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sur 4109 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Vous êtes fan du King, jetez vous là-dessus.
Vous ne connaissez pas le King, jetez vous là-dessus.
Vous n'êtes pas friand de science-fiction, ça tombe bien ce roman n'en n'est pas vraiment un, donc jetez vous là-dessus.
Vous êtes fan de SF, ce n'est peut-être pas le sujet principal, mais ça vous parlera tout de même, donc jetez vous là-dessus.
Vous aimez les longs romans, jetez vous là-dessus.
Vous prenez un peu peur devant la taille de celui-ci, mais je vous le dis : vous n'avez rien de mieux à lire, donc jetez vous là-dessus.

Le King nous propose là une oeuvre foisonnante, pleine de pages, d'idées et d'émotions.
22/11/63 est un roman d'ampleur, par sa taille et son sujet. Mais c'est également une oeuvre d'ampleur par l'émotion qu'elle suscite auprès du lecteur.
936 pages, cela peut paraître démesuré, mais croyez-moi, si vous arrivez à plonger comme moi dans ce récit, elle vous paraîtront presque insuffisantes.
Le propos, la construction, les descriptions, tout respire l'intelligence. A certains moment, ça en est presque déstabilisant.
Oh non, pas que le King veuille ramener sa science, bien au contraire ! le récit est d'une fluidité quasi miraculeuse, prouvant que l'auteur maîtrise le sujet et son art sur le bout des doigts.
La description des années 50 et 60 est passionnante, détaillée, mais surtout vivante. On n'est pas dans un livre d'histoire.
Certains trouveront peut-être que ses 936 pages n'ont pas toujours la même intensité. C'est, pour moi, au contraire une qualité, le King alternant parfaitement moments de tension, suspense et moments de respiration.
Et cette histoire respire par tous ses pores. Elle respire d'intensité, de crédibilité et d'émotion. Parce que, oui, le King fait la part belle à l'émotion dans ce roman, loin de ses anciens récits horrifiques. Et il touche en plein coeur.
me concernant, une lecture qui restera inoubliable, j'en suis certain.
Je n'aurais maintenant qu'un seul souhait : pouvoir revenir dans le passé, atteint d'un légère amnésie, et pouvoir me replonger dans ce roman, comme neuf.

Je pose un genou à terre et je me prosterne devant le King. le roi est vivant, vive le King.

(Sur mon blog, mon journal de cette lecture, jour après jour, pages après pages, émotions après émotions)
Lien : http://gruznamur.wordpress.com
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22/11/63 ou comment se plonger dans l'Amérique du début des années soixante. Jake Epping hérite d'un secret hallucinant? al Templeton un ami qui se meurt, l'invite à prendre la machine à remonter le temps pour changer le cours de l'histoire. Sa mission: empêcher Lee Harvey Oswald de flinguer JFK. Jake devient Georges Amberson et se lance dans une course contre la montre. Sacré challenge surtout que l'amour toque à sa porte, sous les charmants traits de Sadie la bibliothécaire.
Et la embarquement immédiat pour un gigantesque panard de plus neuf cent pages.
Immersion totale, mister King mène son récit avec un talent incroyable, ça foisonne, ça titille, ça émeut, ça vit, ça intrigue. le tout dosé aux petits oignons. du boulot d'orfèvre. Un très grand bouquin. Jamais un auteur n'a porté aussi bien son nom. Vive le King.
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Quand le papillon du destin perd ses ailes dans le vortex pour redevenir chenille…

King. le King. J'veux qu'il m'appelle Pépette moi aussi, avec des étoiles dans les yeux et des papillons au bas du ventre, qu'il me fasse danser, virevolter sur un bon rock, puis qu'il m'amène fissa dans sa Plymouth Fury rouge chromée, à travers une petite bourgade paumée du fin fond du Maine ou du Texas. Non pas Elvis. Pas Luther. Pas le terrifiant Kong. Non, Stephen. The King.

Pourquoi faut-il que j'atteigne l'âge que j'ai pour le découvrir ? Pourquoi ? Je le jugeais trop populaire ? Trop étiqueté horreur ? Trop américain ? Une forme de condescendance ? Des préjugés ? Tout cela sans doute, et, à présent, je le regrette…Comme j'aurais aimé le lire adolescente…ma vie en aurait-elle été changée ? Imaginons que je puisse ainsi retourner en arrière, ne serait-ce que de trente ans, c'est pas grand-chose trente ans, et que je change ce petit détail, adolescente je me mets à dévorer tous les livres du King, explorant ses milles et une facettes, cela pourrait-il modifier beaucoup de choses dans le présent, sous le coup du fameux effet papillon ? Serais-je devenue une spécialiste des livres d'horreur et de thriller détrônant par la même sur Babélio NicolaK ? Ecrirais-je des livres ? Aurais-je eu le même métier ? Aurais-je ce pseudo ? Ou au contraire, aurais-je délaissé les livres au profit du petit écran et des séries américaines à tire larigot ?

« Tu dois retourner d'où tu viens et voir exactement ce que tu as fait. Ce que tout ton travail, sans nul doute dur et bien intentionné, a accompli ». Tel est le sujet de ce livre incroyable de plus de 900 pages : qu'est-ce qu'il advient lorsqu'on modifie le passé ?

