AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,08

sur 587 notes
*** Rentrée littéraire 2018 ***

Outch, j'ai été percutée par Turner, un mec comme on en voit peu dans les romans. Ça fait très longtemps que je n'avais pas rencontré un personnage aussi surpuissant , à la fois testostéroné et porteur de valeurs fortes.

«  T'es un homme qui sait comment sont les choses. Ce qui se résume à juste de la merde. Rien n'a de sens. C'est un putain de chaos. Mais quelque part dans ce gigantesque océan de merde pure, l'homme qui voit comment sont les choses doit choisir les merdes qui semblent le plus de valeur et les défendre. C'est peut-être une femme qui te donne l'impression de mesurer trois mètres. Ça peut être le drapeau d'un pays qui t'enterrera sans y penser plus qu'un chat qui enfouit sa merde dans sa litière. C'est peut-être une fille sans nom allongée morte dans la rue. Mais c'est surtout de savoir que si tu refuses de le faire, si tu prends le fric et que tu te barres, tu ne serais plus qu'un le fantôme de toi-même. Tu ne seras rien. C'est ce sentiment que tu as dans le sang, quand tu sais qu'il foncer, jusqu'à ce que tu t'écrases. » lui dit un de ses adversaires.

Ce mec qui sait comment sont les choses, c'est Turner. Il a le regard d'un psychopathe mais est devenu flic et jette toute ses forces obstinées pour arrêter celui qui a tué involontairement lors d'une nuit de beuverie une jeune SDF noire puis a fui. Un jeune blanc friqué couvé par maman. Et il est prêt à s'écraser pour que justice soit faite, refusant la corruption qui gangrène l'Afrique du Sud et sa police.

Une bombe dégoupillée qui m'a fait penser au Nicholaï Hel ( du fabuleux Shibumi, de Trevanian ), capable de tout, y compris de survivre dans un désert de sel. Incroyable scènes de survie ... juste parce que ceux qui s'opposent à lui ont commis la petite erreur de le balancer là en compagnie d'un cadavre, et qu'un cadavre tout frais, c'est 60% d'eau ... hum je vous laisse deviner la suite ...

On est là en plein western ( sud-africain ) avec tout le décor, des mines de manganèse, le désert, le poor lonesome cow-boy, des desperados mandatés pour tuer le gêneur dont la tête est mise à prix, des morts qui s'empilent, des affrontements musclés et une boss d'anthologie.

Mais on est surtout en pleine tragédie gréco-shakespearienne. La Boss, c'est une Lady Macbeth mais sans roi, contrôlant toute la région grâce à sa fortune. Son fils, c'est un Hamlet en puissance, protégé de tout jusqu'au jour où, même pas au courant qu'il a tué tellement il était bourré, on lui cache tout et lorsque ces yeux se décillent, les dilemmes cavalent dans sa tête. Il y a même une Juliette black qui l'aime cet Hamlet-Roméo mais qui a cédé sous la pression de la mère en le quittant quelques temps avant. Décidément, il y a quelque chose de pourri dans le royaume de Lady Macbeth.

Tout cela est emballé par une écriture précise et rock'n roll, furieuse, qui te tient en haleine, collé aux basque de ce Turner qui connait si bien la mort. Ça dépote, ça pétarade ça pulse, bref je me suis éclatée.
Brillant, magistral, jouissif !
Commenter  J’apprécie          11413
Un western sud-africain d'une puissance magistrale !

L'atmosphère glauque surgit dès le début.
On pénètre au coeur d'une société d'Afrikaners corrompus qui exploite sans vergogne la misère .
Margaux le Roux, richissime propriétaire de mines de manganèse règne sans faillir sur une vaste contrée avec l'aide de ses sbires et d'une police locale aveugle .
Mais, cette fois , c'est Turner, flic intègre de la criminelle qu'elle devra affronter pour épargner à son fils une condamnation .

Tout le récit est porté par la personnalité de Turner .
On découvre peu à peu , par bribes , les horreurs subies par le peuple noir africain, tout est prétexte à massacres et sa famille n'y a pas échappé .
La résilience a fait de lui un lion , un justicier , un super -héros qui se bat jusqu'au bout .
Et pourtant , Turner est zen , c'est un pacifique qui utilise plus volontiers le taï-chi-chuan pour se défendre . Enfin, quand on voit dans quel état il met l'adversaire par simple pression d'un doigt , il est juste terrifiant !
Mais, là , ses adversaires déclenchent une vraie guérilla alors, il devient guerrier et se déchaîne ...

