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Critiques de Toni Morrison (1253)
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Récitatif

Récitatif est une nouvelle, - la seule d'ailleurs, écrite par Toni Morrison.

Je suis entré de plein pied dans ce récit en faisant la connaissance de Twyla Benson et Roberta Fisk, deux fillettes pauvres âgées de huit ans qui sont confiée à l'Assistance publique. Nous sommes dans les années 50 dans l'État de New-York. Elles vont passer quatre mois dans le même orphelinat, partageant la même chambre.

On sait peu de choses sur elles, d'où elles viennent, leur passé encore neuf… C'est tout d'abord à travers l'existence de leurs mères respectives qu'on apprend un peu ce qu'elles sont.

La narratrice, c'est Twyla. « Ma mère dansait toute la nuit et celle de Roberta était malade. » Et puis au détour d'une phrase presque anodine, dit comme cela sur un ton très dégagé, Twyla évoque le fait d'être coincée dans un lieu inconnu avec une fille d'une race tout à fait différente.

Le texte est court, à peine soixante pages, si l'on enlève la très riche postface d'une certaine Zadie Smith. Avec la postface on approche des cent-vingt-cinq pages, c'est dire…

C'est un récit de l'amitié, de la sororité… Un texte à la voix très attachante, même si l'on devine en creux beaucoup d'amertume et d'ironie…

C'est un livre qu'on pourrait qualifier d'expérimental.

Rien dans l'écriture n'est laissé au hasard…

Cette nouvelle extraordinaire a été conçue comme « l'expérience d'ôter tous les codes raciaux d'un récit concernant deux personnages de races différentes pour qui l'identité raciale est cruciale ». C'est ainsi que Toni Morrison a justifié le sens de l'existence de ce texte.

La narration est terriblement efficace, directe, rapide. Et je vous jure que cela fonctionne.

En dessinant les contours de cette nouvelle en forme d'énigme, Toni Morrison déploie dans cette histoire d'amitié tout le sens caché qu'elle a voulu exprimer lorsqu'elle disait : « J'aimerais écrire sur des Noirs sans avoir à dire qu'ils sont noirs. Exactement comme les Blancs écrivent sur les Blancs. »

Exercice de style oulipien ? Variations musicales ? Conte initiatique ? Jeu de miroirs ? Casse-tête philosophique ?

L'une est Blanche, l'autre est Noire, mais on ignore jusqu'au bout si c'est Twyla ou Roberta. J'ai fait l'expérience, - puisque ce récit est l'expérience non pas d'un texte mais celui du lecteur, j'ai lu et relu attentivement, revenant sur mes pas… J'ai observé les phrases limpides, ciselées à merveille, l'histoire elle-même porte cependant une identité raciale qui est importante dans les propos des protagonistes, le sujet est plusieurs fois évoqué et malgré tout, le lecteur que je suis s'est perdu dans cette recherche qui était peut-être vaine… C'était sans doute cela d'ailleurs que cherchait à obtenir la facétieuse Toni Morrison dans ce dédale énigmatique d'une histoire ordinaire.

Pourtant elles grandissent, leurs chemins continuent de se croiser, pourtant elles ne font rien pour chercher à chaque fois à se revoir, elles sont même parfois en désaccord sur la lecture qu'elles font de ce passé commun de quatre mois à peine. Mais elles avaient huit ans…

Que m'apprend cette expérience insolite ? Ce jeu en forme d'énigme nous en apprend plus sur nous, sur moi, sur nos représentations, la manière de guetter, décortiquer chaque phrase, chaque mot, chaque scène lue, de chercher à catégoriser, attribuer de manière différenciée ce qui pourrait relever de celle qui est Noire, de celle qui est Blanche…

« Ma mère dansait toute la nuit et celle de Roberta était malade. » Laquelle est une mère noire ? Laquelle est une mère blanche ? Laquelle est à même de danser toute la nuit ? Laquelle a le plus de risque de tomber malade et de le rester dans cette Amérique des années cinquante ?

Et Twila ? Et Roberta ? Deux prénoms... Laquelle est Noire, laquelle est Blanche ? Tiens, celle qui parle justement, la narratrice ? Celle à qui Toni Morrison confie naturellement sa voix ? Ou bien n'a-t-elle pas au contraire voulu nous perdre encore un peu plus, jouer de nous en s'attribuant la narration d'une femme blanche, sorte d'expérience immersive comme seuls savent le faire les grands auteurs ?

Et y penser brusquement, n'est-ce pas une manière vertueuse de nous obliger à nous poser les questions essentielles, oser poser les regards qui ne viendraient pas autrement ?

Ce récit n'appelle pas de réponse. C'est une énigme qui n'appelle pas de solution. Seulement un questionnement, seulement un cheminement, seulement un pas de côté… Un pas de côté pour nous regarder, nous qui observons ce texte à la loupe et je dois avouer que c'est une expérience jubilatoire de se regarder ainsi contempler un livre et ses pages dans tous les sens… Il est intéressant en effet d'observer la confrontation de nos intuitons à hauteur de ce texte.

