'eux les règles et le chronomètre. Tandis qu'il est des activités où le joueur peut créer le jeu même. Par exemple en littérature. Est-il étonnant que Jean-Philippe soit devenu écrivain ?

Mais la vie peut, tout à coup, contourner les meilleures défenses. Un virus, le confinement, mettent à plat la vie professionnelle de l'auteur. Qui, dès lors, redéploie ses armes pour faire face. Pour occuper le vide laissé par les conférences que l'on ne donnera pas, les voyages qu'on ne fera pas, les rencontres qu'on n'aura pas, il décide d'écrire. Traduire une nouvelle de Zweig faisant une large part au jeu d'échecs - voilà qui est indiqué ! Et puisque l'écriture et le jeu sont des vies symboliques, des manières de négocier la vie, bien réelle, pourquoi pas un ouvrage autobiographique ? Un ouvrage où l'on essayerait de démêler les faits, les écrits, les jeux, qui ont structuré cette vie au point d'en former le tissu, la substance ?

C'est ce livre que je vous propose de lire.

Ah, j'oubliais. L'auteur est un grand anxieux. Il n'arrête pas de se rassurer en nous expliquant ses mérites littéraires. Allons, Jean-Philippe, respirez bien à fond, comptez jusqu'à dix, dites vous bien qu'on vous aime. Ca va mieux ? Bon, alors continuons. Mais avec quatre étoiles au lieu de cinq. A force de carillonnades vous vous faites sonner les cloches.








Commenter  J’apprécie          563
Quatrième de couverture : Je voudrais que ce livre soit l'échiquier de ma mémoire.
Le livre : 64 chapitres comme les 64 cases de l'échiquier.
Sur l'échiquier un pion atypique : le cavalier. Celui ne se déplace pas en ligne droite. Il navigue sur l'échiquier et ne repasse jamais sur la même case. Il visite donc les 64 cases de l'échiquier.
La case 1 ou premier chapitre de Jean Philippe Toussaint est très court , une phrase : "j'attendais la vieillesse, j'ai eu le confinement "
Nous sommes en 2020 à Bruxelles au début du printemps, le premier confinement a été mis en place depuis peu.
Jean Philippe Toussaint va profiter de cette période pour mettre en place une triple activité : la traduction de la nouvelle de Stefan Zweig "l'échiquier", l'écriture d'un essai sur la traduction et enfin la mise en place d'un texte en 64 chapitres.
Rapidement il ne restera qu'une double activité. Jean Philippe Toussaint laissant tomber l'essai sur la traduction.
Ce livre tient du journal et de l'autobiographie.
Tout cela donne un livre fin et intelligent qui nous parle de littérature, de création et surtout des échecs.
L'émotion vient nous cueillir à la fin du livre, une sorte d'échec et mat.
Lien : http://auxventsdesmots.fr
Commenter  J’apprécie          310
Le livre en train de s'écrire

C'est durant le confinement que Jean-Philippe Toussaint a écrit son livre le plus intime, où il évoque ses souvenirs d'enfance, son père, ses amis à son oeuvre littéraire. le tout en 64 chapitres, comme autant de case de L'échiquier.

