ENFIN ! UN BOUDDHISME ZEN HORS DES SENTIERS BATTUS !
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« Quoi qu'il en soit, quand on est mort, on est mort, peu importe à quelle heure ».
Enfin
Brad Warner en français ! En effet, voici des lustres que
Brad Warner est une « star » extraterrestre du bouddhisme zen aux USA, qui fume des joints, se bourre la gueule, bouffe des pizza en regardant « des vidéos débiles », sexuellement actif, adepte du porno, et consumériste, bref : américain. Il a une personnalité paradoxale, « alternative » – punk en somme – et une « pensée qui pense »… »de travers » : dissidente, subversive, et résolument fraîche, urbaine et underground – tout en étant un maître zen reconnu et initié par un maître japonais grandiose (Gudô ‘Wafu' Nishijima); enfin c'est l'idée que je m'en fais selon les traductions en français, partielles de ses livres ou de son blog, que j'ai pu lire grâce à l'un de ses fidèles français.
Une pensée presque semblable à la mienne qui suis « Metal Punk » depuis 30 ans, bien que je me sois adouci au fil des années. J'écoute le sulfureux groupe Deicide pendant cette recension, groupe qui s'est révélé dès son premier disque et a vendu des millions de disques, un événement inimaginable qui a bénéficié d'une diffusion planétaire – un peu comme ces « Lettres (en français) à un ami mort » de
Brad Warner.
Ce livre est donc quelque chose de sensationnel. C'est aussi un pari pour l'éditeur – bravo à lui pour son courage -, et, assurément, une tempête qui vient bousculer voire violenter le monde figé du bouddhisme Zen Sôto français.
Brad Warner, soit on l'adore, soit on le rejette. Ce livre, c'est donc, aussi, une sorte de buzz – et je crois que cela fonctionne bien. C'était attendu, espéré, et il y a déjà des ruptures de stock.
Dans cet ouvrage,
Brad Warner se confie dans ses 25 lettres « post-mortem » à son ami mort, Marky Moon. « Cher Marky, Tu es mort à présent, donc je ne sais pas si cette lettre te parviendra », écrit
Brad Warner comme première phrase, avec une mélancolie acide, ironique, cynique, désabusée, où tout est « conneries », où tout devient absurde.
« Ça fait environ trente ans que j'observe ce qui se passe dans mon âme, et après avoir découvert qu'en fin de compte, il n'y avait rien à observer, j'ai fait le voeu de sauver tous les êtres. Je n'ai même pas pu te sauver et t'éviter de finir dévoré par tes propres intestins. »
Brad Warner s'exprime avec une familiarité débridée, désinhibée, relâchée, envers son ami mort, et avec une langage destiné au lecteur qui met de suite à l'aise. Il tutoie, il contextualise tout ce qu'il vit au présent (est-ce finalement un Journal, des Confessions, ou des Lettres sous forme d'un journal ?) et met l'accent sur de petites choses qui donne un ton romancé et mélancolique, voire même négatif à ses lettres. Il énonce des vérités toutes simples, pleines de bon sens. Au travers de cet esprit qui décrypte son quotidien, il y a également une atmosphère douce, calme, « zen » – dépressive ? Normal. Et évidemment, il nous partage ses souvenirs de et avec Marky. C'est en fin de compte un livre captivant, littéraire, génial. Je suis très heureux d'enfin lire
Brad Warner !
Il dit donc des choses communes : « Où allons-nous ? D'où venons-nous ? Pourquoi sommes-nous ici ? Est-ce que tout le monde s'en fout ? Franchement, ça intéresse quelqu'un ? Honnêtement ? ». « Depuis tout petit, j'ai toujours voulu savoir la vérité sur cet endroit où je me trouve. Cette planète. Ce plan d'existence. Appelle ça comme tu veux. Cette réalité. »
Un autre
Charles Bukowski ce
Brad Warner ? Je ne sais pas.
Mais finalement,
Brad Warner n'est-il pas plus le produit d'une culture pop-rock que celui du bouddhisme zen ? N'est-il pas juste un mec qui réfléchit aux choses spirituelles ? Pas certain que
Brad Warner soit vraiment « un maître zen », ou alors, personne n'imagine un « maître zen » avec une telle image. Car il essaie de toutes ses forces de rester quelqu'un d'ordinaire, avec sa personnalité névrosée. Il se plaint de sa renommée et aimerait rester « underground », mais comme « tout est connerie », pourquoi écrit-il donc ? Ou bien, finalement, ne se conduit-il pas comme ces anciens maîtres Chan assez timbrés dans le fond, mais autrement « adapté » ou présent aux vices de notre époque ?
Mais comme il le dit avec surprise : « Je ne crois non plus au bouddhisme (…). Ceci dit, je ne m'intéresse pas tant que ça au bouddhisme. Je m'intéresse bien plus à ce qui est vrai. Ce qui me plaît dans le bouddhisme, c'est que les bouddhistes s'intéressent aussi à ce qui est vrai. Pour la plupart des cas. (…) Personne n'a jamais essayé de me vendre le bouddhisme zen. » Mais le bouddhisme zen lui permet d'en vivre. Ses bouquins, ses sesshin, ses articles, etc, tout cela lui assure un gagne-pain. Mais cela a-t-il un sens pour
Brad Warner ?
Enfin, il casse l'image des « enseignants spirituels », qui devrait leur infliger une belle baffe : « C'est comme s'il y avait un petit Club des Êtres Illuminés. Voici comment ça se passe. Un gars dit qu'il a connu l'illumination. Il a une histoire en béton pour raconter le merveilleux jour où il a fini par tout comprendre sur tout. Un autre type, son enseignant, le déclare membre du Club des Êtres Illuminés. Et voilà son élève prêt à aider les autres à devenir comme lui. »
Et enfin, bravo au traducteur pour sa finesse et son intelligence, et à l'éditeur pour son courage, et son flair éditorial.
C'est un coup de coeur pour moi – Génial ! Explosif ! – car il est captivant, alternatif, et j'espère que le reste de ses livres seront tous traduits. J'ai grandement apprécié cette lecture explosive.
Achetez-le ! Je vous souhaite une excellente lecture !
ZUIHÔ.
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