1994, dans le Nord de l'Australie. D'épais nuages s'approchent de Perdition, une ferme à crocodiles qui maintient ses employés sous le joug de la terreur. Seule la présence d'une jeune femme blonde dénote avec l'hostilité de l'endroit. Alors que le déluge se rapproche, c'est surtout la colère de Connors, le maître des lieux et le père de la belle, qui est à redouter. Ce raciste notoire vient en effet d'apprendre que sa fille chérie sort avec l'un des noirs qu'il exploite. Fou de rage, il envoie un chasseur sans scrupules à leurs trousses. La tempête gronde de plus en plus fort ...
Associés de longue date ("Règlement de contes" chez Soleil, "Welcome to Hope" et "
Parce que le paradis n'existe pas" chez Bamboo), les deux Damien (Marie et Vandenstraeten) se lancent dans un nouveau polar sordide, entièrement dans l'esprit de "Welcome to Hope".
Situant ce diptyque Down Under, dans un endroit lugubre, aux mains d'éleveurs xénophobes et surplombé d'un ciel aussi menaçant que les crocodiles qui y grouillent, les auteurs invitent donc à découvrir un nouveau bled où les hommes se font justice eux-mêmes et qui n'a absolument rien à envier au trou perdu qu'ils avaient ironiquement baptisés «Hope». Une fois le décor planté et l'idylle contre-nature découverte par le paternel d'Angie, le récit prend des allures de road-movie assez classique. le rythme s'accélère et la traque sans merci distille bien vite son lot d'abominations et d'horreurs. le suspense monte crescendo jusqu'à cette dernière page qui laisse présager que le pire n'est malheureusement pas encore atteint.
Si cette histoire d'amour entre un aborigène et une blanche n'hésite pas à mélanger les couleurs, la colorisation adéquate de
Cyril Saint-Blancat se cantonne principalement à des tons aussi sombres que les perspectives d'avenir de ce couple mixte. Derrière une couverture qui préfigure le contenu de ce thriller jubilatoirement noir, Vanders livre des visages hargneux, dont la dureté fait autant froid dans le dos que la bêtise et la cruauté qu'ils dissimulent. Les paysages boueux, le bestiaire sanglant et le ciel orageux contribuent à installer une atmosphère pesante, parfaitement en accord avec l'ambiance glauque et malsaine imprégnée par le scénario.
Si la route qui mène à Perdition ne déborde pas d'originalité, elle est cependant marquée par l'efficacité d'un duo parfaitement rodé et adepte de polars bien sombres ...