Il faut quand même souligner que plus on avance dans le récit , plus l'hémoglobine coule à flots avec mode d'emploi détaillé de telle ou telle arme de poing , sa marque etc... Mais, le rythme effréné , le suspense a balayé toutes mes réticences .

En revanche , l'auteur nous offre une leçon magistrale de survie dans le désert et celle-là, croyez- moi est impossible à reproduire à l'identique en télé-réalité !

Ce roman a le pouvoir de divertir en dénonçant à chaque instant les méfaits de la colonisation et de l'apartheid .
Il est dense , fort , palpitant .
On a même droit à une touche love-story pour l'attendrir un brin !
J'avais bien noté quelques petites critiques comme des répétitions ou des longueurs mais à présent , la lecture achevée , tout cela me paraît bien futile .

Première rencontre avec cet auteur . Elle m'est offerte par l'équipe de Masse Critique Privilégiée et les Editions Sonatine que je remercie grandement pour ce cadeau .


Commenter  J’apprécie          896
Je tiens avant tout à remercier vivement Babelio et les éditions Sonatine qui m'ont permis de découvrir ce très bon livre dans le cadre d'une masse critique privilégiée, un vrai bonheur, merci...
Après réflexion, cependant, je me demande si on doit remercier des gens qui vous transportent dans une histoire où, il faut bien le dire,"ça tire" dans tous les coins!!!!!
M'étant tiré sans dommages (tout le monde ne pourra pas en dire autant) de situations très délicates, je reviens au principal, l'intrigue. Nous sommes au Cap, en Afrique du Sud. Un groupe d'hommes en goguette . Une jeune femme de couleur qui fouille une poubelle pour prolonger son existence sur terre. Une fausse manoeuvre, une marche arrière non contrôlée et la voilà envoyée "ad patres" un peu plus tôt que prévu. Les hommes s'enfuient , sans même un regard pour leur victime....D'ailleurs, qui est-elle?Que vaut son existence par rapport à celle de celui qui l'a renversée ? le mieux serait d'étouffer l'affaire, c'est si souvent le cas semble-t-il dans le pays.
Oui, mais il y a le flic Turner et le flic Turner ne l'entend pas de cette oreille. Et c'est parti...Attachons nos ceintures, ca va tanguer fort...
Je vous raconte tout cela mais ça, ce sont les toutes premières pages, ca démarre "in media res"et ça cessera à la dernière page que vous atteindrez vite tant vous n'aurez qu'une envie au fil des chapitres,"en savoir plus,en savoir plus ". Ne commencez pas cette lecture en début de soirée , vous risquez d'y passer la nuit.
Et puis, pour vous permettre de passer une nuit calme, autant vous le dire, il y a quelques passages d'une grande violence, susceptibles de favoriser les cauchemars.
Pour ma part, j'ai été séduit par l'intrigue, la force ou la faiblesse des personnages, le personnage de Turner, les descriptions de ce pays lointain et la corruption des institutions.Tout se tient, s'enchaîne et, surtout, vous oblige à tourner les pages, comme je l'ai déjà dit.
Ce livre aurait pu s'intituler "Seul contre tous" ou encore "Tous pour un , un pour tous".
J'espère que, comme moi, vous passerez un bon moment et, surtout, que "vous vous en sortirez" car je suis certain que quelques balles perdues vont encore siffler à vos oreilles.
Bon, je vous laisse, bonne chance, amies et amis, et, j'espère de tout coeur "à bientôt". Moi, je mesure la chance que j'ai eue...Je vous souhaite....la même mais...
Commenter  J’apprécie          8612
Ce pays arc-en-ciel me déroute toujours tout autant. Ce n'est pas le premier livre que je lis et dont l'action se situe en Afrique du Sud mais j'en suis toujours tout autant renversée. Je suffoque. Ici, Turner, flic noir, ne lâche pas la bride de l'enquête sur la mort d'une jeune fille noire, écrasée (littéralement) par la voiture d'un jeune riche blanc . Ce jeune et ses amis étaient sortis dans un township boire un coup. Voilà le topo ou presque. S'en suit, il est vrai, un "massacre sur trois jours" (ça ferait un bon titre de film ) dans la campagne . Il est vrai aussi que j'aurai pu me passer des détails de survie de notre héros dans le désert , ça m'aurait épargné des nausées. Il est vrai aussi que ce récit en est un de cowboy assez déroutant, spectaculaire et sanglant. Un justicier, incorruptible, exemple de probité, qui ne lâchera pas le morceau. Mais ce qui est le plus inquiétant c'est ce que nous raconte Tim Willocks sur l'Afrique du Sud.
Est-ce possible qu'une population soit aussi totalement indifférente aux sentiments?
Est-ce possible de vivre dans une société qui banalise à ce point la violence ? Est-ce possible , qu'après l'apartheid, malsain, révélé et compris de tous en plus de tout ce que ces peuples ont vécu, subsiste cette répugnance mutuelle ?
Est-ce possible d'accepter que des officiers de police condamnés pour meurtres et viols et autres soient toujours en service ?
(Plus ou moins 20,000 meurtres par an, vous imaginez 50 meurtres par jour?? Ce pays surnommé la capitale du viol avec ses 110 viols déclarés par jour ...)
Tim Willocks avec La mort selon Turner nous révèle que rien n'est réglé, ne le sera peut-être jamais et que de cette cohabitation forcée surgira toujours le dilemme de la moralité, de la conscience élastique, des enjeux économiques et sociaux énormes et des politiques pleines de bons sentiments . Une lecture dérangeante mais oh combien éloquente.
Commenter  J’apprécie          843
Ce que j'ai ressenti:

