Lire un roman de
Fred Vargas c'est comme renouer le contact avec des membres de sa famille perdus de vue. On prend de leurs nouvelles avec plaisir et on s'inquiète lorsque l'on voit qu'ils ne vont pas bien.
Car oui, rien ne va plus dans la brigade du commissaire Adamsberg.
Si vous n'êtes pas familier avec les personnages de Adamsberg, Danglard, Retancourt et les autres, je vous invite à cesser de lire ma critique sur le champ. et à vous procurer
l'Homme aux cercles bleus, premier volet des aventures d'Adamsberg.
Car ici, je fais ma critique en partant du principe que ceux qui la lisent connaissent les petites manies de chaque membre de la brigade. Les fringales du lieutenant Froissy, l'érudition du commandant Danglard, l'extraordinaire mémoire du brigadier Estalère sur les goûts de chacun en matière de café, les connaissances prodigieuses du lieutenant Voisenet en matière d'ictyologie, sans oublier la déesse Retancourt et sa capacité jamais égalée de convertir son énergie pour accomplir des prouesses. Et Adamsberg, flegmatique commissaire, pelleteur de nuages, capitaine du navire La Brigade qui doit faire face à un début de mutinerie.
Bien sûr, il y a eu des précédents. Déjà, dans
Sous les vents de Neptune, la Brigade s'était divisée entre les pelleteurs de nuages, fidèles au commissaire et les plus pragmatiques qui ont suivi le lieutenant Retancourt.
Mais ce n'était rien comparé à ce qui se trame dans
Quand sort la recluse.
Tout commence quand Adamsberg utilise l'ordinateur du lieutenant Voisenet, parti ramener une murène chez sa mère. Il découvre que le zoologue amateur s'intéresse aux araignées et plus précisément à la recluse. Une timide arachnique qui aurait causé la mort de deux personnes. Et Adamsberg, ça le travaille. Un spécialiste des poissons n'est pas censé s'intéresser aux araignées.Et puis il y a quelque chose d'autre qui le travaille. Qui le pique. Qui le gratte. Et comme le dit si bien Lucio, "si une araignée te pique, hombre, il faut gratter la piqûre jusqu'au bout".
Alors Adamsberg va gratter et encore gratter. Quitte à se mettre à dos son plus fidèle adjoint, Danglard. Il va mener une enquête officieuse pour débusquer cette recluse. Car il le sait, il le sent. Celle-ci n'a pas fini de piquer. Ni de tuer.
J'avais été plutôt déçue par
Temps glaciaires et
l'Armée furieuse (d'ailleurs, ça me fait penser qu'il faudrait que je fasse la critique de tous les
Fred Vargas...un jour). Ce n'est pas que les romans n'étaient pas bons, loin de là. Mais ils étaient largement en dessous de
l'Homme aux cercles bleus, d'
Un lieu incertain et surtout de mes deux préférés,
Sous les vents de Neptune et
Dans les bois éternels.
A croire que
Fred Vargas a lu dans mes pensées car avec
Quand sort la recluse, j'ai retrouvé ce qui m'avait tant manqué. Un tueur insaisissable digne d'un duel au sommet avec le génial Adamsberg. Un jeu du chat et de la souris mortel. Des victimes qui tombent comme des mouches. Et des fausses pistes qui s'accumulent.
Mais surtout, ce que j'ai le plus apprécié dans
Quand sort la recluse, c'est que pour la première fois, Adamsberg doute. Il est perdu dans les brumes de son esprit et il ne sait pas comment s'en sortir. Alors il passe au second plan, d'une certaine façon. Et l'on comprend finalement que, même sans lui, la Brigade est parfaitement fonctionnelle.
Pour moi,
Quand sort la recluse est le roman le plus abouti de
Fred Vargas car il finit ce qui a été amorcé par
Sous les Vents de Neptune. Les différents membres de la Brigade ont fini par trouver une identité propre et sont aujourd'hui susceptibles de prendre enfin leur envol, à l'instar du pigeon sauvé par Adamsberg dans
l'Armée furieuse. Un pigeon qui vit sa propre vie mais qui revient toujours auprès d'Adamsberg.
Un seul bémol : Danglard. Je ne le reconnais plus. Et je me demande si Vargas n'a pas modifié son comportement afin de mettre en avant Veyrenc. Car il est ici flagrand que le second Béarnais de la Brigade a pris la place du Wikipédia sur pattes auprès d'Adamsberg.
Quoiqu'il en soit, si vous avez lu tous les romans de Vargas, foncez la tête baissée. Vous adorerez forcément
Quand sort la recluse.
Pour les autres, qui ne connaissent pas l'univers de Vargas, comme je vous l'ai dit au début de ma critique, je vous conseille de lire
L'homme aux cercles bleus et d'enchaîner avec
Pars vite et reviens tard. Alors, oui, chronologiquement, ils ne se suivent pas car il y a
L'homme à l'envers qui s'intercale entre les deux. Cependant, à mon sens, il s'agit des deux romans qui vous permettront de mieux comprendre l'univers si particulier du commissaire Adamsberg. Ainsi, si vous aimez ces deux romans, vous les aimerez tous, forcément. Dans le cas contraire, je vous déconseille de continuer dans la mesure où Vargas suit la même trame s'agissant de ses personnages.