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Critiques de Régis Debray (182)
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Le nouveau pouvoir

Ce tout petit constat de 92 pages paru il y a cinq ans n'a pas beaucoup vieilli. Debray braque les projecteurs de son esprit corrosif sur un coin de trottoir que nos réverbères laissent souvent dans l'obscurité: nous sommes obsédés par l'slam alors que le monde dans lequel nous évoluons est avant tout protestant, et c'est la source de nombre de nos malaises, nous autres catho-laïques. le néoprotestantisme calviniste c'est l'individualisme, le puritanisme hypocrite - « comme pourrait en témoigner Bill Clinton, baptiste de l'Arkansas » - le culte de la transparence, l'horizontalité, Gide, Ricoeur -les deux maîtres à penser du chef de l'Etat-. C'est aussi l'argent signe d'élection, la finance exubérante, la prédestination qui nous subtilise discrètement libre-arbitre et responsabilité en applaudissant ceux qui se soumettent au chef d'entreprise, un saint, surtout si c'est une start-up -« le succès de leurs opérations financières témoigne que Dieu est avec eux »- et protestent contre la verticalité de l'Etat. le mépris des pays protestants à notre égard confine dans certains cas à la haine, dans certaines contrées où l'on désapprend que les huguenots et Calvin étaient, comme tant d'autres choses, bonnes et mauvaises, français. Les dragonnades furent une abomination et les prussiens nous ont fait payer l'addition avec trois guerres. Halte à la haine, il y a prescription; désormais ils nous convertissent. Debray ne parle pas du réchauffement climatique dont le protestantisme est l'accélérateur culturel et social. Mettre ses ordures dans le bon conteneur ne changera rien au salut individuel des âmes. Pour Calvin, et donc pour nous dans l'avenir, s'alarme Debray « les valeurs de sincérité, de véracité pèseront plus dans la balance du Jugement dernier que les valeurs de vérité ».
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L'Europe fantôme

C'est excellent !

L'Europe fantôme, c'est l'UE : elle n'existe que sur le papier !

Au début de ce petit essai, Régis Debray, aventurier-philosophe, qui a suivi le Che en Bolivie, utilise un langage masqué, comme savent le faire les philosophes qui attaquent le régime au pouvoir : on dirait une sorte de "novlangue bobo-précieuse", avec une ironie grinçante !

Mais au bout d'une quinzaine de pages, on s'aperçoit qu'il fait en réalité le procès de l'Union Européenne, telle qu'elle est conçue actuellement : une machine technoïde sans âme, et sans aval, pour soi disant établir la paix européenne, ce qui est très louable, mais surtout pour favoriser l'économie de marché, ce que beaucoup d'entre nous n'apprécions guère.

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"Tartempion" ne s'y retrouve pas, car :

-- le drapeau bleu étoilé provient d'un message de foi ( Saint Jean ) dans ce monde athée ;

-- formaliser l'UE, c'est mettre la charrue avant les boeufs ;

-- il n'y a pas d'identité viscérale de l'Européen ;

-- l'anglais "global" commercial utilisé, l'Angleterre du Brexit partie, ne représente que peu d'Européens, alors que c'est le langage de Bruxelles ;

-- la vitalité et la souplesse attendues, l'efficacité fait plutôt l'effet d'un échec ;

-- en cas de défense européenne, comme le suggère notre président inexpérimenté, qui appuiera sur le bouton nucléaire ? de quel nationalité seront les chefs suprêmes ? en quelle langue parleront-ils ?

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D'où l'auteur déduit le titre : "L'Europe fantôme", qui n'existe que sur le papier, et même avec un déclassement industriel, culturel et moral.

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Personnellement, je pense que l'Union Européenne est une grosse bêtise qui, comme l'exprime Régis Debray, désagrège l'identité des pays, qui, à l'image de Singapour, Israël ou la Suisse, n'ont pas besoin d'avoir une grosse superficie pour être dynamiques !

En creusant plus loin, je pense que des enjeux économiques, motivés par des intérêts supranationaux ont égoïstement, par avidité, par intérêt, "déconstruit" cette Europe en faisant mine de construire l'UE...