Elles se reverront à quatre reprises pendant une bonne vingtaine d'années, à chaque fois c'est le hasard et chaque fois la rencontre est fugitive, presque superficielle, ce sont cependant des retrouvailles troublées par un souvenir encombrant qui continue de les hanter…

Elles se reverront une dernière fois, du moins, c'est sur cette dernière fois que se referme le livre… J'aurais tant aimé qu'elles continuent de se voir, de se revoir, qu'il ne soit plus question de hasard…

Je me suis retrouvé si fragile devant ce texte si fort...

Que m'importe que je ne sache pas laquelle est Blanche, laquelle est Noire…

La seule chose qui m'importe est de considérer Toni Morrison comme une grande écrivaine et qu'elle m'apprenne à sa manière à faire ce pas de côté. Il est intéressant en effet d'observer la confrontation de nos intuitons à hauteur de ce texte qui se déplie à l'infini...

Je remercie mon amie Isa de m'avoir prêté ce livre très inspirant… On pourrait en parler des heures…

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Home

Il se trouve que j'ai lu et adoré Beloved, il y a quelques années, heureusement, parce que Home , ne m'a pas convaincue...

Oui, c'est très bien écrit.

Oui il y a quelques fulgurances, quelques passages très forts. [Encore heureux, vu ce que Toni Morrison dénonce...]

Mais, je n'ai pas aimé le choix narratif passant sans cesse du passé au présent, changeant tout le temps de personnages.

Peut-on dire qu'on a trouvé brouillon la manière de raconter d'un prix Nobel de littérature? ( même si j'ai bien compris que les premières pages et les dernières se répondaient) .

Une histoire racontée comme on jette des polaroids, et tant pis pour le lecteur , qu'il se débrouille pour s'y retrouver !

Et tant pis s'il passe à côté de l'émotion ! Les faits évoqués sont tellement puissants, tellement horribles, tellement révoltants, que l'auteur atteindra l'identification Lecteur/personnages.

Alors pêle-mêle , Toni Morrison nous offre des souvenirs d'enfance, des souvenirs de la guerre de Corée, un homme qui parcourt des kilomètres , puis son ex-petite amie, puis sa soeur , puis encore le frère qui vient sauver sa soeur ...

Mais au milieu de ces mouvements , surgissent comme des "vraies histoires" des petits bouts de reportages, sur la condition des noirs américains dans les années 50 aux USA. Et comme ces faits sont dramatiquement infâmes, l'auteure nous touche et atteint son objectif. Enfants maltraités, femmes maltraitées, homme noirs maltraités par l'homme blanc, guerre : la liste est longue , le monde est cruel !

D'autres livres racontent peu ou prou les mêmes injustices , et m'ont davantage émue. Là , on a à peine le temps de faire connaissance avec Frank Money et sa soeur, on est enfin rentré dans l'histoire au bout de la centième page, on a enfin placé toutes les pièces du puzzle de Toni Morrison, qu'il est temps de leur dire au revoir...

153 pages qui auraient gagnées à être étirées, développées.

( Mais ce n'est que mon avis...). Quand je lis ce qu'en pensent les journalistes du Washington Post et du New York Times, je me demande si j'ai lu le même livre...

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Beloved

Il faut se sortir du style de toni Morrison chargé de lourds symbolisme et de noirceur confuse pour apprécier ce livre à sa juste valeur. Le lecteur habitué aux parcours balisés aura l'impression d'avancer dans un tunnel sans fin et alors qu'il désespèrera d'accrocher à cette écriture nébuleuse viendra la lumière. Mais cette illumination sera terrible et révoltante car l'esclavage tel qu'il est décrit dans ce livre est loin d'être un soleil. Au contraire c'est une interminable nuit de cauchemar pour les hommes, les femmes et les enfants qui y sont soumis. On compare souvent les esclaves à du bétail, mais leur sort était bien pire. Les bêtes elles n'étaient ni fouettées, ni violées, ni pendues et encore moins humiliées selon le bon plaisir de leurs employeurs. Sethe a tenté de s'enfuir de la ferme ou elle vivait avec ses enfants à la mort de ses maîtres, mais elle est vite rattrapé et pour éviter que ses petits retournent sous le joug elle tente de les tuer. Ses fils survivent à leurs blessures, pas sa petite fille de 2 ans. le roman tourne autour de la culpabilité qui va la ronger au point que la maison qu'elle habite bien des années plus tard une fois libre semble être hantée par le fantôme de ce petit être. Quand elle recueille Beloved, une jeune femme sans passé et sans souvenirs, elle comble le vide créé par l'absente mais réveille aussi les souvenirs d'une vie vouée à l'horreur et à la servitude. Ce livre est indispensable mais il faut savoir qu'un sentiment de honte mêlée d'amertume sera le compagnon du lecteur éclairé bien des jours après sa découverte...
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Le chant de Salomon

Voler! Avec ses ailes de soie bleue, à l'ouverture du roman, le 18 février 1931, Mr Smith, agent d'une Mutuelle d'Assurance-vie, saute dans les airs du toit de l'hôpital. Et meurt. le lendemain, pour la première fois, un bébé noir naît dans ce même hôpital. le bébé, c'est Macon Mort, le héros du livre, qui à quatre ans prend à son tour conscience que seuls les oiseaux et les avions peuvent voler. de quoi perdre tout intérêt pour soi-même.