Jake Epping, professeur d'anglais à Lisbon Falls, n'a pas pu refuser la requête de son ami al Templeton, restaurateur mourant : empêcher l'assassinat de Kennedy le 22 novembre 1963. al a en effet trouvé dans son arrière-boutique un terrier, une sorte de bulle, de fissure temporelle qui permet de retourner en 1958, soit plus de cinquante ans en arrière vu que l'histoire se déroule en 2011. Que nous y restions une journée ou plusieurs années, lorsque nous revenons en 2011, c'est comme si nous étions partis deux minutes. Mais y retourner ensuite, c'est remettre les compteurs à zéro sur les changements éventuels opérés lors du précédent voyage temporel réalisé.


« Vous avez déjà fait cette expérience, par un jour de grand soleil, de fermer les yeux et de continuer à voir l'image rémanente de ce que vous étiez en train de regarder juste avant ? Eh bien, c'était comme ça. Quand j'ai regardé mon pied, je l'ai vu posé sur le sol. Mais quand j'ai cligné des yeux – un millième de seconde avant ou un millième de seconde après que mes yeux se sont fermés, je ne sais pas exactement – j'ai aperçu mon pied posé sur une marche. Et c'était pas non plus dans la pauvre lumière d'une ampoule de soixante watts. Mais en plein soleil ».

Avant d'empêcher l'assassinat du président, Jake va tenter de modifier des éléments du passé moins impactant, touchant non pas à la grande Histoire mais à la petite histoire, celle des faits divers, des violences conjugales, des accidents. Il se rend compte peu à peu que le passé est tenace et qu'il ne souhaite pas être modifié…et la réticence au changement du passé est proportionnelle à l'importance de l'élément à modifier…Notre ami est confronté ainsi à des embûches volant en escadrille, voire à devoir faire des efforts surhumains au fur et à mesure que le moment à modifier approche, en l'occurrence des efforts extrêmes, comme s'il était face à une machine infernale aux dents acérées lorsque le moment pour contrer Lee Harvey Oswald, le tueur de Kennedy, arrive. Un RDV avec L Histoire des plus incroyables !

De plus, plus on s'engouffre dans la fissure temporelle telle Alice au pays des merveilles bondissant dans le terrier, plus de cordes sont créées, images multiples de l'avenir. Plus il y a des dissonances, les cordes finissent en effet par s'emmêler créant une disharmonie faisant voler en éclat la notion même de réalité. Chaque voyage n'est donc pas une remise à zéro intégrale, vous me suivez ? C'est d'ailleurs ce que tente de faire comprendre ce clochard au carton vert, jaune ou orange, à l'entrée du terrier côté année 60, homme ou être surnaturel, simple gardien ou ange-gardien, simple passeur ? J'ai du mal à le déterminer mais cet aspect du livre est passionnant et apporte un soupçon de complexité étrange qui n'a pas fini de m'interroger…

« Les choix et les possibilités multiples de la vie quotidienne sont la musique au son de laquelle nous dansons. Ils sont comme les cordes d'une guitare. Pincez-les et vous créer un son agréable. Une harmonique. Mais commencez ensuite à ajouter des cordes. Dix cordes, une centaine de cordes, un millier, un million. Parce qu'elles se multiplient ! Harry ne savais pas ce qu'était ce grand son de déchirure liquide, mais moi je crois bien que je le sais : c'est le son de trop d'harmoniques créées par trop de nombreuses cordes ».

La recette d'un tel pavé, à priori indigeste, est composée d'ingrédients incroyables qui tiennent le lecteur en haleine tout en le régalant : une cuillerée, certes petite mais totalement addictive, de science-fiction au moyen de sauts dans le temps et de cordes de réalité entremêlées, une grosse louche de nostalgie en nous plongeant avec délice et de façon complètement immersive dans l'Amérique des années 60, une autre grosse louche d'émotion en imaginant une superbe histoire d'amour fusionnelle entre Jake, devenu George Amberson dans le passé, et Sadie, une charmante et touchante bibliothécaire, un zeste de politique et de géopolitique en évoquant la menace sur l'un des présidents américains les plus emblématiques et les conséquences si celui-ci n'est pas assassiné (le livre se faisant alors uchronie). Sans oublier un saupoudrage régulier et constant de caustique via la critique acerbe de la société américaine. Que ce soit celle des années 60, en dénonçant le puritanisme américain, le patriarcat, la ségrégation raciale que celle de 2011 avec ses technologies addictives, son manque d'authenticité, son dérèglement climatique… Chaque ingrédient est apporté avec équilibre et se mélange avec goût. Cela forme une recette unique cuisiné aux petits oignons à la saveur inoubliable.


Alors certes il y a quelques longueurs sur ces 934 pages, c'est vrai. Il s'agit du temps de mijotage afin que la sauce prenne et soit onctueuse. Ce n'est pas un défaut comme j'ai pu le penser dans un premier temps, mais une force du livre, une réelle qualité. Parfois ça mijote à petits bouillons permettant l'immersion progressive, la mise en place de personnages très fouillés auxquels le lecteur se sent de plus en plus proche ; parfois ça bout à gros bouillons laissant place à l'action, à l'intensité du moment. Alternance de respiration lente et de respiration saccadée faisant tout le charme de ce récit de haute voltige.
De bons ingrédients, des histoires dans l'histoire pouvant chacune faire l'objet d'un tome, des rythmes variés, permettant à la crédibilité et à l'émotion de s'épanouir en généreuses notes de fond, arômes persistants.
Quel talent ce King…bon vous n'y trouverez pas une écriture ciselée, on ne lit pas ce livre pour le travail fait sur l'écriture mais plutôt pour sa fluidité et son rythme permettant au talent de conteur du King, talent absolument hors norme, de faire son oeuvre. La simplicité de l'écriture sert admirablement et agréablement l'intrigue.