A notre petit niveau, mondialistes contre nationalistes, on ne peut pas faire grand chose...

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On peut juste observer et commenter la folie des hommes.
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Bilan de faillite

Feignant d'écrire pour aider son fils à choisir une orientation scolaire, Régis Debray transmet le bilan de sa vie et dresse un regard de déclin sur son itinéraire mais également sur le monde. Ce « Bilan de faillite » est l'occasion pour Régis Debray de se pencher sur les choix essentiels de son existence, son parcours jalonné d'erreurs, de défaites et de désillusions.



Jouant au grincheux capricieux, Debray livre un bilan désabusé de sa carrière politique et littéraire ; il ne prétend plus vouloir transformer le monde, mais juste le comprendre. Jeune homme, il a vécu avec passion ses engagements sur lesquels il ironise aujourd'hui avec un certain humour. Le temps est passé, est venu le temps des regrets, mais reconnaître ses erreurs est souvent difficile : « Il est toujours plus facile d'épouser une lubie que d'en divorcer ».



Les mots se bousculent beaucoup trop dans sa prose, et le lecteur est inévitablement dérouté par un style trop ampoulé et confus, un minimum de pédagogie serait nécessaire afin de donner simplement envie de poursuivre la lecture de ce petit livre fastidieux. Debray a pourtant parfois des éclairs de lucidité : "Écrire pour se faire plaisir, oui, mais ne plus penser changer le monde par le biais de l'écrit [...] J'ai l'impression d'avoir fait, avec mes écrits, des ronds de fumée".



Décliniste convaincu, Debray devrait s'appuyer sur ses échecs pour relativiser et donner quelques outils. Pourtant, il ne cesse de vouloir faire passer son échec personnel pour un échec collectif, alors que ses utopies politiques n'ont débouché sur rien : « Tous les guetteurs à leur créneau savent que mettre dans le mille avant l'heure revient à mettre à côté de la plaque. L'astreinte au produit frais ne va pas sans déboires, et chaque fois que j'ai pu voir juste, avec quelques années d'avance, on me persuada que j'avais tout faux.” A l'heure du bilan, il estime avoir eu raison sur presque tout.



Certes Debray dispose d'un sens aiguisé de la formule mais en se tournant en permanence vers le passé il devient un professionnel du désenchantement qui se veut au-dessus de la mêlée, mais qui n'apporte jamais d'idées nouvelles, de solutions qui pourraient agir sur le monde ou d'espoir pour les jeunes. On a envie de lui dire : après ce constat, tu fais quoi ? Passe à autre chose ! Mais Régis Debray reste fidèle à lui-même, une sorte de luciole, parfois lumineux, mais jamais éclairant.

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Un été avec Paul Valéry

Grâce à Masse Critique et aux éditions Equateurs/ Parallèles, que je remercie, j'ai lu cet ouvrage de Régis Debray sur Paul Valéry. La rencontre de ces deux noms a quelque chose d'improbable à première vue : d'un côté, un ancien activiste marxiste, faisant table rase du passé, un intellectuel respecté dans les milieux bien-pensants (France-Inter entre autres, où Debray a parlé de Valéry, est pratiquement la radio d'état). De l'autre, un esprit libre, héritier critique d'une tradition née avec Montaigne et Pascal, celle de la "pensée de derrière" et du conservatisme éclairé. Mais la lecture du livre permet de changer de jugement sur Régis Debray : ayant montré patte blanche dans les premières émissions, et proférant les sottises de gauche reproduites en quatrième de couverture, l'auteur ose enfin penser et lire Valéry sans trop se soucier des préjugés de ses commanditaires. Et Debray est brillant, en particulier dans sa partie, la "médiologie". Le tableau qu'il fait du Valéry de l'entre-deux-guerres, observateur de la mort de l'Europe, est intéressant. Quelques chapitres frappants évoquent aussi le Valéry prophète des temps modernes, celui qui voit venir l'Amérique. Mais Debray tire Valéry à lui : il en fait un intellectuel attentif au monde, ce qu'il fut comme lui, en laissant dans l'ombre le mathématicien, le poète, l'un des fondateurs des sciences du langage et de la poétique modernes, et l'auteur fasciné par le fonctionnement de l'esprit conscient et inconscient. De tous ces Valéry-là, c'est le poète que je regrette de n'avoir pas entendu clairement dans ce livre.