Heureusement, dans les chansons des enfants, dans les mythes afro-américains, c'est tout différent, les esclaves peuvent s'envoler vers l'Afrique pour échapper à leur condition. Mieux que des lingots d'or, non? de quoi nourrir la quête d'identité, la quête des origines du héros d'une bien belle façon.

J'aime la façon dont Toni Morrison sait mêler le réalisme social et la richesse symbolique, la violence et l'humour, elle nous peint « un putain de monde monstrueux » d'une façon merveilleuse, avec de belles touches de réalisme magique.
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Home

C‘est le retour « à la maison » du jeune soldat après la traumatisante guerre de Corée. Il quitte Seattle pour Lotus en Géorgie où il doit retrouver sa soeur malade. La route est longue et difficile pour un jeune Noir dans l'Amérique ségrégationniste des années 50, et en chemin les souvenirs qui affleurent ne sont pas toujours agréables. Heureusement que le Green Book, le guide de voyage des Noirs, est là pour lui indiquer les bonnes étapes.



Dans ce court roman (une fois n'est pas coutume) Toni Morrison aborde avec concision et brio des thèmes qui lui sont chers : elle pointe le racisme érigé en règles sociales et s'intéresse au sort des plus faibles et des démunis. Sa lutte est celle d'une militante qui dénonce la domination des Blancs sur les Noirs, des hommes sur les femmes, la chasse aux sorcières du maccarthysme, un combat visant la réhabilitation des victimes de toutes formes d'oppression.

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Love

Un roman en noir et blanc, ou plutôt un sombre roman de Noirs et de Blancs



Un roman d’époque, celle où, aux États-Unis, les Noirs n’étaient pas admis dans les hôtels réservés aux Blancs. Dans une petite ville de la côte, M. Cosey avait créé un établissement pour les « gens de couleur ». Un grand succès, car y jouaient les meilleurs jazzmen. Les mouvements de libération des années soixante causeront en partie le déclin de l’hôtel en permettant aux Noirs de choisir d’autres lieux de villégiature.



Un roman dur, car les victimes y deviennent des coupables. On sait bien qu’une femme vendue ou violée est sûrement coupable de l’avoir cherché… mais on ne réalise pas toujours que l’impuissance des victimes peut aussi créer l’agressivité et la haine qui se tournent vers leur entourage plutôt vers la cause de leur malheur.



Un roman étrange puisqu’au puissant réalisme de la Nobel 1993, s’ajoute ici un fantôme qui hante encore les lieux où il a été aimé et haï.



Un bon roman de Toni Morrison, peut-être pas le meilleur ou peut-être suis-je moins à l’aise avec les thèmes exploités… (J’ai aimé davantage « Home » ou « L’œil le plus bleu »)

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Home

Les Matchs de la rentrée littéraire 2012.



Ma première participation a un tel évènement, retransmission mondiale et at home. L’engouement est là mais suis-je prêt à monter sur le ring et affronter des adversaires sans doute plus prestigieux que moi. Je me prépare, je m’entraîne. Un régime astreignant à base de céréales (surtout du malt au pouvoir énergisant et euphorisant incontestable), je n’oublie pas une hydratation sans modération, car je sens déjà les perles de sueur couler sur mon front…



Face à moi, Cassius Clay ou son grand-frère. Mon objectif : rester sur le ring et ne pas tomber KO dès le premier coup de gong. Serais-je à la hauteur de l’évènement ? Le trac, la pression (mais la pression a du bon, j’aime la pression sous toutes ses formes, j’aime les pressions). Je ne reviens pas sur les choix proposés, il y avait du lourd, du très lourd pour ce match – c’est un combat pas une réunion Tupperware. Pour ma part, j’ai décidé d’aller sur le terrain de Toni Morrison avant de rentrer à la maison. Home.



Frank Money est un vétéran noir de la guerre de Corée. Il a réussi à rentrer en vie alors que ses camarades ont succombé dans la jungle. Peut-il refaire sa vie ? Il le pense, il le croit. L’Amérique a changé, du moins l’espère-t-il ? C’est alors que sa sœur Ycidra dite « Cee » l’appelle au secours. Un SOS lancé dans une bouteille à la mer qui va plonger Frank dans le doute et l’obliger à un voyage à travers le Sud et le passé.



« Home » commence par une vision presque fantasmagorique : deux enfants assistent à un combat entre des chevaux, et à la mise en terre d’un cadavre, à la sauvette. Je ne comprendrai cette histoire que bien plus tard, à la toute dernière page du roman. Mais de cette entrée en scène découle toute l’obsession et la peur de Frank Money. Sa vie sera marquée à tout jamais de ce qui pourrait ressembler à un cauchemar et que l’enfer de la Corée n’a fait qu’entretenir. D’ailleurs, une fois le livre achevé, je relis cette première page. Elle est l’essence même du roman de Toni Morrison.