Allez, si je cherche, j'ai peut-être été plus dubitative sur le côté uchronie du livre…les conséquences de l'éventuel assassinat évité m'ont parues quelque peu exagérées, l'effet papillon absolument énorme. Là, étonnamment, il m'a manqué quelques briques pour comprendre, une centaine de pages peut-être…là, Je n'y ai pas vraiment cru, j'aurais préféré quelque chose de plus atténuée, de plus amortie, je crois.

Mais malgré ce bémol, sans doute le seul, je me suis régalée. La fin est de plus sublime et surprenante, l'auteur a évité la solution de facilité à laquelle nous nous attendions. Une fin particulièrement touchante avec la danse pour point d'orgue, comme régulièrement dans le livre d'ailleurs.
De plus je ressors de cette lecture avec un livre à lire d'ores et déjà dans ma PAL : « H.H. Muro. Connu sous le nom de Saki. Sa nouvelle intitulée La fenêtre ouverte. Lisez-la Hosty. Ca traite de l'art d'inventer des salades de façon spontanée, c'est très instructif ». Ce livre, parait-il, montre qu'un événement est terrible ou banal selon la perspective donnée par le récit le précédant…un effet domino…ou un effet papillon…
En tout cas, les livres sont de merveilleuses bibliothèques et qui sait l'impact que peut avoir un livre sur notre vie…le livre a un effet papillon inestimable…sans parler de celui des lectures communes qui permettent de sortir de nos zones de confort et de nos préjugés. Merci infiniment Doriane, grâce à toi et cette lecture commune j'ai découvert tout un univers et un très grand auteur !
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Cher Monsieur Stephen King,

