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3,42

sur 198 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Nous sommes en 1937 au Mexique, Trotsky le proscrit vient d'arriver au port de Tampico. Il est accompagné de sa femme Natalia. « C'est un homme d'âge mûr, cinquante-sept ans, les cheveux blancs en bataille ». il est en fuite, condamné à l'exil sur l'ordre de Staline qui veut anéantir toute sa famille et toutes les personnes qui pensent comme lui.

C'est le règne des dictateurs, Staline en URSS, Hitler, le fascisme en Italie, Somoza au Nicaragua qui a fait assassiner Sandino. En Espagne la révolution va bientôt être balayée par Franco.

Trotsky est accueilli par Diego Rivera et Frida Kahlo (communistes tous les deux) et va vivre dans la maison bleue. Commissaire du peuple, il a créé l'armée rouge et dirigé cinq millions d'hommes. Il fait de l'ombre à Staline, qui commence par l'exiler en Sibérie d'où il parvient à s'échapper et depuis c'est un proscrit. Il sait que sa vie est plus que menacé.

En même temps, va arriver au Mexique, Malcolm Lowry, accompagné de sa femme. Il est dans une situation précaire, « Lowry a vingt-sept ans, un physique de boxeur, les doigts trop courts pour atteindre l'octave au piano comme à l'ukulélé. Il vient de subir sa première cure de désintoxication alcoolique. Jamais encore il n'a gagné le moindre rond, et vit de la pension que chaque mois son père lui fait remettre en mains propres par des comptables obséquieux...»P 50. Un homme qui deviendra célèbre en publiant « au dessous du volcan ». a ce moment-là il sort d'une cure de désintoxication éthylique (il en fera plusieurs mais récidivera chaque fois).

Les deux hommes sont écrivains mais Trotsky préfère se consacrer à une mission plus élevée : la IVe Internationale, et aussi à organiser un contre-procès en réaction avec les procès de Moscou.

Les deux hommes ne se rencontreront pas mais on va faire la connaissance de multiples personnages hauts en couleurs qui vont débarquer dans ce Mexique fourmillant d'idées, de réflexion. On va voir passer des gens connus, Antonin Arthaud, André Breton, d'autres moins connus…


Ce que j'en pense :

Ce livre est très particulier. Au début, j'ai été littéralement scotchée par les connaissances de Patrick Deville sur cette époque que je connais hélas bien mal.

L'ouvrage fourmille d'anecdotes, on apprend beaucoup de choses sur les protagonistes, mais voilà il y a tellement de monde qu'on se laisse vite débordé. J'ai dû prendre des notes car souvent sur une page, on voit une dizaine de noms différents et il faut se rappeler qui est qui…

de plus, l'auteur va vite, les dates s'entrecroisent, on ne sait parfois plus en quelle année on est, ça fourmille comme les idées au Mexique à cette époque.

Je découvre Patrick Deville avec ce roman difficile mais très beau, avec une écriture incisive, presque musicale, des phrases courtes, qui martèlent le récit, lui donnant un rythme quasi effréné. L'alcool est présent, la drogue aussi (le Démerol). On entre dans la danse avec tous ces personnages, certains plus sympathiques que d'autres. Un livre à relire pour s'en imprégner et découvrir davantage l'histoire de cette époque et le surréalisme qui me rebute un peu.

Je retiens aussi le caractère passionné, enflammé de l'auteur qui arrive à nous insuffler un peu de cette énergie et nous donne envie de continuer même si c'est difficile. Je n'ai pas eu le temps de lire "Peste et choléra" qui est dans ma PAL, ce que je regrette...

Note : 8/10
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On retrouve dans ce Viva l'auteur et ses fameux carnets en peau de taupe dans lesquels il consigne avec méticulosité le fruit de ses investigations, sur les lieux même où ont vécu les personnages dont il retrace le parcours. Direction le Mexique et l'année 1937. « La dictature somoziste est installée au Nicaragua, le fascisme en Italie, le nazisme en Allemagne et le stalinisme en Russie. C'est la guerre d'Espagne, bientôt la déroute des républicains et la victoire du franquisme. » C'est aussi l'année où Trotsky arrive à Mexico, accueilli par Frida Kahlo dans sa maison bleue. L'ancien commissaire du peuple, l'ancien chef de l'armée rouge, qui commandait cinq millions d'hommes, n'est plus qu'un proscrit, poursuivant la fuite éperdue entamée depuis qu'il a pu s'extraire des geôles sibériennes où Staline l'avait fait déporter. Cette même année, Malcolm Lowry et sa femme Jan débarquent du paquebot Penssylvania à Acapulco. « Lowry a vingt-sept ans, un physique de boxeur, les doigts trop courts pour atteindre l'octave au piano comme à l'ukulélé. Il vient de subir une première cure de désintoxication alcoolique. Jamais encore il n'a gagné le moindre rond, et vit de la pension que chaque mois son père lui fait remettre par des comptables obséquieux. » Ce n'est ni un fuyard, ni un proscrit, il a choisi le Mexique parce que les alcools y sont moins chers. Il y trouvera certes le mescal et la tequila qu'il était venu chercher mais aussi et surtout le décor de ce qui restera à jamais son seul et unique chef d'oeuvre, Au-dessous du volcan.

