Angela Davis , cette féministe connue pour ses combats contre toute forme d'oppression nous dit que la prison a à voir avec le racisme et la répression politique . Or elle sait de quoi elle parle , elle qui fut emprisonnée et condamnée à la peine capitale après un an et demi de prison , fut enfin acquittée en 1972 .
Devenue l'une des intellectuelle majeure des USA , elle nous parle ici de quelques cas à l'appui de son texte : les prisons de Guantanamo , d'Abou Ghraïb et la torture qu'on y pratique à l'encontre des détenus . Sont aussi évoqués les violences sexuelles et le racisme dont on les accable .
Elle stigmatise la boulimie d'emprisonnements aux états-unis favorisée par la privatisation des lieux d'incarcération .
Elle cite aussi : " Au lieu de construire des maisons , jetons les sans-abri en prison . Au lieu de développer le système éducatif , jetons les analphabètes en prison . Si la désindustrialisation due à la mondialisation crée des sans-emploi , mettons ces derniers en prison , ne permettons pas qu'ils vivent au crochet de l'état ."
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La grande réalisation des droits civiques est d'avoir purgé le droit de ses références à des entités spécifiques, permettant l'égalité raciale devant la loi. Mais, parallèlement, ce processus a engendré l'inégalité raciale en ce sens que la loi a été privée de sa capacité à reconnaître la dimension raciale des personnes, leurs origines dans des communautés raciales. Puisque la personne qui est face à la loi est un sujet abstrait détenteur de droits, la loi est incapable de comprendre l'injustice des réalités sociales dans lesquelles vit une partie importante de la population. Pour donner un exemple concret, qui est lié à la formation du complexe carcéro-industriel, je dirais que, précisément parce que la loi est incapable de tenir compte des conditions sociales qui rendent les membres de certaines communautés beaucoup plus susceptibles d'être emprisonnés que d'autres, le mécanisme de l'application en bonne et due forme de la loi justifie la répartition selon la race et la classe des populations carcérales. La loi ne se soucie pas de savoir si tel individu avait accès à une bonne éducation ou non, s'il vit dans la pauvreté parce que les entreprises dans sa communauté ont fermé leurs portes ou se sont installées dans un pays en voie de développement, ou si les prestations sociales antérieurement accordées ont disparu. La loi ne se soucie pas des conditions qui mènent certaines communautés sur une trajectoire qui rend la prison inévitable. Bien que chaque individu dispose du droit à l'application régulière de la loi, ce qu'on appelle la cécité de la justice permet au racisme sous-jacent et aux préjugés de classe de répondre à la question de savoir qui va en prison et qui n'y va pas.
Indépendamment de la question de savoir qui a commis ou n'a pas commis des crimes, le châtiment, en un mot, peut être considéré comme une conséquence de la surveillance racialisée. L'accroissement de l'incarcération est, le plus souvent, le résultat de l'accroissement de la surveillance. Les communautés qui sont soumises à la surveillance policière sont davantage susceptibles de fournir plus de corps humains à l'industrie du châtiment. Plus important encore, l'emprisonnement est la solution punitive à tout un ensemble de problèmes sociaux qui sont négligés par les institutions sociales qui pourraient aider les gens à mener une vie meilleure, une vie plus enrichissante. Voilà la logique de ce qu'on a appelé la boulimie d'emprisonnement. Au lieu de construire des maisons, jetons les sans-abris en prison. Au lieu de développer le système éducatif, jetons les analphabètes en prison. Jetons en prison ceux qui perdent leur travail à cause de la désindustrialisation, de la mondialisation du capital et du démantèlement de l'État providence. Libérons la société de toutes ces populations dont on peut se passer. En vertu de cette logique, la prison devient un moyen de faire disparaître des gens dans le faux espoir de faire disparaître les problèmes sociaux sous-jacents qu'ils incarnent.
Nicolas Pitz sera présent en visio afin d'échanger sur "Traquée - La cavale d'Angela Davis" !
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