Mes frères de sang

Emprunté à la médiathèque pour finir le challenge ABC ! C'est souvent l'occasion de très belles découvertes.
Diego, américain, a été accueilli durant l'année 1973 chez la famille Benevento au cours d'un échange universitaire. A cette époque-là, en Argentine, les jeunes réclament le retour de Perón au pouvoir et les fils Benevento ne sont pas les derniers à s'activer. Miguel et Alejo, les frères de sang de Diego, tractent, militent pour sortir leur pays du chaos, espérant de Perón qu'il soutienne le peuple.
Diego retourne aux Etats Unis et l'Argentine entend le bruit des bottes résonner : la dictature s'installe, par milliers les militants disparaissent ou sont assassinés, les mères défilent à la Plaza de Mayo, les familles sont défaites, ruinées.
Diego reste sans nouvelle de la famille et de ses amis argentins, jusqu'en 1983 où, enfin, une lettre lui parvient. Avec sa femme Betty Ann, ils font le voyage vers une Argentine en proie à une crise économe ravageuse. Ils sont accueillis chez papa et maman Benevento, qui pleurent l'assassinat de Migueleto et la disparition d'Alejo.
Diego vient officiellement, en tant que journaliste, couvrir le début du procès des comandates - généraux et amiraux coupables des exactions et autres crimes commis pendant la dictature. Les témoignages s'accumulent, durant les audiences mais aussi au sein de la CELS, l'association dans laquelle travaillent les hôtes de Diego, chargée de recueillir les preuves et de constituer les dossiers à charge contre les tortionnaires.
Un climat d'insécurité règne à Buenos aires, les militaires n'ont pas dit leur dernier mot et ils continuent de terroriser leurs victimes, potentiels témoins venus à la barre exposer leurs blessures. La famille Benevento est-elle même menacée, subit des intimidations incessantes et Diego et Betty Ann sont embarqués dans cette course folle pour échapper aux hommes des comandates.
Nourri par l'expérience de l'auteur qui s'inspire beaucoup de sa propre histoire, c'est un roman passionnant, pédagogue et très bien traduit. Douglas Unger explique simplement des événements historiques complexes et ce n'est jamais ennuyeux. C'est par contre très oppressant : le récit des tortures, la pression quotidienne exercée par les militaires, la violence chaotique, l'inflation galopante qui voit le cours de la monnaie changer chaque heure, …
Le sentiment aussi que, quel que soit le pouvoir en place, la corruption et la terreur continuent de régner. On souffre pour le peuple argentin, fier et courageux, qui jamais ne baisse les bras. le couple Benevento incarne magnifiquement cette histoire nationale, celle d'un pays livré à une dictature sanglante qui dépouille de tout.
Très beau roman, terrible récit.
Challenge ABC 2021/2022