Tout d'abord je tiens à vous présenter mes plus humbles excuses. Longtemps je me suis couché de bonne heure en vous considérant un peu comme un écrivain relevant de la littérature de gare. J'ai toujours souri à cette expression bizarre que je devine bien sûr plutôt condescendante voire méprisante de la part de certains lecteurs intellectuels. Certes, les gares évoquent pour moi la féérie des voyages improbables. Et certaines gares sont de véritables monuments historiques : la gare de Porto par exemple avec ses magnifiques azulejos, la gare de Perpignan visitée par Salvador Dali, la gare d'Anvers, la gare de Chhatrapati Shivaji à Bombay... Je n'ose évoquer celle d'Obiralovka et l'image de cette chère Anna Karénine dans cette ultime gare...
Mais je m'égare...
Sottement, je pensais un peu cela jusqu'à ce qu'un papillon se pose un jour sur mon épaule, histoire de me faire de l'effet. C'était une invitation en bonne et due forme pour que je lise 22/11/63. J'ai retenu poliment ma joie à cette idée, je suis d'une nature peu expansive, et je vous avoue un peu honteusement que ce choix m'a un peu aidé à contenir toute expression délurée.
Cher Monsieur Stephen King, vous n'êtes pas présent, - du moins pas encore, dans mon Panthéon littéraire, et quand j'ai vu la taille de l'exemplaire que je venais d'emprunter auprès de ma médiathèque préférée, - 934 pages ça impose, j'ai senti le sol trembler sous mes pieds, je me suis accroché à ce que j'ai pu trouver sous la main, - pas une pile de livres elle serait tombée, non un vulgaire kiosque d'accueil. Les bibliothécaires sont accourues à mon secours, affolées. Ça va, Bernard ? Reprenant mes esprits, je les ai rassurées du mieux que j'ai pu en précisant qu'elles ne me verraient pas durant un certain temps... J'ai senti une tristesse se dessiner sur leurs visages, c'est dur le métier de bibliothécaires...
Cher Monsieur Stephen King, il existe des romans de 150 pages qui sont d'une langueur éprouvante et épouvantable. Chaque soir, je suis venu à votre livre avec la même joie débridée que Jake Epping se glissant dans cette faille temporelle qui le ramenait en 1958, quelques cinquante ans plus tôt...
22 novembre 1963. L'événement lié à cette date fatidique ne vous aura pas échappé. Elle scelle un événement majeur de l'histoire des États-Unis, l'assassinat de John F. Kennedy à Dallas.
22 novembre 1963, j'avais un an et cinq mois... Mais brusquement je n'avais plus un an, grâce à vous, Cher Monsieur Stephen King. J'avais vingt ans, j'avais trente ans, j'avais votre âge, j'avais mon âge... J'existais dans cette faille temporelle que je venais de franchir à mon tour...
J'avais bien compris l'intrigue : remonter le temps et tenter d'inverser le cours des choses, les petites choses, les grandes choses, si on peut considérer que dans ce fil du destin la vie d'un certain John F. Kennedy compte plus qu'un Jojo La Bidule, qu'un Dodo La Saumure, qu'une Gisèle, qu'un Jean-Jacques ou qu'une certaine Sadie Dunhill...
Ah, tiens ! Sadie Dunhill...
Inverser le cours des choses, torturer ce passé infernal, inexorable, le fatiguer. Nous y avons tous rêvé.
Empêcher que le 22 novembre 1963 devienne une date majeure dans l'histoire des États-Unis.
Cher Monsieur Stephen King, chaque soir, j'ouvrais les pages et j'avais l'impression de frotter une sorte de lampe d'Aladin et je me plongeais alors dans le monde tourbillonnant des personnages de ce récit. Je me suis aperçu peu à peu que ce livre représentait pour moi une sorte de talisman, me protégeant du reste du monde. Je ne lisais plus l'histoire, j'étais dans l'histoire, aux côtés des personnages, j'étais dans la turbulence des années 60, là-bas voyageant entre le Maine et le Texas, dans cette Amérique rude et attachante, avec l'insouciance de la jeunesse, la légèreté d'un tourbillon qui vous enivre, mais aussi la tension liée à ce tumulte social, politique, géopolitique, la haine, la ségrégation, toutes ces minorités dont les droits étaient bafoués piétinés, et puis aussi les espérances qui se forgeaient pour construire un monde meilleur... L'Amérique a-t-elle changé pour de bon, changera-t-elle un jour ? Il faudrait une autre faille temporelle pour me projeter en 2063, mais là c'est une autre affaire.
Brusquement cette histoire totalement insensée, non seulement devenait crédible à mes yeux, mais était la seule vérité, la seule à mes yeux...
J'ouvrais les pages et mes pas brusquement se retrouvaient sur cette première marche d'un escalier invisible, enfouie sous le sable, qu'il fallait chercher, qu'il fallait trouver. Oui chercher cette première marche à travers les pages du livre, chaque soir, c'était le miracle accompli, le nirvana, le geste magique qui me délivrait de la torpeur des jours ordinaires...
Est-ce alors qu'on lit pour fuir la vie ? Ou pour regarder celle-ci droit dans les yeux ? Ou bien pour recommencer autre chose ?
Remède à la mélancolie, remède à l'indifférence, remède aux rebuffades de la vie...
Je sais que les livres ont un pouvoir, un pouvoir magique, une magie que je ne trouve nulle part ailleurs en dehors bien sûr de ma vie personnelle cela va de soi, je sais que les livres m'offrent ce don de devenir magicien à mon tour, m'accordant ce pouvoir.
Et c'est peut-être cela qui est vertigineux, abyssal...
Cher Monsieur Stephen King, j'ai retrouvé ce pouvoir magique dans vos pages, j'ai été épris de ce vertige, grâce à vous, l'écrivain populaire, ha haha ! - pardon c'est un rire nerveux...
930 pages, c'est un temps qui s'étire, longuement, un bonheur incommensurable à l'heure du tweet, du sms, des phrases prémâchées...
J'aime ce temps que vous savez inventer à merveille, où les morts parlent aux vivants, où les morts redeviennent vivants le temps de leur donner un nouvelle chance...
Cher Monsieur Stephen King, lire 22/11/63 m'a ébranlé dans mes certitudes de lecteur. Il est difficile de qualifier votre roman. Uchronie ? Roman fantastique ? Thriller historique ? Et si c'était avant tout un roman d'amour...
Un roman d'amour au sens large, un roman où l'on s'éprend de personnages attachants, où l'on s'éprend de l'humanité qui porte ce récit. J'ai aimé votre humanité qui dénonce l'hypocrisie d'une Amérique puritaine qui finalement est complice et nourrit toute cette violence sous-jacente qui traverse ces 930 pages. J'ai comme le sentiment que cette humanité est en vous, vous porte...
Cher Monsieur Stephen King, je dois vous avouer, je vous en veux un peu... Je crois bien que j'ai fini par tomber amoureux de Sadie Dunhill, à cause de vous. Enfin, tout de même il ne fallait pas me la présenter cette fameuse Sadie... J'ai eu l'impression de danser avec elle le madison. J'ai eu l'impression de la serrer dans mes bras, de sentir son coeur battre contre le mien... Mais elle était l'amour de Jake Epping et pour rien au monde je n'aurais trahi un ami. Alors elle devenait elle aussi une amie, une complice, une frangine... Celle qui me tenait la main quand je lisais, par-delà les années qui nous séparaient... Je sais bien qu'elle était là toute proche de moi, je sentais même son parfum...
On s'était dit elle et moi qu'on se ressemblait, on avait tous deux une cicatrice qui traversait le visage. Moi c'était à cause d'un accident de voiture à l'âge de onze ans... Elle, c'était... C'est alors qu'elle a posé un doigt en travers de mes lèvres. Ne leur raconte pas tout, c'est notre secret...
Je me souviens alors de la dernière fois où nous nous sommes vus... J'abordais les dernières pages du livre et j'avais le coeur qui se resserrait en moi, j'avais le souffle court, je me demandais si je n'allais pas faire de nouveau une crise d'asthme... Ils étaient là tous les deux et je voulais me retirer sur la pointe des pieds, tout doucement, sans faire de bruit...
J'étais en train de revenir à la surface de l'onde, remonter le cours des pages, sortir du livre par cet endroit magique où j'étais entré, elle m'a pris par la main... J'ai senti cette main affectueuse sur ma main, elle a déposé un baiser d'amie sur ma joue gauche en feu, celle de ma cicatrice... Je suis remonté à la recherche du fameux escalier, tâtonnant vers la fameuse marche, je me suis retourné une fois encore, il y avait une séparation entre nous, un chemin devenu vertigineux, comme celui d'Orphée lâchant la main d'Eurydice, la regardant une dernière fois...
Cher Monsieur Stephen King, votre écriture n'a peut-être rien d'extraordinaire, - quoique, nous pourrions en discuter... Quel talent formidable de conteur vous avez pour m'avoir tenu en haleine à chaque page, m'avoir embarqué dans cette histoire ! Je vous en veux de m'avoir fait croire que tout ceci était vrai comme si j'y étais.
Après la dernière page lue, je me suis endormi et je ne saurais dire si j'étais serein ou énervé. Toujours est-il que j'ai eu droit à un vif reproche de mon épouse le lendemain matin, me posant moultes questions au sujet de cette trace de rouge à lèvres que j'avais sur la joue presque encore en feu, marquée comme un dernier baiser du passé datant de soixante ans, mon âge...
Je me suis réfugié dans la salle de bain pour effacer l'outrage. Je vous avoue être resté là longtemps, enfermé. Jamais je n'ai traîné autant dans une salle de bain... Je n'avais pas remarqué ce papillon qui venait à cet instant de quitter mon épaule pour d'autres voyages. Quel effet !
Cher Monsieur Stephen King, je vous remercie pour l'émotion que vous m'avez transmise. Si ce don appartient à la littérature populaire, croyez-moi que j'y souscris totalement.