A la fin, Debray a ce mot très juste sur la postérité de Valéry : alors qu'on retient Rimbaud, Hugo, Camus, car ils sont à la fois une oeuvre et une histoire, sa discrétion sur sa vie privée, la variété de son oeuvre, ses multiples entrées et sorties, font que le public aura de la peine à se faire une idée simple, narrative, de lui. Debray signale laidement qu'il n'y a pas de "story-telling". Valéry n'est pas simple. Un été avec lui risque d'éloigner des plages, alors que le Cimetière Marin nous y renvoie.
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Civilisation

Je n’y croyais pas trop, à l’américanisation. Et puis j’ai déménagé à Lyon. Et puis j’ai été embauchée à top chatouilles, une entreprise qui moulinait des hélices dans le domaine du web marchandising. Le nom ne fait pas le moine - que certains veuillent se donner de grands airs en s’affublant de titres honorifiques à consonance anglophone, ça m’en touche une sans bouger l’autre. Le temps passant, je réalisai toutefois que le phénomène, de par ses attributs grégaires, entraînait une véritable hypostase du titre qui, tout imaginaire qu’il puisse l’être, trouva alors une force d’application réelle. C’est ainsi que l’on vit les descendants de braves paysans se mettre à ingurgiter des manuels de développement personnel pour self made man ; que l’on décida d’évaluer le leadership de tous les employés, même ceux situés au plus bas de l’échelle ; que l’on en vint à organiser des gaming weeks ; à pricer les produits phares ; à crosser les petits accessoires dont personne ne veut ; à évaluer d’un regard critique le reporting quotidien des ventes ; à commander des lunch box pleines de burgers et de milk shakes pour le midi. Les succès marketing virtuels se célébraient régulièrement par l’organisation d’afterworks dont la date aura été discutée longtemps à l’avance, en conciliabules interminables sur l’agenda en ligne. Dans cette pagaille d’enthousiasme et de convivialité, exaltée par le petit apéro de fête, la hiérarchie n’a plus d’autre justification que celle qui implique des différences salariales. Ainsi, le jeune homme qui a été embauché le mois dernier, pour peu qu’il tienne mal l’alcool et qu’il soit naturellement peu porté à l’inhibition, ne ressent aucune gêne à sortir sa bite pour s’en servir de raquette de ping-pong devant son chef qui, sans doute, regrette de ne pas en avoir une pareille, puisqu’il garde la sienne dans son sac.





L’entreprise devient un nouveau lieu de vie. Certains se pacsent entre eux. On les voit arriver ensemble le matin, dans leur petite citadine, et ils attendent que le portail automatique s’ouvre pour les laisser entrer dans le parking privé, tandis que les autres descendent piteusement du bus des heures de pointe. Certains partagent leurs jouets. Il y avait cette mode des figurines en plastique avec des têtes hydrocéphales, que certaines s’échangeaient à l’heure de la récréation. Le facteur se pointe tous les jours avec des brouettes de colis amazon premium : j’ai des livraisons pour truc, pour machin, pour bidule ! les heureux élus se précipitent, ils déballent leurs colis à même le sol et rigolent en essayant leur nouveau iphone ou leurs nouveaux éclairages LED pour tuning pc. Les petits chiots ne finissent-ils jamais par grandir et à s’intéresser à autre chose qu’à leurs jouets ? Certains parlent des dernières séries netflic et, non contents de les avoir gobées sans avoir eu envie de gerber, ils se demandent s’ils ne pourraient pas faire des créations graphiques pour les mettre à l’honneur sur le site. Certains proposent qu’après le boulot, on se retrouve pour faire du kitesurf, des pilates, des cours de pâtisserie ou du bénévolat à la spa. A la place, je vais rendre mes livres à la bibliothèque mais quand je traîne en travers des rayons, il n’y a plus que des films, des peintures ouvertes au prêt, et des livres avec des images dedans. Un animateur de la bibliothèque fait une visite guidée pour un groupe de femmes voilées qui pépient entre elles dans une langue inconnue. Alors je rentre chez moi en prenant le tram et, tandis qu’il chemine sur ses rails, je regarde les petits films diffusés sur les écrans disposés à l’intérieur de chaque wagon : la météo, l’horoscope, les attractions lyonnaises. Mon livre est au fond du sac, je ne sais même plus de quoi il parle.