«Les échecs — leur symbolique, leur romantisme, leur abstraction rassurante — ont toujours été intimement mêlés pour moi à l'écriture. Ils sont le sujet de mon premier roman, Échecs. Et, depuis que j'ai donné ce même titre, Échecs, à ma traduction de la nouvelle de Zweig, les deux textes se rejoignent dans mon esprit dans une boucle temporelle vertigineuse. Je commence ainsi à prendre conscience que, si je continue à tirer sur ce fil — le fil du jeu d'échecs —, c'est toute la pelote de ma vie qui pourrait se dévider, se débobiner et se dérouler dans ces pages.» Et voilà comment, durant les journées de confinement Jean-Philippe Toussaint décide de meubler son temps en divisant sa journée en deux, la traduction de Échecs de Stefan Zweig d'une part et l'écriture de réflexions autour de sa passion pour ce jeu d'autre part. C'est cette seconde partie qui a donné ce livre riche de souvenirs et qui va bien au-delà du projet initial. Car effectivement, très vite la pelote de sa vie s'est dévidée… Une pelote que l'on voit se dérouler au fur et à mesure dans ce livre en train de s'écrire.
Son point de départ pourrait se trouver dans un hall d'école, pavé alternativement en plaques blanches et noires. Des cases sur lesquelles les pièces seraient constituées des membres de la famille, des amis d'enfance, des auteurs qui ont accompagné l'auteur de la salle de bain. À la place du roi et de la reine, on placera son père Yvon, «directeur du Soir de Bruxelles, une personnalité reconnue, bien introduite auprès de la classe politique et habituée des plateaux de télévision» et avec lequel il jouera longtemps aux échecs. Jusqu'à ce qu'il soit plus fort que lui et qu'il mette fin à ces échanges, se refusant à perdre. Un père qui aura la lucidité de voir en son fils un futur écrivain. Sur sa mère, qui tenait une librairie-galerie, il est plus discret, mais aussi plus tendre, tout comme pour ses deux grands-mères et pour Madeleine, celle qui deviendra son épouse.
S'inspirant de Georges Perec – il s'agit d'aller d'une case à l'autre sans jamais y revenir – le romancier passe de la famille aux amis, les Bonhomme, Garrec, Caratini, Lehrer. Ou encore Dominique D. un camarade de classe fantasque dont il apprendra la mort tragique. Un drame qui frappera aussi Gilles Andruet, le champion d'échecs qui le fera progresser et dont il ne voudra pas croire qu'il a été assassiné.
Hommage émouvant aux amis disparus, ce livre évoque aussi les grands maîtres, Fischer et Spassky, Karpov et Kasparov, Youssoupov ou encore Kortchnoï que l'auteur a failli pousser au nul, sans doute l'une de ses réussites majeures.
Bien entendu, la littérature échiquéenne ne pouvait manquer dans ce livre. Zweig, cela va de soi, tout comme Perec, mais aussi Nabokov et sa Défense Loujine, Borges et même Lewis Carroll.
Dans cette vraie-fausse autobiographie, Jean-Philippe Toussaint joue beaucoup et propose au lecteur de jouer avec lui. Avant de finir sur une note plus grave, comme il l'a confié à Livres-Hebdo : «Dans le jeu d'échecs le rapport à la mort est évident, il faut tuer le roi, le temps se réduit comme peau de chagrin, le temps de la partie c'est le temps de la vie. Il y a de même dans le travail d'écriture cette acuité au temps qui passe. Je crois qu'il faut être hypersensible à la mort pour bien écrire.» Est-il utile d'ajouter que ce livre est très bien écrit ?


Lien : https://collectiondelivres.w..
Commenter  J’apprécie          311
Avec l'échiquier, Jean-Philippe nous offre un coup de maître! Sûr de son art, il s'offre le plaisir de jouer avec son lecteur autour d'une partie en 64 coups, comme tout autant de cases que comporte l'échiquier. A la fin, c'est la littérature qui gagne.
Chacun de ces 64 chapitres est pour lui l'occasion de se livrer, de confier son amour de la littérature et des événements qui l'ont amené à en faire sa vie.
Comme toute partie d'échecs, ce livre comporte une ouverture pendant laquelle le joueur déploie ses pièces (sa jeunesse à Bruxelles, ses amitiés adolescentes, les souvenirs de la maison paternelle) et un final où le Roi sera mat!

Aussi dans certaines parties, on perd un peu le fil de notre idée originelle. C'est aussi le cas de ce récit et il l'assume complètement…Alors il continue à nous balader sur l'échiquier de ses confidences, pas au rythme linéaire du pion, plus à la manière d'un cavalier, cette pièce fantasque et intrépide qui se permet de sauter par-dessus d'autres pièces de faire deux coups en arrière et un pas de côté. Sur ce terrain, il excelle, ayant été initié très jeune aux subtilités des jeux de stratégie et il s'amuse, à notre plus grand plaisir.