***Rencontre explosive!

C'est rare, mais je tenais à le dire: je veux revoir, à tout prix, Radebe Turner! Il incarne cette idée de justice dans sa plus noble définition, envers et contre tout, en dépit de tout…Et ça, c'est précisément, tout ce que j'aime. Bref, j'ai adoré ce personnage, j'ai eu un coup de foudre pour cet homme de valeur, de sagesse, et sacrément déterminé. Un héros taillé, démesurément, pour les causes perdues…Un flic qui mène sa propre défense pour les êtres de « rien », ceux qu'on oublie au détour d'un carrefour, ceux qu'on laisse mourir à côté d'une poubelle, ceux dont personne ne se soucie…Lui, il va en faire son « leitmotiv », et je peux vous le dire que cette mission ne se fera pas dans la dentelle, ni dans les sourires entendus et hypocrites pour la hiérarchie …Un feu incroyable anime cet inspecteur, et il brûlera tout sur son passage…

« -Que justice soit faite même si les cieux dégringolent… »

***A feu et à soif…

Le décor est planté en Afrique, Lankopf, Cap-Nord. L'air est irrespirable de trop de poussière, de trop de pouvoir empoisonné. Entre la chaleur abrutissante et la corruption imprégnée, difficile de se sentir bien sur ce petit bout de terre, à quelques pas d'un no man's land de perdition…En partant, comme cela, bille en tête pour rendre justice à cette jeune fille sans nom, contre la famille le Roux, dirigeante sur des kilomètres à la ronde, Turner n'avait pas idée des lourdes conséquences qu'il va engendrer. L'auteur plonge son héros en plein enfer, mais il le fait avec panache,lui donnant une assurance surdimensionnée et une soif de justice incompressible, qui ne va plaire à la reine des lieux…La descente policière n'est qu'un apocalyptique chaos à l'image de l'édifice de puissance de Margot le Roux: un western des temps modernes en terre africaine, avec fusillades et actes de violences en tout genre…

« Trouve la force du fer dans ton âme. Si le fer n'est pas là, c'est qu'il n'y a plus rien. »



***Une plume flamboyante!

Tim Willocks m'a conquise dès le premier chapitre…Il a une écriture sensitive, furieuse, poétique, palpitante, empathique, magistrale qui fait que l'on ressent l'intensité de ces drames, la misère de cet environnement, la chaleur extrême, les inégalités honteuses, et la douleur intime de Turner. Je suis restée scotchée dans la scène du désert de sel, c'est presque insoutenable, et cela prouve bien que l'auteur a un immense talent. On a l'impression d'y être, de voir carrément l'horreur sous nos yeux, de sentir les effets de la déshydratation, de goûter le sel de ses scènes de violences, de toucher de près, la poisseuse main mise de la corruption, d'entendre la mort, à pas fracassant…Avec un tel personnage qui pousse cette envie de justice vers son idéal ultime et cette plume incroyablement sensible et bouleversante, j'ai eu un coup de coeur pour ce thriller noir. Stupéfiant, inattendu et puissant, mais vraiment, un énorme coup de coeur!