J’ignore sûrement que « l’Amérique est entrée dans l’histoire et dans nos cœurs par l’image ». De Gaulle et Napoléon ne seraient rien sans leur correspondance et leurs mémoires mais ils datent du siècle dernier. Les présidents américains, quant à eux, peuvent mourir tranquillement sans avoir marqué la moindre page de leur singularité. Il leur suffit de se laisser photographier, d’apparaître à la télé ou d’avoir eu des histoires avec des putes. « Une image est positive : l’absence, le projet, le possible, le programme, tout ce qui dépasse, anticipe ou interroge le donné effectif, ne sont pas photographiables et encore moins photogéniques ». Conséquence : « il nous faudra donc “positiver”, en oubliant l’ancien travail du négatif. Adieu la dialectique ou la contradiction, bonjour la soumission à ce qui est et le respect du fait accompli ». L’image ne tromperait pas, selon les dernières nouvelles. L’image se doit donc de refléter les qualités les plus prisées – les plus rares – de l’humanité : joie, beauté, positivité.





« Quel est l’âge par excellence du bonheur et de l’innocence (dans la doxa) ? L’enfance. L’américanité, qui sacralise cet âge, invente pour elle les plus beaux jouets et jeux, les parcs d’attractions, la bûche de Noël, Mickey Mouse et Bugs Bunny. N’est-ce pas aux enfants qu’est promis le royaume de Dieu ? Quand l’adulte est-il le plus heureux ? Quand il redevient enfant. Comment l’y aider pratiquement ? En le comblant d’ice cream, de produits lactés et de bonbons. En mettant beaucoup de glucides dans ses boissons et ses aliments, au risque de le rendre obèse, mais c’est le prix du bonheur sans peine, l’édulcorant. Soda, burger and donut. Il y a bien encore quelques activités fastidieuses dans l’existence, aller à l’école par exemple. Tout sera fait pour y éviter l’ennui, faire du professeur un animateur, du manuel scolaire, un programme télé (la double page maquettée à l’écran), et du cours lui-même, une récréation. Ecouter une conférence ? Barbant mais starting joke préventive. Lire un pavé ? Se reporter au Reader’s Digest. Enterrer un proche ? Confier son corps à un thanatopracteur, qui vous le rendra, dans la funeral room, pomponné, maquillé et pimpant. S’informer sur le triste état du monde ? Infotainment, les nouvelles comme un jeu, ou la feel good TV. Les handicapés sont rebaptisés personnes à mobilité réduite ; et les guerres, opérations extérieures. On ne meurt plus, on vous quitte ou on s’en va. »

Ceci n’est pas sans rappeler quelques belles pages de Philippe Muray.





A top chatouilles, nous avions l’habitude de nous exprimer pendant nos heures de « travail » par l’intermédiaire d’un logiciel de messagerie instantanée qui remplaçait ce que nous appelions autrefois « la place du village ». Un jour, un employé, la trentaine passée, nous raconta ses déboires sentimentaux : sa petite amie ne partageait pas sa passion pour les jeux vidéo. Elle aurait aimé qu’il passe plus de temps à s’occuper de leur fille. Le jeune homme se lamentait : arriverait-il un jour à rencontrer la geekette de ses rêves avec qui il pourrait passer des journées et des nuits entières à titiller le gamepad ? Le roman de cette génération s’appellera : « on baisera quand il y aura une coupure d’électricité ».





Mon ton peut sembler amer. Toutefois, je n’ai jamais ressenti d’amertume au cours de mes dix mois de travail chez top chatouilles. J’allais chaque jour travailler là-bas avec l’assurance de découvrir une nouvelle parcelle de la réalité de ce monde. La surprise sans cesse renouvelée m’épargnait la dépression. Je pensais en outre que la folie qui imprégnait les bureaux de top chatouilles n’était qu’une sorte d’épidémie locale. Après tout, l’instinct grégaire est asservissant, et chacun s’adapte comme il le peut. Il en est qui se soumettent sans même avoir l’impression d’un effort, n’affichant que la bonne humeur que l’on attend d’eux (hérodiens), tandis que d’autres préfèrent se sacrifier pour ne pas suivre le troupeau bêlant, et cela sans raison autre qu’ils n’aiment pas se voir comme bêlants, quand bien même ils en auraient par ailleurs toutes les caractéristiques (zélotes).





