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sur 736 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
L'écriture a cette magie ! Partant de 26 signes, elle peut faire apparaitre des personnages, des paysages, des mondes.
John Irving avait cette capacité de donner naissance à des êtres faits d'encre et de papier.
Dans ce roman, c'est le parcours de William, Will, Willy Abbott que nous allons suivre.
Né d'un père disparu et d'une mère égarée, grandissant dans tout ce qu'on ne lui dit pas sur son père, William va tenter de trouver, d'accepter et de faire accepter son identité sexuelle.
Irving construit son récit autour de deux pôles principaux.
Tout d'abord, le club de théâtre local dans lequel on retrouve presque toute la famille de William : le grand père Harry, spécialiste des rôles féminins, sa mère, souffleuse, sa tante et son beau-père, acteurs.
C'est également autour du club de lutte du collège (thème déjà évoqué dans « Un mariage poids moyen ») que graviteront plusieurs personnages.
On croisera au long du récit toutes les variantes de la relation physique à l'autre et à soi même : homos hommes et femmes, hétéros, transsexuels….
Sur la forme, rien de bien neuf, on retrouve dans ce roman ce qu'Irving a déjà fait dans « le monde selon Garp » ou « L'oeuvre de Dieu, la part du diable ». Il fait naitre et évoluer sur la durée un personnage qui se prend des coups à droite et à gauche, obligé de louvoyer entre les contraintes de cette vie, guidé par ces tuteurs choisis ou imposés.
L'originalité de forme tient dans l'intégration des pièces de théâtre, Sheakspeare et Ibsen, dont les répétitions sont prétextes à illustration de la vie de William (Abbott, pas Sheakspeare).
Sur le fond, il y a beaucoup plus à dire. C'est le roman le plus personnel d'Irving. Difficile de de ne pas voir en William un avatar de John Irving. On imagine très bien ce qu'a pu être la vie d'un ado à la sexualité différente dans l'Amérique des années 60.
Loin de faire du prosélytisme, Irving se contente de montrer, sans manichéisme, sans volonté de vouloir faire entrer la différence dans une nouvelle normalité, mais en appelant à accepter la différence, à laisser vivre chacun en accord avec ses désirs.
Hétéro et homos sont renvoyés dos à dos dans leur intolérance face à la bisexualité du narrateur.
J'ai trouvé que John Irving abordait avec beaucoup d'intelligence la notion d'identité en nous rappelant que l'identité sexuelle n'est qu'une partie de notre identité.
Avec moins de finesse, Irving évoque également l'idée de transmission de l'identité. Un grand père hétéro qui aimait se travestir sur scène et dans son intimité, un père de hasard, absent, homosexuel et travesti de scène : l'identité sexuelle est-elle inné ou acquise ? Je n'ai pas l'impression que l'auteur cherche à apporter une réponse mais plutôt à soulever en nous ces questions.
La dernière partie du livre m'a moins emballé. Même si elle est très bien écrite, je n'ai pas bien compris ce que le récit des années SIDA amenait au récit.
Déçu également par la partie de fin concernant le père de William. Elle semble avoir été posée la pour ajouter quelques pages. Soit trop, soit pas assez sur cette partie du récit.
Au final, une assez bonne lecture et un personnage central que l'on quitte à regret.
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Une première pour moi avec cet auteur, découvert et lu dans le cadre du Challenge Solidaire Babelio.
Ignorant tout des écrits de John Irving, c'est le hasard total qui m'a menée vers ce titre, qui aurait pourtant dû m'alerter un tant soit peu...

Autant le dire d'emblée, je n'ai pas été très à l'aise avec cette lecture, très déroutante et que je n'ai pas vraiment réussi à apprivoiser.

En vrac, il est question, durant 600 pages (et environ 60 ans), d'orientations et d'identités sexuelles variées, d'expériences diverses en la matière (toujours très crûment explicitées), de parcours de vies avec des sexualités "différentes", le tout servi entre deux répétitions de pièces de Shakespeare ou d'Ibsen, ou avec un air d'opéra. Déroutant je vous dis !