Je découvre donc l’écriture de Toni Morrison. J’ai passé pas mal de temps avec Jim, ce bon vieux Jim homonyme dont sa musique m’enlace encore des nuits et des jours. La musique de Toni place ses sonorités dans le jazz version be-bop. Question d’époque aussi, certainement, question de racines aussi. Celles de Toni sont afro-américaines avec tout ce que cela entraîne : l’esclavage, la ségrégation, le racisme et la misère. Le Sud profond de l’Amérique où les mœurs ne sont pas les mêmes notamment à l’encontre de la « communauté » noire (entre guillemets de bien-entendu, parce que pour fédérer une communauté, il faut des êtres, des hommes, des âmes ; mais là-bas, les nègres sont loin d’appartenir à cette catégorie).



L’Amérique de Frank est celle d’avant l’ère Kennedy. Mais c’est aussi celle du douloureux maccartisme. Chaque ère a sa part d’ombre et de lumière. Il ne valait mieux pas être nègre, mais il ne valait mieux pas être un coco, non plus. Sud natal ou Nord adopté, je découvre ce pays bien différent de l’Amérique d’Obama, fraîchement réélu ou déchu (réponse ce soir). Barak et Toni. Comme avant, Malcom et Martin Luther. Et Rosa Parks, surtout Rosa Parks.



J’ai survécu au premier round. Je suis chaud, la foule m’encourage, m’harangue. Je suis debout, encore. Nul doute que je remonterai à nouveau sur le devant de la scène. Je n’ai pas la ceinture dorée du champion, mais je continuerai sur la voie Toni Morrison. Le gong retentit. Est-ce la fin du match ? Non, j’entends derrière une musique, une trompette s’élève, celle de Dizzie Gillespie, un saxo s’envole, celui de Charlie Parker, le piano gronde, celui de Thelonious Monk, la contrebasse frappe, celle de Charles Mingus, la batterie cogne, celle d’Art Blakey. Le roman de Toni Morrison s’achève sur cette musique noire, chargée de sueur et de liberté, sur ces notes de be-bop.
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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Beloved

Quelle claque! Quand on me parlait de ce livre, je répondais l'avoir lu, effectivement - je le confondais en fait avec un autre - et je ne partageais jamais tout-à-fait l'enthousiasme de la personne. C'est quand mon beau-frère, qui m'a déjà plusieurs fois recommandé des livres fantastiques, m'a parlé de Beloved avec passion que je me suis décidée à le relire.

Je l'ai acheté et là, dès la première page, j'ai compris: non je ne le connaissais pas et oui, la magie a tout de suite opéré. J'ai étéimmédiatement saisie par la richesse, la complexité de cette langue - je l'ai lu en anglais et je ne comprenais pas tout... - qui rendait ce texte mystérieux.

Tout au long de la lecture, et une fois le livre posé avec regret sur la table de chevet, Sethe ne m'a pas quittée. Je repensais à cet arbre qui avait poussé sur son dos, à cet acte terrifiant de Sethe et à cette petite fille sans repos.



Je pensais également en savoir pas mal sur l'esclavage, mais en réalité, jamais encore je n'avais lu de livre où l'on se retrouve si intime lié à un esclave, sa vie quotidienne. Je ne savais pas que les familles d'esclaves n'existaient pour ainsi dire pas, les enfants étant très vite séparés des parents, revendus, passant d'un propriétaire à un autre comme, bien sûr, une simple marchandise. Je n'avais jamais vraiment vu ces dos atrocement mutilés, ni supposé que la liberté, quand on avait été esclave, était un état très difficile à appréhender. bref je me suis sentie bien naïve.

J'ai également découvert, ensuite, que Beloved avait été inspiré de la vie de Margaret Garner, une esclave qui s'est échappée dans les années 1860 et a traversé les Etats-Unis du Kentucky à l'Ohio pour être libre, a été pourchassée par ses propriétaires d'un état à l'autre et a tué son enfant pour qu'il ne subisse pas, comme elle, l'esclavage.



Pour la force et la beauté des mots, pour cet hommage qu"elle rend aux esclaves noirs américains, je pense que Beloved est un livre à lire absolument, et quand je pense que j'ai failli passer à côté de ce trésor!


Lien : http://pourunmot.blogspot.fr..
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L'oeil le plus bleu

C'est une histoire poignante, marquante: celle d'une fillette noire de douze ans, laide et pauvre, qui rêve d'avoir les yeux bleus, pour qu'enfin on la regarde...



Elle va subir des drames horribles et on a le coeur serré tout au long de ce parcours de vie. Cela ne peut qu'aboutir à une issue fatale. Cette transparence vécue comme une souffrance, cette absence d'existence aux yeux des autres est terrible.



Le récit prend une forme originale, car il est ponctué de phrases leitmotiv qui débutent chaque chapitre, les lettres étant imbriquées les unes dans les autres, à tel point qu'on ne sait plus le sens de la phrase complète. Cela mime la folie progressive du personnage, de même que le dialogue final où Pecola converse avec son double.