Je remercie mes amis pour m'avoir entraîné dans cette belle aventure, d'abord Doriane qui connaît admirablement l'oeuvre de S. King et qui nous a généreusement proposé cette invitation. Sont alors venus dans cette farandole commune : Chrystèle, Hélène, Nicola, Paul, Sandrine, qui furent de merveilleux compagnons de lecture...

♫ Love me tender
Love me sweet ♬
♫ Never let me go
You have made my life complete ♬
And I love you so ♩ ♩ ♩
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Oh non, me suis-je dit en tournant la dernière page de ce roman ! J'ai dû quitter avec nostalgie ce monde des années 1958-1963 décrit avec tant de vraisemblance par Stephen King. Quitter aussi ces personnages tellement humains, que ce soit Jake, professeur d'anglais, ou encore le trop célèbre Lee Harvey Oswald, assassin de Kennedy et plein d'autres encore qui forment une cohorte de faiblesse et d'héroïsme.

Mais ce passé ne vient pas à nous naturellement, car ce prof d'anglais est notre contemporain, et sur les conseils pressants de son copain al qui a découvert une porte - qu'il appelle « le terrier » - entre notre monde et le passé, il dégringole des marches invisibles pour se retrouver au même endroit, mais en 1958. En effet, il est chargé d'une mission capitale pour l'avenir des USA et même de la planète entière : assassiner le meurtrier de Kennedy avant qu'il ne commette son crime. Il lui reste donc 5 ans pour peaufiner son plan, pour surveiller Oswald et ses agissements. 5 ans, c'est long...C'est le temps de venger un homme dont l'enfance a été traumatisée, de sauver une petite fille d'un accident paralysant, de « mesurer combien enseigner a été bien davantage qu'une simple façon de tuer le temps » et...de tomber amoureux. Mais attention ! le passé résiste, le passé n'aime pas être changé ! Et Jake qui aime engager des actions décisives, qui déteste tuer le temps, va devoir lutter de toutes ses forces pour mettre à mal ces résistances (in)opportunes. La bataille de la vie et de la mort a commencé, un combat dangereux dont il ne faut pas oublier « l'effet-papillon »...

C'est peu dire que j'ai adoré ! J'ai vécu au rythme de ces habitants du Maine, j'ai été trimballée dans une Ford décapotable Sunliner de 1954, j'ai téléphoné dans des cabines téléphoniques en tournant le cadran, j'ai supporté avec stoïcisme les fumées des cigarettes omniprésentes, j'ai regardé des films en noir et blanc sur des TV à une seule chaîne, j'ai mangé de la nourriture délicieuse non encore améliorée de ces conservateurs et additifs, j'ai dansé, surtout, car le héros n'aimait rien tant que danser sur « In the Mood » ...
Dieu que je me suis amusée !
Mais l'autre versant de la vie ne m'a pas épargnée, et j'ai côtoyé la lie de la société, ces hommes violents avec leur femme, fous à lier sous leur masque charmeur, ces assassins ...
Dieu que j'ai tremblé !

Une mélancolie infinie m'a donc étreinte à la fin de ce livre, car je quittais à jamais ce monde si vivant où la douceur de vivre côtoie sans vergogne le suspens et la terreur, où la petite histoire s'emmêle avec la grande Histoire.