Jean-Philippe Toussaint souhaitait que son livre soit “sensible, concret, malicieux, humain, ombrageux, imprévu, généreux” et c'est absolument réussi.
L'élégance de son style, l'audace de la structure et la finesse de son regard en font un bijou de littérature. Une des merveilles de la rentrée littéraire 2023.
Commenter  J’apprécie          251
« J'attendais la vieillesse, j'ai eu le confinement » C'est sur ce quasi alexandrin que J.P Toussaint commence ce que l'on pourrait nommer son  « journal de confinement.» En effet, comme l'explique l'auteur hanté par la vision du désoeuvrement, dans la mesure où tout ce qui était prévu fut soudain annulé, il fallut trouver d'autres occupations. Ses projets partent alors dans trois directions : une traduction du « Joueur d'échecs » de S. Zweig (roman dans lequel un personnage central est confiné lui aussi!), un essai sur la traduction (qui va très vite être abandonné) et un livre autobiographique qui prendra la forme d'une plongée en soi-même, d'un va-et-vient constant entre les lieux d'autrefois et ceux d'aujourd'hui, un texte qui sera en somme une espèce d'« échiquier de la mémoire ».
Jamais me semble-t-il le ton de J.P Toussaint n'a été aussi personnel ni aussi intime.
Ce confinement le ramène dans un premier temps vers les lieux du passé : l'école de la rue Américaine, le quartier de l'enfance : les rues Jules Lejeune et Washington, la place Leemans à Bruxelles, le collège de l'Ermitage... À vrai dire, j'avais l'impression de lire un texte de Modiano : les mêmes évocations un peu troubles, la même opacité qui donne un caractère étrange et mystérieux aux souvenirs. Des noms et des prénoms reviennent mais pas forcément des visages. L'auteur raconte le destin incroyable d'amis qui sont morts, très jeunes souvent. Il semble surpris par le peu de choses dont on se souvient des gens qu'on a croisés. Toussaint nous transporte dans un passé lointain et gris duquel émergent des êtres aux contours flous tandis que d'autres visages se font plus précis.
Évidemment l'auteur s'interroge : « L'heure de l'autobiographie, pour moi, aurait-elle sonné ? » La mort rôde… Difficile de ne pas se sentir concerné par le temps qui passe. le ton devient mélancolique.
Les souvenirs d'enfance conduisent l'écrivain à évoquer le jeu d'échecs auquel il jouait régulièrement avec son père, grand journaliste et directeur du Soir. Se dessine alors la relation au père et le souhait de ce dernier que son fils devienne écrivain. « Je n'ai pas eu la vocation, j'ai eu la permission.» Et de préciser : « Le livre que je suis en train d'écrire est un livre d'origine. C'est l'histoire d'une vocation, non pas comment je suis devenu joueur d'échecs - non, je ne suis pas devenu joueur d'échecs-, mais comment je suis devenu écrivain. »
J.P Toussaint propose aussi des analyses, des réflexions théoriques au sujet de la littérature. Il dit ce qu'elle est ou n'est pas. Il dit de quel ordre est son travail sur la langue et les mots.
À cela s'ajoutent des passages vraiment très drôles : certaines scènes sont franchement irrésistibles comme celle où il essaie des masques dans une pharmacie, celle du rendez-vous chez l'ophtalmologiste, le docteur Praggnanandhaa ou bien la scène où il avoue à Madeleine, sa femme, que cette crise sanitaire « finalement, ça l'arrange » (en effet, visiblement, il a plutôt très très bien vécu son confinement!) Nous assistons là à de véritables scènes d'anthologie ! Ses réflexions sur ses problèmes de traduction sont aussi très amusantes. Cela crée des ruptures de ton étonnantes où l'on surprend l'auteur dans sa vie quotidienne..
Toussaint nous propose ainsi un récit autobiographique fragmenté en 64 chapitres (comme les 64 cases du jeu d'échecs.) le propos semble moins structuré qu'à l'ordinaire et donne l'impression d'épouser le flux de la mémoire : on passe d'un souvenir à l'autre, d'une anecdote à une réflexion sur l'écriture ou la vie. Tout est mouvement et l'on se déplace librement sur l'échiquier de l'existence : « Tout au plus me contenterai-je de promener négligemment mon Cavalier de case en case au gré de mes souvenirs, en tâchant de redonner vie à quelques fragiles silhouettes furtives et émouvantes qui ont traversé ma vie. »
« L'échiquier » est un texte très intime dans lequel on a l'impression de découvrir un auteur qui dit souhaiter que ce livre soit « un rempart contre le monde extérieur, un talisman, une égide. Je voulais que ce livre soit une réflexion plus ample sur la littérature, je voulais que ce livre dise l'origine de ce livre, qu'il en dise la genèse, qu'il en dise la maturation et le cours, et qu'il le dise en temps réel. Je voulais que ce livre soit sensible, concret, malicieux, humain, ombrageux, généreux, je voulais que ce livre soit tout à la fois un journal intime et la chronique d'une pandémie, je voulais que ce livre ouvre la voie à la tentation autobiographique, qu'il soit une conjonction de hasards et de destinée, de contingences et de nécessité... »
Oui, le livre est tout cela. Il m'a beaucoup touchée.
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
Commenter  J’apprécie          241
Livre prétentieux et sans intérêt
Comme disait Brel : « et moi qui suit le plus fier , je parle encore de moi »
Ce que fait Philippe Toussaint tout au long de ce livre sur fond de confinement
Il veut traduire le joueur d' échecs de Stefan Zweig
Pourquoi pas mais aussi en faire un tryptique
Cette ambition se heurte à un description du quotidien ou à une évocation de sa vie personnelle .Il est loin du talent de Sweig
Philippe Toussaint a un égo un peu surdimensionné et se considère comme un écrivain majeur au point de prendre de haut toute critique avec un mépris certain pour celui ou celle qui oserait critiquer son oeuvre, car, n'est-ce pas, il faut un certain niveau pour comprendre des auteurs majeurs comme lui
Que de suffisance !
il doit être pourtant bien introduit dans le milieu fermé des éditeurs pour que ce livre soit noté cinq étoiles par certains
On est loin de Primo Levi, Dostoïevski Steinbeck ou Victor Hugo ,etc… qui ,eux , méritent, la note maximale
A tout mélanger, on discrédite les grands textes
Celui-ci, L' échiquier , est une petite production par temps de confinement qui sera vite oubliée
Un livre inutile, tout simplement
Commenter  J’apprécie          235
Je ne suis pas faite pour intégrer un site comme celui-là. Pourquoi me direz vous ? Tout simplement à cause de mon système de notation et de mon appartenance à des valeurs universelles. Primo, je note entre 1 et 5 étoiles, secundo, je ne peux pas admettre qu'une oeuvre comme "L'échiquier" soit notée aussi généreusement par une partie des adhérents à ce club. Pourquoi biaiser le système, quel est votre but ? Nous sommes tous perdants au final.