Trotsky et Lowry. le révolutionnaire et le génie littéraire. Ces deux-là ne se rencontreront jamais et le texte suit en parallèle leur destin tragique. Mais pas que. C'est là toute la force de Deville. Son ode à ces deux figures mythiques, qui n'a rien d'un panégyrique pleurnichard, ne s'y limite pas. On croise dans ces pages Frida Kahlo, Diego Rivera, la photographe Tina Modotti, Antonin Artaud, André Breton et bien d'autres. Un tourbillon de noms, de faits, d'anecdotes, de rencontres et de rendez-vous manqués. Chronologies et biographies se bousculent, se télescopent parfois, sans que jamais le lecteur ne perde le fil. le canevas est tissé tellement serré, avec une telle dextérité, une telle érudition, une telle plume, que l'on ne peut que s'extasier devant une fresque aussi saisissante.

Viva est un hymne à la révolution, à la poésie, à l'art. C'est une plongée vertigineuse au coeur d'une époque où l'idéalisme politique et le culte de la littérature bouillonnaient de concert. Une époque où des hommes et des femmes servaient des causes qu'ils mettaient au-dessus de leur propre existence. Une époque depuis longtemps révolue…

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Patrick Deville écrit des « romans sans fiction », c'est lui qui l'affirme. Et en effet tous les personnages de ce récit historique (autre étiquette) ont vécu dans la première partie du siècle d'avant. Dans ce récit il y a aussi la géographie, l'auteur s'y met en scène, modestement. Il va sur les traces de ses personnages, au Mexique principalement, et aussi en Russie, à Paris ... On retrouve donc Léon Trotsky en exil et Malcom Lowry, au dessous de « son » Volcan, B. Traven dont la vie est un roman plus grand encore que ceux qu'il écrit, puis la passionaria Frida Kalho et son «éléphantesque» Diego Rivera ou encore Antonin Artaud qui, au Mexique, encore et toujours, essaie de calmer ses nerfs avec des substances nouvelles.
L'écriture est vive, claire et érudite. Certains chapitres sont comme les fresques de Rivera, ils englobent une multitude de personnages, plus ou moins proches, plus ou moins colorés. D'autres parties s'attardent sur un individu particulier, le lecteur l'appréhende mieux, mais sa vie est si riche que l'auteur ne peut s'attarder davantage ; l'Histoire avance vite. Deville décrit aussi l'époque, celle des utopies, des révolutions avortées, celle des désillusions individuelles et collectives, des lendemains qui déchantent, de la folie, de la violence et des guerres mondiales. Attention, ce bouquin ne vous dira pas la différence entre le trotskisme et les autres sectes marxistes, ce n'est pas son sujet, et c'est tant mieux.
On n'est pas obligé d'avoir lu Au-dessous du volcan, ni l'un des romans de Traven (le trésor de la Sierra Madre, le vaisseau des morts ou La révolte des pendus), pas plus que la poésie d'Artaud, mais c'est mieux quand même. Sinon peut-être que la lecture de ce bouquin vous donnera envie d'aller plus loin (voir les 4 pages de bibliographie).
Pour donner le ton de cette époque ; cette citation de Frida Kalho en exergue d'un chapitre (elle pourrait être de M. Lowry ou de son ex-consul du Volcan) : « Je buvais pour noyer ma peine, mais cette garce a appris à nager ». Et cette autre p.200 de Pierre MacOrlan : « On dit que l'argent c'est bien inodore/Le pétrole est là pour vous démentir/ Car à Tampico quand ça s'évapore/ le passé revient qui vous fait vomir » - Celle-ci pourrait être de B. Traven.
Roman sans fiction, mais 4* pour qui s'intéresse à l'Histoire du 20ème siècle. Allez, adios amigos.
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Roman ?Plus qu'un roman. L'histoire d'une partie de la vie de Trotsky jusqu'à son assassinat.
Sa fuite, ses exils autour du monde, poursuivis par la haine de Staline et ses sbires en embuscades permanentes, et ce jusqu'à l'extinction de sa famille. Portrait d'un homme super intelligent, ayant pour but de changer le monde des opprimés, en mieux, évidemment.
Aimé, haï, trahi, traversant mille épreuves, victimes de complots de procès inouï voyant ses meilleurs amis assassinés autour de lui, tombant un à un, mais poursuivant son but jusqu'à sa mort programmée.
Un amour aussi, dans ce monde de folie,. le Mexique, en pleine révolution où il se réfugie dans "la maison bleue" bardée comme une forteresse, ou il sera entouré de visiteurs célèbres dans le monde artistique des années 1925-1940 : peintres, poètes, écrivains.
Un livre passionnant, qui demande un petit effort de lecture, tant la trame serrée de lecture, demande un effort d'attention.
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L'Histoire racontée comme ça, on en redemande. Kampuchéa m'avait saisi. Viva m'enthousiasme. le mode narratif des destins croisés est un must dans l'art de captiver le lecteur. Dans un roman, on peut le considérer également comme un artifice mais ici, les personnages sont réels. Oser un parallèle entre le chantre de la révolution permanente et l'archange du roman absolu relève de la transgression. le Mexique, pays où la folie est ordinaire est un lieu de rencontre virtuel. Dans l'imaginaire de l'un, il est l'endroit où l'on rêve de mourir. Dans l'intellect de l'autre, il est une résurrection possible, la dernière possibilité de sauver le monde. Ils ne se rencontrent pas, pour se dire quoi? Ces deux-là ont poursuivi un rêve d'absolu. Ils en sont morts.
Nous sommes ici dans l'épique d'une course poursuite contre un destin que l'on sait inéluctable. Les génies font aussi des erreurs, pêchés d'orgueil en général, ce qui peut nous rassurer, humbles mortels.
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Extraordinaire. Saisissant. Un roman à clefs multiples, historiques, métaphysiques, littéraires, politiques, humaines. Patrick Deville conte la marmite mexicaine des années 20 où se croisent littérateurs et révolutionnaires en mal d'absolu. le lieu de fuites et d'exils, où tous passent et se retrouvent, les exilés et leurs assassins, les perdants de l'heure et leurs vainqueurs du jour, les anarchistes du Poum et les tueurs tchékas…
Patrick Deville Viva
"Nous cheminons dans le petit jardin tropical de Coyoacàn, entourés de fantômes aux fronts troués."