D'autre part, le roman présente un deuxième point de vue, celui d'une autre fillette noire, qui a eu plus de chance qu'elle, témoin indirect de ses drames, mais témoin indifférent parfois...



Un livre violent, touchant.Cette fois encore, l'auteure percute nos coeurs.
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Récitatif

Twyla et Roberta passent quelques mois dans un foyer d'orphelins : la mère de la première dansait toutes les nuits, négligeant sa fille ; celle de la seconde était malade.

Devenues jeunes femmes, puis mères, elle se croisent à deux reprises des années plus tard. Un malaise entoure leurs retrouvailles.



L'une est noire et l'autre blanche, et ne pas savoir laquelle est d'une couleur ou d'une autre n'a à aucun moment gêné ma lecture.

Dans sa postface, plus longue que la nouvelle mais qu'il faut absolument lire, Zadie Smith nous explique que l'autrice s'est ingéniée à brouiller les cartes, cherchant à nous empêcher de déterminer qui est de quelle couleur.

Entretenir cette ambiguïté avait sans doute un sens dans l'Amérique du début des années 1980 (la publication initiale date de 1983), et en a sans doute encore un dans de nombreux milieux. Pour moi, si elles avaient été toutes les deux jaunes ou rouges, cela n'aurait rien changé...

Je me suis en effet plus intéressé à l'évolution des deux personnages, entre qui l'amitié d'enfance devient l'indifférence des jeunes adultes puis l'opposition frontale, avec le souvenir divergent d'un événement de leur passé.

C'est évidemment très bien écrit, dans un style plutôt épuré, facile à lire.

Un court mais très bion moment de lecture.
Lien : http://michelgiraud.fr/2024/..
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Un don

A la lecture de la quatrième de couverture je m’attendais à un récit sur l’esclavage. En fait le sujet est traité de façon beaucoup plus large que cela. Ce texte met en exergue la servitude sous toutes ses formes. Asservissement volontaire, involontaire, légal, de fait, à une caste, à un être humain, à l’autre sexe, aux croyances, à un dieu, à l’argent,… Toni MORRISON joue avec les nuances avec beaucoup de talent. Esclavage, servitude, soumission, dépendance, la frontière est parfois mince. Toutes ces notions s’emmêlent, se confondent, se distinguent et surtout cela nous questionne ; parfois brutalement. Jusqu’à quel point un être humain est-il complice de sa servitude ? Dans quelle mesure un être voué à la soumission de par sa naissance, son statut social, sa couleur de peau… est-il complice de sa situation ? - Sortez vos stylos vous avez 4 heures après je ramasse les copies !-

Et puis il y a la question des femmes : quelle que soit la couleur de leur peau leur degré de dépendance est, à l’époque, complètement conditionné par leur sexe. - Hein quoi qu’est-ce que j’entends dans le fond de la salle ? Qui a dit pas qu’« à l’époque » ?-

Bon, je disais, leur liberté se limite à un choix initial plutôt restreint, encore plus quand elles sont pauvres: bonne sœur, prostituée ou épouse dévouée. - Qui a dit bobonne ?! –

Dans ces conditions le concept de liberté fait beaucoup moins rêver. On finit même par se demander si la liberté n’est pas justement qu’un concept abstrait qui n’a jamais existé. – Aïe ! Qui balance des boulettes ? Non je ne suis pas en dépression !-



J’en étais où… ? Ah oui donc… Le lecteur est invité tout à tour dans la tête de chaque personnage. Chacun dévoile sa part de mystère mais leurs histoires personnelles étant liées les unes aux autres, petit à petit le puzzle s’assemble jusqu’à prendre tout sa dimension. Chaque personnage prend de l’épaisseur à être ainsi décortiqué sous tous les angles. 4 femmes: 2 blanches, 1 indienne et 1 noire et aucune n'est vraiment libre, pas pour les raisons auxquelles vous pensez. D'ailleurs quand Rebekka pourrait être libre elle choisit une autre forme d'asservissement. Les hommes ne sont guère mieux. Une seule exception, je vous laisse découvrir.



En pointillé derrière ces histoires il y a des petits bouts de l’Histoire des Etats Unis qui nous sont dévoilés. Une Amérique sauvage et faite de grands espaces vierges ou tout est possible mais aussi instable, à commencer par les frontières. – Non à l’époque il n’y avait pas de mur avec la frontière Mexicaine ! Z’avaient pas eu l’idée. Chut j’ai dit ! –



Je disais, une Amérique où des peuples sont exterminés, où des peuples sont asservis pendant que d’autres exploitent cette situation pour s’extirper de la fange et se hisser vers le haut. Une ascension sociale, mais à quel prix ?