« Je suis donc assis dans une voiture avec un homme mort, mort avec de la poésie aux lèvres. »



Ma note Plaisir de Lecture 10/10
Lien : https://fairystelphique.word..
Commenter  J’apprécie          829
Au Cap, l'on aime faire la fête... Partis pour y passer une nuit, quatre amis qui, visiblement, ont un peu forcé sur l'alcool, vont écourter leur soirée. Et pour cause, Dirk le Roux, au volant du Range Rover, fait une malheureuse marche arrière et écrase, contre un container, une jeune femme qui y cherchait de quoi manger. Son beau-père, Hennie, prend les choses en main, ignore les regards suppliants de la jeune SDF, reprend le volant et la direction de Langkopf et fait taire Jason qui suggère au moins de prévenir une ambulance. Qui peut se soucier d'une pauvre fille comme elle ? Et qui pourrait remonter jusqu'à Dirk qui, d'ailleurs, ne se rappelle absolument de rien. Personne, peut-être, excepté Radebe Turner, flic de la brigade criminelle du Cap. Grâce au portable de Jason, malencontreusement perdu sur place, il ne lui faut pas beaucoup de temps pour démasquer les meurtriers fuyards, même si l'un d'entre eux, Dirk le Roux, est le fils de Margot, une femme très puissante qui règne sur les mines de manganèse...

Dans un township du Cap, une jeune femme pauvre et paumée trouve la mort dans d'atroces circonstances. Son coupable, qui s'ignore parce que trop bourré au moment des faits : un jeune homme riche, de bonne famille, promis à un brillant avenir. Son entourage, au courant, va tout faire pour empêcher le flic chargé de l'enquête de parvenir à ses fins. Mais Turner, droit dans ses bottes, réclame haut et fort justice, quitte à semer des cadavres ici et là, et peu importe l'origine sociale du coupable, les bâtons mis dans les roues, le chantage ou encore les mises en garde. Voilà un roman très noir, violent, glauque parfois, et macabre. Sur fond de racisme, de corruption, de magouilles en tout genre, le duel qui oppose Turner et Margot le Roux va très vite tourner au drame. À leurs côtés, des hommes sans scrupule, amoraux. À un rythme effréné, à la plume vive, immersive et palpitante, multipliant les rebondissements et les scènes d'horreur, ce roman nous entraîne dans les contrées les plus sombres de l'âme humaine et ce, au coeur d'un décor désertique et suffocant.
Un roman puissant et implacable...
Commenter  J’apprécie          744
J'ai découvert Tim Willocks il y a vingt-cinq ans au travers du dyptique « Bad City Blues », « Les Rois écarlates », une lecture en forme d'uppercut, qui m'avait laissé exsangue, étourdi par la férocité inouïe qui se dégageait de ces deux romans.

C'est ainsi avec un mélange d'appréhension et de curiosité que j'ai ouvert « La mort selon Turner » dont l'intrigue située en Afrique du Sud évoquait d'autres lectures moins éprouvantes, les très beaux romans noirs de Deon Meyer.

Lors d'un week-end trop arrosé au Cap, Dirk, un jeune Afrikaner écrase sans même s'en rendre compte une jeune noire qui a le malheur de se trouver derrière son Range Rover. Les hommes de confiance de Margot le Roux, qui accompagnent son fils Dirk lors de sa virée « festive », décident d'abandonner la jeune femme agonisante et de quitter les lieux illico.

Partie de rien, Margot le Roux a bâti un empire au milieu de nulle part, en devenant la reine des mines de manganèse du Cap-Nord, et protègera à tout prix sa progéniture, qui se destine à une brillante carrière d'avocat. Dans une Afrique du Sud post-apartheid gangrénée par une violence et une corruption omniprésente, l'abandon d'une jeune noire sans domicile à son triste sort ne représente que l'écume de la banalité du mal.

Personne ne semble vraiment se soucier d'un délit de fuite consécutif à un accident. Personne sauf Turner, un flic noir de la brigade criminelle du Cap, qui convainc son chef, le capitaine Venter de le laisser se déplacer sur place, dans ce coin paumé situé à plus de six cent bornes du Cap, où Margot règne tel un seigneur féodal d'un autre temps.