Lien : http://quidhodieagisti.over-..
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Ce roman à la fois court et ambitieux esquisse en un trait rapide et dense le bouillonnement intellectuel du Mexique des années 1930, terre d'asile pour qui fuit le climat délétère de l'Europe, chaudron artistique et révolutionnaire, territoire chaud et volcanique sillonné par les trajectoires tangentes d'écrivains, poètes, peintres, photographes, activistes communistes et anarchistes, syndicalistes, futurs guérilleros qui se croisent et repartent.

Viva, le cri des révolutionnaires, le son de l'agitation. Et, au milieu de l'effervescence, deux destructions. Deux figures, dont les courbes n'entreront pas en collision, mais influenceront l'imaginaire de beaucoup qui se reconnaîtront d'elles. D'une part, Trotsky, le proscrit en exil, hébergé par les sulfureux peintres Diego Rivera et Frida Kahlo, écrit ses mémoires alors que la Russie rédige méticuleusement son oubli, compose son oblitération totale, lui apposant la marque finale et irrémédiable d'un piolet à l'arrière du crâne. de l'autre, Malcom Lowry qui compose Under the volcano – son chef-d'oeuvre – et s'abolit progressivement, ne laissant subsister derrière lui qu'un Consul qui se noie dans la même « fantasmagorie mezcalienne » que son géniteur.