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Ça y est, j'ai lu mon premier Stephen King. Tout le monde connaît Stephen King, même ceux qui ne l'ont jamais lu, tellement souvent adapté au cinéma… J'ai commencé avec Christine, puis Shining, Dead Zone… et Stephen King me semble familier.
Et puis je me suis déniché celui-ci depuis déjà un bon moment, les histoires de voyages dans le temps, j'adore ça, mais devant l'épaisseur du livre, je reportais sans cesse ma lecture. J'avoue aussi que j'avais un apriori négatif. Pour avoir tant de romans adaptés au cinéma, je voyais Stephen King comme un bon “faiseur” qui connaissait les ficelles, les astuces du suspense, et je m'attendais à quelque chose de formaté, calibré…
J'ai tout faux.
(J'ai lu en parallèle “The Last” de Hanna Jameson, reçu dans le cadre d'une “Masse Critique” privilégiée, là, ces défauts s'y étaient invités avec leurs gros sabots !)
22/11/63 est un roman de science-fiction formidable, pas du tout stéréotypé, intelligent, haletant, consistant, émouvant, un des tout meilleurs romans de Voyage dans le temps qu'il m'ait été donné de lire.
Il ne se contente pas de cultiver le suspense, même s'il est très fort dans ce domaine. Il tergiverse parfois pour nous faire découvrir une société américaine entre 1958 et 1963, on sent son amour pour cette époque, les vieilles bagnoles, le mode de vie, avec bien sûr quelques aspects négatifs, la place de la femme, le puritanisme. Quelques moments d'anthologie viennent ponctuer le récit, comme celui sur la danse, le Lindy Hop, et il n'hésite pas à s'étendre sur les sensations de l'époque, le goût de la bière, la fumée des cigarettes, les odeurs, les bruits, il nous met dans l'ambiance, crée une atmosphère grâce aux nombreux détails, il n'en néglige aucun. Jake Epping va vivre cinq années dans le passé pour tenter d'empecher l'assassinat de John Fitzgerrald Kennedy, il faudra bien sûr un suspense final, pour une fin vertigineuse, pas forcément surprenante, mais vraiment bien amenée.
Je pense que beaucoup d'auteurs n'auraient pas eu le courage d'étendre leur histoire sur cinq années, c'est pourtant là tout le génie de ce roman, on se disperse sur des intrigues secondaires, mais encore plus fortes que l'intrigue principale, et le tout fait une oeuvre à la hauteur de son énorme ambition.
C'est un gros pavé, mais je n'ai pas senti le temps passé, on découvre que l'essentiel n'est pas dans l'intrigue policière, mais dans les temps de répit qui jalonnent le récit. le principal intérêt de la science-fiction et des histoires de voyage dans le temps, c'est de nous faire voir d'un autre oeil ce que nous possédons dans notre présent, nous faire relativiser sur les évènements, de nous proposer des voies alternatives sur notre interprétation de l'histoire, et je dois dire qu'ici, j'ai été comblé. Seul reproche que je pourrais faire, c'est les réveils difficiles que cette lecture m'a imposé après avoir éteint la lumière trop tard.
Enfin, j'ai lu un roman de Stephen King, et je ne m'attendais pas à ce que ça soit de si bonne qualité. À renouveler donc.
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Pas de doute, le 22/11/63 aura eu un impact (certes limité et local) sur le 15/07/15 : à cette date, j'ai fini le roman éponyme de Stephen King, ébouriffée, sonnée, mais avec un sourire jusqu'aux oreilles ! Parce que j'ai tout simplement a-do-ré.

Pas besoin d'être amateur de voyages dans le temps, admirateur inconditionnel de Stephen King, friand des théories du complot ou fan des sixties pour apprécier ce roman... il suffit d'avoir un peu de temps devant soi et d'aimer les bonnes histoires ! Car cette histoire d'un prof idéaliste et solitaire envoyé manu militari dans les Années 60 pour sauver Kennedy, et accessoirement le monde, est excellente.

Sur plus de 1000 pages, elle nous tient en haleine, alternant séquences d'aventures, reportage sur la vie d'avant et rencontres humaines fortes et belles. Quel plaisir de voir Jake Epping aux prises avec ce passé si tenace qui lui envoie alternativement une gastro ou un Jimla ! Quel régal de découvrir avec lui ce monde plus simple et plus goûteux, mais aussi fondamentalement raciste et terriblement enfumé ! Quel délice de vivre avec lui la fin de sa solitude, les moments d'amour et d'amitié à Jodie ou même la jolie fin douce-amère...

Quelles qu'en puissent être les conséquences, moi aussi je voyagerais bien dans le temps... juste pour recommencer 22/11/63.
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Jake Eping alias George Amberson, selon qu'il se trouve dans le passé, le présent, voir le futur, ça dépend de quel point de vue on se place, est un anti héros comme seul Stephen KING sait en faire. Jake a une mission et pas des moindres : sauver JFK. le problème c'est que nous sommes en 2011, aucun souci une petite faille spatio temporelle et le tour est joué.

Vous l'aurez compris 22/11/63 nous parle de voyage dans le temps, un vieux thème éculé vu et revu, raconté sous tous les angles, explorer en long, en large et en travers. C'est mal connaître S KING. Ce qu'il nous propose c'est du haut niveau. Accrochez-vous car vous allez être émotionnellement très secoués. Ce voyage dans le temps est certes le centre de l'histoire mais c'est aussi un prétexte pour nous parler d'autre chose. de beaucoup d'autres choses.

22/11/63 c'est d'abord un livre inclassable : science-fiction, roman historique, roman d'amour (et oui !), roman d'horreur, roman initiatique, épopée, road trip, aventure, polar, fantastique ? Oui et non. C'est ça, mais c'est aussi plus. C'est ça et puis c'est autre chose. C'est ça mais pas vraiment. C'est du grand Stephen KING !