Régis Debray, je crois, ne fais pas l’unanimité. Je n’ai pas essayé de chercher pourquoi. Tout ce que je sais de lui, c’est qu’il a composé un opéra sur Walter Benjamin, ce qui d’assez bon goût. Pour poursuivre mon étude sur notre civilisation, j’ai décidé de lire René Guénon. Faites pareil ou pas.

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Un candide en Terre sainte

Comme c'est Régis Debray, ce candide n'est très candide ! On a plutôt affaire à un intellectuel de haute volée et plutôt bien renseigné sur le sujet.

Plus qu'un récit de voyage au sens propre (on ne trouvera guère d'anecdotes pittoresques et en cela le livre est bien loin de Nerval, Flaubert ou Lamartine), le livre est le récit d'une rencontre intellectuelle avec une région du monde complexe à un courant de son histoire. Régis Debray rencontre des personnalités diverses et nous faire part de ses réflexions sur des sujets divers, la situation des chrétiens d'Orient, Jérusalem, la montée du Hamas...C'est tout à fait passionnant, fort bien écrit (avec un beau sens de la formule, mais cela ne sonne pas creux), on s'en doute et particulièrement intelligent. On ne peut que souscrire à la majorité de ses analyses.

Toutefois le livre a maintenant une quinzaine d'année et la situation s'est encore largement dégradée. La Syrie a connu le chaos que l'on sait. La guerre d'Irak a débouché finalement sur l'Etat islamique et en Israël les partisans de la paix sont sans cesse plus minoritaires....

Vous ne trouverez ni dans ce livre, ni dans l'actualité des raisons d'être optimiste quant l'avenir de ce qu'on appelait autrefois le Levant. A lire cependant pour un éclairage en profondeur mais un peu daté.
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Civilisation

J'ai reçu ce livre dans le cadre d'une masse critique et je remercie BABELIO et GALLIMARD pour cette lecture.



Jusque là, je n'avais jamais rien lu de Régis Debray et je me faisais une joie de découvrir ses écrits. Car la réputation de Mr Debray n'est plus à faire. Il a, entre autres, combattu aux côtés du Che Guevara, il a été fait prisonnier et a été torturé en Amérique du Sud dans les années 60, il est philosophe et a fait partie de l'académie Goncourt. Bref, c'est un grand bonhomme !



Comme j'ai lu Lévi-Strauss, Sartre, Beauvoir, Malraux, Proust et bien d'autres, naïvement, je pensais que "Civilisation" allait être à ma portée...



...alors inutile de vous dire que j'ai été très déçue par ce livre. Je n'y ai rien compris et pourtant je me suis acharnée à le relire plusieures fois. Oui, Mr Debray est un homme très cultivé et il nous le fait bien sentir avec tous les grands mots qu'il utilise et ses phrases compliquées, mais son style est hermétique et confus ...en tout cas pour moi.



Alors peut-être que ça vient de moi et de mon niveau d'étude insuffisant pour un tel livre ? Mais personnellement, je ne le recommande pas du tout.
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Un été avec Paul Valéry

Découvrir Paul Valéry raconté par Régis Debray est un régal.

La lecture est double.



Il y a d’abord le poète, l’écrivain, l’homme présenté sous diverses facettes.

L’ordre chronologique est choisi par l’auteur qui nous livre des éléments biographiques et une analyse certes courte mais percutante de l’homme et de l’oeuvre en regard de son époque.

Un homme pour qui la poésie doit se débarrasser de toute emphase, un homme qui évolue dans ses idées au gré de l’expérience et du vécu, un penseur visionnaire qui prévoit le mal être de l’Europe et annonce un futur avec ses modifications technologiques et les bouleversements chez l’homme que l’on constate depuis quelques décennies.

