« … il a commandé une bière Flag… »
La Flag… il m’en faut pas plus pour transporter mon esprit de l’autre côté de la Méditerranée, mais n’essayez pas de la goûtez dans notre contrée froide, elle ne paraîtra que trop fade car pour bien apprécier cette bière, il faut avoir pris la bateau, sentir la moiteur du port de débarquement, respirer cette air moite et cette chaleur qui vous colle à la tunique, transpirer et suer à grosses gouttes et surtout avoir en bouche ce goût âcre de la latérite, poussière rouge qui vous assèche le gosier, à ce moment-là, le bonheur n’est qu’à une capsule de Flag, et qui dit bonheur, dit jubilation
« … il a commencé par critiquer les pays européens qui nous avaient bien bernés avec le soleil des indépendances alors que nous restons toujours dépendants d’eux, puisqu’il y a encore des avenues du Général-de-Gaulle, du Général-Leclerc, du Président-Coti, du Président-Pompidou, mais il n’y a toujours pas en Europe des avenues Mobutu-Sese Seko, Idi-Amin-Dada, Jean-Bedel-Bokassa et bien d’autres illustres hommes qu’il avait connus et appréciés pour leur loyauté, leur humanisme et leur respect des droits de l’homme, donc nous sommes toujours dépendants d’eux parce qu’ils exploitent notre pétrole et nous cachent leurs idées, parce qu’ils exploitent notre bois pour bien passer l’hiver chez eux, parce qu’ils forment nos cadres à l’ENA et à Polytechnique, ils les transforment en petits Nègres blancs… »
je jubile, tu jubiles, nous jubilons tous ensemble avec Alain Mabanckou et surtout ce « Verre Cassé », l’âme africaine, l’écrivain qui écrit sur ce bar que je fréquentes assidûment depuis les premières pages depuis que j’ai soif depuis que j’ai envie ce besoin de boire une Flag depuis que je veux voir du monde, des comiques et de belles gazelles noires, des gazelles avec des nichons énormes et un cul encore plus
« … j’avais croisé Céline au Timis, c’est une boite de nuit black très connue et qui se situe vers Pigalle là-bas, dans le XVIIIe arrondissement de Paris, je ne sais pas ce qu’elle foutait au milieu de cette forêt de Nègres en rut et sans manières même si on dénombrait quelques autres Blanches dedans, mais ces autres Blanches se coltinaient des fesses si plates qu’on pouvait repasser sa chemise dessus, or Céline m’avait flashé avec son derrière, sa taille, ses deux énormes pastèques greffées à la poitrine… »
j’aime les pastèques, ça rafraichit, ça désaltère, j’aime les filles fraiches, ça désaltère aussi quand je m’accroche à leurs pastèques, je suis comme ça, un obsédé de la pastèque, grosse et mure car j’ai toujours soif, une soif sans fin et sans faim, jamais rassasié, j’en veux toujours plus et ces filles qui fréquentent le « Crédit a voyagé », ce bar malfamé de Brazzaville sur lequel j’écris mes quelques chroniques me font bander, à mon âge, faut me comprendre, je suis seul, vieux et sale et j’ai plus que le sexe et la flag pour me faire passer quelques frissons à mon âme grisonnante
« … c’est vrai que j’aime les filles du quartier Rex, oui, j’aime le goût des jeunes filles du Rex, de vraies belles du Seigneur, elles savent manier la chose en soi, elles sont nées avec ça autour des reins, jamais un homme ne vivra de telles stupeurs, de tels tremblements sous son toit conjugal, et puis les petites-là sont terribles, je te dis, Verre Cassé, c’est des volcans, ces petites, elle tes promettent le ciel et te l’offrent enroulé dans du papier cadeau alors que nos femmes de la maison ne réalisent plus aucune promesse, or les petites du quartier Rex, c’est tout chaud, c’est à la fois du caoutchouc et de l’élastique, c’est tout piquant, tout sucré, c’est fiévreux, elles te parlent à l’oreille, elles accompagnent ton érection au millimètre près, elles savent où te toucher pour réveiller l’alternateur endormi, elles savent comment ne pas te faire caler au rond-point, elles savent faire tourner la turbine, passer les vitesses, accélérer, on est heureux, on a la vie devant soi… »
un proverbe congolais dit qu’il ne faut pas mettre la turbine avant les bœufs, c’est ça l’Afrique, prendre son temps, se faire plaisir et sentir la fièvre monter en toi, sentir ce mélange de musc et de sueur, sentir ton sexe se gonfler, renifler son sexe, entendre le bruit des gamins dans la rue, le bruit des ivrognes traînant leurs loques, le bruit d’un Fanta orange qu’on décapsule, le bruit d’une Mama aguicheuse aves ses grosses fesses et son pagne autour, et le bruit de Robinnette, sacrée Robinette, qui pisse des litres et des litres de bières