Durant les 200 premières pages, c'était tellement particulier que j'ai failli lâcher prise, comprenant difficilement la direction que voulait prendre le roman.
Puis arrivée péniblement à la p. 254, j'ai lu " Quand on n'a pas lu un livre, on ne peut pas vraiment savoir de quoi il parle"... alors je me suis obligée à poursuivre, pour savoir donc, et me sentir plus légitime à donner mon avis.

C'est extrêmement foisonnant comme histoire, ça part un peu dans tous les sens, mais avec un point d'ancrage, un véritable leitmotiv : celui de l'ambiguïté de la sexualité du personnage principal, William, alias Bill ou Billy (... ou John Irving lui-même, qui sait ??) qui passera toute sa vie à se chercher.
La narration à la première personne teinte le récit d'une nuance autobiographique qui aurait pu être immersive, s'il ne m'avait pas été si compliqué de me fondre dans la peau de ce garçon, dont j'ai pourtant perçu la souffrance psychologique liée à sa différence, mais pour lequel je me sentais tristement impuissante, et qui m'a laissée, simple observatrice, au bord d'une histoire qui me dépassait, car par trop éloignée de mon univers et de mes capacités d'identification.

Et puis, il y a, autour de tous ces tourments, cette obsession permanente pour la sexualité, crue, nue, sans poésie, sans états d'âmes, sans sentiments ni passion, sans véritable amour, juste afin d'assouvir pulsions physiques et fantasmes. J'ai trouvé ça glauque, vulgaire et laid... Et au final, quelle solitude et quelle tristesse...

Heureusement, il y a quand-même l'originalité de la construction, qui nous transporte progressivement dans le temps, de l'enfance du narrateur à la maturité de sa soixantaine, avec pour deuxième fil rouge, une thématique littéraire et théâtrale intéressante et très présente, habilement reliée au reste du roman, mais exigeant de solides connaissances de la part du lecteur.
Et là, j'ai dû faire preuve d'humilité face à mes souvenirs shakespeariens étiolés, qui ne m'ont certainement pas permis d'apprécier la totalité des parallèles établis entre les personnages des pièces et les soucis d'identité des acteurs.

Mais malgré les sujets sensibles abordés, malgré les drames et difficultés vécus par les différents protagonistes, j'ai manqué d'émotions, d'empathie, de ferveur. Avec cette impression que le narrateur restait lui-même prisonnier dans sa propre vie, passablement indifférent et impassible aux événements extérieurs. Ce regard froid et caustique qu'il portait à lui-même et aux autres, telle une carapace, en était même assez perturbant, jusqu'à l'arrivée (dans les 200 dernières pages) des années 80, les fameuses "années Sida", avec leurs ravages, correspondant aussi à l'âge de la maturité pour Bill.
Là, j'ai enfin ressenti en même temps que lui, sa terreur, mêlée de chagrin et d'incompréhension, son sentiment d'injustice, toujours bizarrement accompagnés d'une sorte de mise en retrait désabusée, mi lâche, mi fuyante.

Cette dernière partie, effroyable et pourtant davantage posée et très bien documentée, apporte un équilibre appréciable à l'ensemble du roman et me permet de pondérer mon premier ressenti à cette lecture si originale, que je suis donc satisfaite d'avoir finalement menée à terme.
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« Comble d'ironie, ma première bibliothèque était bien modeste. C'était la Bibliothèque municipale de la petite ville de First Sister, dans le Vermont – un bâtiment trapu, en brique rouge, situé dans la même rue que la maison de mes grands-parents. J'ai vécu chez eux, à River Street, jusqu'à l'âge de quinze ans, c'est-à-dire jusqu'au second mariage de ma mère. Ma mère a rencontré mon beau-père sur les planches. »

Bill Abbott, le narrateur de ce roman à l'amplitude habituelle chez John Irving, est un adolescent américain du milieu des années 1950. Il est le seul rejeton d'une mère divorcée. Son père, qu'il a à peine connu, a vite quitté sa mère pour des raisons qu'il ignore. Mais il est loin d'être seul car beaucoup de membres de sa famille proche (grand-mère, grand-père, oncle et tante, cousine) vivent dans la même petite ville. La mère de Bill rencontrera un professeur de littérature, Richard, venu dans le Vermont enseigner la littérature dans une école privée pour garçons, la Favorite River Academy. Ils se marieront.

