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EAN : 9782809825664
448 pages
L'Archipel (06/02/2019)
4.17/5   3 notes
Résumé :
Tyrans mégalos, vieillards inamovibles, bourreurs d’urnes et de crânes, faux démocrates et vrais satrapes... Les dictateurs d’aujourd’hui, s’ils ne sont pas moins cruels que ceux d’hier, ont appris à faire mentir l’image caricaturale du despote assoiffé de pouvoir et de sang.
Qu’ils soient des héritiers (tels Kim Jong-un, Bachar el-Assad, Raúl Castro), tirant leur légitimité d’une famille qui s’est illustrée, pour le pire, dans l’histoire de leur pays, des no... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Arrêtons-nous d'abord sur la couverture, remarquablement choisie ! A voir la grosse face de lune hilare de Bébé Kim, entouré d'un aréopage d'officiers à l'air réjoui, (posture diplomatique ou réalité ?), on acquiert la certitude que la profession de dictateur est sacrément enviable !
Sans doute l'est-elle, car Emmanuelle Raimondi nous en fait l'état des lieux et le dictateur pullule sur tous les continents !
Pour autant, son existence ne donne pas l'impression d'être une vraie sinécure. Car conquérir le pouvoir apparaît exaltant, s'y installer est gratifiant, mais s'incruster dans la durée, c'est une autre affaire !
Enfin, il y a bien quelques recettes qui permettent d'assurer la continuité ! et l'auteur de nous les détailler de façon très exhaustive.
Poutine a l'air de bien les connaître et il n'est pas le seul. Quant à Kim Jong Un, il n'a aucun souci à se faire. Héritier de la dynastie qui a mis depuis soixante quinze ans la Corée du Nord à sa botte, il est considéré quasiment comme un dieu vivant !

Emmanuelle Raimondi ne nous apprend rien de vraiment neuf, du moins en ce qui concerne Kim Jong Un, Raul Castro, Bachar El-Assad, Erdogan, Xi Jinping et les plus célèbres de ces estimables personnages.
Parmi les autres, certains m'étaient totalement inconnus, mais je ne suis pas abonnée au Bottin Mondain de la politique internationale ! en outre on n'est pas forcément au courant au jour le jour des faits et gestes de tous les tyrans de la planète ! Et certains d'entre eux ont si bien "cadenassé" leur pays que le vulgum pecus n'en sait pas grand chose.

Le grand mérite de cet ouvrage est, pour chacun des chapitres réservés à chacun de ces tyrans, d'avoir réussi une compilation de leur parcours singulier, utilisant des articles de presse, des travaux de journaliste, des témoignages de première main, des rapports d'ONG ... réussissant ainsi à donner une image complète de la réalité terrifiante imposée aux malheureux habitants des pays concernés par les agissements du dictateur de profession.
En condensant toutes ces informations, l'auteur nous brosse un tableau édifiant de chacune de ces dictatures où l'on retrouve peu ou prou les mêmes ingrédients destinés à fabriquer une cuisine indigeste pour celui qui la consomme mais infiniment roborative pour le maître queux qui la concocte ! népotisme, pillage des richesses du pays, adoration du chef, parti unique, assassinats, torture, terreur organisée par des milices à la botte du chef, manipulation des foules, populisme, sens de la communication, utilisation de la démocratie pour parvenir au pouvoir, et ensuite musellement du pays pour empêcher toute velléité de contestation. .... tant et tant de "bonnes" idées pour assurer la durée d'un régime.

