Tentatives de louange livre les ultimes poèmes d'
Henri Bauchau, écrits en 2010 et 2011. Disparu en 2012 quasi-centenaire, il revisite le sel de la vie. Si l'homme est désormais fragile, atteint par l'affaiblissement naturel des sens à cet âge, il se montre encore d'une lucidité remarquable. le titre du recueil nous dit me semble-t-il deux choses importantes : la louange, c'est l'hommage de l'homme de spiritualité, du croyant, au Seigneur auquel il s'adresse beaucoup dans ces textes. Mais l'agnostique (que je suis) peut être tout aussi sensible à ces pages, tant elles célèbrent le miracle de la vie quand il s'agit d'en goûter les plaisirs quotidiens, le soleil, la nature s'incarnant dans les arbres, les oiseaux, etc, mais aussi le plaisir de sentir son corps et ses muscles vibrer, par exemple en skiant, ce que ce belge semblait particulièrement apprécier. C'est aussi une louange pleine de ferveur au travail d'écriture, à la langue, et à l'art comme la peinture. Louange à l'amour, bien sûr aussi.
Mais le titre est nuancé du mot "Tentatives" : ces poèmes m'ont fait penser à de petits messages lâchés comme autant de ballons pour que la mémoire subsiste, que d'autres prennent le relais, mais emprunts d'une grande humilité devant le mystère de l'existence...car là-dessus, l'auteur qui a pourtant vécu si longtemps avoue encore son ignorance.
Ce recueil du très grand âge force le respect, alliant luminosité et réalisme, il vient couronner la carrière et la vie, les deux étant mêlés jusqu'au dernier souffle de cet immense écrivain, discret et finalement peu connu du grand public.