Un écrivain quelque peu oublié à qui le Général de Gaulle rendit hommage par des funérailles nationales et dont la lecture de certains écrits ne peut qu’alerter tout esprit en quête de compréhension.

Un homme qui dérangea par sa dualité (ex. Le Mondain et le Sectaire), par ses jugements trop lucides, par certaines prises de position déconcertantes.



Il y a ensuite l’auteur de ce livre qui jongle avec les moments de l’Histoire et nous démontre la modernité des propos de Paul Valéry.

Il ne se gêne pas pour dénoncer les travers de notre société contemporaine, les dérives de nos systèmes de communication.

Il égratigne au passage l’importance donnée à la sous-culture dominante, sous-culture de profit qui anesthésie et favorise l’absence de pensée.



Le plaisir de cette lecture est donc double : découvrir Paul Valéry et goûter les éclairages donnés par Régis Debray.

Deux plaisirs qu’il ne faut pas bouder.

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La République expliquée à ma fille

Régis Debray dresse avec un propos clair et accessible les symboles, emblèmes et repères forts qui symbolisent et caractérisent la République. Il s'adresse à chacun d'entre nous et, pour l'occasion, à une jeune fille qui s'apprête à user de son droit de vote.

Ce petit guide permet de revenir aux fondamentaux de notre système politique et de se rappeler que les plus grandes conquêtes bien qu'elles nous semblent (définitivement) acquises sont à sauvegarder tant elles sont précieuses mais néanmoins fragiles.

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Un été avec Paul Valéry

Voici un puissant petit essai de Régis Debray à mettre entre toutes les mains de ceux qui ont peur du grand méchant loup des lettres Paul Valéry.



Je ne connaissais (d'intimidante réputation) que le poète hermétique, élève de Mallarmé son contemporain. Et il existe. Mais existent aussi des oeuvres plus brèves, plus accessibles, percutantes, et ce sont celles qu'on aime aujourd'hui.



Il ne faut pas oublier aussi Paul Valéry le penseur politique et social plutôt visionnaire mis non sans raison au programme de l'ENA : il prévit la simultanéité des images à la commande (télévision, internet) et la façon dont elle transformerait notre intellect et nos moeurs ; l'avenir de l'entente entre les nations jusqu'à ce que se réalisent aujourd'hui encore ses étonnantes prédictions ; parcourut l'Europe de conférence en conférence ; écrivit maintes chroniques journalistiques ; fut à l'initiative de la Société des Nations et de maintes autres organisations intellectuelles et scientifiques.



Il promouvait avec ardeur une société européenne, fondée non sur la marchandise mais sur la mise en commun des idées. On se souvient du fameux dialogue de Freud et d'Albert Einstein sur la guerre.



La montée du nazisme le désenchanta grandement.



Il mourut en 1945 et de Gaule lui organisa des obsèques nationales. Mais se souvient-on que Jean Moulin avait réfléchi à l'idée d'en faire un président de la République ?



Debray a une plume alerte, pleine d'humour, très légèrement coquine (au sens noble du terme), il nous rend l'homme sympathique. Son livre est un petit bijou qui, (peut-être), ouvrira une porte.



Paul Valéry est une montagne qu'on peut aborder par plusieurs côtés.
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Sur la mort d'Albert Londres

Quelles similitudes y a t-il entre le fameux Lawrence d'Arabie, so british, et le célèbre journaliste français Albert Londres? Ont-ils eu une liaison inavouable? Ont-ils conspiré au sein d'une société secrète comme les Illuminati? Faisaient-ils du trafic d'armes, comme Rimbaud? Etaient-ils alcooliques comme Hemingway ou crypto-communistes comme l'Abbé Pierre?

Le fait est qu'ils sont morts accidentellement dans des circonstances étranges, après une vie héroïque et mouvementée qui les conduisit à révéler certaines forfaitures commises au nom de la Raison d'Etat.