Toni MORRISON nous rappelle que la servitude ne se résume pas à l’esclavagisme mais que tous nous pouvons aliéner notre liberté : volontairement ou non, consciemment ou non, sous le poids de la société et de ses mœurs, sous le poids des traditions, des superstitions, ou que sais-je. – Quoi qu’est-ce que tu dis ? L’esclavage c’est du passé ? Toi t’es libre, tu fais c’que tu veux ? Tu peux me le redire en lâchant ton écran des yeux STP ? Ah pardon tu surveilles tes likes, ...libre à toi…

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L'oeil le plus bleu

L'œil le plus bleu ou la Genèse de l'œuvre de Toni Morrison, un roman qui met en scène, avec l'imaginaire de l'auteure, un événement qui a éveillé la conscience afro-américaine (et esthétique) de Toni Morrison en tant que femme noire Américaine.

Ce n'est pas un roman simple à aborder, et le résumé vraiment très réducteur sur la quatrième de couverture n'aide pas et ne prépare pas le lecteur lambda (à mon avis) à rentrer dans le récit.



A l'inverse des autres romans de Toni Morrison, L'œil le plus bleu parle presque uniquement de l'enfance, de ce qui la construit autant que de ce qui la détruit. C'est aussi un roman plus terre à terre, dont la langue bien que très poétique n'a pas la dimension d'incantation aux ancêtres qu'on trouve pourtant souvent dans son œuvre. Ce roman décrit des évènements quotidiens de la petite Pecola qui en plus d'être née dans une famille noire pendant la ségrégation raciale est aussi née dans une famille brisée, tant physiquement que moralement (y compris sur le plan de la moralité). Ce réalisme m'a beaucoup étonnée, d'autant plus qu'il est violent- le roman s'ouvre sur le récit d'un inceste, ce sui donne le ton à l'ensemble du roman. Viol d'enfant, meurtre d'animaux, humiliations et atteintes à la dignité sont le lit de ces personnages.



Curieusement (mais on comprendra vite pourquoi), la narratrice de l'histoire n'est pas Pecola elle-même, mais Claudia, une autre petite fille du quartier. Claudia et sa sœur Frieda tentent de comprendre ce monde violent qui les entoure et de lui donner un sens avec leurs mots et leurs réflexions d'enfants- ce décalage créé d'ailleurs une violence supplémentaire. Quant à la partie consacrée aux portraits de personnages adultes, le lecteur n'est pas en reste pour constater que les dégâts sur cette communauté font date ! Contrairement à d'autres romans, on ne voit pas la résilience qui viendrait éclairer ce récit. Les mits tombent comme des couperets, et l'écho des derniers mots résonnent comme une dénonciation individuelle de chaque personnzge dans le malheur de Pecola, que ce soit par ses moqueries ou son indifférence.



Avec du recul, on peut voir les thèmes qui seront récurrents dans l'oeuvre de la romancière américaine. Une chose est sûre, les différents visages de la violence dans ce récit ne laissent pas indifférent et interpellent, donnent matière à réflexion. En cela, la lecture de la postface de l'auteure dans l'édition Vintage apportent des éléments intéressants sur le contexte de l'écriture.



En bref, un roman âpre, mais beau malgré tout qui "remonte dans le temps", comme le fantôme de Marley de Dickens qui tente de nous expliquer comment et pourquoi une petite fille noire a pu détester son image au point de vouloir des yeux bleus. Et pas seulement bleu, les plus bleus.
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Le chant de Salomon

J’ai été emballé par le début de ce roman, La chanson de Salomon, avec cette rue Pas-Rue-du-Médecin, appelée ainsi par dérision, puis j’ai été intrigué par ce vendeur d’assurance qui se jette du haut d’un hôpital, causant cette pauvre femme enceinte (fille dudit médecin de la fameuse rue) à devenir la première de couleur à accoucher à l’intérieur de l’hôpital. Début prometteur. Je me disais que son auteure, Toni Morrison, avait beaucoup d’imagination et, pour une lauréate du sérieux prix Nobel, ne craignait pas de jouer avec le ton humoristique. Mais, pas la suite, je me suis senti un peu perdu. Le nouveau-né sera éventuellement surnommé Laitier (pas parce qu’il distribue du lait, non ! cherchez plutôt du côté d’un allaitement maternel prolongé) car, dans ce patelin de Caroline du Nord, tout le monde doit porter un surnom. Et le plus étrange est le mieux. Ainsi, on a droit à Mort, Corinthiens Un, etc. Un petit lien avec les Évangiles aide aussi, comme Pilate et Agar.



C’est que La chanson de Salomon est une grande fresque historique sur le peuple noir, cherchant à retracer ses origines et à trouver son identité. Ainsi, tous ces liens avec les Saintes Écritures mais aussi avec les légendes africaines, avec traditions orales, servent à l’accentuer. Et, pour y arriver, tout y passe : déracinement, esclavagisme, désoeuvrement, haine raciale, amour et folie, chasse au trésor, etc.



