Le titre original du roman, Rubè, a été traduit il me semble incorrectement en
Vie de Filippo Rubè : il ne s'agit aucunement d'un roman de formation, c'est tout au plus le récit d'années décisives du personnage justifiant son comportement et le menant vers sa fin inattendue et sujette à interprétation.
Rubè est un interventionniste à tout crin. Il veut que son pays entre en guerre et combatte l'impérialisme. Il voit dans la guerre l'exaltation d
e valeurs morales qui retrempent un pays. Comme on sait, après une période d'hésitation, l'Italie sortit de sa neutralité pour prendre le parti des alliés en 1915 et en fût guère récompensée dans ses prétentions territoriales. Notre personnage principal s'engage dans le front en lutte avec l'Autriche-Hongrie, récoltant une blessure honorable, une balle dans les poumons. À partir de là, sa vie n'est qu'une éternelle errance de trains en trains, de visites en visites, un peu comme une particule entraînée irrésistiblement par le tourbillon de l'eau qui se vide dans un siphon. D'ailleurs elle trouvera son achèvement dans une marée humaine.
Curieux livre que celui-là et singulièrement lassant. On se demande quel est le propos de l'auteur; certes il s'agit d'une errance et de rendez-vous manqués, mais pourquoi tant d'épisodes de voyages en chemin fer vers des destinations et pour des motifs vagues? Il semble qu'un paragraphe ou même une phrase aurait suffit là où l'auteur prend cinq cent pages pour nous dire que son héros est déboussolé, perdu pour cette vie. C'est beaucoup trop long pour une telle uniformité d'épisodes.