La particularité du nouveau couple, c'est de pratiquer le théâtre amateur à haute dose. La mère de Bill ne veut pas se montrer sur les planches mais est la souffleuse de The First Sister Players. Cette troupe amateure monte au moins une pièce « exigeante » par saison : Ibsen, notamment. du côté de la Favorite River Academy, c'est à Shakespeare qu'on s'attaque le plus souvent. Et Richard Abbott sera le metteur en scène de ces pièces.

Bill deviendra écrivain. La bibliothèque de First Sister aura une grande importance pour lui dans sa découverte décisive de l'oeuvre de Dickens. Ou plutôt sa bibliothécaire, Miss Frost, une femme solidement bâtie, quoi que très féminine, d'une grande intelligence. Bill en est amoureux. Mais il l'est aussi d'autres personnes, indifféremment de leur sexe…

J'ai éprouvé du plaisir à retrouver le monde toujours un peu farfelu de John Irving, que je n'avais pas rejoint depuis longtemps. Il sait emporter ses lecteurs dans des fictions, aux thèmes parfois répétitifs mais jamais ennuyeux.

Ici, ce qui m'a le plus étonné c'est l'importance accordée à toutes les ambiguïtés sexuelles et de genre. Il me semble qu'Irving était bien moins frontal sur le sujet dans ses romans plus anciens. Bill est bisexuel. Il traversera les décades, des frileuses années 50 aux années 2010 davantage tournées vers les droits LGBT, en passant par les terrifiantes années 80…

Ce que j'ai le plus apprécié dans ce roman, ce sont ses nombreuses références et citations théâtrales et littéraires. John Irving sait les faire resplendir de toutes leurs couleurs, en les mettant en situation comme personne.
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Ah, ça faisait bien longtemps que je n'avais pas lu John Irving, lui dont j'ai dévoré tous les livres quand j'étais ado et qui m'a donné l'amour des gros pavés bien denses, des romans fleuves dans lesquels résonnent les tambours d'une époque de la grande épopée américaine. On y retrouve tous les gimmicks de l'auteur : une myriade de personnages, le Vermont, Vienne, la lutte, les transsexuelles, les amours interdits, l'absence du père, les secrets familiaux, et même quelques ours... Comme souvent, j'ai eu un peu de mal à rentrer dedans. le foisonnement de personnages et de digressions dès les premières pages nous force à nous accrocher. Mais dès que le rythme de croisière et atteint, plus moyen de le lâcher.
L'histoire ? Six décennies de la vie d'un homme qui, à l'adolescence, découvre des attirances sexuelles qui le perturbent. Il a le béguin pour des hommes, des femmes, et tout ce qui se trouve entre les deux, à une époque et dans une Amérique rurale dans laquelle il vaut mieux marcher droit, sous peine de devoir recourir au duck-under, l'unique prise de lutte que le narrateur aura réussi à maitriser et dont il lui faudra attendre la soixante pour trouver l'occasion de se servir. Cette identité sexuelle mouvante est le fil rouge du roman. de la découverte honteuse de soi à l'hécatombe du SIDA, de l'évolution des moeurs à l'émergence des mouvements LGBTQ+, il nous embarque dans la grande symphonie de l'histoire sociale américaine.
Comme toujours chez Irving, c'est touffu. Il n'hésite jamais à s'offrir la liberté d'une digression, d'une parenthèse, d'un saut dans l'espace et le temps. Il nous plonge dans son amour des lettres, en particulier Shakespeare. Ses chapitres sont longs et denses. En finir un est toujours un peu une victoire. le résultat heureux d'un effort presque physique. Et pourtant, on en redemande. Et on referme la dernière page avec le sentiment que ses personnages font désormais partie de notre intimité. Ceux que j'ai découvert à mon adolescence continuent à me suivre. C'est ça aussi, la vraie magie d'un écrivain.
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Roman d'apprentissage à la sauce Irving, un peu déjanté, bien construit, bien écrit.
L'histoire se passe aux Etats Unis puis en Europe. William Abbott (Billy) le narrateur, un personnage qui part à la recherche de son identité sexuelle de son adolescence pendant les années 50 avant l'arrivée du SIDA jusqu'aux années 2000.
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C'est un livre provocateur mais sans agressivité, il dit tranquillement que nous sommes des personnes singulières et que nous ne pouvons pas rentrer dans des normes, dans des cases définies arbitrairement. Si le lecteur a l'esprit ouvert, il avance avec le narrateur vers l'idée que chacun doit vivre son chemin singulier sans s'enfermer dans un rôle social [...].

Lire la suite de la critique de nos lecteurs sur le Cercle des écritures de Nantes.
Lien : https://cerclenantais.wordpr..
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John Irving est un peu comme un Oncle d'Amérique, qui revient régulièrement me raconter des histoires et tant pis s'il se répète parfois un peu : je l'aime quand même, et je suis toujours heureuse de le retrouver.
Dans ce roman, il retrace la vie d'un écrivain américain (le narrateur), dont la particularité principale est d'être un bisexuel qui s'assume pleinement, ce qui permet à l'auteur de dépeindre l'histoire contemporaine des LGBT(Q) aux Etats-Unis, et de décrire puissamment les années SIDA. Mais il raconte aussi -et surtout- un entrelacs d'histoires d'amour cocasses, tendres et terribles.
Ce livre est un condensé de l'oeuvre d'Irving, puisqu'on y retrouve : la Nouvelle Angleterre, l'après-guerre, la guerre du Vietnam, les piques contre Reagan, le théâtre, la littérature, la famille farfelue, la pratique de la lutte, le travestissement, la vie sur un campus, le séjour à Vienne, le Freak, le drame. Petite différence par rapport aux romans précédents : le sexe y est plus important, mais sans jamais être gratuit ni choquant ; le narrateur évoque sa bisexualité de façon si naturelle que sa lecture en devient tout aussi naturelle -ce qui n'était pas gagné, mais là réside tout le talent d'Irving, qui sait s'emparer des sujets les plus délicats pour les traiter de manière extrêmement adroite. Il propose ici (et dès 2012) une réflexion sur le genre et un plaidoyer implacable pour la tolérance, plus toniques et efficaces que les débats actuels.
Même si j'ai eu du mal à entrer pleinement dans ce roman aux accents proustiens, je l'ai quitté un peu triste, tant j'ai aimé cette immersion dans cet univers parallèle si vivant, réel, chaleureux et généreux.
Mais ce n'est qu'un au revoir, Uncle John, nous nous retrouverons !
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Fan inconditionnel d'Irving,j'ai bien aimé ce roman qui retrace le parcours d'un homme à la recherche de son identité sexuelle encouragé par certains et frustré par d'autres dans l'Amérique juste avant l'arrivée du SIDA et de ses ravages.
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Orphelin de père, Bill est élevé dans une famille férue de théâtre et découvre très tôt la fluidité des genres en voyant son grand-père se travestir sur scène pour incarner les plus grandes héroïnes de Shakespeare. Mais cette connaissance précoce de la comédie que sont les normes de genre ne rendent pas le désir naissant de Bill pour les autres jeunes hommes moins effrayant pour autant... Grâce à l'aide de la bibliothécaire de sa petite ville qui lui fait découvrir James Baldwin, Bill finira par assumer pleinement sa bisexualité.

Depuis cinquante ans, John Irving a régulièrement affirmé dans ses romans le droit de chacun à vivre sa sexualité sans entraves. À moi seul bien des personnages semble le couronnement de cet engagement incessant, et met notamment en scène un des plus beaux personnages transgenres de l'oeuvre d'Irving. Commençant comme un roman de Dickens et se terminant comme un film d'Almodovar, ce récit de l'éducation sentimentale et sexuelle de Bill et de sa dramatique traversée des années Sida, n'est peut-être pas aussi spectaculaire que les grandes fresques du John Irving des années 70, mais reste un des plus attachants de ses romans de la maturité.
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. Son père est homo , son grand-père se travestit ,il a une cousine lesbienne , son premier amour est un(e) transexuel(le) . Pas étonnant si Billy a du mal à définir son identité sexuelle ! C'est cette Odyssée-là que conte exclusivement ce drôle de roman d'apprentissage , avec Shakespeare comme fil d'Ariane , la lutte comme métaphore : au début ,c'est « La croisière s'amuse » ,tout en ironie et loufoquerie jusqu'à ce que survienne l'iceberg létal du Sida.
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