Les pays satellites de l'ex-Urss ont quasi naturellement accepté une nouvelle dictature, tant ils y étaient auparavant déjà habitués. Leurs dirigeants, suivant en cela le chef de file Poutine, pratiquent allègrement "la verticale du pouvoir" selon sa célèbre formule !
Parmi ceux-ci, l'auteur nous offre un portrait sidérant du satrape ubuesque sévissant au Turkménistan, Gurbanguly Berdimuhamedow, - (déjà qu'avec un nom aussi imprononçable, les journalistes ne risquent pas d'envahir les journaux télévisés d'informations le concernant) - imposant au peuple qu'il met à genoux des contraintes hallucinantes de bêtise. Mais ce pays n'est pas inconnu pour tout le monde. Bouygues y fait ses choux gras avec de juteux contrats pour des travaux pharaoniques payés des fortunes, et ce au détriment de la population autochtone qui crève de misère ! La richesse du pays, le gaz, permet n'importe quelle excentricité à son dirigeant. "Quand le Turkménistan sera vidé de ses ressources naturelles, Berdimuhamedow reposera depuis longtemps dans son mausolée de marbre blanc, construit par les bons soins de Bouygues. Après lui, le déluge." !

Quant aux tyrans africains, ils n'ont rien à envier à Mobutu et Idi Amin Dada de sinistre mémoire ! Ils sont d'excellents élèves et connaissent les bonnes recettes destinées à remplir leurs poches et ruiner leur pays respectif.

S'appuyant sur une abondante documentation et proposant une substantielle bibliographie, ce document laisse au lecteur écoeuré un sentiment de profonde amertume. Comment le monde peut-il encore en être là et tolérer de semblables horreurs au XXIe siècle ?
Sidérant et terrifiant de constater à quel point l'être humain est doué pour assujettir ses semblables !
En refermant cet ouvrage, et entre autres questions, celle que l'on se pose le plus est la suivante : mais où est donc l'enfer sur terre ? En Syrie, en Tchétchénie, au Turkménistan ou plus certainement en Erythrée (ce "camp de travail géant dont tout le monde se fout") sous la férule de l'abominable Afewerki ? difficile de répondre ...
Une autre question douloureuse, et celle-là directement posée par l'auteur : qu'en est-il de l'état de nos démocraties occidentales, menacées par l'augmentation des inégalités et les désordres causés par la mondialisation de l'économie ?

Cet ouvrage m'a été attribué lors de la dernière Masse Critique de Babelio, que je remercie, ainsi que les Editions de l'Archipel, pour ce témoignage infiniment dérangeant et très éclairant sur les faces obscures du monde.
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Cet ouvrage d'essai politique présente les portraits, de 25 pages environ chacun, de 17 dictateurs sévissant toujours en 2018.
Se basant sur des entretiens qu'elle a eu avec des journalistes spécialisés, des chercheurs, des membres d'ONG comme Human Rights Watch, généralement natifs du pays concerné, Emmanuelle Raimondi nous propose le parcours de chacun des dictateurs, depuis son enfance jusqu'à nos jours, et son cheminement pour se hisser à la tête de son pays. En même temps, elle nous dresse l'état général actuel du pays en question et les faibles espaces de liberté disponibles pour ses habitants.
À chaque dictature son histoire mais les moyens employés sont généralement identiques : enrichissement personnel, culte de la personnalité, parti unique, populisme, élections truquées, arrestations arbitraires, emprisonnement des opposants, torture, propagande, restrictions des libertés individuelles, censure...
Au passage, il est à noter que les dictateurs les plus mégalomanes semblent être les plus méconnus (Berdimuhamedow du Turkménistan et Afewerki d'Érythrée).
L'épilogue de l'ouvrage n'incite pas à l'optimisme puisque Emmanuelle Raimondi y pose le cas de nos sociétés occidentales. Certes, elles n'ont plus de dictateurs en leurs seins, mais elles voient apparaître des populistes (Orbán en Hongrie, Bolsonaro au Brésil, Conte et Salvini en Italie, et celui qui a le plus de pouvoir, Trump aux USA) un peu partout, employant certaines des méthodes des despotes, et, le plus étonnant, réclamés par une fraction croissante des populations.

La marche du monde ne s'arrête jamais et au cours de la lecture de cet ouvrage plusieurs événements en rapport avec les dictateurs cités ont eu lieu. D'une part, Kim Jong-un a ridiculisé une nouvelle fois Trump au cours d'un sommet à Hanoï, et d'autre part, un opposant s'est levé pour affronter Nicolás Maduro au Venezuela.