En quelques heures, Turner reconstitue le déroulé de la dernière soirée d'une jeune femme à la dérive, et comprend que, s'il décide de continuer son enquête et d'appréhender Dirk, il sera seul contre tous. Mais il n'est pas homme à abandonner, ni à se laisser impressionner par le pouvoir absolu que semble détenir Margot sur la région, surtout lorsqu'il s'agit de sauver l'honneur d'une pauvre fille, dont personne ne se soucie, morte dans d'indicibles souffrances.

En décidant de poursuivre, envers et contre tous, la procédure censée conduire à l'arrestation pour homicide involontaire de Dirk le Roux, Turner va déchainer les enfers et faire face au déferlement d'une violence aussi sauvage qu'inéluctable. En nous entraînant jusqu'au coeur des ténèbres du désert du Cap-Nord, dans la croisade de son héros sans peur ni reproche, Tim Willocks nous dépeint un tableau dont la laideur et l'épouvante évoquent l'oeuvre de Hieronymus Bosch.

Athlète à la peau d'ébène et aux yeux verts, expert en arts martiaux, tireur d'élite, flic qui hait la police, Turner a parfaitement compris que si le meurtre, même involontaire, d'une jeune femme sans domicile ne compte pas, alors plus rien ne compte. Son combat contre Margot et ses hommes de main évoque l'Archange Gabriel face au Dragon, et apparaît comme une forme de métaphore biblique de la lutte sans merci que se livrent le Bien et le Mal.

« La mort selon Turner » est un roman dont la violence fuse telle la balle chemisée sortie du canon d'un Magnum 357, où, excepté Turner, chaque homme a son prix. Malgré la fureur, malgré les compromissions, une forme de beauté languide, telle une fleur du mal sur le point d'éclore, émane du combat sans répit que mène son héros pour la mémoire d'une jeune femme oubliée.
Commenter  J’apprécie          6427
Turner est un flic, noir, bourré de principes.
Si, c'est possible.
Aussi, lorsque le corps sans vie d'une pauvre gamine de couleur fut découvert, renversé par la bagnole d'un jeune Afrikaner blindé tenant moyennement la marée et visiblement couvert par môman, femme puissante à la poigne de fer, Turner s'est dit qu'il allait jouer à l'extérieur, sur terrain miné.
Visionnaire, le gars.

Vous aimez les westerns originaux ?
Alors direction l'Afrique du Sud, Cap-Nord pour être précis, où la reine Margot le Roux règne sans partage sur ses généreuses mines et la kouasi entièreté de la populace, aidée en cela par moult gâchettes avides de plaire à madame.
Le territoire est hostile.
Les chances de survie avoisinant les 0 % pour qui n'aurait pas la carte.
Illusoire d'imaginer un seul instant l'ami Turner arriver, la fleur au fusil, afin d'alpaguer le petit le Roux promis à une brillante carrière sans que sa mère ne mette tout en oeuvre pour l'en dissuader.
Les flingues allaient cracher.
Les macchabées mordre la poussière.

J'ai tout aimé.
L'ambiance, le rythme, la description de ce pays peu propice au partage, à l'égalité des chances, au respect de son prochain.
S'il est une chose que l'on vénère à Cap-Nord, ce sont ses biens et sa famille.
Quiconque renierait ce postulat s'exposerait à de très dangereux griefs. Léthales, les représailles, puisqu'en ce bas monde la justice ne semble s'abreuver qu'à deux mamelles, la corruption et le pouvoir.
J'ai adoré ce flic intègre, parfaitement conscient de son infortune en devenir mais y allant franco, se sachant parfaitement condamné sans aucun espoir de franchir la ligne d'arrivée.

La Mort selon Turner.
Le talent narratif selon Willocks.
Commenter  J’apprécie          5711
Lauréat du Prix "Le point du polar américain" lors du dernier quais du polar, "La mort selon Turner " de Tim Willocks, n'a assurément pas volé sa récompense.

Changement de braquet pour Tim Willocks, scénariste pour Speilberg ou Michael Mann et romancier habitué des romans historiques, un peu à la Alexandre Dumas ( Les douze enfants de Paris notamment).