La construction est d'une fluidité étonnante pour un livre aussi foisonnant qui regroupe plusieurs histoires. Plusieurs histoires ou plusieurs versions ? c'est toute la question. On ne voyage pas dans le temps sans conséquences aussi agréable soit la destination. Et elle l'est ! La plongée dans les années 50/60 est savoureuse. L'auteur fait appel à nos 5 sens. On entend ronronner le moteur d'une Chavy (amateurs de vieilles voitures américaines vous allez être ravis) tandis qu'on traverse la rue envahie des fumées malodorantes des usines. En poussant la porte du petit resto pour aller s'enfiler un burger on entend les petites clochettes tintinnabuler. Accoudé au bar un chic type à la coupe rockabilly nous prépare un coca avec du sirop et de l'eau de Seltz tandis que le juke box tout neuf diffuse un lindy pop endiablé. Des garçons en Blue jeans envoient voler leur partenaire dans un joyeux mélange de queues de cheval, de jupons vaporeux, et de socquettes blanches. Parce que la vie est une danse !

Avec un souci du détail impressionnant le KING nous fait revivre ces années pas si insouciantes au contexte politique tendu. Rien n'est laissé au hasard, pas d'anachronisme, la partie historique dénote d'un travail minutieux et titanesque. Pourtant nous ne sommes pas dans un livre d'Histoire, on vit aux côtés de Jake. Et on vit intensément, passionnément. Des histoires d'amitié, d'amour, des moments de tension insoutenables, des moments bucoliques, des moments de suspense, de dénouements (oui plusieurs), des respirations, un souffle coupé, un espoir, un désespoir, des peurs, des angoisses, du bonheur et toujours de l'intensité. Et puis il y a ces moments où on sent planer la menace de forces supérieurs. Ces forces à l'oeuvre dont on ignore tout, même si on comprend que le passé ne veut pas être changé. Il y a aussi ces questionnements sur la vision manichéenne du bien et du mal. Ici la frontière est brouillée, floutée et est source de bien des interrogations.
Comme d'habitude Stephen KING en profite pour égratigner la société américaine par des réflexions que j'ai trouvé ici, plus profonde qu'à l'accoutumé.

1000 pages et pas une seconde d'ennui.

Je le dis souvent, ouvrir un livre de Stephen King c'est aller retrouver un vieux pote. Ici c'est d'autant plus vrai que l'auteur fait un beau clin d'oeil à Ça, qui ne gênera pas ceux qui ne l'ont pas lu mais qui enrichira encore la lecture de ceux qui se sont frottés au célèbre clown et qui ont arpenté les rues de Derry. Une véritable immersion dans l'univers de l'auteur. Un régal.

Ce livre est un condensé d'humanité, de vie. Je suis passée par toute la palette des émotions à la fois enivrée, chavirée, bouleversée, émue… et puis la dernière page est arrivée. La fin est parfaite ; mais c'est la fin. Rideau, retour en 2022, pas envie. Après autant d'intensité il y a un vide, un gouffre, c'est à ça que je sais que je viens de lire un grand livre !