Je n'ai qu'une petite remarque concernant la forme. Il manque, au début de chaque chapitre, une photo du dictateur en question et une localisation de son pays sur un planisphère. En effet, ces "affreux" ne sont pas tous célèbres ni leur pays.

Je remercie les Éditions de l'Archipel et Babelio de m'avoir fait parvenir "Profession dictateur" remporté suite à une Masse Critique.
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
A propos de la Corée du Nord.

Un miracle ? Disons plutôt une remarquable faculté d'analyse : "d'une certaine façon, le régime s'est adapté. Ses dirigeants ont compris, plus que dans tout autre pays communiste, à quel point il est difficile de mener à bien une révolution socialiste, à cause d'un élément, un seul : la nature humaine, explique Sokeel Park. Toute la littérature du régime explique que le socialisme a échoué "ailleurs". On ne cite pas explicitement l'Allemagne de l'Est ou l'Urss mais on devine très bien que l'on parle de ces pays. Selon les Nord-Coréens, si les dirigeants de ces états ont échoué, c'est tout simplement parce qu'ils étaient trop modérés. Ils ont permis l'entrée des médias et des idées occidentales dans leurs sociétés. Mais les Nord-Coréens ont compris, eux, que la plus grande difficulté, c'était de contrôler les gens. Il n'y a donc pas le choix : il faut instaurer une religion d'état, renforcée par les médias de toutes sortes, tout en bloquant les alternatives, les idées venues d'ailleurs, les autres valeurs. Il faut contrôler le storytelling dans son propre pays. Et, pour arriver à cela, il faut recourir à des moyens extrêmes et ne rien tolérer. Absolument rien. Et ils ont raison ! Tout le XXe siècle a prouvé qu'en laissant la porte ouverte, on ne maîtrisait plus rien. C'est tragique qu'ils aient si bien compris le problème."
Page 30
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La petite et la grande histoire se retrouvaient mêlées, mais ce qui est terrifiant, c'est le tableau que fait Diaz-Balart de l'avenir de Cuba dans ses explications de vote : "Fidel Castro et son groupe ne veulent qu'une chose : le pouvoir, mais le pouvoir total, qui leur permette de détruire définitivement tout vestige de Constitution et de légalité à Cuba pour instaurer la plus cruelle, la plus barbare de tyrannies, une tyrannie qui montrerait au peuple la véritable signification de ce qu'est la tyrannie, un régime totalitaire, sans scrupule, voleur et assassin, qu'il serait très difficile de renverser au moins vingt ans. Car Fidel Castro n'est rien d'autre qu'un psychopathe fasciste qui, une fois au pouvoir, pourrait pactiser avec les forces du communisme international, vu que le fascisme a été auparavant vaincu au cours de la seconde guerre mondiale, et que seul le communisme pourrait fournir à Fidel l'habillage pseudo-idéologique indispensable pour pouvoir assassiner, voler, violer impunément tous les droits, et pour pouvoir détruire définitivement l'ensemble du patrimoine spirituel, historique, moral et juridique de notre République. (...) Je prie Dieu que ce soit moi qui ait tort".
Son ressentiment à l'égard de son beau-frère* lui donnait peut-être un certain don prophétique. Il ne se trompa que sur un point : la tyrannie des Castro allait durer bien plus de vingt ans.
Page 89

* Diaz-Balart avait été le beau-frère de Castro qui avait divorcé de sa soeur
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A propos de l'Erythrée

Le système éducatif est militarisé, les enfants sont séparés de leurs parents lorsqu'ils atteignent leur douzième année d'études, qui correspond à la fin de leur cursus. Et en Erythrée, à cette occasion, on ne passe pas son baccalauréat, on est expédié au camp de Sawa, à dix heures de route d'Asmara, pour commencer son "service national".
Si on n'étudie pas, le régime rafle les gamins des campagnes. Celui qui tente de s'échapper finit avec dix balles dans la peau et son cadavre est exposé à la vue de tous, en guise d'avertissement. Tout le monde, fils de paysan et de ministre doit accomplir la même chose au même âge ; l'identité individuelle est dissoute dans une identité collective : "l'identité érythréenne", fantasmée par Afewerki. La jeune génération est d'ailleurs baptisée Warsai, "les héritiers".
page 242
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A propos du Congo.