En arrière-plan, le défilé des silhouettes qui sillonnent le livre, reliant les points, et que l'on voudrait énumérer plutôt que de disséquer le roman. Nadeau qui ne vint pas au Mexique mais opère dans le livre de Deville le lien entre Trotsky et Lowry, éditant l'un et admirant l'autre. Autour d'eux, entre eux, passant parfois à côté sans les croiser, d'autres figures de cet intellectualisme révolutionnaire. Les écrivains activistes Victor Serge, B. Traven, Nordahl Grieg. Pierre Naville, et les écrivains satellites qui gravitent autour des trotskistes de la Ligue communiste de France et des surréalistes, d'André Breton à Antonin Artaud – halluciné chez les Tahamuras, en quête du peyotl sacré. « Artaud est le paratonnerre qui doit dévier vers lui la foudre, le Grand Fusible qui va fondre ». Les écrivains activistes Victor Serge, B. Traven, Nordahl Grieg... Les philosophes Walter Benjamin, Max Stirner, Simone Weil... Les poètes Dylan Thomas, Alfonsina Storni, et Arthur Cravan, ce neveu d'Oscar Wilde qui composait des vers entre ses matchs de boxe, disparu dans le désert sans laisser de traces. Et puis, bien sûr, les artistes mexicains : Diego Rivera, Frida Kahlo, la photographe Tina Modotti. Encore...

Patrick Deville tend des fils d'un auteur à un autre, tisse une toile au mille noeuds dont l'intertextualité serait le fil de trame qui dessine le motif infiniment variable de tous ces itinéraires artistiques qui traversent l'histoire de la littérature en se mêlant les uns aux autres au gré des rencontres, des influences, des héritages littéraires. Viva, à l'instar du Royaume de Carrère bien que de façon très différente, est aussi une interrogation du processus de l'écriture, le questionnement d'un écrivain qui interroge la trajectoire de ses précurseurs dans un espace et un temps délimité qui s'étire jusqu'à nous toucher. Palpable, la question est là : pourquoi écrire ? Comment ?

« Mais chez Lowry et Trotsky, c'est la question bien plus grande : savoir dans quel but vendre son âme au Diable. Pourquoi cette belle et terrible solitude et ce don de soi qui leur font abandonner la vie qu'ils aimeraient mener, les êtres qu'ils aiment, pour aller toujours chercher plus loin l'échec qui viendra couronner leurs efforts.
Ils ont le même goût du bonheur, un bonheur simple et antique, celui de la forêt et de la neige, de la nage dans l'eau froide et de la lecture. Chez ces deux-là, c'est approcher le mystère de la vie des saints, chercher ce qui le pousse vers les éternels combats perdus d'avance, l'absolu de la Révolution ou l'absolu de la Littérature, où jamais ils ne trouveront la paix, l'apaisement du labeur accompli. C'est ce vide qu'on sent et que l'homme, en son insupportable finitude, n'est pas ce qu'il devrait être, l'insatisfaction, le refus de la condition qui nous échoit, immense orgueil aussi d'aller voler une étincelle à leur tour, même s'ils savent bien qu'ils finiront dans les chaînes scellées à la roche et continueront ainsi à nous montrer, éternellement, qu'ils ont tenté l'impossible et que l'impossible peut être tenté. Ce qu'ils nous crient et que nous feignons souvent de ne pas entendre : c'est qu'à l'impossible chacun de nous est tenu. »

Cette immersion a fait naître en moi l'envie de me plonger dans mille autres écrits, de façon frénétique. Il faut lire Viva au milieu d'autres livres entrouverts, une encyclopédie à portée de main, pour découvrir mieux toutes ces figures entraperçues et agrandir sa bibliothèque. En revenant sur cette expérience, je pense à Henry Miller et Les livres de ma vie, à Herman Hesse et Une bibliothèque idéale, évidemment à Alberto Manguel et L'histoire de la lecture ou Journal d'un lecteur. Peut-être est-ce un syndrome de grand lecteur que de collectionner les livres qui parlent de livres, constituer, construire brique après brique sa bibliothèque idéale, une cathédrale qui ne sera jamais achevée, dont on change sans cesse le plan, les fondations ?
Lien : https://lesfeuillesvolantes...
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Dans les années 30 le Mexique accueille de nombreux révolutionnaires et artistes maudits. Patrick Deville s'attache particulièrement à la figure de Trotsky, qui s'y fera assassiné en 1940 et de Malcolm Lowry, le génial auteur de Sous le volcan. On y croise aussi Frida Kahlo et Diego Rivera, Antonin Artaud ou André Breton. Par petites touches et en courts chapitres Patrick Deville nous promène dans ce milieu intellectuel et foisonnant d'idées qui ont fortement influencé tout le 20ème siècle.
Marceline
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Patrick Deville déambule au Mexique sur les traces de Trotsky et de Malcolm Lowry, auteur d'Au-dessous du volcan et qui y vécurent tous les deux dans les années 30. Leur point commun à part le lieu et l'époque ?