Oui, je sais, ça fait un peu réchauffé comme scandale, l'un est mort d'une funeste sortie de route en moto dans la campagne anglaise en 1935, et l'autre a fait naufrage au large de la Somalie en 1932. Etaient-ils sur le point de publier des révélations accablantes qui auraient permis de renverser le gouvernement et d'éviter la deuxième guerre mondiale? La vie de Lawrence, écartelé entre sa loyauté à l'Empire britannique et son désir de libérer les peuples du Moyen-Orient est un échec, mais son destin est celui d'un héros immortel, dont les exploits vivront longtemps après lui.

Quand à notre ami Albert, nul doute qu'il a inspiré à Hergé les aventures de Tintin, qui combat les trafics d'esclaves, et déjoue les complots des trafiquants d'opium, d'armes et de pétrole. Un héros de l'information, un lanceur d'alerte qui a laissé sa vie pour son métier, comme le raconte Régis Debray dans "Sur la Mort d'Albert Londres".

Deux idéalistes mais aussi hommes d'action, de courage et d'esprit, qui méritent qu'on aille au-delà de leur mythe.
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Eloge des frontières

Chez toi ou chez moi?



Il s'agit ici de la retranscription d'une conférence donnée en 2010 au Japon : le "sans frontières" nous porte à en créer de nouvelles.

Bien sûr il faut faire un petit effort pour lire ce texte, ne pas penser en même temps à la météo ou au dîner du soir. Mais au final, ce remue-méninges pose des questions sur les frontières et les limites, celles qu'on impose, celles qu'on s'impose, celles que la mondialisation nous retire et celles qu'on recré pas forcément au même endroit. Un thème qui m'a toujours fascinée.

On n'est pas obligé d'apprécier ou de détester Régis Debray pour lire ce court texte. On n'est même pas obligé d'être d'accord. On peut aussi avoir envie d'y réfléchir, même si parfois il nous perd un peu et complique à souhait la compréhension de son discours.

Un texte à relire plus tard quand tout ça aura fait son chemin dans ma tête.
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La neige brûle

La vie de militant révolutionnaire passé dans la clandestinité n'est pas une sinécure. C'est le cas d'Imilla et de Boris (celui-ci a quelque chose de l'auteur...). Imilla est une autrichienne passée à la cause de la Révolution en Amérique latine. Boris est un Français, ayant survécu à la guérilla bolivienne du Che. L'expérience l'a marqué et lui a fait prendre du recul. Autant Boris s'est converti au pragmatisme, autant Imilla reste accrochée à l'idéal et à la pureté révolutionnaire.

Imilla s'engagera dans une nouvelle tentative de guérilla urbaine en compagnie de celui qu'elle admire et qu'elle aime : Carlos. L'issue de cette aventure sera tragique.

Boris et Imilla se retrouveront pour venger Carlos.

Voilà de belles variations sur le thème de la lutte révolutionnaire, laquelle n'exclut pas les rapports amoureux, même si elle les complique.

On retrouve ici Régis Debray dans un de ses tout premiers romans écrit en 1977, avec son sens aiguisé de la formule.
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Le nouveau pouvoir

Fin 2017, au lendemain de l'élection d'E. Macron, Régis Debray fait le constat que la France s'inscrit dorénavant dans une société marchande issue du néo-protestantisme. le catholicisme ne survit plus qu'à la marge, ou sous la forme diffuse du catholicisme zombi (référence à Emmanuel Todd), le protestantisme s'étant incarné dans le libéralisme et son avatar extrême (ça c'est mon avis) le néolibéralisme qui nous gouverne.

Dans cette optique Macron incarnerait cette société « du contrat », les décisions étant issues d'une démarche "bottom up".

Hum ! Aujourd'hui, après deux ans de gouvernance de Jupiter, je ne sais pas si Debray ne retoucherait pas, au moins à la marge, son essai de 2017.

On a là une fois de plus chez Régis Debray un essai brillant où les formules font mouche. Il a un vrai talent pour cela.
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Eloge des frontières

Il y a des personnes qui s’écoutent parler et des écrivains qui s’écoutent écrire. Régis Debray est de ceux-là. On pourrait ajouter : Qui trop embrasse mal étreint. C’est ce qui arrive à l’auteur de ce discours sur les frontières. Entre deux boutades, citations, clins d’œil, il fait l’étalage d’une culture maquillée comme une femme de petite vertu. C’est clinquant, superficiel et à peu près dépourvu de signification.
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Eloge des frontières

Je pensais que Régis Debray avec son Eloge des frontières allait proposer un texte à contre-courant qui amènerait une réflexion sur le repli sur soi, le désir de protection et de sécurité, le besoin de se retrouver dans une identité.