Il y a effectivement de quoi "se gaver". Entre ses cours d'eau, dont le potentiel hydroélectrique pourrait donner de l'électricité à la moitié de l'Afrique subsaharienne, et ses quatre-vingt-millions d'hectares de terres cultivables, qui lui permettraient de nourrir une grande partie du continent africain, ses ressources faramineuses en cuivre et en cobalt - un métal dont la valeur a triplé ces deux dernières années face à la forte demande en voitures électriques -, sans compter les immenses opportunités touristiques que lui offrent sa biodiversité, ses célèbres gorilles des montagnes et ses paysages volcaniques, le Congo pourrait être l'un des pays africains les plus riches ... s'il avait un régime stable et digne. Dans l'attente, sa population reste l'une des plus pauvres du monde, tandis que la famille Kabila, elle, sait très bien assurer son avenir.
Page 116/117
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Niazov s'est aussi piqué d'être un auteur dont l'œuvre édifierait les masses populaires et la jeunesse [...]. Son Ruhnama [...], un pavé paru en 1993, constitue l'ouvrage de référence tout au long de la scolarité des petits Turkmènes [...]. On y découvre entre autres que les Turkmènes ont "inventé la roue et l'écriture", ou encore des maximes d'une sagesse incontestable, telles que "la barbe pousse depuis le cerveau. Plus la barbe est longue, moins il y aura de cerveau. Moins il y a de cerveau, moins la personne est sage".
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Videos de Emmanuelle Raimondi (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Emmanuelle Raimondi
Emmanuelle Raimondi - Profession Dictateur
En librairie le 6 février 2019 448 pages ? 22 ?
Ces despotes qui nous gouvernent
Tyrans mégalos, vieillards inamovibles, bourreurs d?urnes et de crânes, faux démocrates et vrais satrapes... Les dictateurs d?aujourd?hui, s?ils ne sont pas moins cruels que ceux d?hier, ont appris à faire mentir l?image caricaturale du despote assoiffé de pouvoir et de sang. Qu?ils soient des héritiers (tels Kim Jong-un ou Bachar el-Assad), tirant leur légitimité d?une famille qui s?est illustrée, pour le pire, dans l?histoire de leur pays, des nostalgiques du modèle soviétique (Poutine ou Loukachenko) et de ses méthodes, ou encore des autocrates africains (Afewerki, Obiang Nguema, Omar el-Béchir...) pilleurs des ressources de leur peuple, tous ont compris qu?aujourd?hui, pour durer, il faut changer de méthode. Savoir jouer avec les règles démocratiques et être un communiquant hors pair. Réseaux sociaux, fake news... La manipulation de l?opinion 2.0 est désormais une arme aussi efficace que l?usage de la force. Face à ces régimes, l?Europe est-elle su?re d?être vaccinée contre la tentation du despotisme ? Si la démocratie reste le « pire des systèmes à l?exception de tous les autres», la fascination croissante pour les « hommes forts » ? Orba?n, Kurz, Kaczyn?ski, Salvini, figures emblématiques de la montée des populismes ? doit nous interroger. Dans une période de perte de repères politiques, cette galerie de portraits peut aider à abattre les masques dont s?affublent les dictatures modernes.
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Née en 1984, diplo?me?e de l'Institut pratique du journalisme, Emmanuelle Raimondi a d'abord exerce? comme journaliste avant de travailler plusieurs anne?es à l'Assemble?e nationale et au Sénat. Voyageuse passionnée d'histoire, concernée par les enjeux politiques et environnementaux, elle a cosigné avec Jean-Luc Bennahmias Les Paradoxes de Monsieur Hulot (L'Archipel, 2018).
Le livre : http://www.editionsarchipel.com/livre/profession-dictateur/
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