"Chez ces deux-là, c'est approcher le mystère de la vie des saints, chercher ce qui les pousse vers les éternels combats perdus d'avance, l'absolu de la Révolution ou l'absolu de la Littérature, où jamais ils ne trouveront la paix, l'apaisement du labeur accompli. C'est ce vide qu'on sent et que l'homme, en son insupportable finitude, n'est pas ce qu'il devrait être, l'insatisfaction, le refus de la condition qui nous échoit, l'immense orgueil aussi d'aller voler une étincelle à leur tour, même s'ils savent bien qu'ils finiront dans les chaînes scellées à la roche et continuerons aussi à nous montrer, éternellement, qu'ils ont tenté l'impossible et que l'impossible peut être tenté. Ce qu'ils nous crient et que nous feignons souvent de ne pas entendre : c'est qu'à l'impossible chacun de nous est tenu."

(Ca place la barre haut...)

Au cours de ses pérégrinations l'auteur évoque les nombreux révolutionnaires, poètes et écrivains qui trouvèrent refuge au Mexique au 20° siècle. Les figures locales aussi. Auprès de Trotsky il y a bien sur Frida Kahlo et Diego Rivera. Vingt ans plus tôt Fabian Lloyd alias Arthur Cravan, poète et boxeur. Beaucoup de gens dont je connaissais à peine les noms ou même dont je n'avais jamais entendu parler.

C'est un ouvrage cultivé pour lecteur cultivé et j'ai bien conscience que pour une bonne part il m'est passé largement au-dessus. Cependant j'aime beaucoup la façon d'écrire de Patrick Deville où je trouve des accents poétiques, son art d'organiser les coïncidences et les rencontres improbables, son don pour raconter des histoires. J'avoue que j'ai toujours eu un faible pour les intellectuels. Si en plus ce sont des aventuriers, alors...

Je découvre comment Staline a poursuivi Trotsky et sa famille de sa haine à travers la planète. Quelle crapule !
Lien : http://monbiblioblog.revolub..
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Bandes « fraternelles »  et vie parallèles.s

Patrick Deville a quitté l'histoire linéaire au profit d'une écriture rapide, comme accélérée, qui accompagne des personnages multiples à une époque donnée. On pourrait parler de récit « panoptique », les protagonistes mêlant différentes passions, et l'auteur les accompagne sur les lieux par eux fréquentés.

S'ils sont « une petite bande », tirant parfois à hue et à dia, selon les aleas de l'histoire et de la vie, ils vivent intensément, au rythme des trains et des bateaux, accumulant villes et pays, en mission, en fuite, ou en exil.

Le Mexique est le lieu de leurs rencontres, dans le bouillonnement de créativité de la période 1930-1947.

Deux figures dominent le paysage : Trotsky, chercheur d'absolu dans la Révolution, mais aussi écrivain, et Malcolm Lowry, dont les itinéraires sont compliqués et renouvelés comme les différents avatars d'« Au-dessous du volcan ».

Rencontres de grappes d'artistes où figurent Artaud, Alvaro Mutis, B.Traven, Diego de Riveira, Frida Khalo, et bien d'autres, que l'auteur accouple selon leurs points communs, les coïncidences des dates, les destins similaires, souvent tragiques, ils s'épaulent ou se détruisent, dans le cycle de la grande roue du destin - qui souvent les broie.

Ainsi on voit se côtoyer et se compléter sur des asymptotes,Tina Modotti et Alfonsina Sorni, Graham Green et Lowry, Trotsky et Traven etc.

« Chez Lowry et Trotsk[…] les mêmes goûts du bonheur, un bonheur simple et antique celui de la forêt et de la neige, de la nage dans l'eau froide et de la lecture.

Chez ces deux là, c'est approcher le mystère de la vie des saints, chercher ce qui les pousse vers les éternels combats perdus d'avance, l'absolu de la Révolution ou l'absolu de la Littérature, où jamais ils ne trouveront la paix, l'apaisement du labeur accompli. C'est ce vide qu'on sent et que l'homme, en son insupportable finitude, n'est pas ce qu'il devrait être, l'insatisfaction, le refus de la condition qui nous échoit, l'immense orgueil aussi d'aller voler une étincelle à leur tour, même s'ils savent bien qu'ils finiront dans les scènes scellés à la roche et continueront ainsi à nous montrer, éternellement, qu'ils ont tenté l'impossible et que l'impossible peut être tenté. »

La langue, dense et précise comme le propos, charrie dans le même élan les « hommes accomplis » ou les histrions, dressant une fresque mexicaine, artistique et politique, où, selon ses connaissances et références littéraires, chaque lecteur reconnaîtra « les siens ».
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