Contre-courant de la mondialisation qui se veut uniformisatrice, phénomène planétaire qui fait sauter les barrières et ouvre la voie du sans limite.



Il n’en fut rien.



Une déception.

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Le Dire et le faire

"La communication, dont vit la classe politique qui s’imagine pouvoir survivre par elle à son discrédit, a tué le politique et ruiné sa crédibilité. Cet art meurtrier est aussi celui de ne pas répondre aux questions, mais très abondamment. Parmi ces « éléments de langage », il en est un qui frappe par son omniprésence : le viral « faire en sorte que » du politicien. Ce n’est plus un tic mais un aveu. Puisque dire n’est plus faire, et que la parole n’est plus un acte, on annonce ce qu’on devra faire mais plus tard, sans préciser quand ni qui. "



C'est très bref mais efficace. A lire absolument. D'autant que vous pouvez le faire sans bourse déliée, Gallimard vous en offrant la lecture : https://www.edenlivres.fr/campaigns/am5aM4ps3s65ayp4/participants/fGmZbtdYqgF3SY2V . Régalez-vous.
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D'un siècle l'autre

Avec talent comme toujours (quel sens de la formule !), Régis Debray, après avoir remisé son treillis de guérillero et ses idées de révolution mondiale, jette sur notre siècle un regard un brin nostalgique mais qu'il veut lucide.

Il pointe une fois de plus la mort des idéologies, le retour des religions, la vacuité de toute politique nationale dès lors que tout se décide au niveau supranational et dans les hautes sphères des multinationales, la puissance de l'individualisme au détriment de l'action collective et dresse un tableau alarmant de la France. Il pousse même le bouchon un peu loin en prônant (sérieusement ?) les États Unis d'Occident sous l'égide des USA, dont la France ne serait plus qu'un cinquante et énième État. le Grand Charles – qu'il admire – doit se retourner dans sa tombe !

Voilà une lecture stimulante où l'amateur de belle prose sera séduit, une fois de plus. Quant au fond, j'ai pour le moins des réserves, me disant à la lecture que c'est trop brillant pour être toujours juste.
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Le plan vermeil

Lu ça il fut un temps. Ce que j'en pense aujourd'hui c'est que Régis Debray est vieux maintenant à son tour.

Investir le champ intellectuel sur tout .. il faut le lire comme quelqu'un qui s'est souvent trompé et qui passe son temps à vouloir sur le tard rattraper ses théories d'antan si fumeuses, mais le soir n'est pas bon conseiller..

Alors j'ai envie de lui opposer cette formule : "Avec un vieux, il ne faut pas raisonner comme on pense qu'il voit les choses, mais comme on pense qu' il lui plairait de les voir s'il n'était pas vieux". Pour le reste, c'est juste une question de capacité physique."
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La République expliquée à ma fille

Une lecture pour réviser quelques principes élémentaires et remettre les idées à l'endroit de ceux qui mélangent laïcité et athéisme, nationalisme et attachement à son pays, valeurs républicaines et parti républicain.

L'ancien guerillero parti rejoindre le Che en 1961, détenu dans les prisons boliviennes pendant 4 ans, observateur en 71/72 des mouvements pour rétablir la démocratie au Chili, a eu le temps de réfléchir sur ces conquêtes précieuses que sont les Droits de l'Homme, la liberté d'expression et le respect de la justice.

Celui qui se définit comme "un gaulliste d'extrême gauche" fut pourtant proche de Mitterrand, puis de Mélenchon. Un parcours qui peut sembler déconcertant pour ce brillant élève de Normale Sup', docteur en philosophie, spécialiste de l'image et des médias, qui a publié une oeuvre considérable et controversée. Un de ces intellectuels bien de chez nous, capable d'écrire sur tous les sujets, et de donner un avis sur l'actualité sans rechercher la notoriété. Je le crédite de sincérité dans ses prises de position, au détriment d'une certaine clarté.
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