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Scientifique dans l'âme et indécrottable cartésienne, j'avoue avoir toujours regardé les livres de Stephen King d'un oeil condescendant.
J'imaginais qu'ils contenaient des élucubrations, des personnages et des faits délirants, un fatras de choses irrationnelles... et je me demandais quel intérêt on pouvait bien y trouver.
Et puis, l'occasion m'a été donnée de dépasser mes préjugés, de lire et d'apprécier par moi-même, et je ne remercierai jamais assez Babelio et le Livre de Poche pour la grosse claque que j'ai reçue lors de cette lecture. Une gifle magistrale dont je vais longtemps garder la marque.
Il y a de la magie dans ce livre, il m'a totalement ensorcelée. Dès le départ, j'ai été happée par l'histoire, envoutée, maraboutée : Stephen King m'a attrapée dans ses filets, et sur plus de mille pages ne m'a plus lâchée.
Une faille spatio-temporelle dans une arrière-boutique permet un retour dans le temps, dans l'Amérique de 1958. Ça, je n'y ai pas cru, évidemment. Mais à part ce fait, tout le reste, absolument tout le reste est d'une extraordinaire cohérence. Les personnages (tant les principaux que les secondaires), les évènements, les lieux, l'atmosphère des différentes époques : tout est totalement réaliste, crédible, et merveilleusement bien rendu. À tel point que j'en ai presque oublié le postulat de départ. Non, mieux que ça : à tel point que j'ai eu envie de croire que c'était vrai, tellement c'était séduisant. Et si...
Les jours pendant lesquels j'ai lu ce roman ont été différents. J'avais l'impression, tout comme le héros, d'avoir été avalée dans la fameuse faille, et d'être hors de notre temps. En tout cas, j'avais envie de me soustraire du quotidien pour me consacrer à ma lecture.
Imaginez le tableau :
Le dîner ? Rien préparé, pas eu le temps.
Le boulot ? Pas fait. Désolée, je n'ai pas pu.
En retard à un rendez-vous ? Excusez-moi, je reviens de 1958, il m'a fallu un peu de temps.
Évidemment, ça n'a pas été possible.
Mais ça montre à quel point ce livre est diaboliquement addictif. Je pense avoir (un peu) fait l'expérience de l'intoxiqué à une drogue dure qui court sans cesse après sa future dose : j'ai sans cesse couru après ma plage de lecture suivante.
Mais l'histoire et le suspense, si formidables soient-ils, ne sont pas les seuls intérêts du livre.
22/11/63 nous offre une plongée dans l'histoire américaine. On revit des évènements marquants comme la crise des missiles de Cuba, l'arrivée au pouvoir de Kennedy, et bien sûr tout ce qui tourne autour de son assassinat, puisque c'est le coeur de l'ouvrage. L'ambiance de ces années est extrêmement bien rendue. La façon d'agir et de penser des gens de l'époque, leur façon de vivre, leurs habitudes, leurs goûts : que ce soit à travers de grandes différences (comme l'absence de téléphones portables, qui complique bien la tâche du héros) ou par de multiples petits détails, on se retrouve vraiment plongé dans un autre monde. Tout cet aspect du livre a dû demander un travail de recherche colossal, mais le résultat en vaut largement la peine : pas un seul faux pas , pas une miette d'incohérence, et l'ensemble est saisissant de réalisme. Le charme des années soixante en prime, ce qui n'est pas négligeable.
La possibilité qui est offerte au héros de changer le futur en modifiant le passé est l'occasion de réflexions fort intéressantes sur la fragilité des existences et des évènements. L'occasion de parler de la fameuse théorie du battement d'aile du papillon : on est ici en plein dedans.
Mais le coup de génie de Stephen King est d'avoir choisi comme thème central l'assassinat de Kennedy. Sujet emblématique et sensible s'il en est, surtout pour un américain. L'auteur le dit lui-même dans la postface : "J'ai tenté pour la première fois d'écrire ce livre en 1972. J'ai abandonné le projet parce que la recherche qu'il aurait impliquée semblait vertigineuse pour un homme occupé par l'enseignement à plein temps. Il y avait une autre raison : même neuf ans après les faits, la blessure était encore trop fraîche." Eh oui, une blessure dont les américains ne se sont sans doute pas encore remis. Un évènement qui a ébranlé les États-Unis et bien au-delà. Un fait qui est à l'origine de tant de livres, de documentaires, de films, de tant de théories, et qui ne laisse pas grand monde indifférent, même après tant d'années. Alors, quand on sait que le héros part dans le passé pour essayer de le changer, la curiosité est à son comble. L'envie de savoir devient impérieuse : va-t-il ou non y parvenir, et avec quelles conséquences ? Et voilà, on ne lâche plus le livre.
J'ai été prise dans un gigantesque vortex, dans un tourbillon d'histoire et d'émotions, et 22/11/63 fait désormais partie de ma liste des incontournables.
Je ressors de ma lecture avec une certitude : Stephen King a ouvert dans son livre une porte vers le passé, mais il m'a aussi ouvert une porte vers le futur, puisque je compte bien ne pas m'arrêter en si bon chemin dans ma découverte de son oeuvre.
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Une brique de Stephen King, c'est comme un après-midi sur la balançoire d'une cour d'école. Ce n'est pas la chute finale qui est importante, mais toutes les petites émotions qu'on peut ressentir tout au long. Parfois des montées d'adrénaline lorsque le pendule va de plus en plus haut et donne l'impression que le coeur reste accroché tout en haut, avant de redescendre ensuite et apprécier des moments plus calmes, des moments où on est sur « l'erre d'aller », où on continue sans effort sur la lancée, en prenant le temps de regarder autour ou de humer les odeurs.

On grimpe sur la balançoire de ce roman de 900 pages qui se résume en une phrase : un homme découvre la possibilité de retourner dans le passé où il pourra tenter de prévenir des crimes, dont celui du 22 novembre 63, l'assassinat de JFK.

Le mouvement s'amorce lentement, avec un vieil ami mourant, des interrogations sur le phénomène du voyage dans le temps, son étrangeté et ses conséquences éventuelles.

L'escarpolette oscille doucement, on se retrouve dans une petite ville américaine de la fin des années 50, avec des enseignes et des marques familières (ou exotiques selon l'origine du lecteur). L'odorat est un sens efficace pour évoquer des souvenirs et la fumée de l'air ambiant rappelle l'époque d'avant le succès des campagnes antipollution du tournant du siècle.

Une poussée de balançoire et on arrive en pays de connaissance pour les fans de King, à Derry, Maine, où les « Friches » et le clown de « Ça », ravivent des frissons. On salue au passage la « Plymouth Fury » de « Christine ». le rythme s'accélère, on sait qu'ici l'horreur est au rendez-vous. L'émotion grandit, est-ce que prochaine montée conduira au crime?

La tension redescend, on profite de la nature avant d'aller vers une autre ville, dans un autre état. Cette fois, c'est un bel endroit, où les gens sont gentils et solidaires. le héros devient professeur de lycée, « un métier encore plus important que celui de romancier ». C'est un bon moment pour tomber amoureux et pour danser, pour rêver de profiter de la vie tranquille des « Fifties ».

Mais le temps n'a pas dit son dernier mot, encore un élan, puis un autre. Des amis meurent ou sont défigurés, des accidents, des crimes. Kennedy sera-t-il sauvé? le héros s'en sortira-t-il indemne? Propulsé par l'imagination de King, la pulsation augmente sa cadence, le bolide monte de plus en plus haut, atteint presque le firmament…

L'engin décélère, je descends de la balançoire. le sol tangue encore un peu lors de premiers pas sur la terre ferme. de retour en 2014, je referme le livre et chasse un papillon en me demandant quel effet ce petit geste aura sur le futur…
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