Écrit ainsi, c’est assez vendeur. Toutefois, l’intrigue est toute aussi étrange que les noms des personnages. J’oserais même dire embrouillée. Par moments, ça semblait si décousu que j’éprouvais de la difficulté à m’y retrouver. Puis, à d’autres moments, mon intérêt reprenait et tout semblait avoir du sens à nouveau. J’ai vécu de tels épisodes plusieurs fois. À cause de cela, je n’ai pas été aussi sensible aux qualités littéraires, poétiques et symboliques du roman. Peut-être est également à cause de la plume de Toni Morrison ? J’avais l’impression qu’elle forçait trop l’inclusion de certains passages qui semblaient peu apporter à la trame principale. Dans tous, les cas, le dénouement rassemble tous les éléments qui me paraissaient disparates en un tout cohérent, il était trop tard pour moi : j’avais presque oublié le début de cette histoire et les raisons qui m’avaient poussé à en continuer la lecture. Dommage. Il va sans dire que ce n’est pas une lecture légère.
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Délivrances

J'ai voulu découvrir Toni Morrison, prix Nobel de littérature et j'ai rencontré une auteure magnifique.



Ne croyez surtout pas que je joue pour le titre d'expert en littérature américaine de Babelio, que nenni…jamais je ne battrai les amateurs de SF, ou d'horreur, au demeurant fort sympathiques, et puis je déteste le carcan des challenges. Ma motivation, c'est juste de la curiosité et l'amour des beaux textes qu'on prend le temps de savourer.



Petit bras, je me contente de prix Pulitzer, de prix Nobel…de Jim Harrison…des auteurs de l'école du Montana, de bien d'autres encore….sans compter tous ceux que je n'ai pas mis sur Babelio, des livres lus avant l'invention d'internet, vous imaginez le monde sans internet ?….Hemingway, Faulkner …bref, je ne joue pas dans la même cour.



Alors Toni, me direz-vous ? …c'est brillant, elle est dans ce roman au-delà de la question raciale, même si c’est toujours en sourdine d'une façon surprenante, et comme une composante d'une question sociale. Avec elle, on est obligé de regarder en face un sujet douloureux , la maltraitance des enfants, du manque d'amour à la pedophilie, de la difficulté de se construire après des traumatismes. Les victimes et les bourreaux sont de toutes les communautés.



Tous les personnages de ce roman choral sont liés entre eux. Chacun représente un regard sur la réalité qui nous apparaît peu à peu. La construction est magistrale. Tout s'organise autour de la magnifique Bride, jeune femme noire, dont la beauté et la réussite économique cachent mal les blessures de l'enfance. En fait de croisière, pour faire un break, c'est sur les routes de campagnes de Californie, qu'elle nous emmène en Jaguar pour un road trip à la recherche d'elle-même et de son amour perdu.



Toni Morrison nous montre de l'Amérique, une réalité dure mais nuancée : le couple de néo hippies revenus de la société de consommation, la dictature des apparences chez les jeunes branchés, la pauvreté, elle nous questionne sur ce qu'est la réussite, si l'on peut revenir de terribles douleurs, s'il est possible de se faire confiance entre humains. Pas de réponses simples ou préfabriquées, elle nous laisse avec de l'espoir mais aussi avec toute la conscience de la complexité du monde.



Un roman qui bouscule nos représentations, une belle découverte.





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Délivrances

Lula Ann Bridewell, fille de "mulâtres au teint blond", est si noire de peau à la naissance que sa mère, Sweetness, n'éprouve pour elle que du dégoût. Son père, ne la croyant pas de lui, quitte le domicile conjugal.

Mal aimée, la petite Lula Ann est prête à tout pour attirer l’attention d’une mère indifférente même à signer un faux témoignage envoyant une institutrice blanche en prison pour pédophilie.

La fillette va grandir seule, se forger une personnalité factice, portant en elle le secret de ce mensonge lourd de conséquences.

Devenue adulte, la chenille se transforme en papillon et Lula Ann devient Bride, à la beauté éblouissante, fière de sa peau tellement noire qu’elle la met en valeur en ne s’habillant qu’en blanc.

Sensuelle et épanouie, elle entame une brillante carrière dans le secteur des cosmétiques et élabore sa propre ligne de produits.

Comment parvient-on à se libérer des traumatismes de l’enfance ? Comment vivre avec la culpabilité d’être, celle lentement inculquée, diffusée par ses parents, par une mère ? Comment vivre en étant Noire, même la plus belle ? Comment survivre avec le mensonge, dans le mensonge ? Comment aimer sans rejeter ni juger ?

Délivrances est un roman grave, lumineux et réaliste, confirmant la puissance narrative magistrale de la romancière et la force de son regard sur la société américaine contemporaine et les injures et insultes faites aux exclus et aux faibles.

Une belle lecture !







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Beloved

"Home" m'avait fait pressentir ce que "Beloved" me confirme : Toni Morrisson est une gastronome haut de gamme de la littérature américaine, d'un raffinement aussi subtil que son accès est délicat, un peu difficile même (*)

(difficulté corsée pour ma part par une lecture en anglais).



Sethe, mère de Beloved et de trois autres enfants, est une esclave libérée de ses maîtres au lendemain de la guerre de sécession, mais pas de ses chaînes.



Paul D, un des hommes auprès desquels elle a vécu dans ses années d'esclavage, arrive chez elle et peine à l'ouvrir à un amour qu'elle n'arrive pas à donner, sous le regard suspicieux et souffrant de sa fille Denver habitée des fantômes de sa mère.