« … Robinette boit plus que moi, elle boit comme les tonneaux d’Adélaïde que les Libanais vendent au Grand Marché, Robinette boit, boit encore sans même se soûler, et quand elle boit comme ça elle va pisser derrière le bar au lieu d’aller aux toilettes comme tout le monde, et quand elle pisse derrière le bar elle met au moins dix minutes à uriner sans s’arrêter, ça coule et coule encore comme si on avait ouvert une fontaine publique, c’est pas du bluff, c’est incroyable mais vrai, tous les gars qui ont essayé de la concurrencer en matière de pisse à durée indéterminée ont fait l’adieu aux armes, ils ont été vaincus, écrasés, laminés, ridiculisés, roulés dans la poussière, dans la farine de maïs… »
je l’aime cette Robinette, faut pas lui tchatcher ces paroles, mais putain quel effet elle me fait cette gazelle, avec son derrière de mammifère périssodactyle, c’est peut-être la femme de ma vie, allez savoir, qui sait, personne, pas même moi, ni même le bon Dieu qui me regarde pisser de là-haut, parce que après tout la Flag, ça fait quand même sacrément pisser et je sens qu’il va falloir que je me soulage bientôt, faut que je trouve un arbre
« … et donc Robinette a d’abord ôté sa chemise en pagne, il faut dire honnêtement que ce spectacle était loin de celui d’une Margot qui dégrafait son corsage, elle a ensuite soulevé son pagne jusqu’à la naissance de ses reins, et on a vu son derrière de mammifère périssodactyle, ses grosses cuisses potelées de personnage féminin de peinture naïve haïtienne, on a vu ses mollets de bouteille de bière Primus, elle ne portait pas de slip, la garce, c’est peut-être parce qu’il n’existe pas de slip qui puisse domestiquer sa montagne de fesses, et donc elle a poussé un long rot qui nous a rebutés, et elle a dit à haute voix « au plaisir de Dieu, la vérité va se voir à la lueur de l’aube, en avoir ou pas, c’est ce que nous allons vérifier, mes amis », et puis on a vu son sexe lorsqu’elle a écarté les tours jumelles qui lui servent de fesses, tout le monde a applaudi, et curieusement, j’ai même bandé à mort comme les autres témoins, faut être honnête et ne pas cacher la vérité, oui j’ai bandé parce qu’un derrière de femme c’est toujours un derrière de femme, qu’il soit petit, gros, plat, potelé, avec des zébrures, avec des pigments qui vous causent des névralgies, avec des tâches de vin de palme, on bande d’abord et on décide ensuite si on y va ou si on n’y va pas… »
sacrée Robinette, elle m’émeut cette gazelle, elle a tout pour me plaire, faudra qu’un jour je l’invite à boire une flag autour d’un poulet Maffé peut-être qu’après elle me laissera caresser ses cuisses, je lui proposerai une nouvelle Flag qu’elle s’empressera d’accepter alors j’irai lui ploter les nichons, une autre flag, oui, bien sur, et là j’irai même jusqu’à lui passer la main dans sa culotte humide et qui sait avec une dernière flag elle se mettra nue devant moi, mon bangala fera le fier, il se redressera au garde-à-vous prêt à fusiller prêt à libérer sa décharge, oui je crois que je l’aime cette Robinette
« … et moi je dis que je n’ai pas encore bu, que depuis ce matin j’ai pas bu une seule goutte d’alcool, et je ris en débitant ce mensonge gros comme une résidence secondaire d’un dictateur africain… »
des paroles, paroles, paroles, pas de mensonge, une vérité crue, celle de mon âme, celle de ma bouteille, celle de l’Afrique, de ses gens, de son peuple, noir, fidèle, perdue, amoureux, ivre, heureux, l’Afrique sous toutes ses coutures dans un bar et moi qui l’observe, la dissèque, oui j’ai tant adoré ce Verre Cassé que je l’amènerai avec moi si je devais partir là-bas et je garderai toujours une pensée pour ce livre tant il m’a marqué lorsque je sentirai les gorgées de Flag venues désaltérer mon gosier rougi par la sècheresse et la poussière de latérite, oui ce livre est un chef d’œuvre à déguster et à puiser comme un bon Bukowski
« … « Verre Cassé, sors-moi cette rage qui est en toi, explose, vomis, crache, toussote ou éjacule, je m’en fous mes ponds-moi quelque chose sur ce bar, sur quelques gars d’ici, et surtout sur toi-même », ces paroles m’avaient cloué un moment le bec, j’avais failli verser des larmes, je ne me souvenais plus de quel écrivain ivrogne nous avions discuté, de toutes les façons y en avaient plusieurs qui buvaient, et y en a qui boivent à mort parmi les contemporains… »
je suis essoufflé, point.
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