Ici, il va chasser sur les traces de l'immanovible Deon Meyer, et nous livre un western sombre et cruel sur l'Afrique du Sud, qui se situe au Cap ( où l'auteur britannique n'a jamais mis les pieds mais qu'il restitue formidablement) .

le roman commence lorsqu'un jeune afrikaner de très bonne famille renverse une jeune SDF noire. Il décide, avec les personnes qui l'accompagnent de la laisser agoniser sans prévenir les secours.

C'est sans compter sur Turner, flic noir de la Criminelle, bien déterminé à retrouver le coupable de ce crime resté impuni, mais notre héros seul contre tous, aura fort à faire vu que le meurtrier est le fils de Margot le Roux, une femme d'affaires très riche qui tient les rênes de grosses activités minières de l'État et qui a bien l'intention de protéger sa progéniture

La mort selon Turner est une flamboyante tragédie Shakespaerienne, avec de temps en temps une ambiance un peu à la Tarantino, le portrait d'un combat pour la justice d'un homme seul contre les institutions, sous fond de ségrégation raciale.

L'intrigue policière est bien solide, mais l'auteur va plus loin avec son portrait d'une Afrique du Sud dans laquelle les cicatrices liées à l'Apartheid restent fortement tangibles, tant les frontières économiques, sociales et bien évidemment raciales sont encore totalement palpables et gangrènent encore toute la société.

Un polar plein de souffle et d'humanité, aux allures de western mais aussi plein de violence et de testostérone, autrement dit le lecteur en a largement pour son argent !!
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
Commenter  J’apprécie          540
Aaaah! Ça, c'est du thriller, et du bon, avec tous les codes du genre. Mais c'est aussi de la littérature. de la métaphysique. Et de l'intertextualité. Eh ouais.
Soit la femme blanche richissime qui pense que tout s'achète. Et l'homme noir (on est en Afrique du Sud) version moine Shaolin, expert en zénitude, qui ouvre ses chakras plus que sa bouche, tueur impavide et policier intègre.
Donc ça défouraille à tout va, le sang sèche sous le soleil ardent du désert du Kalahari, ça peut même être gore au-delà du supportable - mais du gore justifié, pas du gros rouge qui tache pour remplir le contrat: de l'insoutenable nécessaire.
Et dans ce monde quasi aux antipodes du nôtre, "L'Étranger" de Camus en fil conducteur; la millionnaire du bush brandissant Meursault comme modèle d'indifférence, retranché de la comédie humaine. Bon, me disais-je in petto, mais que vient faire ici ce roman? La mort sous le soleil, oui bien sûr, mais z'encore? La réponse se trouve à la toute fin du roman J'en ris encore. Je suis sûre que les ¾ du livre ont été écrits pour la beauté de cette citation inattendue...
Et je parierai aussi que cette désinvolture envers Camus est un hommage supplémentaire à Sartre. Parce qu'on retrouve dans ce roman deux des thèmes chers à l'auteur de pièces philosophiques comme "La P. respectueuse" ou "Le Diable et le bon Dieu". Dans la première, Sartre exprime sa détestation du "salaud": le salaud, c'est celui qui est persuadé de son bon droit, de sa bonne foi. le salaud est persuadé que Dieu (ou l'Histoire, ou la Vérité) est dans son camp et autorise, ou justifie, tout ce qu'il se croit tenu d'accomplir. C'est Margot: parce qu'elle est assez riche pour donner du travail à toute une contrée, parce qu'elle s'est faite elle-même quand les autres végètent, elle croit ne rien devoir à la loi ou aux sentiments d'autrui. Mais Turner, son adversaire, n'est finalement pas plus estimable que Margot. La pièce "Le Diable et le bon Dieu" a pu être appelée une "tragédie du bien": "Le monde est iniquité, si tu l'acceptes, tu es complice ; si tu le changes, tu es bourreau..."
Pour faire ce qui est juste, Turner tue sans relâche. Pour faire ce qui est mal, Margot avait proposé réparation. L'intégrité mérite-t-elle le carnage? le justicier a les mains sales et le lecteur la nausée...
Mais au fait, pourquoi ce titre sublime "La Mort selon Turner"? Hein? Finalement, je crois savoir pourquoi le héros de Tim Willocks s'appelle ainsi: Turner comme page-Turner. Oh que oui.
Commenter  J’apprécie          522




Lecteurs (1203) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (6 - polars et thrillers )

Roger-Jon Ellory : " **** le silence"

seul
profond
terrible
intense

20 questions
2864 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , thriller , romans policiers et polarsCréer un quiz sur ce livre

{* *}