Par tableaux successifs et touches délicates emprunts d'une profonde humanité, Toni Morrisson dévoile peu à peu - très peu d'abord, et c'est assez déroutant à la lecture - ce que sont ces chaînes, et révèle lentement dans un style très allusif les raisons d'être de Sethe et celles de ses filles, qui lui sont intimement liées.



Sensible à ce plaidoyer universel tout en profondeur et délicatesse contre la condition épouvantable faite aux esclaves, en Amérique ou ailleurs, et pour l'amour maternel, la liberté, la dignité humaine, je dois avouer qu'y rentrer m'a demandé pas mal d'efforts mais qu'ils en valent la peine, car ils sont de nature à sédimenter définitivement les convictions les plus ancrées.



(*) Sur le même sujet, "Racines" d'Alex Haley est beaucoup plus accessible

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Récitatif

Une histoire de racisme, somme toute banale dans sa sobriété mais loin d'être inintéressante. C'est corrosif . On croit effectivement découvrir qui est la petite noire, devenue femme , qui est la fillette blanche, mais la postface de l'écrivaine britannique Zadie Smith nous donne encore plus à réfléchir et à remettre en cause ce qui avait peut être été trop rapidement déduit. Courte nouvelle mais si riche d'enseignement !
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Home

Toni Morrison trempe sa plume dans l’efficacité pure. Cent cinquante pages seulement suffisent à Toni Morrison pour dérouler avec virtuosité une histoire emblématique et originale, puisant dans les thèmes pourtant bien rebattus de l’Amérique des années 50, tels que la ségrégation raciale et le maccarthysme.

Cette histoire est racontée à deux voix. Celle de Toni Morrison et celle de Frank Money, le personnage principal, qui se permet d’interrompre le récit et d’interpeller l’auteur dans de courts chapitres de transition : « Décrivez-moi ça si vous savez comment... »

La construction du récit est subtile. Retour au pays d’un vétéran de la guerre de Corée. Flash-back et visions oniriques. Souvenirs d’enfance. Plusieurs personnages entrecroiseront leurs parcours secondaires au récit principal de Frank Money pour former une trame particulièrement solide. Particulièrement amoché, Frank cherche à se reconstruire et à retrouver sa dignité. Un moyen possible est d’exorciser son passé, un autre est de voler au secours de sa sœur dont il a reçu un appel de détresse. Arrivera-t-il à temps ?

Toni Morrison ne laisse rien au hasard, tel personnage évoqué de façon désinvolte au détour d’une phrase ressurgira plus tard dans le récit, tel début de témoignage se trouvera ensuite corroboré ou désavoué, lorsque les souvenirs cesseront d’être refoulés, tel comportement étrange pourra plus tard trouver sa justification dans un épisode oublié de la petite enfance. Attention, les indices sont parfois ténus et peuvent échapper à la vigilance. Home est le résultat d’une écriture exigeante, où toute trace de superflu et de flou artistique a été éliminée. D’une force inouïe, les scènes racontées dans Home imprimeront à jamais des images indélébiles dans l’esprit du lecteur. Chaque phrase devient une grenade dégoupillée. Vous voilà prévenus.
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Beloved

Lecture ardue que celle-ci.

Ardue en raison de la construction éclatée du récit. Toni Morisson fait le choix de proposer une narration avec de multiples points de vues, des aller-retour permanents dans le temps, des digressions multiples mais jamais gratuites, des éléments clés pour la compréhension donnés au compte-goutte et dans le désordre.

Non, « Beloved » n'est pas une lecture facile. Elle exige une concentration de chaque instant, une implication sans faille.

Une fois impliqué ainsi, le lecteur ne peut que se glisser dans les mémoires meurtries des personnages et saisir toute l'horreur que fût l'esclavage.

Toni Morisson écrit merveilleusement bien, une écriture d'une poésie incroyable, faussement naïve et d'une efficacité redoutable quand il s'agit de traduire l'inhumain.



J'émettrais juste une réserve toute personnelle quant à l'aspect « fantastique » du récit qui m'a gênée au point de me paraître par moments presque incompréhensible et m'a freinée dans ma lecture.





Challenge Muli-défis 2018

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Home

J'ai toujours hésité à lire un livre de Toni Morrison, je crois que cette dame m'impressionnait et c'est une fois de plus "ma" bibliothécaire qui m'a fortement conseillée" Home". Merci à elle.

"Home", c'est le retour de Frank Money de la guerre de Corée. L' alcool sera son refuge pour réussir à survivre. Il n'arrive pas à vivre avec les souvenirs des atrocités de la guerre et celles qu'il a commise aussi.

C'est sa petite soeur Cee, tant aimée, qui le fera revenir dans sa vile natale qu'il voulait pourtant fuir à jamais. C'est là qu'il pourra enfin retrouver "la paix".

La construction du livre est un peu déroutante, on passe d'un point de vue à un autre, ce qui m'a parfois rendu la lecture un peu "difficile". Ce que je garderai en mémoire de ce livre n'est sans doute pas ce bémol mais l'écriture extrêmement forte, incisive et bouleversante de Toni Morrison.
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