J'ai bien conscience de ma médiocrité en tant qu'écrivaine, je n'ai d'ailleurs jamais tenté ma chance, et croyez moi, j'ai beaucoup d'estime pour chacun des auteurs. Lorsque je note leur travail, je ne note pas la personne, mais leur livre. Faut-il le rappeler à Jean- Philippe Toussaint ?

Je connais l'homme, et c'est avec humilité et modestie que je lui dit bravo pour s'être mis à nue dans son dernier roman. Mais, tout lecteur, amateur d'échecs ou pas ne peut pas être accaparé par sa prose et son histoire.
Je suis désolée d'avoir noté cet ouvrage à la hauteur de mon ressenti, et je peux comprendre que certains puissent mettre 3 étoiles. Je reste néanmoins totalement dubitative lorsque je vois fleurir des 5 étoiles au cimetière des hypocrites.

Je sais que ce post déchainera des critiques à mon encontre. J'assume mes propos. Par exemple, j'assume 5 étoiles pour " Si c'est un homme" de Primo Levi, alors comment puis je donner une note comparable à " L'échiquier" qui n'est autre qu'un délire égocentrique que j'espère passager.
Soyez indulgents à mon égard, je suis déjà si triste d'avoir passé un si mauvais moment en compagnie de ce bouquin.

Le 11 octobre:
Je crois avoir été un peu trop excessive sous le poids de la souffrance infligée par cette lecture, je révise ma note en pensant aux trente dernières pages qui sont à la hauteur de mes attentes. Mon avis en donnant une seule étoile est sans doute une sanction trop forte.
Commenter  J’apprécie          2114
Quand j'entreprends la lecture de l'Échiquier j'ai en tête le tableau de Paul Klee, pas l'un des séries des polyphoniques qui présentent des agencements ordonnés de couleurs mais celui en noir, blanc et gris qui donne dans le rhythmique. Un échiquier aux délimitations mouvantes où sont introduites syncopes et variations telle une partition visuelle.
C'est en virtuose que Jean Philippe Toussaint se déplace sur les cases de l'échiquier, plus exactement sur les 64 cases comme les 64 chapitres du livre, il se réfère d'ailleurs à la technique de la polygraphie du Cavalier, déjà utilisée par Georges Perec, qui consiste à parcourir le plateau d'échecs sans jamais s'arrêter deux fois sur la même case. Livre sur la mémoire et toujours à la frontière entre l'autobiographie et l'autofiction, Jean Philippe Toussaint parle en effet de lui, de son enfance, plus généralement de sa vie, de sa relation avec les échecs. Il déroule le fil par scènes et joue avec l'espace-temps en digressant les codes.
Mais le coup de maître de Jean-Philippe Toussaint c'est de s'autoriser les variations les plus déroutantes car plus qu'une autobiographie, ce texte est un travail sur l'écriture, une réflexion sur la littérature où tout est minutieusement maitrisé.
« le livre que je suis en train d'écrire est un livre d'origine. C'est l'histoire d'une vocation non pas comment je suis devenu joueur d'échecs – non, je ne suis pas devenu joueur d'échecs, mais comment je suis devenu écrivain. » p.196.
Commenter  J’apprécie          170




Lecteurs (419) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1724 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *}