Idylle avec chien qui se noie

Un court récit étrange,en grande partie autobiographique,d'une centaine de pages.
Le narrateur,un écrivain (alias l'auteur),a une relation assez formelle avec son éditeur.Le portrait qu'il en fait au debut du récit est désopilant ("Je ne pouvais associer à cet homme les concepts de femme,d'amie,de maîtresse .....dans mon imagination je ne lui attribuais même pas de parents...nul ne savait ce qu'il faisait une fois qu'il avait mis son manteau,relevé son col,ouvert son parapluie,dit au revoir à la dame de l'accueil et quitté la maison d'édition...p.14). Cet homme hautain et distant vient de lui proposer de se tutoyer et de se déplacer chez lui à Hohenems,en plein hiver discuter de son manuscrit....Une situation difficile à gérer pour l'écrivain,qui ne sait sur quel pied danser avec lui.....Mais ce séjour va révéler des surprises.Il va découvrir l'homme et un incident dont l'origine est l'éditeur, va pousser l'écrivain à jouer avec sa propre mort, pour un chien ,jusqu'à la fin, sans qu'il en soit nécessaire.
Michael Kohlmeier,qui a perdu sa fille Paula,à vingt-et-un ans,dans une chute en montagne,voulant écrire sur elle , avec ce récit,la retrouve par l'écriture,sans que sa mort devienne un objet littéraire,nous dit la quatrième de couverture. En voulant sauver le chien a tout prix,risquant sa propre mort,pensait-il à Paula? L'auteur n'en dit rien.Cet incident est-il une une fiction ou la réalité?On n'en sait rien....
L'enjeu n'est pas facile à comprendre,mais c'est trés bien écrit avec de belles réflexions sur la litterature et la vie.
Cet auteur autrichien ,dont le dernier livre vient d'être publié en francais,"Deux hommes sur la plage",basé sur une histoire vraie entre Winston Churchill et Charlie Chaplin,va sûrement faire parler de lui dans cette nouvelle rentrée littéraire.

Je découvre l'univers singulier de cet auteur autrichien.J'ai trouvé ce très court roman dans une autre édition, Babel, que j'aime beaucoup .La première de couverture est plus attrayante: une verrière et des plantes.Et on verra que ce décor a son importance dans le roman.

Singulier en effet, ce rapport plus intime qui s'établit entre le narrateur, qui est un auteur ( l'auteur lui même, ce livre , d'après ce que j'ai appris, étant une autobiographie romancée) , et son éditeur, l'étrange et solitaire Dr Beer.Jusque là, ils se voyaient ailleurs et se vouvoyaient mais l'éditeur décide soudain de venir chez le narrateur et le tutoie au téléphone.

Le narrateur et sa femme Monika vivent dans la campagne isolée, à Hohenemes, et la neige envahit tout à ce moment.A son arrivée, l'éditeur admire la végétation luxuriante dans la véranda de Monika...

Ce que j'ai surtout aimé , dans ce livre, c'est la découverte progressive que fait le lecteur du chagrin du couple tendre et blessé de l'auteur et de sa femme: ils ont perdu leur fille de 21 ans, morte près de chez eux, dans un accident de montagne.Monika essaie de panser ses plaies en créant ce jardin intérieur exubérant et l'auteur se plonge dans l'écriture-catharsis.

Mais pourquoi ce titre, me direz-vous ? Eh bien, dans la dernière partie du roman,l'éditeur, en se promenant, est suivi par un chien.Et par la suite, le narrateur sauvera ce chien de la noyade dans la glace.Ce sauvetage est symbolique , il représente, je pense, le fait, que par ce geste, il sort de son désespoir personnel.Mais on reste perplexe et la fin est bizarre, peu explicite, et c'est ce qui m'a gênée.J'ai d'ailleurs eu l'impression, à plusieurs moments de ma lecture, de ne pas saisir tout l'enjeu, l'implicite du texte.C'est pour cela que je ne lui attribue que trois étoiles.

Très court roman à l'atmosphère étrange, qui m'a largement fait penser à son compatriote Peter Handke, ne fût-ce que pour le titre à rallonge, mais pas seulement, et mâtiné de Krasznahorkai peut-être.

Tout est dit en écrivant cela je pense. Mais comme les critiques doivent à présent compter un nombre certain de caractères, j'ajouterai de ne pas forcément jeter Krasznahorkai ni surtout Handke si ce livre-ci vous tombe des mains, car ces deux auteurs sont quand même un cran au-dessus très certainement.

Quel roman étrange et soufflant. Je crois que je n'ai rien lu de tel encore, ni d'aussi surprenant. Quelle drôle d'expérience, aussi drôle et étonnante que le titre qui a attiré mon attention à la bib'.

Une écriture et une atmosphère qui m'ont un peu évoqué Les braises de Sandor Marai, quelque chose de fin, de dentelé, et de percutant en même temps.

Rentrer dans ce livre, c'est comme être aspiré dans une autre dimension, et on en ressort toutefois aussi indemne qu'avant d'y entrer, sauf que notre esprit est encore hanté par la bizarrerie de ce qu'on vient de lire, qui n'a rien de fondamentalement bizarre en même temps. Enfin, c'est particulier...

Intriguée par ce livre à la bib', j'ai jeté un oeil sur la 4ème de couv', chose que j'évite de plus en plus mais à laquelle je résiste mal, surtout quand je n'ai jamais entendu parler du livre ni de l'auteur, et que pourtant, quelque chose me pousse vers lui.

Me voilà obligée de résumer le résumé tel que je l'avais compris (trop fort) pour tenter d'expliquer ce qui m'a attirée dans ce livre improbable:
Déjà, ce roman parle d'un écrivain et de son éditeur. Tous deux sont plongés dans une discussion sur la littérature au cours d'une promenade le long du Rhin quand ils aperçoivent un grand chien noir qui court à leur rencontre sur la glace (oui c'est l'hiver), celle-ci cède sous son poids et il tombe à l'eau. L'écrivain tente alors de le sauver en mettant sa propre vie en danger. Ce qui m'a encore plus intriguée, c'est cette suite dans le résumé. Pourquoi ne renonce-t-il pas, pourquoi refuse-t-il, au mépris de sa vie, de laisser le dernier mot à la mort?

Ensuite j'ai lu la phrase de trop dans les 4èmes de couv', celle qui éclaire le sens et le pourquoi de ce récit, ce qui ne m'a pas dissuadée pour autant de le découvrir car elle ne révèle pas tout non plus et éveille elle-même la curiosité, intrigant davantage. le résumé n'est par ailleurs lui-même qu'une portion de l'histoire.

Et au final quelle réussite en tout point, quelle oeuvre formidable, pleine de pudeur, mais violente dans les non-dits que l'on peut décrypter et interpréter à l'infini dans le contexte général. Une histoire qui semble si banale, mais rien n'est anodin dans ce qui est rapporté. L'écriture est savoureuse, pleine de subtilité, dans sa démarche cathartique.

J'ai adoré les rapports entre l'écrivain et son éditeur, il y a un humour inattendu aussi. Et cette jungle! Et ce chien!
Lien : http://lecture-sans-frontier..

Un petit livre par le nombre de pages, un grand livre par les thèmes qu'il aborde !


Lien : https://readingbibliophile.c..